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Accueil du site > Tribune Libre > Fusion SUEZ-GDF, manquement à la parole donnée et hold-up économique

Fusion SUEZ-GDF, manquement à la parole donnée et hold-up économique

"Entre l’argent public et l’argent privé, il y aura la même différence qu’entre une arme détenue par un particulier qui peut servir à faire un hold-up ou bien à protéger un innocent et une arme confiée à un soldat et qui a pour seule fonction de défendre la patrie. C’est dire que l’une inspire la défiance et l’autre le respect." François de Closets, Toujours plus.

Les citoyens et les peuples peuvent-ils changer le cours du droit international et (re)trouver leur pouvoir de décision ? C’est possible : d’abord en se réappropriant toute leur culture juridique, composante essentielle du patrimoine démocratique depuis 1789. Les droits fondamentaux constituent une arme puissante qui, bien comprise, permettrait d’enrayer le déferlement d’un droit tout entier fondé sur la primauté du commerce et du profit. Le rappeler participe de la pression civique contre la résignation et la loi du plus fort (ou du plus riche) qu’on essaye d’imposer à des démocraties affaiblies, déclare Me Nuri Albala, avocat et président de la Commission internationale droits fondamentaux et mondialisation.

A l’occasion d’un entretien qu’il accordait le 20 septembre 2005 devant le Conseil de l’Europe, le criminologue britannique Michael Levi, auquel son interlocuteur demandait s’il y avait en Europe une définition commune de ce qu’on appelle le crime économique, répondait par la négative. Il précisait toutefois que le Conseil de l’Europe avait listé un certain nombre de figures juridiques qui en tenaient lieu, en rappelant notamment l’adoption en 1981, par ce même Conseil, d’une recommandation R(81) 12 qui répertoriait seize crimes et délits économiques concernant notamment les cas de fraudes financières, de blanchiment d’argent et de corruption.

Interview 20.09.2005

 

A une autre question qui lui était posée, celle de savoir si cette liste était toujours valable aujourd’hui, ou si l’on voyait apparaître de nouveaux délits financiers, il répondait par l’affirmative, ajoutant toutefois de manière très pertinente en pensant aux anciens pays communistes de l’ex-bloc soviétique, que s’il était vrai qu’à cette époque certains délits touchant notamment aux privatisations n’avaient pas été pris en compte, il ne fallait pas " non plus oublier que combattre le crime économique, (c’était) aussi regarder du côté de personnes bien établies injustement respectées et pas seulement du côté des gangsters auxquels on assimile facilement le crime organisé."

Or, avec la question de la fusion Suez-GDF, c’est précisément à une nouvelle catégorie qui s’apparente à un véritable hold-up économique que l’on est en train d’assister, lequel met en péril, sur fond de libéralisation du marché de l’énergie en Europe occidentale, aussi bien les consommateurs eux-mêmes que les Etats qui y participent, laissant la porte ouverte à de véritables prédateurs autrement plus puissants et dangereux.

Il convient de rappeler qu’en lançant le débat sur une future politique européenne commune dans le domaine de l’énergie avec son "Livre vert" publié au mois de mars 2006, la Commission européenne qui venait d’être échaudée par le conflit gazier survenu entre la Russie et l’Ukraine au mois de janvier 2006, n’avait plus d’autre choix que de s’intéresser rapidement au dialogue énergétique entre la Russie et l’UE, en pressant parallèlement ses membres d’achever l’ouverture des marchés européens du gaz et de l’électricité, d’intensifier les relations avec les principaux fournisseurs d’énergie comme la Russie et l’OPEP, et de travailler à l’utilisation des énergies renouvelables en privilégiant l’efficacité énergétique et la recherche sur les technologies pauvres en carbone .

Si les chefs d’Etat et de gouvernement ont alors largement approuvé les propositions de la Commission lors du sommet annuel de printemps tenu le 24 mars 2006, plusieurs pays ont toutefois jugé utile, s’agissant du choix du "bouquet énergétique" à mettre en place, d’indiquer que l’UE ne devait pas empiéter sur leur souveraineté nationale. Mais plus précisément encore, des observateurs très attentifs ( la Confédération européenne des syndicats, par exemple) ont aussi souligné la nécessité de réserver un droit d’accès aux services énergétiques pour tous en Europe, appelant pour ce faire à la mise en place d’un service public européen ! Le secrétaire général de la CES, M. John Monks, déclarant que la future politique énergétique européenne devait s’articuler autour de quatre priorités : "le renforcement du contrôle public et de la démocratie dans le secteur énergétique, la réduction de la consommation énergétique, la sécurisation des approvisionnements et la diversification de l’offre énergétique", regrettait vivement que le Livre vert de la Commission n’ait pas cru devoir tenir compte de la dimension sociale de la politique énergétique.

