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Accueil du site > Tribune Libre > Faut-il fermer les frontières du français ?

Faut-il fermer les frontières du français ?

L’ouverture de la langue française aux nouveaux mots et expressions a quelque chose à la fois d’affligeant et de déroutant. Affligeant du fait de la distorsion audacieuse du « parler convenable » que nous avons en commun. Déroutant, parce que, trop souvent, ces incursions dans la langue française aboutissent, trop souvent, à l'adoption, par bien des gens, des mots et des expressions d’origine contestable, qu’il faudrait, dès lors, adopter pour ne pas se faire affubler du qualificatif peu honorable de « has-been » (passé de mode)

Béate ouverture

Ainsi devrions-nous, selon Le Petit Robert 2014, nous convertir, sinon nous adapter, aux aberrations et à l’usage des vulgarités comme "bombasses", "cheloues", "texter", "kéké", "modeux", "clasher", "choupinet" et autres… "agender",...

C’est aussi déroutant pour de nombreux francophones dans le monde (250 millions[1]) pour qui le français n’est pas seulement un outil banal de communication La langue de Molière est un code, un ensemble de règles grammaticales, un savant agencement de vocables et d’expressions châtiées. Le français est un monde, une culture, un système de pensée, une citoyenneté supranationale.

Le français doit s’apprendre davantage qu’il ne se parle, il doit s’apprendre parce qu’il ne se transmet pas comme un héritage familial. Il doit être appris et ses règles doivent être comprises et pratiquées conformément aux recommandations de l’Académie française. Ainsi seulement ce merveilleux code de communication pourra-t-il survivre au péril annoncé, si pas d’une disparition, en tout cas d’érosion et d’altération profonde au fil des générations. Le latin n’y avait pas survécu…

Ouverture, jusqu’où ?

En parlant justement de la disparition, il est toujours utile de revenir et de s’interroger sur les foyers de nouveaux mots et expressions repris chaque année dans le dictionnaire. Des foyers qu’il est, d’emblée, difficile de juger tolérables ou pas.

A l’inventif de nos « cousins » québécois nous devons : « bas-culotte » (collant), « patenteux » ou « traîneux » (personne désœuvrée). Plus près de nous, nos autres « cousins » ne sont pas en reste. La « fricadelle » (saucisse panée) ou le « brol » (fouillis) arrivent de Belgique tandis que les Suisses nous inventent le verbe « agender » (fixer une date pour).

Et que dire des périphéries de nos villes où le français dépérit pour les uns, renaît pour les autres en s’adaptant à une diversité endémique ? Que dire davantage du français parlé dans les anciennes colonies et les territoires d’outre-mer où il a littéralement absorbé des mots et concepts locaux par lexiques entiers, pour ainsi dire, à l’insu de la métropole ? Est-ce toujours du français ?

Au final, difficile de trancher la question de manière satisfaisante :

« En s’ouvrant aux influences d’ici et d’ailleurs, en cédant aux sirènes de la mode, le français s’enrichit-il utilement ou se dénature-t-il dangereusement ? » 

Boniface MUSAVULI



 


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8 réactions à cet article    


  • Constant danslayreur 30 mai 2013 09:17

    L’ouverture de la langue française aux nouveaux mots et expressions a quelque chose à la fois d’affligeant et de déroutant.

    Et d’un, le mariage « affligeant » - « déroutant » est des plus hasardeux, puisque le deuxième marque l’inaccoutumé, le très étonnant, ce qui laisse indécis/ hésitant/ interdit. Alors que le premier est nettement tranché sans aucune place, pas la moindre, au doute ou à l’indécision. L’opinion y est faite et elle est définitive… mariage quasi-impossible.

    Et de deux, l’apparition d’un solécisme, un anglicisme en particulier est à examiner, mais celle plus générale d’un néologisme, n’est pas, ne peut pas être, systématiquement négative sauf à décider de figer une bonne fois pour toutes, une langue et donc à la condamner à mourir à terme, bref il aurait fallu dire quelque chose comme :

    L’ouverture de la langue française à de nouveaux mots et expressions, relève PARFOIS DU déroutant VOIRE de l’affligeant.

