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Accueil du site > Tribune Libre > Des places de cinéma gratuites pour lutter contre l’absentéisme (...)

Des places de cinéma gratuites pour lutter contre l’absentéisme scolaire ! Non, ce n’est pas une blague !

On reste sidéré devant la capacité d’invention de l’Éducation nationale pour imaginer les solutions les plus saugrenues aux problèmes tragiques qui se posent à elle. Pour lutter contre l’absentéisme scolaire, selon Le Figaro du 7 juin 2008, le lycée professionnel Louis-Lumière à Chelles de Seine-et-Marne vient de faire miroiter des places de cinéma gratuites aux élèves les plus assidus. Pourquoi ne pas envisager de leur verser un salaire, tant qu’on y est ?

Quand on a appris à marcher sur la tête, il devient difficile de tenir sur ses pieds.

Cette rétribution fait songer aux disques, films ou livres que les journaux proposent pour déclencher l’acte d’achat de leurs numéros. La différence toutefois est que l’école est gratuite et obligatoire. Ainsi gratuité et obligation scolaires n’auraient-elles pas des effets pervers ?

Une école d’abord obligatoire pour les parents

C’est d’abord un fait établi que la notion d’école obligatoire a changé en 120 ans. Qu’on se rappelle les années 1880 qui ont vu l’instauration de l’école obligatoire, pour des raisons à la fois philanthropiques, économiques et politiques puisqu’il s’agissait autant de former des employés alphabétisés pour les besoins de l’industrie que d’arracher les paysans à l’emprise du curé et du châtelain aristocrate, monarchistes impénitents.

Se retrouver sur les bancs de l’école pour les enfants n’était pas une corvée, en comparaison du travail des champs auxquels ils échappaient : le petit paysan passait d’une vie pénible de commis de ferme au service de ses parents, à une vie relativement reposante d’apprentissage intellectuel et de jeux, avec l’espoir d’échapper à cette terre qui ensevelissait les siens de leur vivant. Il fallait alors faire obligation d’envoyer leurs enfants à l’école à des parents souvent paysans, qui se résignaient mal à devoir renoncer à une main-d’œuvre enfantine gratuite, si utile au travail de la ferme.

Une école devenue obligatoire pour les élèves

Qu’en est-il aujourd’hui ? La situation est inversée, même si certains enfants sont invités à aider leurs parents commerçants ou artisans en dehors de l’école : la majorité des élèves, sauf erreur, situent le lieu de travail à l’école et la détente au-dehors. L’obligation scolaire est ressentie désormais comme une contrainte par l’élève. Venir à l’école, c’est quitter le repos des vacances pour un univers d’effort et de travail.

Pis encore, les élèves doivent accepter une évaluation sans complaisance à l’école – sauf égarement démagogique –, quand, à l’extérieur de l’école, les médias redoublent quotidiennement de flatteries pour obtenir d’eux la pulsion d’achat d’un produit – journaux, films, nourriture, vêtements, sports, etc. – et que leur sont offerts en modèles des stars à qui une complexion physique innée (les mannequins) ou un savoir-faire limité (les sportifs) suffisent à rapporter des revenus mirobolants : le salaire mensuel net d’un footballeur professionnel dans un club français pouvait, en septembre 2005, monter à 162 000 euros, sans compter d’éventuelles recettes publicitaires pour jouer sans compétence aucune le prescripteur de produits auprès d’un public tout entier prisonnier du réflexe d’identification.

Diplôme dévalué, réseau prisé

Ainsi, à longueur d’antenne et de colonnes de magazines, est vanté un type de « réussite » où un minimum de savoir est parfaitement inutile pour l’atteindre. L’appartenance à un réseau – comme l’a récemment rappelé, dans Le Monde du 30 mai dernier, Mme Rachida Dati, ministre de la Justice, pour expliquer sa fulgurante ascension sociale – est autrement plus efficace.

C’est que la détention d’un diplôme n’est plus le billet d’accès à un emploi certain, ni par temps de chômage ni par temps de croissance. Un des motifs est en particulier une dévaluation du diplôme lui-même, tant en contenu qu’en raison de son obtention par un trop grand nombre de candidats. Dans ces conditions, le traditionnel jeu des relations clientélistes devient décisif. À l’image de Mme Dati, mieux vaut se préoccuper de « se faire son réseau ». Et de réseaux, il y en a de toutes sortes : de l’économique à l’idéologique, de la coterie ou de l’écurie à la mafia.

À quoi bon perdre son temps à l’école qui a cessé d’être le fameux "ascenseur social" automatique qui permettait à un enfant de milieu modeste de devenir banquier, puis président de la République, comme Georges Pompidou ? Mais pour avoir trop insisté sur ces défaillances décourageantes, et avoir confondu l’école avec l’antichambre de l’entreprise, on en est venu à sous-estimer le fait qu’il vaut mieux avoir tout de même le diplôme plutôt que de ne pas l’avoir sur le marché du travail.

