Foulard islamique : le voile de Malala
Des filles ou femmes portent le voile, signe d’appartenance culturelle et religieuse selon une lecture rigoriste du coran. Ne peut-on considérer qu’elles adhèrent de leur propre chef à leur culture et religion ? Ne peut-on les respecter et considérer qu'elles choisissent elles-mêmes de porter le voile, comme signe d'appartenance voulue ?
En Suisse orientale, à Bürglen, deux fillettes ont été autorisées par un tribunal à porter le foulard, faute de loi cantonale adéquate. Faut-il contester le foulard des écolières de Bürglen au nom de l'égalité femmes-hommes ? C’est le point de vue que j'ai lu suite à cette décision de justice.
Le voile de Malala
Sont-elles forcées à le porter ? C’est possible, mais est-ce différent des parents occidentaux qui décident eux aussi assez largement de l’habillement de leurs enfants à l’école ? Si elles sont contraintes, n'ont-elles pas le courage de se rebeller ? Certaines musulmanes, venues en Europe, déclarent avoir été forcées. Peut-être. Mais comment croire en une parole déjà contaminée et formatée par le discours victimaire féministe, une parole qui fait d’elles des êtres minorées, des sous-femmes incapables de choisir ? L’islam contient des passages selon lesquels, dans certains domaines, les femmes sont subordonnées aux hommes. C’est la gestion musulmane des différences de sexe. Ce n’est pas la nôtre. Mais le discours victimaire du féminisme n’est pas assez enthousiasmant pour contrer la force de la tradition. Les Femen à Tunis ne sont qu’une caricature de la femme occidentale. Le slogan n'est pas une pensée.
L’attitude de certaines féministes à l’égard des pays islamiques montre comment débute le processus de contamination et de dénigrement des femmes (car on les dénigre en les traitant de victimes) pour en faire un clan, au nom d’une idéologie égalitaire dont on connaît les biais. On voit aussi que celles qui vivent du féminisme ont besoin de nouveaux marchés pour maintenir leurs jobs, car le marché occidental s’éteindra.
Hier, Malala a parlé devant l’Assemble Générale de l’ONU. Elle a 16 ans. Elle portait un voile sur les cheveux. Malala Yousafzai est l’adolescente qui l’an dernier a reçu des balles dont une dans la tête, tirées par des talibans. Elle voulait étudier, eux ne voulaient pas. A l’époque on a crié au sexisme parce que c’est une fille. Les garçons talibans eux sont contraints d’étudier dans les écoles coraniques. Les rôles sont définis pour les garçons comme pour les filles. On ne crie pas au sexisme pour autant, pas plus que pour chaque homme exécuté pour ses croyances ou son appartenance.
L’instrumentalisation des musulmanes
On ne s’élève pas non plus contre le sexisme du passé, par exemple quand les hommes africains, esclaves de la traite saharienne, étaient émasculés pour ne pas se reproduire. Le discours sur le sexisme et le voile est une forme d’impérialisme culturel à l’encontre des femmes, considérées encore une fois, dans le mépris qui caractérise le féminisme bourgeois, comme le maillon faible de la société. Il instrumentalise les femmes musulmanes en vue d’alimenter une doctrine rigide et stéréotypée sur le monde. Il n’est plus une analyse de société : il est devenu un mantra, une hypnose, un réflexe pavlovien.
Si un jour les deux élèves de Bürglen veulent se rebeller, elles devront faire comme les femmes et les hommes occidentaux : ils et elles se sont rebellés contre les oppressions. Mais si des féministes veulent décider de ce qui est bon pour ces jeunes filles, si elles veulent formater le monde à leur image, elles trouvent ici plus fort que leur doctrine. Leur projet autoritaire de formatage du monde ne passe par partout. Il suffit déjà qu'il passe chez nous, malheureusement, faute d'avoir des hommes assez fermes pour y tenir tête.
Le voile de mère Teresa
Jusqu'à quand pourra-t-on s'habiller selon son choix ou selon sa culture ? Qui décide de ce qui est bon pour les autres ? Pourquoi ne dit-on rien des hommes contraints à porter le turban (arabes ou sikhs) ou une kippa et à couvrir symboliquement leur tête ?