    Déroutant, parce que, trop souvent, ces incursions dans la langue française aboutissent, trop souvent,

    Si souvent que ça ? Au point d’en être réduit à l’asséner pour convaincre ?

    à l’adoption, par bien des gens,

    Mais ça ne veut rien dire ça « bien des gens » on n’exprime pas la multitude - sauf à être ma concierge - par de si vagues assertions, j’aurais dit quelque chose comme « par de larges pans de la société, ou alors plus sobrement par « beaucoup de personnes »

    à l’adoption, par bien des gens, des mots et des expressions d’origine contestable,

    Hé non derechef,

    à l’adoption, par bien des gens (à la rigueur hein), DE mots et D’expressions A L’origine contestable,

    Ah oui au fait, ça veut dire quoi au juste, une origine contestable ? smiley

    qu’il faudrait, dès lors, adopter pour ne pas se faire affubler du qualificatif peu honorable de « has-been » (passé de mode).

    Ouh-là,
    Ne pas se faire affubler, disons plutôt ne pas se voir affubler
    Quant à la phrase dans son entier :

    Qu’il faudrait dès lors se résoudre à adopter, si l’on veut éviter de se voir affubler du qualificatif de ceci cela,

    Qu’il faudrait dès lors se résoudre à adopter ou alors prendre le risque de se voir affubler du qualificatif de ceci cela,

    Ainsi devrions-nous, selon Le Petit Robert 2014, nous convertir, sinon nous adapter, aux aberrations et à l’usage des vulgarités comme « bombasses », « cheloues », « texter », « kéké », « modeux », « clasher », « choupinet » et autres… « agender »,...

    L’usage DE vulgarités TELLES « bombasses »

    Ensuite vous appelez ça directement des vulgarités vous ?...

    Ainsi seulement ce merveilleux code de communication pourra-t-il survivre au péril annoncé, si pas d’une disparition, en tout cas d’érosion

    … heu … le « si pas d’une disparition » pique un peu, vous ne trouvez-pas ?

    En parlant justement de la disparition, il est toujours utile de revenir et de s’interroger sur les foyers de nouveaux mots et expressions repris chaque année dans le dictionnaire. Des foyers qu’il est, d’emblée, difficile de juger tolérables ou pas.

    Ah d’accord des « foyers » qui seraient « tolérables ou pas » smiley

    Et que dire des périphéries de nos villes où le français dépérit pour les uns, renaît pour les autres en s’adaptant à une diversité endémique ? Que dire davantage du français parlé dans les anciennes colonies et les territoires d’outre-mer où il a littéralement absorbé des mots et concepts locaux par lexiques entiers, pour ainsi dire, à l’insu de la métropole ?

     smiley Très drôle en effet, je me vois très bien en Algérie par exemple, veiller à tenir informée la … métropole, de toute liberté que je prendrais avec le Français 

    Au final, difficile de trancher la question de manière satisfaisante :

    Au vu des réflexions très profondes que vous livrez, un peu oui que c’est difficile.

    « En s’ouvrant aux influences d’ici et d’ailleurs, en cédant aux sirènes de la mode, le français s’enrichit-il utilement ou se dénature-t-il dangereusement ? »

    pas mal les « influences d’ici »

    Sinon ben c’était le chinimli imli en direct d’AV, merci de votre contribution, vous avez maintenant tout le loisir de réapprendre le Français à zéro, avant de prétendre dans une décennie ou deux, le « défendre » des influences néfastes « des périphéries de nos villes » mais plus généralement « d’ici et d’ailleurs » smiley


    • Constant danslayreur 30 mai 2013 09:20

      S : j’ai repris sans le souligner

      L’ouverture de la langue française à de nouveaux mots pas aux...

      Une catastrophe ce billet et c’est moi qui suis le méchant dans l’histoire smiley


    • MUSAVULI MUSAVULI 30 mai 2013 09:49

      Constant Dalayreur,
      Il s’agit pour l’essentiel d’une différence de style.
      Pour le reste, je crois savoir que nous abondons dans le même sens, à savoir la recherche d’une certaine exigence dans la pratique au quotidien de ce merveilleux code de communication, sachant que chacun se présente avec ses propres bagage et talents.