Dans ce contexte, les places de cinéma offertes pour lutter contre l’absentéisme scolaire sont-elles bien une réponse adaptée au problème ? Que peut un cachet d’aspirine contre un cancer ? En revanche, qu’a fait l’École, de son côté, pour armer ses élèves contre le conditionnement auquel les soumettent les médias de masse – musique, film, radio, télévision, internet, presse – et qui structure aujourd’hui leur minimum culturel ? Saturation sensorielle, entretien d’une incapacité infantile d’attention, stimulation violente des réflexes primaires que sont le voyeurisme, l’identification ou la vanité, tels sont les procédés qui caractérisent les médias plébiscités par la majorité.

Or, l’école peut-elle rejeter toute responsabilité dans un tel désastre ? Les spectateurs qui, cette fois, par leur assiduité encouragent ces programmes télévisés ou ces films, par exemple, n’ont-ils pas tous été soumis à l’obligation scolaire, depuis 120 ans qu’elle existe ? Et leur choix n’est-il pas un indice de la qualité du savoir qu’ils ont retiré de l’école ?

Paul Villach


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36 réactions à cet article    


  • bof 10 juin 2008 13:19

    Villach, c’est fou comme votre texte sent la naphtaline où vos souvenirs de jeunesse ont dû passer les 40 ou 50 dernières années.

    Dans vos côtes d’armors natales, vous n’avez jamais vu de fils de paysans qui allaient bosser aux champs APRES la sortie de l’école ? Moi, j’en ai côtoyé plus d’un dans mon finistère... Ca devait pas être bien différent dans le reste du pays.

    Mais ça vous retourne, hein ? de savoir qu’on peut gagner 162000 Euros à taper dans un ballon, ou qu’avec une belle gueule (ou un beau cul) y’a même pas besoin de ballon, suffit de savoir marcher. J’imagine bien que pour vous qui avez été gavé des valeurs "pédagogoqies " de l’EN, la pilule soit dure à avaler.

    En a-t-on vu de ces petzouilles qui vous assénaient du haut de leur estrade "Machin, tu seras jamais qu’un bon à rien si tu ne connais pas ton imparfait du subjonctif", tellement bouffis de leur importance, les Distilleurs de Connaissance.

    Eh ben maintenant, on les voit scier la branche où ils sont assis. Savent plus quoi inventer pour capter l’attention de leur public. Au train où ils vont, l’école publique soi-disant laïque républicaine et égalitaire (!) sera complètement désertée dans 20 ans.

    Moi je m’en tape : mes gamins ont toujours été dans le privé. Ouais, chez les cathos ! Là où on leur demande pas s’ils ont envie de bosser, là où quand ils sont absents on téléphone aux parents dans la demi-heure, là où on les a mis pour qu’ils apprennent et non pas pour qu’ils se sentent bien tranquilles.

    Les Pédagogues récoltent ce qu’ils ont semé, alors qu’ils viennent pas se plaindre


    • bof 10 juin 2008 13:37

      Tiens, mon index a glissé...

      Mais finalement ça me plaît bien les valeurs pédagogogiques

       


    • ocean 10 juin 2008 16:36

      c’est peut-être dommage, bof, de mélanger à vos arguments des propos désobligeants contre l’auteur. Bruyamment parasité par ces derniers, votre propos n’y gagne pas en visibilité.


    • roOl roOl 10 juin 2008 14:59

      Super, comme ca les foetus tout vert et pleins de bouton pourront aller au cine voir Indiana Jones comme des nerds, pendant que les branleurs du rang du fond continueront a vivre leur ecole buissoniere peinard...

      Un cinema en plein apres midi, quand on est jeune et asser con pour secher le bahut, on peut facilement y rentrer sans payer ...

       

      m’enfin, ca fais couler de l’encre hein...


      • ZEN ZEN 10 juin 2008 15:05

        "...qu’a fait l’École, de son côté, pour armer ses élèves contre le conditionnement auquel les soumettent les médias de masse – musique, film, radio, télévision, internet, presse – et qui structure aujourd’hui leur minimum culturel ..."

        C’est aussi ma question , Paul.

        Certains ont essayé ou s’y esssaient ...difficilement et minoritairement.. C’est une tâche incessante et difficile, consistant à remonter le courant à contre-sens ...et quel courant !

        "Ouvrir l’école sur la vie" disait-on . C’est fait , dans le pire des sens, sans armes....Les esprits sont le plus souvent désarmés, démunis de toute exigence critique , cibles parfaites pour les marchands de tous poils...