Je ne suis pas partisan du voile. Je regrette que l’on ne puisse voir la chevelure de certaines femmes. Je suis opposé à la burqa parce que l’on ne peut plus identifier la personne à qui l’on parle. Et si je devais un jour adopter une pratique spirituelle particulière ce ne serait pas l’islam. Je regrette qu’une religion s’occupe autant de l’intendance. Mais je considère que le port du foulard est du ressort de la liberté de celles qui veulent le mettre.
Est-il un signe d’identité religieuse, voire de prosélytisme ? Une chose m’étonne alors : pourquoi si peu de chrétiens montrent-ils ouvertement leur appartenance ? Ils devraient s'affirmer, porter des signes bien visibles, tenter de convaincre de la supériorité de leur religion. L’islam est une culture forte. Où en est la nôtre ?
Et puis, quelle leçon les musulmanes voilées ont-elles à prendre de nos femmes qui veulent bannir le foulard, quand on se rappelle que mère Teresa, en Inde ou en Afrique, portait toujours un voile sur la tête, signe explicite de son appartenance religieuse ?
Les réponses au foulard
Derrière le foulard, bien plus que l'égalité, c'est la religion et le prosélytisme qui sont en débat. C’est aussi le vide spirituel occidental. C’est le peu d’espace personnel, singulier, qu’offrent les idéologies égalitaristes d’origine marxiste. C’est le manque de transcendance et d’enthousiasme de nos sociétés. C’est aussi la confiance chancelante dans notre propre culture, ébranlée depuis les deux grandes guerres.
Des courants féministes, dont les sectaires Femen, véhiculent un impérialisme culturel et tentent de contaminer d’autres régions du monde. Leur cheval de Troie est la victimisation. Malala, en parlant voilée du haut de ses seize ans, a renvoyé un message de non adhésion au discours victimaire. Elle met vraiment sa vie en jeu au nom d’un véritable idéal : prôner l’éducation et la scolarisation pour tous les enfants. La secte Femen pourrait prendre une leçon de courage avec elle...
Le foulard interpelle ? Répondons-y. La réponse au foulard, dans le mesure où il est un signe religieux, ne peut pas venir de la notion politique occidentale d’égalité.
La réponse est :
1. soit la laïcité stricte qui passe par des interdits :
- interdiction de porter dans les lieux publics des signes qui sont de l’ordre du religieux privé et port d’un uniforme à l’école ;
- ce qui gommerait tôt ou tard tous les particularismes et toute identité de type spirituel (on y arriverait, à cette société où l’on échange le droit de vivre en sécurité contre le droit de mourir d’ennui) ;
2. soit l’acceptation de signes religieux pour toutes les religions avec une prévalence pour les religions chrétiennes ; les cours d’histoire devraient inclure une part d’histoire du christianisme donnée par des théologiens-historiens (pas par des laïcs marxistes) et mettant en valeur nos racines chrétiennes dans la morale, le droit, le respect de la liberté individuelle, le développement de la conscience ; toutefois il n’est pas judicieux de réintroduire le crucifix dans les écoles car si le port du foulard est un acte individuel limité à son propre corps, l’exposition sur un mur de classe est déjà une forme plus collective laissant penser à une adhésion globale au symbole. De plus il doit être possible de critiquer les religions sans être traité d'islamophobe, de christianophobe ou autre -phobe.
3. soit la fermeture de l’Europe sur elle-même, ce qui aurait des conséquences économiques certaines ;
4. soit le réveil des chrétiens. Ce sera plus difficile tant notre société d’intolérance désigne la foi comme ringarde et la religion comme l’opium du peuple. J’ai moi-même assez de doutes sur la religion pour ne pas y adhérer. Mais je reconnais son importance et sa valeur historique, sociale, morale et culturelle, ainsi qu’une dimension métaphysique. Défendre nos valeurs face à des valeurs d’une autre culture dans laquelle nous ne nous reconnaissons pas, cela passe par la défense de l’héritage chrétien. Ce qui est réalisable sans forcément être croyant.
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