Mais que pèsent ces considérations face au formidable eldorado qui vient ainsi de s’ouvrir ? Les grandes manoeuvres ont commencé, on s’en souvient, avec l’italien ENEL qui a lancé une OPA sur Suez, dirigée par M. Gérard Mestrallet, (Suez, l’ancienne Lyonnaise des eaux, que dirigeait le très chiraquien Jérôme Monod) , et dont l’activité couvre les marchés de l’eau, des déchets et de l’électricité. Enel, dont on a rapidement compris qu’il projetait de revendre le département aquatique de Suez à Véolia, son premier concurrent, a alors créé la panique : ne s’était-il pas en effet mis d’accord avec Henri Proglio, le dirigeant de Véolia, chiraquien lui aussi, certes, mais plutôt sarkozyste ? Qu’à cela ne tienne, une solution a vite été trouvée par le Premier ministre qui a paré le coup en proposant de fusionner Suez avec Gaz de France, lequel a comme chef M. J-F. Cirelli, autre sarkozyste.

Une autre difficulté surgissait alors, tenant au fait qu’au mois de juillet 2004 et alors qu’il était ministre de l’économie, M. N. Sarkozy avait fait promulguer une loi portant ouverture du capital de Gaz de France et fixant un seuil minimal de participation de l’Etat fixé à 70 %. Deux mois plus tard, les deux sociétés EDF et GDF avaient aussi changé de statut en devenant sociétés anonymes. Que faire, dès lors que, pour opérer la fusion Suez GDF, il devenait nécessaire d’échanger des actions entre les deux sociétés, obligeant ainsi à réduire à 34 % le seuil de participation de l’Etat ? Comment justifier un tel manquement aux engagements donnés ? Mais tout simplement ! En renversant l’échiquier, en accréditant auprès du grand public - patriotisme économique oblige, n’est-ce pas ?- l’idée de prime abord séduisante que la fusion Suez-GDF permettrait au groupe nouvellement formé d’atteindre une taille critique susceptible d’en faire le premier groupe européen fournisseur de gaz, une entité suffisamment crédible pour traiter d’égal à égal et négocier des tarifs favorables avec l’Algérie, la Norvège, la Russie , le Qatar et... l’Iran. On ne peut qu’être confondu devant une telle pratique du bonneteau !

Qui ne voit pas que ce montage n’a aucune force économique face à un partenariat aussi important que celui qui lie désormais Gazprom et Lukoil avec Sonatrach, aux termes d’un accord de participations croisées entre ces trois géants des hydrocarbures ?

Qui peut sérieusement ignorer qu’à part distribuer du gaz, GDF ne sait rien faire d’autre, face à Gazprom et à Sonatrach qui représentent ensemble 36% du marché européen d’une énergie qu’ils fournissent, produisent et vendent aussi en en indexant de surcroît le prix sur celui d’un pétrole qu’ils contrôlent pleinement ?

A part son portefeuille de clients qu’elle partage avec EDF, qui sera désormais son concurrent, GDF n’est rien, et n’apporte rien, si ce n’est une bouée de sauvetage temporaire à Suez et à son dirigeant dans un combat pitoyable entre réseaux chiraquien et sarkozyste.

Le député européen Claude Turmes (Luxembourg) ne se trompait pas lorsqu’il déclarait que "tous les bénéfices de la libéralisation supposée des marchés du gaz et de l’électricité vont dans les poches d’une poignée d’entreprises du secteur et de leurs actionnaires." Pour le moment, ajouterai-je, car cette manipulation qui a pour cadre la libéralisation du marché de l’énergie va rejaillir de plein fouet sur les consommateurs.

Les citoyens que nous sommes et les peuples peuvent-ils changer le cours du droit (inter)national et (re)trouver leur pouvoir de décision ? Oui. Et voici comment : grâce à la pression civique contre la résignation et la loi du plus fort (ou du plus riche) qu’on essaye d’imposer à des démocraties affaiblies.