        Mais qui va éduquer les éducateurs ?...


        • Paul Villach Paul Villach 10 juin 2008 15:09

          Cher Zen,

          Je partage votre interrogation. Paul Villach


        • biztoback 10 juin 2008 15:56

          On dirait bien que les enseignants n’ont pas su s’adapter aux élèves, à la société plus géneralement ( la nouvelle, celle du cynisme... ).


          • Lisa SION 2 Lisa SION 10 juin 2008 16:09

            "...qu’a fait l’École, de son côté, pour armer ses élèves contre le conditionnement auquel les soumettent les médias de masse – musique, film, radio, télévision, internet, presse..." avez vous écrit.

            Il ne manquerait plus qu’’un jour, il n’y ait plus de professeur mais un logiciel programmé et transmis à un projecteur vidéo !

            C’est curieux, cette information arrive le lendemain de la palme d’or à Cannes récompensant une classe française de banlieue en temps réel...Si cela se trouve, la place gratuite donne un ticket pour le film...Tout ceci me semble cousu de fil blanc...


            • anny paule 10 juin 2008 16:10

              Vous avez infiniment raison de signaler ce fait tant qu’il reste anecdotique... avant qu’il ne se généralise !

              Voilà des années, vers 1986, confrontée dans notre collège de province aux prémices de ce qui devint "La violence et l’échec en milieu scolaire", et aux débuts de l’absentéisme de certains enfants, j’avais monté un projet sur mesure pour ces gamins. C’était l’époque du grand slogan de la LUTTE CONTRE L’ECHEC SCOLAIRE.

              Mes postulats initiaux étaient les suivants : s’ils se rebellent, c’est qu’ils ont des réserves d’énergie qu’il convient de canaliser, (ils ne sont pas encore totalement "cassés"), c’est que ce qu’on leur demande est incompatible avec leurs capacités et leurs besoins (ils avaient autour de treize ans et leur niveau scolaire frisait celui du CE2/ CM1... mais ils étaient en 5° !) ; s’ils s’absentent (pour des raisons souvent couvertes par les parents, mais incohérentes), c’est que, pour eux, dehors est bien mieux que dedans... C’est donc en allant voir dehors avec eux qu’il est possible de comprendre leurs centres d’intérêt pour mieux les faire entrer.

              Ce projet, je l’avais intitulé : "Cheminement particulier", en référence à certaines pratiques québécois pour les enfants en échec et les enfants de migrants.

              J’ai donc couru la campagne (c’était en zone rurale, proche d’une capitale régionale) avec eux. Là, j’ai découvert des gamins adorables et possesseurs d’un savoir dont l’école n’avait rien à faire. C’est sur ce savoir que je me suis appuyée pour bâtir mon programme. Ils connaissaient bien des plantes, bien des oiseaux, bien des poissons... étaient capables les nommer, de parler de leurs séances de braconnage (en particulier pour la pêche aux anguilles, aux grenouilles)... Ils avaient le sens de l’orientation...

              Le plus difficile, pour moi, en tant que prof de lettres, a été de trouver les textes en phase avec leurs intérêts et de les conduire à écrire ce dont ils savaient si bien parler et de leur faire admettre la nécessité de connaître la grammaire et l’orthographe.

              Les débuts ont été durs, mais les résultats ont dépassé mes propres attentes. Le plus délicat a été de les persuader qu’ils n’étaient pas des "nuls"... de restaurer l’image qu’ils pouvaient avoir d’eux-mêmes, de leur faire admettre que si je les avais regroupés ainsi, c’était pour les aider, non pour les "punir". (Tous étaient de milieux défavorisés, certains étaient fraîchement immigrés, et tous vivaient mal leur statut dans l’institution scolaire... pour la plupart, ils avaient l’habitude d’avoir été mis à l’écart et livrés à eux-mêmes.)

              Le rectorat, informé du projet (mené contre l’administration de l’établissement qui trouvait vraiment inutile de mobiliser une équipe pour 18 élèves qui ne méritaient pas qu’on s’intéresse à eux, mais avec le soutien des fédérations de parents d’élèves), a dépêché une inspectrice pour voir ce qui se faisait réellement. Elle a trouvé l’expérience passionnante... mais les crédits n’ont pas suivi, et en dehors de ces 18 élèves, d’autres n’ont pu bénéficier de ce "traitement" pourtant salutaire. (Je précise qu’à deux près, tous ont obtenu un diplôme professionnel après le collège et certains ont intégré le lycée. Deux ont eu un diplôme de l’enseignement supérieur, un a eu un BTS).

