La stratégie américaine pour les nuls
Si vous êtes un peu déboussolés - disons perplexes - quand vous voyez les Américains soutenir en Syrie des Jihadistes sunnites contre Bachar el-Assad, puis des milices chiites à Bagdad contre les mêmes Jihadistes devenus l'armée de l'État Islamique en Irak et au Levant (EIIL), ne renoncez pas à comprendre. La situation, en réalité, est simple, limpide et la stratégie évidente. C'est votre cerveau de complotiste d'un autre âge qui vous joue des tours et vous amène à imaginer de la complexité partout. Stop ! Il n'y a plus de complexité. TOUT EST SIMPLE.
Il n'y a plus de complexité. Enfin, beaucoup moins.... Pourquoi ? Parce que la complexité a été un simple intermède ; une réponse improvisée au dérapage médiatique qu'a été la gestion inepte par le Système des séquelles du 911. Ce dérapage était grave, car il venait compromettre le "viol des foule" - le b - a - ba de la gouvernance démocratique - et on s'est un peu énervé....
Grave, car c'était le deuxième. Le premier dérapage avait été la couverture en direct de la Guerre du Vietnam à la TV qui en montrait les horreurs. (Voyez la série américaine 'Sixties") Une grosse bavure, qui allait faire perdre au Système la guerre de l'opinion publique aux USA... puis aux USA la guerre elle-même. On avait réparé cette bavure lors des guerre suivantes, en n'en montrant plus que des images correctement édulcorées, mais on en avait gardé le souvenir qu'une bavure était possible. Alors, quand est arrivé le dérapage du 911, on s'est énervé...
On ne s'était pas méfié. On avait prévu que Quidam Lambda ne verrait le spectacle qu'une seule fois et y croirait comme à un Évangile, les illusionnistes du Système avaient donc bâclé un scénario des attentats cousu de fil blanc. Ils n'avaient pas anticipé que, précisément à ce moment, l'accès à l'Internet et son usage allaient se multiplier par 5 aux USA, permettant à des milliers de gens de se partager leurs compétences pointues et de reconstituer, au profit de TOUT LE MONDE ce qui a été appelé l'"effroyable imposture" du 911.
Patatras ! Une grosse bavure cette couverture du 911, car ce qui aurait dû susciter un vague patriotique et faire rêver les jeunes Américains d'aller occire tout ce qui porte burnous ou turban s'est au contraire soldé par un froncement de sourcil sceptique. De sondages, en sondages, les Américains disaient de plus en plus qu'ils n'y croyaient pas.
Le Système a réagi en jouant la carte de la complexité. On a cherché à CONVAINCRE Quidam Lambda en mettant du mystère. En remettant l'individu à la place, qu'on voulait la sienne, de celui qui ne comprend pas et ne peut pas comprendre. Le 911 - puis tous les gestes odieux des USA, qui ont suivi, de la "libération" du Kosovo au massacre des civils en Libye pour en voler les fonds souverains et les ressources - ont dès lors été subtilement "expliqués" pour que l'Amérique ait eu raison. De façon tellement tarabiscotée, qu'on pourrait prétendre que si lambda n'y croyait pas, c'est qu'il n'y comprenait rien.
Où était la Vérité ? Qui pourrait démontrer par quel nouveau subterfuge Oncle Sam allait parvenir à introduire sa main crochue dans la culotte des enfants ? Il en est résulté une myriade de complots, de pseudo complots et de crypto complots, rendant impossible la preuve formelle de l'abjection des gestes posés.... avec en prime la possibilité de discréditer comme "complotiste" quiconque s'en offusquerait...
Tout est devenu hypothèse. Quidam Lambda, et vous, et moi nous nous sommes adaptés à une réalité où chaque train en cachait plusieurs. Rien n'était jamais ce qu'il paraissait être... Nous nous y sommes faits, mais avons-nous été convaincus ?
NON. hélas pour le Système, cette stratégie de l'obfuscation sans limites a échoué. Elle venait trop tard, le mal était fait : le fardeau de la preuve avait basculé. C'est le Système qui s'était discrédité. Cela signifiait qu'en l'absence de preuves, de part et d'autre, Quidam Lambda ne donnerait plus le bénéfice du doute à la Sainte-Trinité "Etat-Banque-Presse" , mais présumerait que celle-ci lui mentait. Ce qui change tout...
