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Accueil du site > Tribune Libre > Le meilleur des mondes

Le meilleur des mondes

"O wonder !

How many goodly creatures are there here !

How beauteous mankind is ! O brave new world,

That has such people int't ! (Tempest, V, 1)

"Les utopies apparaissent comme bien plus réalisables qu'on ne croyait autrefois. Et nous nous trouvons actuellement devant une question bien autrement angoissante : comment éviter leur réalisation définitive ?... Les utopies sont réalisables. La vie marche vers les utopies. Et peut-être un siècle nouveau commence-t-il, un siècle où les intellectuels et la classe cultivée rêveront aux moyens d'éviter les utopies et de retourner à une société non utopique moins "parfaite" et plus libre. " (Nicolas Berdiaeff)

Sous notre houlette, par contre, les hommes seront heureux et renonceront à se révolter. Ils ne s’extermineront plus comme ils le font aujourd’hui partout à la faveur de la liberté que tu leur as léguée. Nous saurons les convaincre d’ailleurs qu’ils ne seront libres qu’à partir du moment où ils auront renoncé à faire usage de leur liberté et nous l’auront sacrifiée dans un esprit de soumission sans retour. […] Nous donnerons un bonheur humble et paisible à ces êtres faibles et lâches, le seul qui leur convienne. […] Nous leur permettrons même de pécher puisqu’ils sont si faibles et ils nous aimeront comme des enfants à cause de notre tolérance. […] '' (Dostoïevski, "Les Frères Karamazov", La légende du Grand Inquisiteur)

"Que sert à l'Homme de gagner l'univers s'il vient à perdre son âme ?" (Matthieu, 16, 26)

Petit-fils du naturaliste Thomas HUXLEY et frère du biologiste Julian HUXLEY, Aldous HUXLEY naquit en Angleterre, à Goldaming, dans le Surrey et fit de brillantes études à Eton et à Oxford. A l’âge de 16 ans, il devint pratiquement aveugle. Cette cécité, partiellement guérie plus tard marqua sa vie entière. HUXLEY collabora à plusieurs revues et publia des poèmes de jeunesse avant de faire paraître ses premiers romans Jaune de Chrome (1921), Cercle vicieux (1923) et Contrepoint (1928) qui reflètent son scepticisme, sa désillusion et son pessimisme.  Critiquant le positivisme scientifique et la mainmise du modèle américain sur la culture occidentale HUXLEY n’a cessé de dénoncer les dangers d’une civilisation entièrement soumise à la technique. Après plusieurs voyages en Inde et au Népal, HUXLEY publie de nombreux essais. Les Portes de la Perception (The Doors of Perception, 1954) dont le titre est emprunté au poète William BLAKE raconte son expérience avec la mescaline. Etabli en Californie à partir de 1937, il se tourna, à la fin de sa vie, vers la contre-culture américaine. Aldous HUXLEY est décédé en Californie en 1963.

Ecrit en 1932, "Le Meilleur des mondes" ("Brave new world") évoque une société entièrement rationalisée où une poignée d'individus "supérieurs" dirigent de façon totalitaire une masse d'individus privés de leur liberté psychique.

Ce livre, mondialement célèbre, chef-d'oeuvre de la littérature d'anticipation, a fait d'Aldous Huxley l'un des témoins les plus lucides de notre temps.

"Aujourd'hui, devait écrire l'auteur dans les années 50, près de vingt ans après la parution du "Meilleur des mondes", il semble pratiquement possible que cette horreur s'abatte sur nous dans le délai d'un siècle. Du moins si nous nous abstenons d'ici là de nous faire sauter en miettes... Nous n'avons le choix qu'entre deux solutions : ou bien un certain nombre de totalitarismes nationaux, militarisés, ayant comme racine la terreur de la bombe atomique, et comme conséquence la destruction de la civilisation (ou, si la guerre est limitée, la perpétuation du militarisme) ; ou bien, un seul totalitarisme supranational, suscité par le chaos social résultant du progrès technologique."

Dans un lointain futur, après une guerre mondiale batériologique et atomique qui a ravagé la planète, les survivants ont accepté de remettre le pouvoir entre les mains d'un "sauveur", Ford ; ce dernier a réorganisé la société sur les bases d'un Etat mondial.

Tout ce qui caractérisait l'ancienne société a été aboli : la recherche scientifique (trop dangereuse), l'art (remplacé par le "cinéma sentant" et "l'orgue à parfums"), la religion (remplacé par le "culte de Notre-Ford"), la connaissance de l'Histoire, la littérature, la poésie, mais aussi la famille, le mariage, la procréation par des moyens naturels, la viviparité et la passion amoureuse. "Détail" essentiel, qui pourrait passer inaperçu, les habitants du meilleur des mondes ne parlent plus qu'une seule langue (un anglais simplifié).

Les enfants naissent dans des "Centres d'Incubation et de Conditionnement" et sont prédestinés, grâce à des manipulations qui ont lieu au cours de la gestation à jouer des rôles sociaux bien définis ; la société est divisé en cinq castes, chaque groupe comportant une variable positive ou négative : 

  •  Les castes supérieures :
  •  Les Alpha en constituent l'élite dirigeante. Ils sont programmés pour être grands, beaux et intelligents.
  • Les Bêta forment une caste de travailleurs intelligents, conçus pour occuper des fonctions assez importantes.
  • Les castes inférieures :
  • Les Delta et les Epsilon forment enfin les castes les plus basses ; ils sont faits pour occuper les fonctions manuelles assez simples. Ils sont programmés pour être petits, laids (les Epsilon sont presque simiesques).
  • Les Gamma constituent la classe moyenne voire populaire.