    • MUSAVULI MUSAVULI 30 mai 2013 10:19

      « A de nouveaux mots » plutôt que « aux nouveaux mots » ?
      « Les nouveaux mots », quand ils sont repris dans l’ouvrage.
      Dans ce cas, on utilise la contraction « aux » (pl. de « à les »).
      « De nouveaux mots » quand ils sont dans la nature sans qu’on sache s’ils ont ou pas vocation à être repris dans un lexique de référence. Dans ce cas, « à de nouveaux mots ».


    • ZenZoe ZenZoe 30 mai 2013 09:19

      Le français est une langue riche, vivante, mouvante, vorace de nouveaux mots et expressions qu’elle digèrera en les bidouillant au besoin plus tard si nécessaire. Une langue, comme toutes les langues vivantes, qui bouge, grouille, expérimente et se transforme au gré de son histoire. Une langue qui donne autant qu’elle reçoit, et sème ses propres mots partout où elle passe. L’anglais regorge de mots étrangers, pris tels quels ou arrangés à la sauce locale, et ne s’en porte pas plus mal, au contraire même ! Une langue vivante n’a pas de frontières, et tant pis pour ceux qui voudraient la contrôler de force.
      S’il y a une chose que les défenseurs de la langue française rejettent par-dessus tout est le fait que la langue appartient au peuple qui la parle, et n’a nul besoin de défenseurs auto-proclamés. La langue est faite par et pour le peuple dans son ensemble, et n’a que faire d’une minorité d’intellectuels qui voudraient la confiner dans un musée, ses règles de grammaire et son vocabulaire protégés à jamais par une cage aux parois de verre blindé.


      • Citoyen85 30 mai 2013 14:12

        Il ne faut pas tout confondre, un dictionnaire français se doit d’expliquer la plupart des mots utilisés dans le langage courant et dans les journaux. Cela ne signifie pas que ces mots doivent être utilisés.
        Pour le reste toutes les langues évoluent avec le temps, mais les modes passent.


        • voxpopuli voxpopuli 30 mai 2013 15:28

          Une langue est par essence quelque chose de vivant et le français n’échappe pas à cette règle , il est le fruit d’une histoire et n’a jamais cessé d’évoluer au fil du temps , cette évolution n’étant que le reflet de l’évolution de ceux qui le parlent , vouloir figer une langue dans le marbre n’a donc tout simplement aucun sens . 

          Si personne ne conteste aujourd’hui par exemple que le mot « bagnole » fait parti de la langue française c’est tout simplement parce que les francophones ont choisis de l’utiliser et ce sans se soucier de l’opinion des linguistes et dans quelques décennies il en ira peut-être de même pour le mot « bombasse » tout dépendra de l’utilisation qui en sera ou non faite .

          • Filou49 30 mai 2013 21:39

            Quel vieux débat ! Je suis linguiste et voudrais rappeler une phrase d’André MARTINET, grand linguiste dont j’ai eu la chance de suivre les cours, et collaborateur de Roman JAKOBSON : « une langue évolue parce qu’elle fonctionne » ; 

            Dans cet article, on retrouve tous les relents conservatistes de la société française qui aujourd’hui prend un énorme retard par rapport à nos voisins européens, et pas seulement au niveau des langues. Etant également germaniste, je constate que la langue allemande est, contrairement aux idées reçues en France, plus apprise dans le monde que le français !!! Une langue est le reflet d’une culture, d’une société (base en anthropologie !). L’attitude frigide face aux emprunts lexicaux est le reflet d’une frigidité plus large...
            L’allemand n’est pas soutenue par une politique virulente telle que le français dans la francophonie, n’a pas d’« Académie allemande » !!! Et elle est perçue dans le monde (les arguments sont nombreux) comme une langue dynamique, comme l’Allemagne d’ailleurs.
            Enfin, les emprunts aux langues étrangères répondent à des besoins avant tout sémantiques ! Et puis personne n’est choqué par les nombreux emprunts que d’autres langues font au français !!!
            Rassurez-vous, le français est parlé par près de 200 millions de personnes dans le monde : c’est une garantie de bonne santé !


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