              Si je rends compte de cette expérience, c’est simplement pour montrer que des solutions existaient mais que c’est le système lui-même qui se voilait la face et ne voulait pas faire l’effort de les rechercher ou de les appliquer... C’est vrai qu’il est plus simple d’offrir une place de cinéma à celui qui consent à venir au collège ou au lycée que de lui donner une véritable formation... cela coûte moins cher ! 


              • Paul Villach Paul Villach 10 juin 2008 16:53

                @ Chère Anny Paule,

                Passionnante votre expérience ! Si vous saviez comme je m’y retrouve ! À une différence près : l’administration s’est mise en quatre (les quatre échelons hiérachiques) pour tout casser, avec la complicité de "chers collègues"  !

                Oui, il y a des solutions, mais je commence à croire qu’elles sont jugées indésirables !

                Toujours le fameux rapport de l’OCDE " Faisabilité politique de l’ajustement", pour détruire le service public... Paul Villach


              • anny paule 10 juin 2008 21:14

                @ Paul,

                Nos expériences et nos réflexions se croisent ou se rencontrent parce que nous sommes sensiblement de la même génération, de la même "école", de la même culture, parce que nous avions le désir de faire autre chose que de formater les enfants dont nous avions la responsabilité, parce que nous avions le désir d’éveiller leur intelligence, de leur distribuer un enseignement véritable tout en formant leur esprit critique.

                Très rapidement, j’ai constaté que ce pourquoi je m’étais engagée dans cette profession ne correspondait plus à ce qu’il m’était demandé de faire, aux directives et programmes nouveaux. Très rapidement, j’ai pris mes distances avec les instructions officielles, pour me consacrer à ce que je pensais (et pense encore)être l’intérêt supérieur de mes élèves...

                Dans une institution pareille, ce n’a pas toujours été facile ! C’est vrai que ceux qui se conforment aux normes, qui "pointent" et ne font pas de vagues ont la vie rose, dans l’éducation ! (sur le plan carrière, bien sûr !) Mais je reste persuadée qu’il faut un haut degré d’exigence, et que les classes hétérogènes ont fait beucoup de mal : on ne fait pas boire un âne qui n’a pas soif ; on n’a aucune chance de faire parcourir la même distance dans un même temps à un cul de jatte et un marathonien... Or c’est la règle ! Et nous mesurons l’étendue des dégâts !

                 


              • Paul Villach Paul Villach 11 juin 2008 09:37

                Chère Anny Paule,

                Oui, ce que vous écrivez, je peux l’écrire.

                Mais pourquoi nous sommes nous retrouvés si peu à être capables de prendre de la distance avec des instructions qui conduisaient à enseigner des erreurs, et avec un mode de vie intérieur des établissements qui ruinait autant le travail intellectuel que l’exemplarité morale ?

                Trop de nos collègues, qui sentaient pourtant que "ça ne collait pas", se sont contentés de se donner des alibis humanitaires, sans jamais rien changer aux erreurs qu’ils enseignaient et surtout en faisant corps avec l’autorité hiérachique dont on sait maintenant qu’elle s’inscrit depuis plus de dix ans dans la destruction du service public conformément aux conseils du rapport de l’OCDE, "La faisabilité poilitique de l’ajustement", qui depuis 1996, prépare la privatisation de l’enseignement. Paul Villach


              • Yann 11 juin 2008 11:09

                Votre article est bien écrit, comme les précédents, mais je suis moyennement d’accord avec votre interprétation un peu "grand complot" des cahiers de l’OCDE. En introduction de chacun de ces cahiers il est écrit :

                << [L’objectif des Cahiers de politique économique] est de stimuler la réflexion et la
                discussion, permettant ainsi une meilleure compréhension des difficultés et la résolution de
                certains problèmes-clés. >>

                Le problème clef du cahier n°13 (que vous citiez dans un précédent article) est de conseiller une ligne de conduite pour maintenir la stabilité de l’état lorsqu’un changement (au sens large mais avec une répercussion sociopolitique en particulier) est décidé, mais le but de ce cachier n’est pas de dire qu’un changement est bien ou pas. Si on voulait s’écrier "Regardez, c’est la politique que l’OCDE préconise", alors c’est le cahier n°1 qu’il faut lire (en gardant à l’esprit qu’il a 16 ans d’âge et qu’il n’est que partiellement applicable à un pays "donneur" comme la France) plutôt que le 13.

                Or, le problème clef du cahier n°1 est de conseiller sur les changements à envisager pour les pays receveur d’aide (financières) de pays donneurs, et la diminution des dépenses pour l’éducation, la santé ou les aides sociales sont mentionnés dans la liste des mesures tentantes à court termes mais destructives au long terme, avec forces exemples et contre-exemples.

