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Accueil du site > Tribune Libre > Le sabre et les Rafales. Ou de Voltaire à Voltaire

Le sabre et les Rafales. Ou de Voltaire à Voltaire

Je reçois d’un ami ces réflexions lucides que je vous transmets avec grand plaisir :

« De vos souvenirs d'écolier et lycéen, ceux des manuels d'Histoire de France de votre enfance, il vous reste probablement encore en mémoire le récit des supplices cruels que les puissants de l'Eglise et de l'Etat d'il y a plusieurs siècles infligeaient à ceux qui avait osé enfreindre la loi de Dieu ou attenté au corps du Roi.

Jeanne au bûcher, l'écartèlement de Ravaillac régicide d'Henri IV, le supplice de Damien qui avait porté le couteau sur la personne de Louis XV, la mort sur la roue de Jean Calas, les membres brisés, puis étranglé, toutes ces figures ont inscrit dans nos esprits la marque, qu'en ces temps-là, l'on ne pouvait impunément offenser Dieu ou le Roi.

Cruauté communément admise et acceptée alors, puisqu'elle apparaissait comme la sanction de l'atteinte au Divin. Admise, mais aussi entretenue, car, par la terreur qu'elle était censée inspirer, elle maintenait les consciences dans, plus que l'obligation, la fatalité de l'obéissance.

Face à cette immanence, des voix commencèrent cependant à s'élever, signe qu'une autre appréhension du monde était en cours.

Deux ans après la mort de Jean Calas, Voltaire (François Marie Arouet, dit Voltaire), dénonciateur du fanatisme religieux et de la monarchie absolue, réfugié en Suisse, s'adressait à l'opinion de toute l'Europe, en 1763, dans un ouvrage de rupture, Essai sur la Tolérance. Dans ses libelles, ses contes philosophiques, Voltaire dénonçait les conditions du procès de Jean Calas et obtenait enfin de Louis XV la tenue d'un nouveau procès qui aboutira à la reconnaissance de son innocence.

Il n'est jamais trop tard.

A la même époque, en 1766, un jeune noble de 20 ans, François-Jean Lefebvre, Chevalier de La Barre, était condamné selon les termes du tribunal d'Abbeville, pour « blasphèmes et sacrilèges exécrables et abominables », un crucifix brisé et des immondices répandues. Torturé, les jambes brisées, après que le bourreau eut renoncé à lui arracher la langue, il était décapité à la hache et son corps brûlé. Signe qui ne trompait pas, accompagné d'un exemplaire du Dictionnaire philosophique de Voltaire.

14 Juillet 1789. La prise de la Bastille.

Mais la modernité était en route et rien ne l'arrêterait. 30 ans plus tard, la Révolution Française accouchait dans la douleur et les convulsions d'une nouvelle représentation du Monde : rien de moins que le changement de Souverain, non plus le corps terrestre mais pourtant divin du Roi, représentation tri-millénaire depuis Gilgamesh à Sumer, depuis les Pharaons d'Égypte, l'Inca où les

Empereurs de Chine, mais, dorénavant, le Peuple lui-même dans sa généralité. Étaient ainsi jetées les bases de la Souveraineté Populaire et de la Laïcité. Et ce tournant,même s'il s'est produit en France, a valu pour le Monde entier.

Signe des temps nouveaux : le Chevalier de La Barre était réhabilité par décret de la Convention le 15

Novembre 1793 (25 Brumaire de l'an II).

Il est encore pourtant une région du monde où le vent de la modernité n'a pas encore soufflé. Par modernité, nous n'entendons pas moteur à combustion, avions supersoniques ou robotique et micro-informatique, mais Laïcité et Souveraineté du peuple. Voilà pour la modernité.

Par région du monde, nous ne parlons pas des contrées du Croissant fertile où sévissent aujourd'hui les bandes fanatisées de Daech ou d'Al Qaïda. Ces bandes sont illégitimes, illégales et combattues à merci par la coalition générale des Nations Unies.