Le changement, très rapide, est apparu clairement quand, d'un an au suivant, les internautes qui avaient soutenu massivement une intervention contre la Libye sans preuve crédible de la malfaisance de Kadhafi (que les faits avérés montraient plutôt sympa ! ) - ont soudain majoritairement pris position CONTRE une intervention en Syrie, alors que le dossier de Bachar el-Assad était pourtant bien plus discutable.... Quelque chose avait traversé un seuil et basculé.
Le citoyen semblait avoir développé un préjugé NEGATIF contre la "bienpensance" pro-Système. Bien sûr, les internautes ne sont pas un échantillon représentatif de l'ensemble de la population, mais nier toute valeur indicative a cet échantillon est pur déni. Il n'est même pas exclus de penser que l'opinion des internautes soit annonciatrice de celle de la population en général qu'elle précede.
En quoi cette perte de foi du citoyen en sa gouvernance, ses pompes et ses oeuvres explique-t-elle les curieuses volte-face de la politique américaine au Moyen Orient ? Elle explique tour, car on voit que, confronté a cette perception négative, le Système a jeté l'éponge. Il a renoncé à expliquer à Quidam Lambda. Toute cette période post-911, pendant laquelle on cherchait à le convaincre est terminée. L'opinion publique a été passée aux profits & pertes. La gouvernance a accepté que, comme le disait Orwell, le peuple qu'elle gouverne est son ennemi.
Fi de la subtilité donc, et ceux qui en cherchent encore se roulent dans la farine. La situation actuelle ? Elle est transparente. OUI, on torture a Guantanamo ET ON LE DIT ! OUI, on soutient une dictature en Egypte contre les Islamistes qui ont démocratiquement formé le gouvernement... OUI, on dit candidement que les armes de discussion massive de Saddam était une invention. OUI, on admet désormais qu'on a souvent cherché à assassiner Castro, comme on a assassiné Diem, Kadhafi, Sankara, Lumumba et tant d'autres OUI, c'est un faux incident (false flag) ans le Golfe du Tonkin qu'on a inventé pour mener à son paroxysme cette guerre du Vietnam, qui est le meilleur exemple contemporain du Mal-qui-a-la force martyrisant le Bien qui est faible.
Aujourd'hui, la stratégie revient à la vérité, car on ne voit plus possible ni nécessaire de mentir. Quelle est cette vérité ? La vérité, c'est que l''Amérique, après la chute de l'Empire soviétique, s'est retrouvée sans l'ennemi dont elle a toujours besoin pour que fonctionne son économie et que sa population demeure sur le qui-vive . Elle s'en est donc choisi un sur mesure : l'Islam. Un adversaire de la bonne taille, pas mortellement dangereux, mais assez gros pour que le défi soit intéressant et qu'on puisse le montrer haïssable à souhait.
On peut envahr l' "Islamie" de tous les côtés. On y va et on quitte, on y vend des armes, on détruit et on reconstruit. En le faisant, on se dispute un peu de capital politique à Washington entre Reps et Dems. ... Suivez tout le périple des USA au Moyen-Orient et au Maghreb depuis 20 ans... Ça se suit à la trace comme une coulée de sang.
Le fin du fin, comme toujours, c'est la zizanie programmée, dont le cas-école a été le Liban de 1974... Il n'y a qu'une seule explication a la politique américaine : c'est la volonté de créer le chaos. Faire en sorte que tous les peuples se fragmentent en factions et s'entretuent les uns les autres pour le plus grand profit de l'Amérique. Il faut le voir.
On aura bientot Chiites contres Sunnites, l'Iran contre un Etat Islamique qui est à se bâtir rapidement et qu'on engraisse aux stéroïdes. Encore un peu de travail, et on en arrivera bien à impliquer l'Arabie saoudite et à la "démocratiser"... On vendra aux enchères les émirats petroliers en périphérie...
On est presque arrivé à la totale zizamie. On aura créé l'enfer pour une ou deux générations. TOUT EST SIMPLE. Et aucune autre explication ne tient.
Tout est redevenu simple. Il faut seulement comprendre et accepter que la phase de duplicité astucieuse qui nous forçait a réfléchir en profondeur à la politique internationale depuis quelques années est terminée. Il faut nous reconvertir à la simplicité et ne plus chercher midi a quatorze heure : le mal se promène nu et sans masque. Il faut le voir.
Les volte-face sans vergogne des USA, c'est le signe que c'est désormais la "stratégie américaine pour les nuls" qui est en vigueur. Les nuls, c'est vous et c'est moi. Ceux qui mènent le monde ont jugé que nous en étions tous.
Pierre JC Allard
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