Chacune de ces castes est divisée en deux sous-castes : Plus et Moins. Chacun, en raison de son conditionnement, estime être dans une position idéale dans la société, de sorte que nul n'envie une caste autre que la sienne.

Cette organisation permet de résoudre les problèmes liés au marché du travail en produisant un quotas précis de personnes pour chaque fonction. Ces quotas sont déterminés par le service de prédestination.

Les enfants sont conditionnés par "hypnopédie", dès leur plus jeune âge, à accepter leur condition tandis qu'une drogue miraculeuse, le soma, assure un état d'euphorie immédiat et quasi permanent, dissipant les sentiments "négatifs" comme l'angoisse de la mort et le sentiment de solitude ; une autre drogue, le SPV, dispense les effets d'une passion violente, sans ses inconvénients, la liberté sexuelle est encouragée dès le plus jeune âge, à condition de ne pas s'attacher et de ne pas procréer.

Seule une poignée d'individus survit à l'état primitif dans une réserve conservée pour des raisons expérimentales.

Certains cependant, comme Bernard Marx et Helmholtz Watson (un Alpha et un Alpha plus) ne se sentent pas à l'aise dans ce "monde parfait"...

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 Ridley-scott.jpg

Affiche pour le film de Ridley Scott "A Brave New World", adapté du roman d'Aldous Huxley

Eléments de réponse :

La clé du "Meilleur des mondes" se trouve au chapitre 16, la discussion entre John ("Le sauvage") et Mustapha Menier, l'administrateur mondial pour l'Europe occidentale.

John représente l'humanité traditionnelle : il a été élevé dans une réserve, à l'écart du "meilleur des mondes", il a un père et une mère, il est né "naturellement", il ne prend pas de soma, il lit des livres (Shakespeare), il éprouve des sentiments (amour, haine, colère, dégoût, compassion...).

Huxley se situe dans la lignée des humanistes de la Renaissance : Erasme ("L'Eloge de la folie"), Montaigne, ("Des cannibales"), Thomas Moore ("Utopia") , et des philosophes du siècle des Lumières.

Le procédé consistant à critiquer la société occidentale à travers le regard distancié d'un personnage étranger à cette civilisation a été utilisé par Montesquieu dans "Les Lettres persanes", Swift dans "Les voyages de Gulliver", Diderot dans "Le supplément au voyage de Bougainville" et dans le conte philosophique de Voltaire, L'Ingénu,  avec le personnage du "Huron".

John est d'ailleurs exhibé, tout comme le Huron dans "L'Ingénu" de Voltaire, comme un phénomène de foire dans la société des Alphas du "meilleur des mondes" ; Bernard Marx s'en sert pour se faire valoir et pour se venger du directeur du Centre d'Incubation et de Conditionnement de Londres-Central , Mr Foster, qui est en fait le père biologique de John, ce qui va provoquer un énorme scandale entraînant la démission de Foster lorsque ce fait sera révélé.

Il y a ce passage étonnant dans le roman de Huxley où "le sauvage" parvient à mettre des mots sur des sentiments et des émotions "à l'état brut" grâce à un livre, les oeuvres complètes de William Shakespeare, interdit dans le "meilleur des mondes" et qu'il a trouvé dans la réserve : "Semblables aux tambours, semblables aux hommes chantant l'incantation du blé, semblables à des formules magiques, les mots se répétaient et se répétaient dans sa tête. Après la sensation de froid, il eut soudain très chaud. Il avait les joues en feu sous l'afflux du sang, la chambre tournoyait et s'assombrissait devant ses yeux. Il grinça des dents : "Je le tuerai (l'amant de sa mère, Linda), je le tuerai, je le tuerai", disait-il sans fin. Et brusquement, il y eut d'autres mots encore :

"When he is drunk asleep, or in his rage

Or in the incestuous pleasure of his bed..." (Hamlet, II, 3)

"Quand il dormira, ivre mort, ou dans sa rage,

Ou dans le plaisir incestueux de son lit."

Huxley n'oppose donc pas (naïvement) la nature innocente à la culture artificielle du "meilleur des mondes", mais les sentiments d'un jeune homme élevé en dehors du "meilleur des mondes" dans un monde qui est loin d'être "parfait", nourri par les mots et la pensée d'un génie qui n'aurait probablement pas voulu d'un "monde parfait".

Huxley ne préconise pas un impossible retour à la nature, mais une réflexion sur les dangers de l'utopie ; raison pour laquelle il fait précéder la citation de Shakespeare tirée de La Tempête, en épigraphe de son roman :

How many goodly creatures are there here !

How beauteous mankind is ! O brave New World

That has such people in't !

... de cette autre de Nicolas Berdiaeff : "Et peut-être un siècle nouveau commence-t-il, un siècle où les intellectuels et la classe cultivée rêveront aux moyens d'éviter les utopies et de retourner à une société non utopique, moins "parfaite" et plus libre.