Non, nous parlons d'un État internationalement reconnu, siégeant aux Nations Unies, entretenant avec le reste du monde les relations économiques, culturelles et scientifiques les plus normales, et qui plus est, pour la France, militaires et stratégiques les plus avancées. Notre Président y siégeait au mois de Mai dernier, comme invité d'honneur, à la réunion du Conseil de Coopération du Golfe.

Un État que ni les Présidents Bush et Obama n'ont qualifié de voyou ou accusé de faire parti de l'Axe du Mal.

Un État dont l'ambassadeur aux Nations Unies occupe un poste important au sein du Conseil des Droits de l'Homme de cette instance internationale. Selon un décompte effectué par l'organisation Human Rigths Watch, plus de 170 exécutions publiques ont eu lieu dans ce pays depuis le début de l'année.

Arrêtons là le descriptif. Vous avez reconnu notre partenaire privilégié économique, politique, stratégique et militaire, l'Arabie Saoudite.

Le châtiment suprême y attend aujourd'hui Ali Mohamed al-Nimr, 20 ans, originaire de Qatif, ville du Hasa, région majoritairement chiite de l'Est du royaume saoudien. Pour avoir contesté la monarchie féodale et son wahhabisme, il a été condamné à mort et doit être décapité, son dernier recours ayant été rejeté. Sa dépouille sera ensuite exposée en croix, jusqu'à son pourrissement. Décapitation et crucifixion.

Qu'a fait ou qu'a dit la France, à l'annonce de l'imminence de l'exécution ? Fait, rien. Peut-être trop d'enjeux. Dit ? Mutisme au Ministère des Affaires Étrangères fort occupé à la préparation de la COP 21.

Mutisme du Premier Ministre. La Présidence, elle, s'est exprimée : - Communiqué du Secrétariat de la Présidence de la République Française, en date du 23 Septembre : « La France fait les plus extrêmes réserves et demande aux autorités saoudiennes de surseoir à l'exécution ». - Correction de tir, le lendemain 24 : « Le Président de la République Française demande à l'Arabie Saoudite de renoncer à l'exécution du jeune Ali al-Nimr, au nom du principe essentiel que la peine de mort doit être abolie ».

Pour conclusion, ces quelques éléments lexicologiques concernant ces trois termes :

- surseoir  : remettre à plus tard ; différer (en langage d'huissier, on parle de sursis à exécution),

- demander  : solliciter d'une autorité,

- renoncer  : cessez d'envisager de recourir à une chose à laquelle on est en droit de prétendre.

Espérons que cette sollicitation ne reste pas lettre morte. Tragique ironie de l'histoire, elle est formulée par un ancien élève de la promotion Voltaire de l'ENA, celle de 1980. L'erreur en la matière remonte à bien loin : l'Arabie Saoudite telle qu'elle fut et telle qu'elle est,n'aurait jamais dû devenir le partenaire privilégié qu'elle est. »

Jean Casanova


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20 réactions à cet article    


  • Rensk Rensk 29 septembre 2015 17:45

    Tiens, les Rafales de Mistral...

    "Il est faux de soutenir, comme le fait le Gouvernement, que la France et ses industriels ne subiront +aucune perte+ du fait de ces accords grâce la revente des BPC à l’Egypte. Hors revente des BPC, l’Etat supportera une perte financière d’environ 1,1 milliard d’euros, qui se traduira en 2015 par un effet négatif sur le solde budgétaire de 556,7 millions d’euros", a indiqué la commission des finances du Sénat.


    • philouie 29 septembre 2015 18:25

      Signe des temps nouveaux : le Chevalier de La Barre était réhabilité par décret de la Convention le 15 Novembre 1793 (25 Brumaire de l’an II).

