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Accueil du site > Tribune Libre > Mais qu’est-ce qui effraie tant M. Darcos ?

Mais qu’est-ce qui effraie tant M. Darcos ?

Qu’est-ce qui effraie tant M. Darcos ? M. Darcos et nombre de ses prédécesseurs d’ailleurs qui se voient proposer, maintenant, d’écrire eux-mêmes les programmes d’histoire ! Cela semble incroyable ? En fait c’est presque naturel tant l’histoire est un sujet sensible, une matière apte à la propagation d’idées, voire d’idéaux.

Les pseudos historiens du XIXe siècle, ceux de la lignée de Michelet, ceux que Jules Ferry cautionnera, sont de cette école. Leur but, alors, la réécriture de l’histoire, notamment médiévale et monarchique, dans le but de promouvoir l’idéal révolutionnaire, mais aussi patriotique.

Exagérations, mensonges, inventions : tout est bon pour salir les principes féodaux, religieux des siècles précédents. Tout est bon pour faire des quelque mille ans qui constituent le Moyen Age une période sombre, obscure même. Tout est bon pour présenter les souverains de la Renaissance et des Lumières comme des monarques décadents, oppressifs. Être historiens, au XIXe siècle, c’était faire œuvre de propagande ! Et il faut croire que rien n’a vraiment changé. A une exception près cependant : si les historiens que XXe siècle n’ont guère eu de mal, pour peu qu’ils s’y soient attachés, à revenir sur les "vérités révélées" du siècle précédent, c’est que la loi, déjà, le leur permettait. Une leçon semble-t-il pour les néo-propagandistes de l’histoire, ceux du XXIe siècle, qui ont pris soin d’empêcher, d’interdire toute recherche, tout débat. D’où la question : qu’est-ce qui effraie tant les Darcos, Chirac ou autres promoteurs de la législation en histoire pour vouloir ainsi étouffer tout débat ?

On se doute bien que l’An Mille, l’Inquisition ou le droit de cuissage ne sont pas en cause dans ce débat. Non, il y a autre chose en cause. Une histoire plus récente, plus douloureuse aussi et qui mériterait, plus que tout autre, d’être ouverte au débat. La cantonner dans un statu quo victimaire ne fait que renforcer l’opposition communautariste au détriment du sentiment national. C’est, en substance, ce que dénonce Elie Barnavi, historien, ancien ministre des Affaires étrangères israélien en France, lorsqu’il proclame que "l’historien ne peut pas travailler sous la menace de la loi" (Marianne n° 599).

Une opinion que seul un Elie Barnavi peut défendre sans être accusé de révisionnisme. Une opinion pourtant partagée par nombre d’historiens désormais interdits de penser, interdits de débattre, bref, interdits d’exercer leur métier. Des historiens révoltés par l’oppression des lois mémorielles au point de signer un manifeste Liberté pour l’histoire. Des historiens qui, manifestement, n’ont guère été entendu par le pouvoir qui confond encore histoire et mémoire et qui marque clairement son dédain des historiens en les excluant de l’enseignement de leur propre matière.

Belle image de cette démocratie qu’on prétend ainsi défendre. Belle confiance aussi accordée aux historiens, comme si eux-mêmes ne savaient pas juger du travail de leurs pairs…


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8 réactions à cet article    


  • Cug Cug 30 octobre 2008 12:50

     Pas besoin de chercher bien loin, comme aux USA, l’idée c’est d’empêcher les dangereux gauchistes de mettre en question le néolibéralismelibreéchangiste garant du maintien de la domination de l’élite sur les sociétés.