Et quel est le premier de ces droits fondamentaux ? C’est le vote. Le vote qui permettra de rappeler utilement dans moins de huit mois que quelqu’un qui souhaite briguer la magistrature suprême, surtout s’il est déjà ministre d’Etat, ne peut se permettre de manquer à la parole qu’il a donnée à ceux-là mêmes dont il sollicitera le mandat pour les gouverner pendant cinq ans.


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18 réactions à cet article    


  • Panama (---.---.198.59) 18 septembre 2006 12:35

    Certes, certes. Toutefois, vous éclipsez deux questions fondamentales :

    - des salariés d’une entreprise monompolistique mais destinée à ne plus l’être pour des raisons européennes peuvent-ils continuer à bénéficier d’un régime de faveur dont les avantages sont, n’ayant pas peur des mots, léonins, et payés par le régime général, c’est à dire les autres ?

    - la libéralisation et la privatisation sont-elles les conséquances inéluctables de la globalisation de l’économie mondiale, contre laquelle la France ne pourra jamais rien ?

    Après tout, la fusion GDF/SUEZ pourrait tout à fait rentrer dans le moule de la théorie fort gaullienne du nationalisme économique.

    Une chose est sûre : GDF ne peut plus fonctionner comme avant. La France giscardienne des lendemains qui chantent n’existe plus.

    Et la solidarité dans un seul sens non plus.


    • roumi (---.---.74.206) 18 septembre 2006 13:31

      monsieur panama quel age avez vous ?

      roumi


    • panama (---.---.198.59) 18 septembre 2006 14:52

      @ Roumi : la quarantaine.

      Et j’ai envie de pouvoir partir en retraite à 65 ans... et avec une retraite complète, qui plus est !

      Après tout, je raque assez tous les mois au fisc et autres organismes.


    • (---.---.72.11) 18 septembre 2006 13:13

      Le régime de faveur des employés de GDF n’est rien par rapport aux privilèges de ceux qui vont s’en mettre plein les pognes grâce à cette fusion. On retrouve l’idéologie ultralibérale dans votre discours : modernité égale privatisation et baisse des salaires. Pourtant depuis maintenant une trentaine d’années que ces politiques sont appiquées, on voit bien que les inégalités croissent de manière vertigineuse, que les prix des entreprises privatisées augmentent considérablement, que le service diminue. La seule chose qui augmente ce sont les bénéficices.

      N’employez pas s’il vous plait le mot de solidarité alors que vous ne parlez que de concurrence faussée (monopole privé) et de privatisation (« conséquences inéluctables »). Libre à vous de penser que vous payerz moins d’impots grâce à ces politiques, bon homo économicus que vous êtes, uniquement préoccupé par la croissance de ses revenus et la maximisation de son profit.

      Pour beaucoup dont je fait partie la seule voie n’est pas la toute puissance économique et la confiscation du pouvoir par de petits groupes de riches et puissants.

        Lire les 6 réponses ▼ (de undefined)

      • (---.---.162.15) 18 septembre 2006 17:12

        Quelqu’un a-t-il un lien qui indique précisément quelles ont été les promesses que Sarkozy est en trait de bafouer ?

        Am.


        • FredSud37 (---.---.57.151) 21 septembre 2006 19:30

          « Je l’affirme parce que c’est un engagement du Gouvernement : EDF et GDF ne seront pas privatisés. (.....) Le Président de la République l’a rappelé solennellement lors du Conseil des Ministres au cours duquel fut adopté le projet. Mieux, le Gouvernement acceptera l’amendement du Rapporteur prévoyant de porter de 50 à 70 % le taux minimum de détention du capital d’EDF et de GDF ». Nicolas Sarkozy à l’Assemblée Nationale le 15 juin 2004.

          A l’heure où le Gouvernement est en passe de brader GDF, il devient urgent de diffuser le plus possible le document écrit par le Collectif Jean Marcel Moulin et de signer la pétition disponible ICI.