      Excellent

      les temps nouveaux dont se réclame l’auteur ont vu la décapitation de louix XVI, la création du tribunal révolutionnaire qui condamna à mort 2742 personnes. etc...

      mouchez vous.

      vous bavez.


      • Passante Passante 29 septembre 2015 19:25
        sans parler de l’éducation de laure smiley


      • philouie 29 septembre 2015 19:41

        @Passante
        Il faudrait comprendre comment le refus de la Loi, la loi religieuse, la loi castratrice, refus dont se réclame la pensée révolutionnaire, conduit à la terreur.


      • Passante Passante 29 septembre 2015 20:50

        @philouie

        ce n’est pas le refus de la loi religieuse qui conduit à la terreur philouie,
        c’est au contraire sa réincarnation hystérisée, 
        vieux ancêtres daëchiens
        ouvrez saint-just, c’est continuellement ! le Temple... la présence au Temple, le Témoignage, les Frères...,
        puis les fêtes programmées, sur fond d’aveux publics ! confessions et jugements,
        devoirs militaires pour mèèère natûre et prières pour : « L’Être Suprême » -

        tout cela relève du pur délire religieux.

      • Passante Passante 29 septembre 2015 21:04

        @philouie


        la terreur fut donc la rapide négation fondamentalement religieuse de la révolution ;
        par ailleurs votre alignement « loi religieuse, loi castratrice » est étrange,
        ou du moins relève de saint-paul, la loi constituant le désir en barrant la jouissance,

        seulement le commandement de torah ou coranique ne se limite pas à cette logique,
        au hasard, le premier des 613 commandements :
        « croissez et multipliez... » - on est mal partis pour « loi castratrice » déjà.
         


      • philouie 29 septembre 2015 21:54

        @Passante,
        je pense , pour votre premier message, que vous avez raison. Pourtant je ne crois pas avoir tort.
        Il faut peut-être mieux définir de quoi l’on parle.
        Quand vous dites délire religieux, je le comprends comme ce mouvement, celui de la grégarité, qui agglomère les êtres humains selon qu’ils se ressemblent, qu’ils sont semblables, - c’est par exemple un groupe de supporter - et dont la cohésion tient dans un combat contre un autre dissemblable.
        Ce que je comprends de votre « religieux », c’est celle d’un groupe d’humains qui s’assemblent en un tas qui s’idéalise lui même et vit du rejet de l’autre. Vous parlez d’hystérisation et je trouve le mot particulièrement bien choisit, d’une part parce que le comportement de ce tas n’a rien de rationnel mais aussi parce qu’il est constitué d’individus englués dans la matrice originel, l’utérus, donc.
        Quand je parle de castration, je ne parle pas de sexualité mais plutôt de séparation d’avec la mère, de quitter la matrice originelle, comprise à la fois comme la Mère mais également comme le grand tout d’où tout provient, Dieu.
        La loi religieuse, castratrice, c’est la loi du père, qui donne, à travers le langage, la place de chacun et limite ainsi le désir de jouissance qui est désir de toute puissance. C’est elle qui permet de passer de l’aliénation à la mère à l’autonomie.
        Votre vision du religieux à vous, est ce qui produit le lynchage : la foule en colère, hystérique, qui s’acharne sur le bouc émissaire alors que dans ma conception du religieux la mise à mort d’un individu ne peut être que le produit d’un procès fondé en raison sur les règles du droit. Le religieux fonde le corps social dans le langage et contraint chacun à sa place.
        L’exemple que vous m’avez donné de l’éducation de Laure est particulièrement pertinent, parce qu’il s’agit précisément de la question du tabou de l’inceste et donc du refus de la différenciation. Nous sommes au cœur du problème.
        Ce refus de la différenciation produit d’une part ce « Nous » fait d’un tas de semblable, mais également la souffrance de celui qui en est prisonnier et qui a besoin de s’en extraire pour enfin naître, tout en refusant d’abandonner la jouissance que cette adhésion au « Nous » produit.
        Souffrance et désir d’émancipation, c’est ce qui produit l’esprit de révolution : il s’agit d’abattre le tyran qui est perçu comme cause de la souffrance et comme l’empêcheur de jouir en paix. Le tout s’articule dans un esprit libertaire, il s’agit bien effectivement de se libérer, bien que ce dont il faut se libérer n’est pas là où l’on croit. ça se termine dans le massacre, parce que fondamentalement, le refus de la différenciation conduit à la négation de l’autre.Autre qu’on tue parce qu’on le croit responsable de notre souffrance, en cela que l’Autre est l’image du père - et ce n’est pas pour rien que Louis XVI finit décapité - dont la fonction est ici de nous séparer de la Mère, alors que la souffrance, on la porte en nous et que cet Autre, le père, castrateur, perçu comme l’ennemi, est en réalité une puissance émancipatrice.