    • daniel 30 octobre 2008 14:17

      @ AUTEUR
      Vous abordez sur le même plan 2 choses qui pour être parentes, n’en sont pas moins di’fférentes.
      La 1ére c’est l’Histoire en tant que science, la 2éme c’est l’Histoire telle qu’objet enseigné à l’école , conçue comme mise en bouche pour la "1ére" , et comme récit commun pour les citoyens de la nation.
      Pour simplifier Michelet c’est l’Histoire "science" , et Lavisse c’est l’histoire "récit commun " pour les petits français du début du 20éme siécle.
      Je note le mépris que vous semblez éprouver pour Michelet. C’est votre sentiment. Mais il suffit de considérer la médiocrité scientifique de nombre d’"historiens" d’aujourd’hui (Stora, Blanchart, Branche, etc...) pour mesurer l’épaisseur et l’intelligence de Jules Michelet.

      Aujourd’hui l’Histoire se trouve confrontée à une situation digne de l’URSS d’antan. Des pans entiers : la Shoa ; l’esclavage, l’Islam, entre autres, se trouvent interdits de questionnements. Intimidations judiciaires, médiatiques, harcelement proffessionnel sont requis en permanence.
      L’insignifiance des travaux historiques sur la Shoa depuis la Loi Gayssot ou l’inanité des recherches sur les rapports Occident-l’Islam (mise en relief entre autre par l’affaire "Aristote au Mt St Michel") démontrent la catastrophe scientifique de l’intrusion de ce MacCartysme bien-pensant dans l’Histoire.

      Quant à l’enseignement de l’histoire à l’école nous somme bien loin du Lavisse. Celui-ci avait moins le mérite de la chronologie et de la cohérence.
      Et s’il présentait une vérité "officielle" , il ne s’en cachait pas , et n’interdisait aucun questionnement .
      Aujourd’hui on sert aux enfants une Histoire chewing-gum , pleine d’approximations, au hasard des modes et des chantages les plus efficaces.
      Sans parler des à-priori des enseignants et des chantages locaux de telle ou telle communauté ....

      L’Histoire et son enseignement sont des revélateurs de l’état d’un pays, de son identité et de ses aspirations.
      M. Darcos pourra faire tout ce qu’il voudra. Tant qu’il suffira qu’une Me Taubira léve le petit doigt pour exiger de faire silence sur la traite arabe ou inter africaine , qu’un M. Lanzmann puisse interdire toute discussion sur la Shoa et son organisation ; qu’un M. Stora puisse interdire toute analyse sérieuse sur la guerre d’Algérie....Rien ne sera possible...

      Car si les Lois mémorielles sont le signe visible de cet interdit de lecture historique libre, elles ne sont en quelque sorte que la pointe visible de l’iceberg...


      • Alix Ducret 30 octobre 2008 14:24

        Je suis d’accord avec vous et c’est volontairement -pour la bonne cause et afin de profiter de l’actualité- que j’ai mis les deux histoires -recherche et enseignement- sur un même plan. A part ce petit détail, je vois que, au fond, nous sommes plutôt d’accord…


        • finael finael 30 octobre 2008 15:45

          L’Histoire aux historiens !

           Je commence avec un profond désaccord avec l’auteur : dire que les historiens du XIXème siècle n’étaient que de "pseudo historiens" est une insulte à leur mémoire. Certes ils avaient des idées préconçues ... tout comme ceux d’aujourd’hui !

           Sans les Michelet, les Camille Jullian, on peut douter que l’histoire actuelle existerait.

           Au fil du temps et des recherches, des découvertes, la vision que nous avons du passé évolue.

          Je travaille actuellement à transcrire des carnets personnels d’explorateurs de l’Afrique (1891 - 1893), de soldats de la IIIème république naissante (garde nationaux en 1870) - mes ancêtres - et je puis vous assurer qu’il y a là de quoi revoir ce qu’on sait de ces périodes.

          Mais je vous rejoins pour m’élever contre la prétention d’un pouvoir, quel qu’il soit, à imposer telle ou telle vision de l’histoire, car il y a maints débats et à mon avis les historiens doivent être affranchis de toute limite politique ou idéologique (religieuse par exemple).