                Bien sûr en publiant cette méthode publiquement, l’OCDE la rend disponible pour n’importe qui (y compris la critique populaire) mais ça ne veut pas dire que l’OCDE joue contre l’EN ou un quelconque autre service public (ça ça resterait plutôt la prérogative des lobbies je dirai...). Où aurai-je mal lu ?


              • Paul Villach Paul Villach 11 juin 2008 12:11

                @ Yann

                Convenez qu’au minimum ce sont des conseils qui visent une baisse non de la quantité, comme il est écrit, mais de la qualité du service public.

                On est dans la stratégie à long terme. Le but est de ne surtout pas susciter la révolte. Le titre se suffit à lui-même dans la bonne tradition des ignominies que l’on masque sous des "euphémismes" compréhensibles des seuls initiés : "La faisabilité politique de l’ajustement" résonne comme "la solution finale", toutes proportions gardées évidemment. Paul Villach


              • Yann 12 juin 2008 04:01

                @ Paul,

                C’est vrai, les conseils du cahier 13 listent les points a prendre en compte pour s’assurer de conserver la stabilité de l’Etat, ce qui signifie concrètement : dévier ou endormir la colère populaire. C’est ce point qui a mis ce cahier aux bancs de la critique internaute régulièrement depuis sa parution.

                Je voulais juste déchargé l’OCDE du rôle d’épouvantail que ces critiques lui font : le contexte initial de ces conseils est celui des pays plus ou moins émergeant du tiers ou quart monde, où "instabilité" ne signifie pas simplement grève à répétition mais potentiellement destruction de bien physique et centaines de morts. Dans ce contexte, dévier la colère populaire par des manoeuvres politiques quelconque serait plutôt un moindre mal, forcément rien n’empêche un Rafarrin ou un Sarkozy d’appliquer la méthode en France, mais au départ le rapport de l’OCDE partait d’une bonne intention. C’est surement pour ça que ces cahiers économiques sont de l’information accessible publiquement d’ailleurs.


              • ocean 10 juin 2008 16:20

                Ce n’est pas "contre le conditionnement auquel les soumettent les médias de masse" que l’école aurait dû protéger les élèves, Paul, c’est contre elle-même ! mais hélas, tombée dans les pièges du confort et du fanatisme idéologique, elle en aurait été bien incapable.

                Je crois que si l’on regarde la chose avec un peu de recul, on peut rapidement se rendre compte que la mort de l’éducation nationale a été programmée le jour même où a été décrétée "l’école obligatoire", car cette obligation va nécessairement de pair avec l’absence d’obligation de résultat et donc avec l’impunité de tous les actants du système.

                On voit mal dans ces conditions ce qui pourrait motiver une amélioration (à part bien entendu une amélioration du confort comme par exemple les meilleurs horaires et les meilleures places gagnés à l’ancienneté, ou une amélioration de l’impunité comme par exemple l’évaluation de tout sauf du prof, et surtout pas par ceux qui risqueraient de savoir comment il travaille).

                Aujourd’hui, l’école est un trou noir qui s’effondre sur elle-même. Quelle inconscience de la part de ceux et celles qui se qualifient si vite de "sachants", et quel hallucinant gâchis !

                C’est d’autant plus idiot que ce n’était pas l’école, qui était obligatoire, mais l’instruction !! la bêtise et la vanité ont causé l’accaparement, qui conduira le tout à sa perte.

                 


                • Paul Villach Paul Villach 10 juin 2008 17:31

                  Cher Océan,

                  Je vous suis volontiers sur les effets pervers de "l’obligation". Mais le moyen de faire autrement ? Tout apprentissage, quel qu’il soit, implique une soumission obligatoire - plus ou moins consentie - à des règles.

                  Il se peut, toutefois, qu’un vice originel de l’école soit dans les ambiguïtés qui ont accompagné sa création obligatoire : son cahier des charges était surtout minimaliste et n’a pas cessé de l’être.

                  Le comble est tout de même que ce sont ceux qui ont le plus besoin de l’école, qui ou y sèment le désordre ou la fuient.

                  Formalisme du savoir et indifférence aux règles et à la loi ont contribué à ce qu’on se heurte à cette absurdité. Paul Villach


                • ocean 10 juin 2008 16:34

                  c’est peut-être dommage, bof, de mélanger à vos arguments des propos désobligeants contre l’auteur. Bruyamment parasité par ces derniers, votre propos n’y gagne pas en visibilité.


                  • bof 11 juin 2008 08:44

                    Je suis désobligeant pour l’auteur ?

                    On peut même dire quasiment tout le monde sur ce fil, tant il a des airs d’assemblée des déçus de l’EN ! Ah, ma pauv’dame, on aurait bien voulu faire des trucs, on a même essayé mais les autres, ils nous ont pas compris...