        • FredSud37 (---.---.132.160) 18 septembre 2006 20:50

          « En Angleterre, les gains promis aux consommateurs résidentiels suite à la privatisation ne se sont pas concrétisés, bien que des facteurs favorables aux entreprises d’électricité, comme une baisse du prix du gaz naturel et du charbon, aient permis à celles-ci de réduire sensiblement leurs coûts. Quant aux employés de l’électricité, ils ont été les grands perdants de cette privatisation. En seulement cinq ans, de 1990 à 1995, plus du tiers des effectifs ont été supprimés (54.400 emplois). Les compagnies, elles, ont réalisé des profits records. Les actionnaires des compagnies d’électricité ont réalisé un rendement annuel moyen de 30 % depuis la privatisation, alors que la bourse de Londres n’affichait qu’un rendement annuel de 11 % au cours de la même période. Les hauts dirigeants des compagnies d’électricité ont également récolté le magot depuis la privatisation. Ils ont vu leur rémunération grimper d’en moyenne 35 % chaque année pendant cinq ans, alors que le salarié britannique moyen devait se contenter d’une augmentation annuelle de seulement 14 %. Non seulement les consommateurs n’ont pas obtenu les baisses de tarifs promises suite à la privatisation en Grande-Bretagne, mais les ménages à faible revenus sont maintenant beaucoup plus vulnérables aux coupures de services. Les entreprises »offrent« aux ménages à faibles revenus un système à carte débit. Ces ménages doivent payer à l’avance pour l’électricité qu’ils consommeront. En cas de difficultés financières, ces ménages ne se font plus couper l’électricité, ils »décident« tout simplement de ne plus en acheter ! Ce système est avantageux pour les entreprises, puisqu’elles n’ont plus à faire de démarches pour couper l’électricité aux ménages en difficultés. De plus, ces cas de »coupures volontaires« n’entrent plus dans les statistiques des coupures de services. Il y a quelque chose de profondément pervers et discriminatoire dans ce système ». (Martin Poirier, Le Taon dans la Cité).

          A l’heure où le Gouvernement est en passe de brader Gaz de France, il devient urgent de diffuser le plus possible le document écrit par le Collectif Jean Marcel Moulin et de signer la pétition disponible ICI.

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          • Renaud Bouchard (---.---.42.5) 19 septembre 2006 00:56

            Analyse assez fine de la part d’un lecteur (que je remercie) d’une situation qui échappe en premier lieu à la Commission européenne, laquelle n’a de cesse de multiplier les interventions pour limiter les effets d’une concentration effective des acteurs en matière d’énergie. Le résultat est loin d’être probant puisque, comme chacun sait, il est apparu que dans dix Etats membres de l’Union européenne, les trois premier géants électriques possèdent plus de 60% des capacités de production, constituant ainsi des positions dominantes qui les ont d’autant moins incités à diminuer leurs marges qu’ils contrôlent aussi les circuits de transport, de distribution et de commercialisation de l’énergie. Je suis donc enclin à penser que les réactions de la Commission, liées aux autorités nationales de la concurrence, ne seront jamais plus que de mauvaises solutions à un problème que personne n’a vraiment le moyen de résoudre. A quoi la prise de sanctions sous forme de cessions d’actifs ( gazoducs, terminaux etc...) ou de contrats de fourniture à d’autres partenaires va-t-elle servir si le seul objectif qui doit être pris en considération n’est pas atteint, qui considte à obtenir une véritable capacité de négociation autrement qu’en devenant le principal acheteur européen de gaz sur le marché international ? A-t-on vraiment compris qu’un groupe comme Gazprom n’a rien à faire du bien-être de l’Europe occidentale en plein hiver si, pour des conditions de géopolitique par exemple, le président de Russia SA , M. Poutine, menace ou décide de couper l’alimentation en énergie ? La vérité est que la libéralisation de ce marché gazier n’entraînera pas de baisse de prix - quel que soit le cas de figure, privatisation ou pas - simplement parce que l’on ne peut rien faire de sérieux quand on ne maîtrise pas de bout en bout la chaîne industrielle du gaz et du pétrole : extraction, production, vente, transport et distribution. La Commission de Bruxelles pourra examiner tant qu’elle le voudra - au regard de la concurrence européenne et des ententes illicites - les conséquences de l’accord signé le 4 août dernier à Moscou entre Sonatrach , Lukoil et Gazprom, je ne vois pas comment elle pourra sanctionner une entente extérieure à l’Union européenne, sachant qu’au surplus un géant comme Gazprom envisage très sérieusement (libéralisation et concurrence obligent) de maîtriser très vite 10% du marché de la distribution du gaz en Europe occidentale... La conclusion s’impose d’elle-même : une fois mis en place des mécanismes de régulation qui se révèleront très vite à bout de souffle,( car ne nous racontons pas d’histoires : les « remèdes » aux effets négatifs de la fusion Suez -GDF sur lesquels la Commission statuera le 25 octobre prochain seront très probablement inopérants), il faudra soit changer d’énergie, soit trouver d’autres fournisseurs fiables, soit plus simplement aller chercher le gaz et le pétrole là où ils se trouvent. Quant au consommateur, il faudra qu’il apprenne aussi très vite à se couvrir contre la volatilité des marchés par des contrats à prix garantis (...) ou par des produits financiers. Spassiba wa Shukran jazilan !