      • sara sara 29 septembre 2015 23:21

        Salut 

        intéressante analyse mais... 
        « Souffrance et désir d’émancipation, c’est ce qui produit l’esprit de révolution » vague non ? vous oubliez surtout Le Moment ( instant T) car la Souffrance, Le Désir c’est continue, la Révolution pas. et il y a un bien un Moment ou le Non se prononce, le refus s’articule. La Révolution ne serait donc pas désir de s’émanciper de la souffrance, mais le moment de l’identification des raisons de cette souffrance, même sans souffrance elle serait le moment de la Connaissance... la Lumière. 
        Enfin je en suis pas spécialiste... mais je m ’y connais en « Non » et il me semble que c’est cela avant tout une Révolution. 





        • philouie 30 septembre 2015 01:03

          @sara
          Je ne comprends pas tellement le sens de votre remarque. Je tente une réponse.
          La révolution ce n’est qu’un moment, un moment paroxystique où l’esprit de rébellion accède au pouvoir et se transforme en terreur.
          Mais, si ce moment est typique, il est toujours présent dans nos sociétés, vous le verrez facilement à l’oeuvre par exemple sur agoravox chez des gens qui se disent libertaire, qui réclament une vrai démocratie, qui refusent l’idée de chef et qui vous insultent dès que vous les contredisez.
          Normalement cet esprit de rébellion est contenu par la loi et par la force de l’état. Mais la révolution c’est le moment où une digue se rompt et où les pulsions de morts se donnent libre court. voyez la Libye ou l’irak. Daesh.
          Ce que je comprends de votre « Non », c’est le moment où l’on résiste à l’oppression. C’est à mon avis quelque chose d’assez différent. Moi je parle d’une souffrance intérieure qui est dû à l’aliénation à la Mère et dont on accuse l’autre d’être responsable. Vous vous parlez d’une souffrance objective, c’est à dire quelqu’un qui vous opprime et pour lequel vous entrez en résistance. (c’est ce qu’il me semble comprendre). Ici il faut se référer au Coran. Coran qui nous invite à la résistance. Oui nous devons résister à l’oppression, nous devons dire non lorsque nos droits sont bafoués. Mais en même temps le Coran nous dit : s’ils cessent, cessez. S’ils veulent aller à la paix, allez à la paix avec eux. L’autre n’est pas un ennemi en soi, il est un ennemi quand il se comporte en ennemi, il est un ami quand il se comporte en ami.
          Ce qu’il faut comprendre de l’esprit de rébellion - qui n’est pas la résistance - c’est que l’autre, par le simple fait qu’il existe dans sa différence, est perçu comme une cause de notre souffrance. Quoiqu’il fasse, il sera toujours l’ennemi.


