L’eau sera-t-elle le bien commun le plus précieux du XXIème siècle ?
En ce mois de juin 2023, les zones de sècheresse se sont étendues en France de l’Oise au Var et la question de l’eau a rejailli dans le débat public. La fameuse molécule H2O va-t-elle se raréfier sur nos territoires au point de devenir une ressource à laquelle le commun de l’humanité n’aurait plus qu’un accès limité ?
Des conférences internationales à l’émergence du concept d’empreinte eau, faisant écho à celui d’empreinte carbone, l’eau nous rappelle qu’elle est un élément essentiel de la transition écologique. Dans ce contexte le plan Eau du Président Macron fait sans doute la part trop belle à la sobriété, alors que d’autres projets de société sont possibles.
L’eau élément essentiel de la transition climatique
En 2023 selon l’OCDE, seuls 40 % de la population mondiale ont accès à l’eau potable. Ce chiffre interroge, tant l’usage de l’eau s’est banalisé dans nos sociétés occidentales. Or, cette ressource indispensable à la vie n’est plus un sujet exotique lié aux pays en développement, puisqu’en France, comme dans l’Union européenne (UE), elle est devenue un problème majeur du fait du changement climatique. Selon les prévisions du GIEC (Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat), le changement climatique diminuera de 30 à 40 % l'eau douce disponible dans notre pays d’ici 2050. Les Nations unies elles-mêmes se sont saisies du sujet, une conférence sur l’eau à la clef en mars 2023. C’est dire combien le problème devient crucial et combien il exige un traitement international. Le réchauffement climatique multiplie les sécheresses et les pluies diluviennes. Le volume d’eau qui circule au-dessus de nos têtes est en constante augmentation et cela va de pair globalement avec un manque de pluie. Cette eau que les scientifiques qualifient d’eau verte par opposition à l’eau bleue qui représente les rivières, les océans et les lacs ne tombe plus assez souvent, ni sur nos têtes, ni sur nos sols, sinon à coup d’orages ou d’inondations dévastateurs. Elle reste prisonnière des nouvelles rivières atmosphériques dont le cours a été dévié, notamment à cause de la déforestation.
Le cycle hydrologique est profondément bouleversé : les surfaces bétonnées sont trop étendues ou inadaptées pour évacuer les pluies diluviennes, de même que les sols trop secs et les forêts devenues des plantations industrielles, dont les capacités d’absorption du carbone se dégradent de jour en jour. La saison froide devenue plus sèche, les neiges plus rares, la plupart des pays de l’Union européenne (UE) sont en état de stress hydrique, ne-serait-ce qu’en raison de la baisse des cours d’eau et surtout de celle des nappes phréatiques. Le plan Eau du gouvernement propose un imposant train de mesures, qui pourraient certes s’avérer utiles au final, prises une par une et supposant toutes choses égales par ailleurs. Or, on sait bien que ce ne sera pas le cas. Excepté le volet gouvernance (c’est bien la moindre des choses, après les majestueux couacs liés aux réserves ou « bassines »), que l’on peut saluer, tout le reste paraît calqué une fois de plus, sur une étrange méthode.
Pour un projet de société qui soit en rupture avec l'inertie climatique
Cette dernière qui a non seulement fait ses armes ces dernières décennies ; mais, qui semble s’installer ou plutôt s’incruster désormais comme une norme s’appuie sur deux béquilles : d’abord gérer la pénurie, ensuite aborder les questions systémiques ou complexes en mode silo. Pour un grand pays comme la France, qui ne manque guère de talents, qu’ils soient intellectuels ou footballistiques, multiplier les approches de ce type ne manque pas de piquant ! Pour l’efficacité, c’est moins sûr. Le cap fixé à la Nation est ainsi celui des 10 % d'économies d'eau à accomplir d’ici 2030. Voilà qui est dit. Quant aux risques liés à l’eau, la stratégie préconisée est celle de la sobriété, avec force de solutions techniques à l’appui : compteurs intelligents, surveillance, etc. Veolia et Suez ne vont certainement pas rechigner. Après l’Ecowatt pour l’énergie de cet hiver, l’Ecowatt de l'eau est convoqué pour cet été. La sobriété hydrologique succède à la sobriété énergétique pour le bien être de la population. Le plan présidentiel aurait sans doute été mieux inspiré de repenser le système de régie de l’eau, ne serait-ce que celui de la gestion des eaux grises (eaux usées). Les hydro-économes qui limitent à 30 % les économies d’eau ne la rendront certainement pas plus accessible. La réutilisation de l’eau grise pourrait être davantage développée. L’objectif est de récupérer 10 % de ces eaux d’ici 2030. En Israël, ce ne sont pas moins de 90 % des eaux usées qui sont recyclées.
En vérité, le seuil levier qui eût amélioré la situation est bien différent de celui de la sobriété. Repenser un projet de société pour le XXIème siècle en rupture avec l’inertie climatique s’impose. Préserver la vie sur la planète. Réparer les dommages causés par l’homme à la nature. La Commission européenne s’est engagée sur cette voie. Le Pacte vert européen édicte la restauration des dommages infligés à la nature dans l'UE d'ici 2050. La Loi de restauration de la nature obligera les Etats membres à reconstituer les écosystèmes sur 20 % des zones terrestres et maritimes dégradés par la pollution ou l’exploitation intensive d’ici 2030, puis sur 100 % de ces surfaces à l’horizon de 2050. Souhaitons que cette loi soit adoptée, malgré la difficile bataille politique en cours au Parlement européen.
Depuis la COP21, aucun gouvernement français n’a vraiment pris aucune mesure véritablement efficace pour lutter contre le réchauffement climatique. L’eau sera parmi les biens communs les plus précieux à conserver en ce XXIème siècle. Les services urbains en gestion directe de l’eau, tout comme ceux des entreprises, telles que Veolia, La Lyonnaise ou encore Saur auront un rôle à jouer. La puissance publique pourra s’appuyer sur ces fleurons industriels aux compétences internationalement reconnues, en prenant soin de définir les objectifs qui leur seront donnés, ainsi que les coûts de facturation. L’eau est le milieu originel de l’Homme. Sans elle, point de vie sur la terre. A nous de savoir la préserver, si nous voulons maintenir la vie humaine sur la planète bleue pour nous-mêmes, comme pour les générations futures.
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