Il faut lire attentivement le chapitre 16 pour comprendre pourquoi les dirigeants du "meilleur des mondes" estiment, en conscience, agir dans l'intérêt général et quelle est la raison d'être de cette "société parfaite", y compris dans ses aspects les plus insoutenables (la prédestination sociale des embryons).

Le passage n'est pas sans faire penser aux paroles que le Grand Inquisiteur", dans les "Fères Karamazov "de Dostoïevski, adresse au Christ : "Sous notre houlette, par contre, les hommes seront heureux et renonceront à se révolter. Ils ne s’extermineront plus comme ils le font aujourd’hui partout à la faveur de la liberté que tu leur a léguée. Nous saurons les convaincre d’ailleurs qu’ils ne seront libres qu’à partir du moment où ils auront renoncé à faire usage de leur liberté et nous l’auront sacrifiée dans un esprit de soumission sans retour. […] Nous donnerons un bonheur humble et paisible à ces êtres faibles et lâches, le seul qui leur convienne. […] Nous leur permettrons même de pécher puisqu’ils sont si faibles et ils nous aimeront comme des enfants à cause de notre tolérance. […] ''

Le roman de Huxley est généralement compris comme l'évocation d'un monde dans lequel nous ne sommes pas tout à fait encore et une mise en garde contre la tentation de l'utopie (le rêve d'un monde parfait), ce qui est en partie exact, ou bien comme une métaphore du monde dans lequel nous vivons (par exemple de la société de consommation), ce qui est exact également, mais là encore, seulement en partie.

Nous avons tendance à séparer les deux lectures, alors qu'elles sont inséparables l'une de l'autre, comme sont inséparables l'utopie d'un monde parfait, dans le dirigisme communiste par exemple, ou, à l'inverse la croyance aveugle en l'autorégulation du marché et la réalité d'un monde imparfait, imperméable au "progrès".

Il y aurait d'un côté le mal et de l'autre côté le remède contre le mal, mais Huxley montre d'une part que le monde "réel" dans lequel nous vivons est en grande partie utopique et purement "virtuel" (on le voit bien aujourd'hui, par exemple, avec la dématérialisation informatisée de la monnaie et l'autonomie de la sphère financière par rapport à "l'économie réelle") et d'autre part que le rêve d'une utopie totalitaire est une réaction désespérée de stabilisation de "l'entropie négative" engendrée par la civilisation (aujourd'hui, la mondialisation de l'économie et la disparition des Etats-Nations) le remède étant quantitativement pire que le mal, bien que d'une certaine manière qualitativement de même nature.

"Communauté, Identité, Stabilité" : c'est la "stabilité" de la société qui est la valeur suprême du "meilleur des mondes". La communauté est tout, l'individu n'est rien. Les habitants du "meilleur des mondes" ne se perçoivent pas comme des individus (sauf de rares exceptions comme Bernard Marx qui en souffre), mais comme des membres d'une communauté dans laquelle ils sont conditionnés, dès leur plus jeune âge, à se fondre.

C'est à la suite d'un énième conflit mondial, le dernier ayant failli détruire la planète et en éradiquer l'Humanité que les survivants ont librement décidé d'abdiquer une liberté, dont ils avaient fait un usage aussi désastreux, entre les mains "d'administrateurs avisés".

A l'instar de ses contemporains les plus lucides, notamment Claude Levi-Strauss, Huxley est conscient du fait que dans les "sociétés chaudes" comme celle dans laquelle nous vivons, le "progrès" engendre des bienfaits (confort, disparition de la famine, allongement de la durée de vie...), mais aussi des effets néfastes sous forme "d'entropie négative" : instabilité sociale, rivalités mimétiques, escalade de la violence, dégradation de l'environnement...

Dans les sociétés primitives, les risques d'entropie sont régulés à travers les interdits et les rituels religieux qui ont disparu des sociétés modernes.

Les pressentiments de Huxley ont été largement confirmés, une dizaine d'années plus tard, avec la Deuxième Guerre mondiale et la matérialisation des équations de la relativité générale dans la bombe d' Hiroshima.

Le developpement exponentiel de la science et de la technique et l'idée plus répandue qu'on ne pourrait le croire, y compris chez de scientiques et des épistémologues de valeur comme François Dagognet, que tout ce qui est techniquement et scientifiquement réalisable est juridiquement et éthiquement légitime, ainsi que la constitution et le développement des complexes militaro-industriels font peser une hypothèque de plus en plus lourde sur l'avenir de la planète.

Les récents progrès de la génétique ont permis de vérifier la validité des lois de l'hérédité (Mendel) et de la théorie de l'évolution (Darwin), mais aussi de manipuler la "matière vivante". Huxley prévoyait la possibilité technique de la "fécondation in vitro" imaginée et mise au point dans les années 1970 et opérationnelle dans les années 1980 ; la fabrication des "jumeaux Bokanovsky" dans le roman de Huxley préfigure la technique du clonage.

En mai 2005, des chercheurs de Corée du Sud et du Royaume-Uni ont annoncé les premiers clonages d’embryons humains à des fins de recherches thérapeutiques.

En 2008, des chercheurs américains, des entreprises Stemagen et Reproductive Science Center, ont annoncé avoir obtenu trois embryons clonés à partir de cellules adultes (cellules de peau) et d'ovocytes énucléés. C'est la première fois que des embryons sont obtenus à partir de cellules qui ne sont pas des cellules souches. 