        • sara sara 30 septembre 2015 08:36

          @philouie Merci même si 
          je ne comprends pas plus votre réponse :) sinon toujours pas d’accord... vous dites : Normalement cet esprit de rébellion est contenu par la loi et par la force de l’état. Mais la révolution c’est le moment où une digue se rompt et où les pulsions de morts se donnent libre court. voyez la Libye ou l’irak. Daesh. je trouve absurde de parler d’un esprit de Rebellion contenu par la Loi ( really l’Esprit des Lois) et donc en désaccord avec la formule. de Quelle Libye parlez vous, de quel Iraq ? c’est un raccourci très dangereux je trouve que d’évoquer Daesh dans le lot, si lot y avait. Vous évoquez le Coran, bien. Mais alors surtout rappelez vous que question altérité il y a AL-HUJURAT : 13

          Et bonne journée ... 

        • philouie 30 septembre 2015 10:51

          @sara
          AL-hujurat:13 est particulièrement bienvenu. Puisque c’est bien ce dont il s’agit dans mon propos avec Passante. Ce verset mérite un long commentaire que je vais faire dans le message suivant.
          En parlant de l’Irak et de la Libye, j’ai voulu dire ceci : on ne peut espérer que la société humaine s’organise sur le bon vouloir de chacun. Les êtres humains portent en eux, et certains plus que d’autres une part de violence. violence qui s’origine dans la souffrance intérieure. Quand l’état est détruit, quand la force publique est anéantie, les brigands sortent. Ce ne sont pas forcément les plus nombreux au sein d’une société mais ce sont eux qui font le plus de mal. C’est la raison pour laquelle existent les Hudud, c’est à dire la possibilité pour celui qui dispose de la force public d’appliquer les châtiments.
          Ce qu’il y a de symptomatique dans la révolution, c’est de constater que ce sont les mêmes, des idéalistes qui se révoltent contre l’autorité du roi qui se transforment, dès qu’ils ont une once de pouvoir, dans les pires criminels.


        • Henry Canant Henry Canant 29 septembre 2015 23:34

          Avant la révolution, tout n’était qu’obscurantisme., après ce ne fut que lumières et connaissances.

          L’auteur, arrêtez de prendre les lecteurs que pour des cons ;
          Trop facile de comparer ce qui était une norme quelques siècles en arrière avec ce qu’elle est aujourd’hui.

          • philouie 30 septembre 2015 11:55

            AL-hujurat (les appartements) :13
            Ôhé humains !
            Nous voici, nous vous créons d’un homme et d’une femme.
            Nous vous constituons de nations et de tribus, afin que vous vous connaissiez.
            Voici, pour Dieu, le plus noble d’entre vous est le plus pieux.
            Voici, Dieu, savant, informé.

            Ce verset mériterait à lui tout seul un livre entier. Et si les termes qu’il contient semblent disparates, ils me parlent en réalité que de la question de l’altérité, ou plutôt de la différenciation, jusqu’en son dernier terme, puisque le refus de l’altérité, c’est ce qui crée dans le coeur de l’homme le mensonge, mensonge qui évidement ne tient pas face à Dieu.
            Je me propose donc d’examiner donc chacun des termes pour montrer comment ils s’articulent en regard des théories que je développe.
            A l’heure de la polémique Morano, on comprend que la doctrine de notre temps vise à régler les problèmes liés à la diversité en niant les différences, alors que le Coran nous invite à vivre ses différences, à les accepter et nous montre la voie pour y arriver.
            (...)


            • philouie 1er octobre 2015 08:53

              Nous vous constituons de nations et de tribus, afin que vous vous connaissiez.
               
