« L’économie française se porte plutôt bien... »
Telle est l’évaluation que fait notre ministre de l’Economie et des finances de la conjoncture française lors d’une interview dans le Parisien et sur RTL. Un tel diagnostic ne manque pas de candeur et d’optimisme ! Faut-il y voir une surexposition à la méthode Couet déclinée par le président de la République ?
Soyons sérieux, la France, notre pays, est dans quel état ? Quels sont les chiffres ?
Alors que le chômage est à 2, 2 millions au sens BIT (source l’Insee au 30 juin 2007), que le déficit budgétaire de 2007 pourrait battre un nouveau record avec près de 60 milliards d’euros, une dette publique dépassant les 1 200 milliards, un commerce extérieur à - 35 milliards, un trou de l’assurance maladie de 12 milliards, des caisses de retraite à qui il va manquer 4,5 milliards et que notre croissance est à nouveau en panne à 1,9 ou 2 %, bien que l’activité mondiale atteint des sommets, on laisse croire que tout va bien.
La réalité est là, devant nous. Tous les comptes sont au rouge et beaucoup de nouveaux records sont établis. Un seul bon chiffre, celui de l’inflation. Mais celui-ci est obtenu par la BCE sous l’égide de Jean-Claude Trichet, gouverneur monétariste brillant, pourtant montré du doigt par notre président.
Face aux chiffres de notre conjoncture, comment le gouvernement peut-il laisser annoncer que l’économie française se porte plutôt bien ? N’est-ce pas là une atteinte à la compréhension des quelques fondamentaux économiques que les Français ont ?
Comment le gouvernement va-t-il pouvoir prendre les bonnes mesures après avoir fait un tel constat ?
Comment appliquer le bon remède sur un inventaire aussi incompréhensible, qui va lui-même déclencher un diagnostic tout aussi absurde et peut-être voir la mise en place d’un plan d’action invraisemblable ?
Comprenons-nous bien, si la France, avec de tels chiffres se porte bien, qu’en est-il alors de l’Espagne, de l’Irlande, du Royaume-Uni, de l’Allemagne, de la Hollande, des pays scandinaves... qui ont de meilleurs comptes que nous ?
A trop vouloir faire de la confiance un point central de l’approche marketing gouvernementale, on en arrive à ne plus vraiment savoir ce qui est bon et ce qui ne l’est pas. Cela peut être risqué quand on a la mission, pour cinq ans, de piloter un pays.
Un mur est là, droit devant nous et le gouvernement laisse croire qu’il n’y est pas vraiment.
Dans le même esprit, nous pouvons aujourd’hui louer les rédacteurs des statuts de la BCE. Heureusement qu’ils l’ont faite indépendante du politique. Imaginons ce qui se serait passé dans la tournante actuelle des marchés financiers mondiaux si nos politiques avaient dû faire des préconisations pour enrayer le manque de liquidités mondiales en dollars, en euros et en yens ?
Monsieur le président, la France ne va pas aussi bien qu’on le prétend. Et vous le savez, fort heureusement ! L’inventaire fait sur la conjoncture de notre pays est erroné. Donc, son diagnostic l’est aussi. Selon Eurostat, la croissance française ne sera pas encore au rendez-vous en 2007, malgré une activité mondiale exceptionnelle. Avec 1,9 ou 2 % de croissance attendue, la France ne créera pas d’emplois ou si peu. Les rentrées fiscales ne seront pas là non plus. La France exporte bien mais, consomme trop de produits importés - et, la relance du pouvoir d’achat par les heures sup défiscalisées va augmenter les importations. La balance sera une nouvelle fois très mauvaise. Et... les comptes sociaux aussi ?
Nous pouvons être traités d’oiseaux de mauvais augure mais, un bon constat, même désagréable, n’est jamais préjudiciable à l’expression d’un bon diagnostic, pour délivrance de la bonne ordonnance.
Alors, Monsieur le président, avant une catastrophe annoncée, il convient de revenir à plus de pragmatisme et peut-être de changer quelque chose dans la manière de lire et de comprendre les chiffres de la comptabilité nationale.
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