La pilule contraceptive a été mise au point dans les années 70. Découverte au début des années 1950 au Mexique, commercialisée aux Etats-Unis à partir de 1960, et autorisée en France à partir de 1967 (loi Neuwirth), son action consiste à interférer avec le cycle menstruel naturel de la femme. Les hormones synthétiques apportées par la prise de la pilule empêchent l'ovulation. Cette invention a permis de découpler la sexualité de la conception. Elle est obligatoire dans les meilleur des mondes (sauf pour les femmes "neutres" pour lesquelles elle est inutile).

Ce n'est pas un hasard si les personnages du roman d'anticipation de Huxley portent des noms de savants, d'industriels ou de théoriciens du XIXème et du XXème siècle (Ford, Lenina, Marx, Watson, Helmholtz). Toutefois, la recherche scientifique est étroitement surveillée dans le meilleur des mondes et les administrateurs mondiaux n'en retiennent que ce qui peut contribuer à maintenir la stabilité de la "société parfaite".

Huxley, cependant, n'est pas un "obscurantiste" ennemi de la science, mais un humaniste, à la manière de Rabelais qui affirmait déjà, à la fin du Moyen-Âge, que "Science sans conscience n'est que ruine de l'âme".

Le Meilleur des mondes n'est pas seulement un roman de science-fiction, mais aussi une métaphore de la société de consommation : les habitants du "meilleur des mondes" sont incités à vivre dans une euphorie permanente et à pratiquer des loisirs collectifs et coûteux, les loisirs individuels et "gratuits" sont découragés. 

Les "jeux électroniques" et certains spectacles cinématographiques ou télévisuels des années 2010, n'ont rien à envier au "cinéma sentant" et aux loisirs mécanisés du "meilleur des mondes" ; les techniques de conditionnement (publicité, propagande), se sont considérablement développés sur la base d'un "behaviourisme" sommaire, issu des travaux de Pavlov, de Watson et de Skinner ; des bureaux de "marketing" "vendent" désormais les hommes politiques, leur image et leurs programmes comme des paquets de lessive.

L'un des aspects les plus préoccupants du monde actuel étant sans doute la baisse considérable du niveau des enfants (20% d'élèves entrent en 6ème en France sans savoir lire et écrire correctement et 50% d'entre eux ont de graves difficultés), tout se passant comme si l'on l'on cherchait à abaisser le niveau intellectuel et culturel de la population et à fabriquer une majorité de consommateurs "Deltas moins" dotés d'un langage rudimentaire et dénués de pensée critique.

Nous connaissons aussi l'importance de la drogue dans nos sociétés "développées" : que ce soit les drogues "interdites", mais facilement trouvables sur le marché pour peu que l'on y mette le prix : cocaïne, héroïne, ou ectasy ou bien ces drogues autorisées que sont les antidépresseurs et les anxiolityques dont un pays comme la France est le premier consommateur au monde. La fuite du "principe de réalité", diagnostiquée par Huxley comme une caractéristique majeure du monde moderne n'a fait que se confirmer.

La "liberté sexuelle", si elle desserré le carcan des interdits, ce qui n'a peut-être pas été un mal a aussi considérablement affadi et banalisé il faut bien le dire, les relations amoureuses.

Huxley a très bien vu également la dégradation du statut des vieillards dans le monde moderne, rebaptisés "personnes du troisième âge", relégués dans des "maisons de retraite" et coupés du reste de la population. Dans "le meilleur des mondes", les signes de sénescence sont considérés comme obscènes et sont gommés par des procédés artificiels.

Nous savons que l'Humanité a désormais les moyens aussi bien de s'autodétruire que de réaliser l'utopie littéraire imaginée par Aldous Huxley et nous savons aussi que cette utopie est le pire des cauchemars.

Comme l'a dit Friedrich Hölderlin : "En même temps que croît le danger, croît aussi ce qui sauve." Mais il faut compter avec la somme des libertés humaines et nous ne pouvons pas avoir la certitude que l'Humanité renoncera à la violence ou à l'utopie d'un "bonheur insoutenable", mais seulement l'espérance.

"Le rêve des constucteurs de la Tour de Babel : l'unification de l'humanité dans une "pensée unique", le disparition des différences se réalise puis s'écroule. Hier le communisme et le nazisme, aujourd'hui la "mondialisation" et le nivellement par le "marché".

Il y a des idéologies qui sont pour l'humanité l'équivalent d'un déluge, noyant l'être parlant dans la parole indifférenciée. Quelque arche pourtant, toujours, s'est construite et une force a été dispersée, tôt ou tard, la fourmilière avant que ne meure la parole et avec elle, les hommes en tant qu'ils sont humains." (Marie Balmary, "Le sacrifice interdit, Freud et la Bible")

"Illusion, désillusion, espérance, telles sont les trois étapes que franchit la conscience humaine dans sa recherche du bonheur. Par essence, la conscience vit dans l'illusion ; mais elle régresse en voulant vivre dans l'attente de l'événement historique et toute idéologie qui prétend transformer la vie, apporter le bonheur, n'est en fait qu'une illusion. L'expérience de la désillusion qui n'a jamais été analysée philosophiquement (bien qu'elle ait été décrite par des écrivains comme Cervantès, Stendhal, Flaubert, Proust ou Dostoïevski), est donc décisive. Elle n'aboutit pas simplement à la déception et au désespoir : la conscience désabusée refuse le nihilisme comme le dogmatisme. La désillusion est une expérience lucide, dont Yves Bonnefoy donne une expression poétique, car la conscience se doit d'assumer les tendances autodestructrices de l'être pour éviter son suicide.