              L’être humain ne vit pas en individu isolé. Il vit au sein d’une communauté. La communauté, c’est le Lieu de la langue partagée ( « que chaque homme parle la langue de son peuple »Esther).
              C’est le lieu du partage, de la solidarité. Le lieu de la chaleur humaine. La communauté, à l’heure où l’on fustige le communautarisme, est en réalité un bienfait pour l’homme. Mais nous savons aussi que la communauté donne lieu à ce que d’aucun nomme « la passion identitaire » et que de nombreux crimes sont commis à cause d’elle. Or Dieu ne dit pas : nous avons fait de vous des communauté pour que vous vous entretuez mais pour que vous vous connaissiez.De quel connaissance s’agit-il. En premier lieu, il faut bien comprendre que l’autre est un miroir qui permet de nous connaître nous même : nous nous connaissons en connaissant l’autre.
              Mais d’autre part, nous savons bien que la passion identitaire s’accompagne toujours de ce qu’on appelle la négation de l’autre. Négation de l’autre qui peut-être physique, mais qui est d’abord une négation morale. négation morale qui précède le crime : il faut déshumaniser l’autre : ce sont des animaux, ce sont des rats, de la vermine, toute parole qui précède le crime et qui se fonde sur l’ignorance. Il suffit de constater que sur les forums la haine s’enracine dans l’ignorance. Ainsi la connaissance de l’autre, est le premier pas vers l’amour pour lui. EN le connaissant, nous reconnaissons ses différences en même temps que nous voyons notre commune humanité. « Nous vous constituons de nations et de tribus » . Si Dieu nous constitue dans la diversité, il nous considère tous sur un même pied d’égalité : nos différences ne sont pas la preuve que nous ne sommes pas d’une commune humanité et nous connaître, c’est apprendre que nous avons les mêmes joies, les mêmes peines, la même tendresse pour nos femmes et nos enfants, les mêmes rires, les mêmes pleurs. Nous sommes à la fois dissemblable et semblable. Dans l’ignorance nous ne voyons que le dissemblable, dans la connaissance nous apprenons à connaître le semblable.
              Un autre verset déclare :
              " Si Dieu l’avait voulu, Il aurait fait de vous une seule communauté, mais Il a voulu vous éprouver par le don qu’Il vous a fait. Concourez pour le bien. Votre retour à tous se fera vers Dieu ; Il vous départageras de vos disputes "
              Voila notre programme.


              • philouie 1er octobre 2015 22:47

                « Nous voici, nous vous créons d’un mâle et d’une femelle »
                 
                « Nous voici », Dieu se manifeste, c’est l’acte créateur.
                Le Un qui se montre multiple.
                Nous avons l’habitude de croire que la création se fait par addition, par multiplication. C’est un défaut d’optique.
                Ce qui est originel, c’est le Tout. Et la création n’ajoute rien au Tout.
                La vie nait, non de la multiplication, mais de la division.
                « Dieu vit que la lumière était bonne ; et Dieu sépara la lumière d’avec les ténèbres.  » génèse 1.4
                et de cette division nait les couples d’opposés : les eaux d’en haut et les eaux d’en bas. le jour et la nuit.
                Le mâle et la femelle.
                La vie est division, différenciation, discrimination.
                Si notre origine commune est divine, nous provenons de Dieu, du grand tout, notre destin de créature est de devenir poussière, d’être extrait de l’infini indifférencié pour devenir une petite crotte de mouche, unique et spécifique. Naitre, c’est n’être. n’’être qu’un extrait de l’être. n’être mâle si nous ne sommes que femelle, n’être femelle si nous ne sommes que mâle.
                Mais ce qu’il faut comprendre, c’est que d’un point de vue psychique, ce processus de différenciation n’est pas achevé à la naissance, c’est au contraire un processus qui commence à la naissance et qui se poursuit au fur et à mesure que nous grandissons. En réalité nous naissons sous la forme de Dieu Tout Puissant et c’est la vie qui nous fait devenir crotte de mouche, passant de l’omniscience ignorante divine à la connaissance spécifique. C’est le processus d’individuation et le premier pas dans ce processus consiste en l’apparition de l’autre à travers l’absence de la mère.
                L’autre est ainsi celui qui nous rappelle, en manifestant son altérité, que nous ne sommes pas le Dieu Tout Puissant et dont la seule présence est source de souffrance.
                C’est pourquoi nous nous agrégeons avec nos semblables, que nous nous regroupons en clans et en tribus, que nous cherchons à gommer toute forme d’altérité au risque même de chercher à tuer l’autre, de chercher à faire disparaître le dissemblable, objet de notre haine, mais en réalité vrai témoin de notre manque, de la perte que nous subissons en passant de la toute puissance à l’insignifiance.
                (...)