                    Désobligeant, peut-être, mais je persiste. Cette dérive de l’EN, c’est vous-mêmes les profs qui en êtes les responsables. N’allez pas chercher ailleurs ! L’école, ça vaut plus grand-chose aujourd’hui, ça vous embête bien, mais qui en a fait ce qu’elle est devenue ?

                    Et me répondez pas "c’est pas nous", c’est le ministère (ou les syndicats). Parce que ceux-là, c’est de vos propres rangs qu’ils sortent.

                    Alors c’est un peu tard pour venir pleurer


                  • Paul Villach Paul Villach 11 juin 2008 10:04

                    @ Bof

                    Vos deux commentaires très fouillés méritent-ils autre chose que votre pseudonyme : Bof ! Pau Villach


                  • Cher paul Villach,

                    triste spectacle ! nous tombons de plus en plus bas ! Mais nous sommes peut-être des réacs !

                    Pourvu que les bénéficiaires desdites places de cinéma ne se les fassent pas voler à la sortie par leurs camarades ...vous savez ceux qui précisément "oublient" d’aller suivre les cours.


                    • Paul Villach Paul Villach 10 juin 2008 17:47

                      @ Lt-Cl Beau

                      La gratuité est-elle éducative ? Quand on sait que tout ce qui est gratuit est sans valeur dans notre société d’argent d’aujourd’hui.

                      Un petit calcul amusant ! Si on estime que le coût annuel d’un élève de collège est environ de 7.500 Euros - je n’ai pas le chiffre exact - il est de 750 Euros par mois (pour une année de 10 mois, vacances d’été exclues) et de 187,5 Euros par semaine et donc de 37,5 par jour (pour une semaine de 5 jours). Cela fait cher du ticket d’entrée quotidien au collège !

                      Combien d’élèves paieraient ce prix pour venir jouer au voyou dans l’établissement et combien d’élèves qui en sont victimes, laisseraient se développer leur désordre à ce tarif ? Paul Villach


                    • Marc Bruxman 10 juin 2008 19:18

                      Vous avez complétement raison la dessus. Effectivement si l’école était payante :

                      • Les gens ne paieraient pas pour ne rien y foutre.
                      • Les élèves et parents ne se satisferaient pas d’une garderie et exigeraient un enseignement de qualité.
                      • La future insertion professionelle serait une priorité.

                      On pourrait imaginer que l’état donne annuellement une somme pour financer les études, que ces derniéres soient obligatoires mais qu’il y ait libre concurrence entre les établissements. D’une part les gens feraient leur chéque et se rendraient compte du vrai prix des études et d’autre part la concurrence tirerait la qualité de l’enseignement vers le haut.

                      Et ne me dites pas oui mais en ZEP ca serait la catastrophe. C’est déja la catastrophe ! Et peut être justement qu’en adaptant les programmes au niveau de ZEP plutot que le fantasme des programmes nationaux on arriverait à récupérer un certain nombre d’élèves. Ce n’est pas parce que vous êtes inaptes à piloter une formule 1 que vous êtes inapte à conduire une Ford Fiesta ;)


                    • Francis Francis 11 juin 2008 16:01

                      L’école est de facto payante puisque financée par les taxes et impôts ...


                    • Marc Bruxman 10 juin 2008 19:14

                      Ah que dire... Oui on est tombé bien bas...

                      Mais de même que donner des CD ne suffit pas à faire remonter durablement les ventes de certains torchons, donner des places de ciné ne va pas forcément augmenter l’assiduité réelle à l’école (par assiduité réelle j’entends faire autre chose que dormir au fond de la classe).

                      Le truc c’est que l’éducation nationale est devenue tellement déconnectée du monde réel et de la vie professionelle que pour les élèves il s’agit principalement d’une garderie.

                      Qu’un enseignement purement théorique soit bon pour une minorité d’élèves c’est un fait. Mais on a tellement baissé le niveau que même cette minorité se fait chier en cours avant qu’on ait éliminé suffisamment de monde pour faire des choses intéressantes (en gros après Bac + 2).

                      Pour les autres, il faudrait un peu plus de concret et d’ouverture. Le lycée notamment devrait être complétement réformé pour etre plus ouvert. Parce que la il ne sert plus à rien. J’ai l’impression d’avoir paumé 3 ans de ma vie à avoir mon bac. Ajoutez à cela les deux années de prépa (qui ne servent qu’à avoir le concours) et vous avez un trou de 5 ans avant de prendre du plaisir à étudier. Le collége est censé être aussi chiant. Mais bizarrement je m’y suis moins enmerdé qu’au lycée. L’école d’ingénieur c’était super comme formation. (Profs excellents, une bonne autonomie laissée aux étudiants, des contacts réguliers avec les entreprises et les laboratoires et de quoi se faire plaisir dans les associations étudiantes)...