C'est après avoir vécu l'illusion historique et son corrolaire, la désillusion, que la conscience peut passer à cette troisième étape dialectique qu'est l'expérience céleste. Alors seulement peuvent s'ouvrir les portes de l'avenir. Alors, grâce à l'art et à la religion du coeur, l'espérance humaine peut aborder aux rives de l'Absolu." (J.-L Vieillard-Baron, "L'illusion historique et l'espérance céleste", L'Ile verte, Berg international, 1981)

Aldous Huxley


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21 réactions à cet article    


  • Jo.Di Jo.Di 27 avril 2016 10:38

     
    A mon avis, il suffit de lire Jouvence et  Île pour comprendre que le Meilleur des Mondes est du 3e degré .... du transhumanisme (continuité de l’eugénisme de son frère mais radicalisé, « transhumanisme » est d’ailleurs un terme inventé par son frère justement)
     
    Dans île les « adeptes de l’adrénaline » (guerriers, militaires, « anciens ») sont envoyés faire de l’alpinisme pour se défouler et que les bobos libidineux puissent vire leur shiteuse vie pénards ... Dans Jouvence, le Seigneur Capitaliste cherche l’Immortalité. D’une manière général, critique de l’Etat, du « militaire », apologie de la drogue, de la vie « dionysiaque », et apologie de l’Être vrai à « retrouver » (mysticisme, hindouisme etc ...), présocratique donc, une « philosophie éternelle » (un de ses bouquin) à la Leibniz.
     
    Et le Meilleur des Mondes est donc celui de Nietzsche ... avec notamment la « Fin de l’Histoire » dans la guerre de 9 ans (c.a.d fin du nihilisme nietzschéen, la morale des faibles) pour avènement de l’Etat Mondial, (mondialisme), c’est Fukuyama.
     
    C’est un bouquin sur le tranhumanisme, une « mystique » nietzschéen du futur, avec ses « esclaves » et ses « aristocrates »Le surhomme est « védique » c.a.d détaché des « fausses consciences » marxistes. Le soma c’est le LSD de bobo shiteux plongé dans la société de consommation ultime, les derniers hommes.
     
    Ce n’est pas une critique, c’est une apologie indirecte, qui, vu le coté sulfureux de l’eugénisme à son époque, après le nazisme (mais il y avait un eugénisme de gôôôche aussi) était contournement indispensable.
     

     

     

     

     


    • Jo.Di Jo.Di 27 avril 2016 11:05

      Julian Huxley
       
      C’est comme si l’homme venait d’être subitement nommé directeur général de la plus grande entreprise de toutes, celle de l’évolution – nommé sans lui demander son avis et sans délai de réflexion et de préparation. Qui plus est, il ne peut pas refuser cette tâche. Qu’il le veuille ou non, qu’il sache ou non ce qu’il fait, c’est en fait lui qui détermine l’orientation future de l’évolution sur cette terre. C’est son destin inéluctable, et plus tôt il s’en rendra compte et commencera à y croire, mieux ce sera pour tout le monde.
       
      Tel frère, tel frère .... le meilleur des mondes du bobo arrive à grand pas .... chiures somatiques du bac à sable consumériste, epsilons gôôôchistes des alpha Seigneurs Capitalistes Immortels brahmanes .... plus d’état, plus de communauté, plus d’Histoire, plus de guerre, Nomos fixe des pousseurs de caddie à tabous programmés intériorisés.


    • Jo.Di Jo.Di 27 avril 2016 11:55

      Pour qui douterait de l’apologétique indirecte de Huxley bobo shiteux .... (shit le soma du 68ard bientôt légalisé par les Flans) ses « femmes pneumatiques » qui doivent se donner à tous, la fidélité est archaïque, la maternité aussi, la tradition, les mœurs etc ... Passage « jouir sans contrainte » 68ard de Kohn le tripoté : du pur libéralisme gôôchiste. Ce n’est pas une critique ....
       
       
      « Un homme civilisé n’a nul besoin de supporter quoi que ce soit de sérieusement désagréable. Et quant à faire les choses – Ford le garde d’avoir jamais cette idée en tête ! Tout l’ordre social serait bouleversé si les hommes se mettaient à faire les choses de leur propre initiative.
       Et le renoncement, alors ? Si vous aviez un Dieu, vous auriez un motif de renoncement.
       Mais la civilisation industrielle n’est possible que lorsqu’il n’y a pas de renoncement. La jouissance jusqu’aux limites extrêmes que lui imposent l’hygiène et les lois économiques. Sans quoi les rouages cessent de tourner.
       Vous auriez un motif de chasteté ! dit le Sauvage, rougissant légèrement tandis qu’il prononçait ces paroles.
       Mais qui dit chasteté, dit passion ; qui dit chasteté, dit neurasthénie. Et la passion et la neurasthénie, c’est l’instabilité. Et l’instabilité, c’est la fin de la civilisation. On ne peut avoir une civilisation durable sans une bonne quantité de vices aimables. »
       
      Pour illustrer Clouscard et son « Capitalisme de la séduction » 
       
       


    • hunter hunter 27 avril 2016 18:09

      @Jo.Di

      Hoh hoh, en pleine forme Villistia, en pleine forme je vois !