                  • philouie 2 octobre 2015 10:02

                    Voici, pour Dieu, le plus noble d’entre vous est le plus pieux.
                     
                    Donc nous provenons du Grand Tout Indifférencié pour devenir créature singulière.
                    Ce processus c’est l’individuation qui s’initie par la séparation d’avec la mère. Il s’agit d’une violence, d’une souffrance, la mère de toutes nos souffrances.

                    Mais nous devenons pas un individu singulier de but en blanc, nous entrons sur le chemin de l’individualité. Mais cette individualité est entièrement à conquérir et nous sommes le premier obstacle à cette conquête parce que nous restons nostalgique de notre ascendance originel, c’est à dire de notre nature divine toute puissante. Cette nostalgie à un nom : l’égo : nous nous prenons pour Dieu.
                    Le désir d’être Dieu est le désir fondamental de l’homme.
                    Mais à ce stade, l’égo n’est pas totalement différencié et nous en sommes bien incapable : l’égo est en réalité un « Nous » : avant même d’être clans ou tribus nous sommes une meute. Et nous pensons ce que pense la meute, nous vivons ce que vit la meute.
                    Il faut également avoir à l’esprit que Dieu étant la totalité de l’être, il n’y a pas d’être, pas d’autre, en dehors de Dieu, donc en s’identifiant à l’égo, à ce désir d’être Dieu dans la masse du nous, nous rejetons l’autre, pire nous le nions.
                    L’égo est ainsi un « Nous » qui vit de la négation de l’autre.
                    Dans ce contexte, pourquoi, pour Dieu,le plus noble d’entre nous est le plus pieux ?

                    (...)


                    • philouie 2 octobre 2015 11:56


                      Nous savons Dieu déteste l’idôlatrie :« Et moi, je cacherai ma face en ce jour-là, à cause de tout le mal qu’il aura fait, en se tournant vers d’autres dieux. » (deutéronome 31-18), ce qu’on appelle en Islam l’associationnisme « Voici, Dieu ne pardonne pas celui qui lui donne des associés, il pardonne, sauf cela, qui Il veut. Qui associe à Dieu, commet un crime grandiose » (Coran 4:38).
                      Or l’égo c’est la première idolâtrie, on peut même affirmer que toute forme d’idolâtrie relève de l’égo. L’égo, outre qu’il ne laisse pas de place à l’autre, est un obstacle à l’acte créateur en ne permettant pas la naissance de la créature différenciée.
                      La piété véritable - qui est autre chose que l’adhésion à un « Nous » de croyant - consiste à mettre Dieu à sa vraie place de Créateur et le moi à sa vraie place de créature. ça consiste, par l’acte d’humiliation de la créature devant son créateur, à combattre l’égo.
                      « Il n’y a de dieu que Dieu », reconnaitre Dieu en commençant par tuer le dieu que l’on porte en soi et pour lequel on se prend.
                      La piété véritable c’est accepter l’acte créateur de différenciation, en reconnaissant Dieu comme le Tout Autre, c’est renoncer à se prendre pour Dieu et ainsi permettre à l’autre d’être ce qu’il est, c’est une voie de paix qui nous conduit dans la voie de l’acceptation de la diversité.
                      Je veux ajouter ici, que le Coran s’adresse ici à nous à titre individuel : « le plus noble d’entre vous », ça veut dire parmi les humains et indépendant du clan ou de la tribu d’appartenance. Il faut comprendre que c’est pas d’appartenir à tel groupe, que ce soit un groupe de croyant, une nation, ou même une race, qui fait notre noblesse, mais bel et bien notre piété, c’est à dire la façon dont on se place vis à vis de Dieu de sorte de ne pas empiéter sur la vie des autres.
                      Ce n’est pas pour rien que le plus degré de l’élévation spirituelle se trouve dans l’anéantissement du moi.
                      (...)