                      • Luna3412 10 juin 2008 20:54

                        Bonjour,

                        Il ne faut pas attendre le lycée pour se rendre compte que l’école n’est plus ce qu’elle était.

                        Tous les samedis matins il me manque entre 5 et 10 élèves dans ma classe de CE1 (25 normalement), sauf les samedis où il y a une sortie ou une rencontre sportive !

                        Bon, vous allez me dire que l’an prochain plus personne n’aura à se lever le samedi matin. Mais avec la nouvelle réforme de la suppression du samedi matin on enlève 60 heures de cours aux élèves ordinaires. Car ceux qui sont en difficultés vont bénéficier de ces 60 heures mais il faut aussi savoir que dans les absents de samedi matin il y a les élèves en difficultés.

                        Alors se lèveront-ils une 1/2 plus tôt tous les matins pour venir bénéficier du soutien qu’on leur doit , alors qu’ils ne se lèvent pas le samedi matin !!!

                         


                        • Francis Francis 11 juin 2008 16:06

                          Voilà bien un raisonnement d’enseignant : et l’effet positif d’avoir un vrai weekend pour ces enfants vous a t’il effleuré l’esprit ? Le respect des cycles biologiques des enfants/ados ?


                        • Luna3412 11 juin 2008 20:18

                          Oui j’ai pensé au rythme biologique des enfants et je dirai même qu’il faudrait réduire la journée de classe mais avec ce système de soutien on va la ralonger. En Euope on est un des pays où la journée de classe est une des plus longues.

                          De plus ce n’est pas moi qui ai mis l’école obligatoire le samedi matin. C’est juste un constat. Le samedi on travaille en classe comme les autres jours et les enfants en difficultés accumulent du retard (alors qu’ils en ont déjà) en ne venant pas le samedi.


                        • gnarf 10 juin 2008 22:31

                          Il s’agit d’une place de cinema a la fin de l’annee....une seule, avec remise d’un diplome d’assiduite en meme temps, devant les parents.

                          C’est exactement l’equivalent des diplomes de fin d’annee, qui etaient accompagnes d’un petit cadeau.

                          Si c’etait une place par mois alors ce serait bien embetant....mais un prix d’assiduite de fin d’annee... vous ne supportez donc plus rien ?


                          • Nycolas 11 juin 2008 04:40

                            Pour l’auteur :

                             

                            Je lis vos articles avec intérêt en général, et celui-là ne déroge pas à la règle. Vous mettez toujours en avant le sens critique, ou, comme vous préférez dire, le doute méthodique.

                            Dans ce cas, permettez-moi d’exercer de doute, quant au rôle que joue l’école, à l’égard de ce sens critique, justement. Avez-vous lu le Meilleur des Mondes, d Huxley ?

                            L’école est peut-être dégradée, je n’en sais rien, j’étais moi-même un grand adepte de l’école buissonnière, il y a une quinzaine d’années, mais je crois surtout que, comme vous le pointez, elle ne répond plus à sa fonction première, dans un monde qui la dépasse. D’où ces tentatives d’essayer de rattraper ce qui est perçu comme un retard, par des techniques qui s’apaprentent plus au marketing qu’autre chose. Quoique cela rappelle aussi les "bons points" d’antan, vous ne trouvez pas ? Donc cette carotte n’est pas tout à fait en rupture avec son passé récent...

                            Néanmoins, je pense qu’il faudrait aller au-delà de ce constat, et reconsidérer la place que tient l’école dans la société actuelle. Sert-elle encore à aiguiser l’esprit critique des jeunes, ou au contrraire participe-t-elle plus ou moins activement à l’émousser, en les préparant à devenir des "citoyens" "travailleurs productifs" et "acteurs" d’un système, d’une société de consommation, sur lequel ils ont de toute façon de moins en moins de contrôle ?

                            Je pense pour ma part que si crise de l’école il y a, elle est en effet symptomatique de la crise de valeurs qui touche tout le reste de la société. Et si l’on revenait donc aux fondamentaux de l’école ? Si, au lieu de "former" les jeunes au "monde du travail" (le monde se réduit-il à cela ?) on les aidait simplement à devenir des êtres humains meilleurs et véritablement capables de réfléchir sur le monde qui a été moulé autour d’eux, mieux armés face à la vie en général, plutôt que d’en faire de bons petits soldats serviles à la cause du consumérisme, monstre de Frankeinstein qui parvient usqu’à présent à forcer son propre créateur à s’adapter à lui ? Bref pour moi il ne suffit pas de s’interroger sur une dérive ponctuelle. Ce qui guette l’école, c’est peut-être bien une réflexion globale. Procédera-t-elle comme nos politiciens, à tout accepter sous prétexte de libéralisme, ou parviendra-t-elle à ne pas s’abaisser à ce genre de compromission dont elle est déjà coutumière ?