            Renaud Bouchard

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          • (---.---.16.25) 19 septembre 2006 00:35

            Que le régime de retraite de GDF doive être aménagé n’est pas contestable en soit. Il a été conçu en tenant compte de conditions de vie qui ne sont plus les mêmes.

            Dans quelle mesure doit il être aménagé ? Cela devra être défini par les partenaires sociaux, en tenant compte aussi de l’avis des représentants du régime général, n’en déplaise aux représentants du régime GDF. D’ailleurs c’est valable pour tous les régimes spéciaux.

            Il faut aussi admettre que la vie maintenant n’est pas celle de nos ainés pour lesquels les systèmes de retraites avaient été conçu, qu’on ne peut pas croire qu’un système imaginé avec 3 actifs pour 1 retraité fonctionne lorsque le rapport devient 1 pour 1 sans qu’on le réaménage.

            Nos ainés avaient une meilleure retraite, plus tôt ? Surement, mais ils vivaient moins longtemps, n’avaient pas certains de nos avantages... Nous n’avons plus certaines contraintes de vie, nous ne pouvons plus prétendre aux compensations de ces contraintes. Nous avons de nouveaux avantages (ex :durée de vie, meilleure santé, plus de possibilité d’étude qu’en 50), nous devons accepter d’en perdre certains (ex : retraite un peu plus tard).

            Quoi qu’il en soit concernant ce problème, cela n’a rien à voir avec la fusion. D’ailleurs, ce n’est pas un préalable à la fusion.

            La fusion GDF/Suez n’a que deux buts : protéger temporairement Suez d’un rachat par Enel, donc sauver un « actif francais » au titre d’un soit disant patriotisme économique, et empécher la prise de contrôle de 2 centrales nucléaires par un groupe étranger. (Le temporairement vient du risque de voir le résultat de la fusion se faire à son tour acheter)

            Economiquement, où est l’intérêt ? Il n’y a pas d’économie d’échelle, pas de synergies importantes, pour améliorer la rentabilité globale des deux entreprises. Ce n’est pas non plus une diversification (on reste dans l’énergie) pour contrer les cycles. Pas de poids pour négocier avec les fournisseurs : sur ce créneau, vu les faibles synergies, les entités conserveront une taille semblable (la division gaz restera a peu près de la taille de GDF). Le seul point serait la taille globale du groupe... Sous réserve de chute du cours en raison du manque de synergies.......... Moi je ne vois pas, j’attends qu’on m’explique.

            Cela n’apparaît non plus comme une saine gestion des participations de l’Etat : GDF est une machine à cash, alors même que le prix du gaz en France est inférieur au prix européen. Pourquoi l’Etat ne garde-t-il pas cette rente ? En plus cette fusion n’a même pas l’excuse de rapporter de l’argent à la manière des ventes de « bijoux de famille » précédantes.

            A ceux qui opposeront que l’Etat n’a pas vocation à gérer un réseau de gaz... L’Etat a vocation à faire fonctionner correctement la nation, et donc à gérer correctement ses propres ressources (ce qui est loin d’être le cas actuellement, j’en conviens). Dans cette optique, vendre une machine à cash (comme c’était le cas pour les autoroutes) doit se justifier par le besoin immédiat de cet argent (dépenses prévues ou autre investissement en vue), et de justifier aussi pourquoi la rente est moins intéressante (alors qu’elle permet de planifier une dépense récurente).

            Quand à De Gaulle, il a créé EDF et GDF justement parce qu’il estimait que certains biens nécessaires à la nation doivent être contrôlés par l’Etat, pour garantir un service global au public (attention pas un service public). Il n’était pas convaincu qu’une commission de controle d’une entreprise privée soit plus efficace qu’une entreprise publique gérée correctement (en France une entreprise publique gérée convenablement, sans décision purement « électoraliste » .... ). C’est quand même très loin du patriotisme économique consistant à faire croire qu’une entreprise purement privée est française. Elle appartient à ses actionnaires. La nationalité de ceux-ci ...