      Merci à l’auteur, très bon article sur cet excellent bouquin, mais il y a une piste (difficile à confirmer je pense), qu’on pourrait évoquer : quand on sait les hautes fonctions assumées par Julian dans la machine capitalisto-mondialiste devant aboutir à l’organisation N.O.M, Aldous n’aurait-il pas souhaité avertir les populos de ce qui se préparait ?

      Car grosso modo, l’univers que souhaitent mettre en place les psycho-sociopathes du pouvoir et de la thune, c’est un mix entre 1984 et Brave New world !

      Quand Villi alias Jo.Di dit : «  Ce n’est pas une critique, c’est une apologie indirecte »
      ce n’est pas faux du tout !
      Et si BNW était un avertissement contre un programme que certains veulent mettre en place depuis longtemps, et qui n’est pas loin d’aboutir.... ??

      Aldous était-il raccord avec les idées de la clique à Julian ?
      Faisait-il semblant en face, mais n’en pensait-il pas moins par derrière ? .....d’où l’écriture du bouquin, comme un gros « hey world, watch out, watch out !..... »
      Mais comme le dit Villi, les bobos shiteux et la clique des larbins accros à la ccacarte et au caddie....ben, ils s’en foutent ou bien n’ont rien compris !

       « That is the question », comme disait un autre british célèbre, que je ne vous ferai pas l’affront de nommer !

       smiley

      Adishatz

      H /


    • Jo.Di Jo.Di 27 avril 2016 23:39

      @hunter
       
      Georgia Guidestones
       
      Le libéralisme est une secte eschatologique ... annoncer l’avenir au 3e degré est dans la grande tradition ....
      De tte façon, le transhumanisme est depuis Nietzsche le futur Esprit du Monde .... il attend la chute de celui de la civilisation de bobo ... l’Esprit branleur .... et comme dit Hegel, la sombre déchéance dans la « nullité politique » signe de la fin d’un cycle, de l’accomplissement totale des virtualités du bac à sable consumérisme, de l’apogée du boboïsme et de l’épuisement du free-branling, tout ça annonce le stade suivant.
      Après le temps des jambes obsolètes face à la bagnole, vient le temps de savoir si mon cerveau est obsolète face à l’IA, une rationalité cosmique en gestation morale.... Extension du domaine d’expropriation du Capital ... où avènement de l’ordre fasciste cyborg ?
       
      « Les individus historiques sont ceux qui ont dit les premiers ce que les hommes veulent » Hegel à propos du Flan sur son scooter passant à Iéna.
       


    • hunter hunter 28 avril 2016 10:13

      @Jo.Di

      Dac o dac camarade ! tu m’as bien fait marré dès ce matin ! ton style est unique mais j’aime de plus en plus !

      Portes-toi bien

      Adishatz

      h/


    • Le p’tit Charles 27 avril 2016 11:11
      Une carte du monde sur laquelle ne figure pas le pays d’ Utopie ne mérite pas le moindre coup d’oeil.

      L’Âme de l’homme sous le socialisme - A map of the world that does not include Utopia is not worth even glancing at, for it leaves out the one country at which Humanity is always landing. And when Humanity lands there, it looks out, and, seeing a better country, sets sail. Progress is the realisation of Utopias.
      [ Oscar Wilde ]


      • Abou Antoun Abou Antoun 27 avril 2016 16:50

        Très bonne analyse de ce grand roman prophétique qu’est, avec « 1984 », « Brave New World ».
        Les deux romans s’inscrivent cependant tous deux dans le droit fil de l’œuvre de Zamiatine, le roman « Nous autres » (titre original « Мы »). Il me semble juste de rendre révérence au précurseur.


        • L'enfoiré L’enfoiré 27 avril 2016 17:27

          Bonjour Robin,

          En lisant je début, j’ai pensé pendant un moment que nous allions avoir un article en anglais.Et puis, non ce ne sont que des citations.
          Plus tard, on apprend que l’utilisation de l’anglais est simplifié.Le français ne serait-elle pas utilisé comme une langue simplifiée ?
          Pourquoi serait-ce différent dans le langage courant ? « Il était une fois, l’utopie » 
          Article dans lequel j’écrivais : « Les utopies sont de tous les temps sans se confondre dans leurs ambitions. Elles ont une histoire et même un dictionnaireL »eutopia« , l’utopie aurait pour but final de créer une société idéale, parfaite, mais pas surfaite. Thomas More est un de ses précurseurs. Il en est peut-être mort. Son histoire personnelle mérite le détour. »
          Je parlais pour finir de l’ordre nouveau et du « système ancien ».
          Le tout, c’est de pouvoir s’adapter aux nouvelles situations sans être nostalgique d’une époque révolue.
          Ce qui n’est pas évident pour tout le monde...


          • jesuisunhommelibre jesuisunhommelibre 27 avril 2016 19:14

            Ce « Meilleur des Mondes » dénonce le rêve de ceux qui veulent changer le monde, de ceux qui veulent un autre monde, en général en massacrant ceux qui n’entrent pas dans leur schéma.

            La Corée du Nord correspond bien.