                            • orange orange 11 juin 2008 10:05

                              Cet article va permettre de prendre conscience de ce que va devenir l’école de demain.

                              A se demander quels seront les enfants admis dans les établissement scolaire. Ne va t-on pas dans se sythèmes de " veux tu apprendre " " est tu prêt pour cela". C’est un peu comme un chomeur qui se présente à un entretien d’embauche.

                              Donner des bons points ( place de cinéma gratuites au plus motivés ) s’est créer une nouvelle injustice aux enfants les plus en difficultés.

                              A moins que ceux qui font de l’absentéisme sont peut être des enfants faisant partie de la bonne société, il n’y a pas que des enfants en difficulté qui font de l’absentéislme.

                               


                              • Paul Villach Paul Villach 11 juin 2008 12:15

                                @ Parkway

                                Comme tout média ! Le doute méthodique est de rigueur ! Il reste que je n’ai pas entendu parler de démenti ! Si vous avez des informations contraires, ne manquez pas d’en faire état. Paul Villach


                              • Yann 11 juin 2008 11:35

                                Il n’est pas si loin le temps où j’étais sur les bancs de l’école, et je me rappelle avoir entendu parler (à l’époque) d’un projet de remuneration des élèves selon leurs résultats, dans un quelconque pays nordique (je ne me souviens plus lequel, à l’époque pour moi tout endroit au nord de Paris était plus ou moins nordique). Je me souviens très bien mon enthousiasme à l’idée de percevoir même dix francs par mois (c’était dans les années 80), comme les écoliers de ce pays avaient de la chance ! (je ne crois pas que ca se soit fait de toute maniere)

                                Bon, par contre une place de cinéma par an, à l’heure où les jeunes s’échangent des film piratés via la mémoire de leurs téléphone portable, désolé de sourire franchement. Même si on envisageait sérieusement d’instituer une récompense à la réussite, ce n’est certainement pas une place de cinéma qui motivera les troupes.

                                Plus sérieusement, il y a une dizaine d’année j’avais entendu parler de l’idée de supprimer les allocations familiales aux familles des élèves trop souvent absent. Ca ne m’avait pas paru une si mauvaise idée, si les parents n’excusent plus leur enfants, ça fait un soutient moral important en moins dans leur absentéisme, qu’en pensez-vous ? (je demande mais c’est peut être déjà en place en fait, pardonnez mon ignorance, ça fait plusieurs années que je n’habite plus en France)


                                • docdory docdory 11 juin 2008 15:18

                                   Cher Paul Villach

                                  A une époque , il y avait , à la fin de l’année , une distribution des prix . Les prix étaient des livres , ce qui encourageait la lecture . Il y avait , à titre d’encouragement pour les élèves les moins bon , des " prix de camaraderie " et des " prix d’assiduité " ( réservés à ceux qui n’avaient pas été absents pendant l’année scolaire ). On pourrait dire que cette place de cinéma gratuite remplace le " prix d’assiduité " , sauf qu’il n’y a aucun prix pour remplacer les " prix d’excellence " et les " prix d’honneur " . 

                                  Autrement dit , si le fait de simplement faire acte de présence est récompensé , par contre , le fait de faire du bon travail pendant ce temps de présence ne l’est pas ...

                                  Par ailleurs , cette technique de la carotte et du bâton ne comporte que la carotte , et pas le bâton , qui est constitué normalement par la mauvaise note ( pour avoir en dessous de la moyenne , il faut vraiment le faire , de nos jours ) !


                                  • docdory docdory 11 juin 2008 15:21

                                     @ Paul Villach

                                    Cela dit , dans cette affaire , le modernisme s’est arrêté à mi-chemin : ils auraient eu plus de succès à proposer un an de préservatifs gratuits aux assidus !


                                  • Alexeï 12 juin 2008 07:26

                                    Votre article lève une nouvelle fois le voile sur les pratiques bien peu reluisantes de l’administration de l’Éducation Nationale.

                                    1. Les régles existent (elles sont inscrites dans les réglements intérieurs des établissements) mais ne sont pas appliquées (quand ce n’est pas l’administration qui viole ses propres règles). On peut, à la lumière de nos expériences, supposer qu’une demi-journée banalisée a dû être nécessaire pour proposer une telle « solution » face à l’absentéisme.

                                    2. Il ne semble pas que cette initiative « branchée » ait ému grand monde, à savoir :
                                    - les enseignants de l’établissement,
                                    - la hiérarchie à tous ses échelons,
                                    - les associations de parents d’élèves dont on peut sans difficulté imaginer qu’elles ont donné leur aval.

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