            C’est donc bien un simple mécano industriel pour rendre Suez non achetable par l’italien (GDF ne l’est pas puisque la loi, proposée par le ministre Sarkozy et votée en son temps pour prouver que l’Etat n’envisageait pas de vendre GDF, n’autorise pas l’Etat à descendre sous les 70% pour l’instant).

            Pour terminer, la discussion à l’assemblée se fait sur un projet de fusion dont le contenu n’est pas public (ce qui serait le cas pour une fusion classique), et sans aucune idée des conditions qui seront imposées par la Commission. Toutes ces choses que l’on connaissait parfaitement (pour peu qu’on suive un minimum l’actualité économique) dans le cas de Natixis (Caisses d’épargne et Natexis Banque Populaire) ou Mittal Arcelor. On en sait même plus sur le projet italien que sur cette fusion GDF/Suez. Mieux, on est même pas sûr que les actionnaires de Suez accepteront cette fusion (AG décisionnaire en fin d’année).

            Ca fait quand même beaucoup d’inconnues pour prendre une décision quand on est député.

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            • (---.---.178.108) 19 septembre 2006 10:54

              Le "droit de vote“, c’est tout ce que vous avez trouvé comme solution ?

              Boudiou, nous ne sommes pas sorties de l’auberge.

              Sans compter, qu’avant d’avoir un droit de vote international...


              • thomasH (---.---.23.208) 21 septembre 2006 19:11

                bonsoir, depuis plusieurs semaines, je lis pas mal de choses sur le sujet et je commence à me faire une opinion sur la fusion Suez-Gaz de France.. C’est délicat tant les avis sont partagés et caricaturaux. On lit tout et son contraire et on voit surtout (de part et d’autres) beaucoup d’idéologie mais pas beaucoup de réflexion de fond. Les politiques essayent chacun de tirer profit de la situation et ils arrivent à brouiller le débat pour faire valoir leur posture (moi, je suis un libéral. Moi, je suis pour la nationalisation, etc...) A mon avis, peu importe qui est pour ou contre, qui était pour avant de devenir contre et vice-versa. Je pense que ce qui compte c’est de répondre à ces 3 questions : Par rapport au statuo-quo, 1/ cette fusion est-elle un progrès pour la France ? (indépendance énergétique, puissance économique...) 2/ cette fusion est-elle un progrès pour le consommateur ? (qualité de service et prix) 3/ cette fusion est-elle un progrès pour les 2 entreprises, leurs employés et leurs actionnaires ? A ces 3 questions, j’ai maintenant tendance à répondre oui. En tout cas, le statu-quo n’est pas tenable et toutes les autres solutions dont j’ai entendu parlé paraissent bien artificielles et encore plus problématiques que celle de Gaz de France et Suez. Thomas


                • FredSud37 (---.---.57.151) 21 septembre 2006 19:20

                  1 - Ni les traités européens ni la concurrence n’imposent leur privatisation.

                  2 - Pour se développer, EDF et GDF n’ont pas besoin d’un statut privé, elles se développent déjà à l’étranger comme des prédateurs.

                  3 - Elles n’ont pas besoin d’être privatisées pour faire à la fois de l’électricité et du gaz, ce qu’elles font déjà ensemble en distribution. C’est leur fusion qui serait une vraie réponse industrielle pour aller plus loin et non la gabegie de leur séparation.

                  4 - Ces privatisations vont coûter très cher aux citoyens-usagers sur leurs factures d’énergie : 640 euros par ménage pour soulager ces firmes privatisées de leurs engagements retraites futurs et des hausses de 10 % au moins, avec la fin d’une tarification de l’énergie fondée sur les coûts du nucléaire et du réseau déjà amortis.

                  5 - La privatisation entraînera la suppression de la péréquation tarifaire, la perte de la garantie de continuité du service et de l’égalité de traitement territorial. En un mot, elle marquera la fin des missions de service public.

                  A l’heure où le Gouvernement est en passe de brader GDF, il devient urgent de diffuser le plus possible le document écrit par le Collectif Jean Marcel Moulin et de signer la pétition disponible ICI.

                  Lire la suite ▼

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