            L’idée que la science est au service de la politique aussi, est dans le droit fil de ces utopies (ne devrait-on pas dire dystopie ?). Par exemple, quand des organismes gouvernementaux définissent ce qui est la bonne science et ce qui n’est pas la bonne science (Lyssenko, le GIEC par exemple).

            Ces romans, « Le Meilleur des Mondes », « 1984 » sont des cris de révolte contre les coup de boutoir assénés aux individus et à leur liberté.


            • bakerstreet bakerstreet 28 avril 2016 00:41

              @jesuisunhommelibre
              Le questionnement de la civilisation et les mérite du progrès dans une société pacifiée, sûre d’elle et de son fait remonte à la naissance de la civilisation. Levi-Strauss dans « Tristes tropiques, bien que novateur, ne fait que rendre écho à Montaigne, qui s’interrogera sur les mérites de notre civilisation sur les soit disant sauvages. La controverse de Valladolid est du même tonneau....Sans compter plus tard au dix neuvième siècle ce très beau livre qu’est »les immémoriaux", écrit par Segalen, qui dénonce l’évangélisation des jésuites sur les iles du pacifique, laminant une civilisation heureuse....S’ils avaient le meilleur des mondes possibles, rapidement ils ont été confronté au pire ! 


            • bakerstreet bakerstreet 28 avril 2016 00:31

              Bravo pour ce bel article, exhaustif, fouillé, qui m’a remis le roman en mémoire, un de ceux qu’il fallait avoir lu quand on avait 18 ans dans les années 70. On lisait beaucoup, à l’époque, on refaisait le monde, on prenait la route, des bouquins de SF plein le sac, et puis Hesse, Kerouac, Miller, les écrivains tendance de ces années là, et Huxley était du nombre...Par contre, maintenant, si je constate l’incroyable profusion et richesse des médiathèques, pas sûr que ce soit les jeunes qui les fréquentent. Ils sont déjà c’est vrai dans le cinéma auto sentant. Et voilà qu’ on parle de casques 3 D, misère de misère en boucle...IL y a fort à parier que certains ne sortiront plus de cette réalité virtuelle. Huxley a été un sacré prophète. Bien qu’Orwell ait lui aussi développé une utopie probable, mais qui n’était déjà plus une utopie politique...J’avais été impressionné à l’époque par « contrepoint », et « jouvence », un roman qu’on oublie pas malgré les années. L’histoire d’un milliardaire, une sorte de citizen kane payant des scientifiques pour lui trouver le remède contre l’immortalité. Ils trouveront la capacité de conserver la jeunesse du corps mais l’esprit continuera à décliner ! C’est un gigantesque éclat de rire sur fond de vanité. Shakespeare nous avait prévenu. La vie est une farce dite par un idiot...Les liens sont nombreux, et vous n’avez même pas oublié Swift, le créateur de Gulliver, et son regard distancié, le relativisme qu’il prône en donnant sur une île la parole aux chevaux et en transformant les humains en idiots primitifs, ce qui inspirera bien sûr Pierre Boule dans la planète des singes..... Vraiment « Gulliver » est un des 20 ou 30 grands livres indispensables dans le quel bien sûr « Brave new word » a sa place ! Avez vous parlé de Wells, qui lui aussi fut un grand prophète des temps à venir, avec des fables amusantes, sur les manipulations génétiques à venir, comme dans « l’ile du docteur Moreau ». Même Conan Doyle eut l’intuition de Gaïa, d’une terre-mère vivante, répondant aux exactions de ses parasites par des ouragans, dans « le jour où la terre hurla »...


              • Dantès (---.---.193.167) 28 avril 2016 02:51

                Y’en a marre des anglais ! Ils sont le problème et la solution, la question et la réponse, ils nous égarent pour ensuite nous offrir la carte... de leur choix.

                Enième chapitre dans le troisième tome des fameux contes du pompier-pyromane, qui craint de perdre sa mainmise sur les bornes d’eau s’il cesse d’y avoir des feux à éteindre.

                Retournons vers nos propres racines, infiniment plus riches, plutôt que de croire à leurs prophéties auto-réalisatrices, fables pré-fabriquées qui leur permettent ensuite de nous imposer leurs propres prophètes.


                • ENZOLIGARK 28 avril 2016 09:38

                  Bobby Marley [ Music / video - en VO - by Manu Chao ] . ... АФФ ИСС . ...


                  • Hervé Hum Hervé Hum 28 avril 2016 13:06

                    L’auteur de l’article pourrait t-il nous dire quelle définition Huxley donne au mot « liberté » ?

                    Car finalement, tout tient dans cette définition et je crains que celle qu’en donne Huxley ne soit pas du tout la même que je partage.

                    Reste alors à confronter les définitions pour voir si une s’impose à l’autre !

                    Je vais vous donner celle que je défend par un aphorisme

                    « la liberté exige une grande discipline intérieure, la servitude un minimum et l’esclavage aucune, car la discipline est imposé de l’extérieur ».

                    Car ce que Huxley, ne voit pas, c’est qu’en société, la notion de liberté absolue n’existe pas, elle est, par définition du mot société ou communauté, relationnelle, relative à autrui. C’est ce qui faisait dire que le maître dépend de l’esclave pour lui garantir sa propre liberté ,qui n’est pas celle de faire n’importe quoi, mais simplement de pouvoir se dédier à ses seuls centres d’intérêts et laisser les tâches ingrates aux autres.