                    • philouie 2 octobre 2015 15:47

                      « Voici, Dieu, savant, informé. ».

                      Le refus de la différenciation, c’est à dire, le fait de rester attaché à la Mère, la mère pouvant prendre la forme du groupe, du sexe ou des drogues, c’est l’aliénation. Il n’y a de vérité qu’en Dieu, pour la simple raison que Dieu est la totalité de l’être. Ne pas être différencié, c’est nié l’autre donc nié la part devérité dont l’autre est porteur. c’est la voie du mensonge, c’est la perversion.

                      ce que confirme les versets qui précèdent :

                      11. Ô vous qui avez cru ! Qu’un groupe ne se raille pas d’un autre groupe : ceux-ci sont peut-être meilleurs qu’eux. Et que des femmes ne se raillent pas d’autres femmes : celles-ci sont peut-être meilleures qu’elles. Ne vous dénigrez pas et ne vous lancez pas mutuellement des sobriquets (injurieux). Quel vilain mot que « perversion » lorsqu’on a déjà la foi . Et quiconque ne se repent pas... Ceux-là sont les injustes.

                      12. Ô vous qui avez cru ! Évitez de trop conjecturer [sur autrui] car une partie des conjectures est péché. Et n’espionnez pas ; et ne médisez pas les uns des autres. L’un de vous aimerait-il manger la chair de son frère mort ? (Non ! ) vous en aurez horreur. Et craignez Allah. Car Allah est Grand Accueillant au repentir, Très Miséricordieux.

                      (...)


                    • philouie 2 octobre 2015 15:59

                      @philouie
                      un dernier mot.
                      Pour ceux qui s’intéresse à la question de la différenciation , j’invite à lire les « Sept sermons aux morts » de CG jung , écrit sur lesquels mes propos précédant se fondent.
                      je poste quelques extraits :

                      sur la différenciation :

                      Notre essence est différenciation.
                      Si nous ne sommes pas fidèles à cette essence, nous nous différencions insuffisamment.
                      C’est pour cela qu’il nous faut opérer des différenciations parmi les qualités.
                      Vous demandez : en quoi est-il nuisible de ne pas se différencier ?
                      Si nous ne différencions pas, nous sortons des limites de notre essence, des limites de la Créature,
                      et nous retombons dans l’état d’indifférenciation qui est l’autre qualité du Plérôme.

                      sur les couples d’opposées :Les qualités sont les COUPLES D’OPPOSÉS, comme :

                      l’Efficace et l’Inefficace,
                      la Plénitude et le Vide,
                      le Vivant et le Mort,
                      le Différent et l’Identique,
                      le Clair et l’Obscur,
                      le Chaud et le Froid, les couples d’opposés.

                      sur la communauté et l’aliénation :

                      La différenciation mène à l’être-unique-séparé # . L’être-unique est opposé à la communauté. Mais la communauté est nécessaire à cause de la faiblesse des humains en face des dieux et des démons et de leur loi à laquelle nul n’échappe. C’est pourquoi il faut laisser s’établir autant de communauté que cela est nécessaire, non pas à cause des humains, mais à cause des dieux. Les dieux vous contraignent à la communauté. La communauté est nécessaire autant que l’exige cette contrainte, davantage serait nocif. Que chacun se subordonne à l’autre dans la communauté, afin que la communauté soit maintenue, car vous avez besoin d’elle. Que chacun se place au-dessus de l’autre dans l’être-unique afin que chacun accède à soi-même et évite l’esclavage.

                       

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