                    Le meilleur des mondes décrit par Huxley, n’est rien d’autre que celui qui est vendu depuis l’avènement de la propriété économique avec la monarchie, puis avec la bourgeoisie aujourd’hui, quelle belle anticipation !

                    Si j’exclue qu’Huxley soit un sophiste, j’en déduis donc que c’était un idiot, puisqu’il prétend dire que le monde pré technologique était libre alors que politiquement, c’est le même système qui domine et que le système qu’il vend n’est en rien différent de celui qui existe depuis l’avènement de la monarchie, donc, depuis quelques milliers d’’années.

                    Bref, tout ce qu’écrit Huxley était déjà conceptualisé depuis au moins la Grèce antique.

                    Heureusement que vous êtes prof de lettres pour nous l’expliquer !!!


                    • Robin Guilloux, auteur de l’article (---.---.255.42) 28 avril 2016 15:32
                      @Hervé Hum

                      Ce que Huxley entend par liberté ? A vrai dire, j’ai du mal à répondre à votre question. Huxley n’est pas à proprement parler un philosophe et ne donne pas de définition de la liberté, comme le font par exemple Descartes ou Spinoza.

                      Mais s’il ne nous dit pas ce qu’est liberté, il décrit la servitude. Peut-être Huxley évoquerait-il la métaphore de la prison. Un prisonnier « sait », non pas intellectuellement, mais existentiellement ce qu’est la liberté.

                      Le problème, dans le meilleur des mondes, c’est que la plupart de ses habitants ne se sentent nullement prisonniers ; ils sont au contraire pleinement satisfaits de leur sort. seule une poignée d’individus n’est pas satisfaite. Ces individus ne sont pas plus libres que les autres, mais à la différence des autres, ils en souffrent. Ils savent qu’ils sont prisonniers.

                      Je penseque Huxley a dû penser au mythe de la caverne de Platon dans La République. Personne n’est tout à fait libre, mais certains ne le savent pas, tandis que d’autres le savent et en souffrent. C’est le commencement de la liberté : la souffrance, le désir, l’insatisfaction : il y a quelque chose qui manque, qui laisse à désirer.

                    • Hervé Hum Hervé Hum 29 avril 2016 15:01

                      @Robin Guilloux, auteur de l’article

                      Merci pour votre réponse, mais qui en effet, marque surtout la faiblesse dans l’analyse philosophique.

                      y répondre demanderait trop de développement, aussi, je vous laisse avec la définition que je vous donne.

                      Mais avant de vous laisser, notez bien que c’est bien la conscience qui fait toute la différence. elle et elle seule !

                      Sachant que la conscience est le sens de l’action en conséquence de la connaissance, donc, où l’inconscience ne permet pas de se définir ou même définir ce qu’est la liberté. C’est là d’ailleurs que tout ce complique, car, cela implique la notion de relativisme ou plutôt de relationnalité, mais le premier terme, bien que plus significatif, est moins bien appréhendé.


                    • Francis, agnotologue JL 28 avril 2016 14:38

                      Bel article pour un beau roman. Bravo à l’auteur.

                       
                      Une question, si vous voulez bien, vous utilisez par deux fois l’expression « entropie négative », dont on ne sait s’il faut parler ici d’oxymore ou de pléonasme, je cite : ’’A l’instar de ses contemporains les plus lucides, notamment Claude Levi-Strauss, Huxley est conscient du fait que dans les « sociétés chaudes » comme celle dans laquelle nous vivons, le « progrès » engendre des bienfaits (confort, disparition de la famine, allongement de la durée de vie...), mais aussi des effets néfastes sous forme « d’entropie négative » : instabilité sociale, rivalités mimétiques, escalade de la violence, dégradation de l’environnement... Dans les sociétés primitives, les risques d’entropie sont régulés à travers les interdits et les rituels religieux qui ont disparu des sociétés modernes.’’
                       
                      Cette expression aurait-elle un sens différent pour les littéraires et les physiciens ?

                      • Robin Guilloux, auteur de l’article (---.---.255.42) 28 avril 2016 15:47
                        @JL

                        Je ne sais plus si l’’expression « entropie négative » est de Lévi-Strauss ou d’Edgar Morin. Peut-être plutôt d’Edgar Morin. Elle fait référence aux lois de la thermodynamique. Pour un scientifique, c’est bel et bien un pléonasme.

                        Mais si l’on prend l’expression « entropie » dans un sens métaphorique (dans le sens approximatif des « littéraires » smiley l’épithète « négative » ne fait pas référence à une déperdition d’énergie, mais aux effets néfastes de la « civilisation » (que Lévi-Strauss oppose à la culture).

                      • Francis, agnotologue JL 28 avril 2016 19:42

                        @Robin Guilloux, auteur de l’article,

                         
                        en somme si je comprends bien, c’est comme la déliquescence ?
                         

                      • Robin Guilloux, auteur de l’article (---.---.210.91) 28 avril 2016 20:06

                        @JL

                        Oui, en quelque sorte, avec aussi l’idée de violence entre les hommes et des hommes sur la nature, de rivalités, de désordre, d’instabilité, etc.

                        J’ai essayé de résumer la question du rapport entre culture et civilisation chez L.Strauss dans cet article : http://lechatsurmonepaule.over-blog.fr/article-claude-levi-strauss-culture-et-civilisation-39691440.html


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