          L’Histoire me passionne depuis ma jeunesse quand redoublant ma classe de troisième à une époque ou c’était la Révolution Française qui était au programme j’ai eu droit à deux visions extrêmement différentes de cette période, la première fois présentée par un professeur gaulliste, la seconde par un professeur communiste.

          Je suis devenu un "rat de bibliothèque" et j’ai compris comment on pouvait interpréter les mêmes évènements différemment, insister sur tel aspect plutôt que sur tel autre, etc ...

          Car il n’y a pas de vérité en histoire, seulement des interprétations que j’aime à confronter.


          • anny paule 30 octobre 2008 16:36

            Je crois me souvenir qu’un philosophe allemand, Jaspers, pour ne pas le nommer, avait écit qu’"Un homme sans origines, sans histoire, était un homme sans avenir" !
            Si le débat (que nous ne pourrons clore, ici, en quelques phrases) porte sur l’intégrité des historiens, sur le fait que l’histoire s’attache à des FAITS réels du passé, mais mis en perspective à un moment précis (avec toutes ses composantes politiques, sociologiques, idéologiques... par ceux qui l’écrivent), il est évident qu’à partir d’une Histoire, il y aura des Histoires. Le communisme, par exemple vu de la Russie soviétique et vu de notre vieille Europe, ou a fortiori de l’Amérique du Nord, n’aura pas la même histoire, le même visage.... les exemples ne manquent pas pour éclairer le biais personnel de l’historien dans l’hitoire telle qu’il la présente... les exemples ne manquent pas, non plus, pour montrer que l’histoire officielle enseignée dans nos écoles, collèges, lycées, voire universités induit une vision conforme à celle du Politique.
            Ceci n’est pas une raison pour ne pas creuser, avec des points de vue divergeants, l’histoire qui fut la nôtre... et de cette controverse faire naître une forme de vérité... ou, du moins, conduire à un doute sceptique permettant de tendre vers cette vérité.
            Je ne suis pas historienne, mais j’ai creusé, pour les nécessités d’une recherche, un pan de notre histoire récente (1959- 1963). Il m’a fallu, au delà du "terrain", bien des travaux et des idées contradictoires sur ce même moment pour tenter d’approcher ce que cela avait pu être... cependant, si cet effort m’a été possible, c’est parce que les enseignements qui m’avaient été distribués en amont me permettaient de comprendre et d’analyser les données que j’avais pu amasser.

            Ainsi, Darcos & Co. , dans les nouveaux programmes qu’ils mettent en place, ne font qu’impuissanter nos jeunes quant à la compréhension du monde dans lequel ils sont... Quel avenir sera le leur (pour reprendre Jaspers)... quand ils auront été "formés" à la "sauce" du moment ???


            • La Taverne des Poètes 30 octobre 2008 17:36

              Je pense que le futur ministre de l’Information nous expliquera très bientôt les vertus de la chose, en compagnie de M.Darcos, ministre de l’Histoire, sous le contrôle très étroit de l’Omniprésident, cela va de soi.


              • Daniel Roux Daniel R 30 octobre 2008 20:09

                L’école est le lieu parfois le seul lieu où l’on acquiert les savoirs qui structure notre opinion d’adolescent puis d’adulte. L’Histoire à l’école forme la mémoire commune d’un peuple.

                Les livres scolaires racontent une Histoire simple, voire caricaturale : Des batailles gagnées ou perdues, des rois plus ou moins adroits qui se succèdent, les révolutions qui bouleversent l’ordre établi, les grandes guerres "boucheries" du XX ème siècle, notre gloire passée... Pas grand chose de profond en fait mais suffisamment pour amener les naïfs enfants à se sentir les héritiers d’un peuple et d’une nation à l’esprit frondeur.

                Un film sur 20 siècles qui montre à ceux qui veulent en savoir plus, non pas l’évolution de la conscience humaine ou l’amélioration matérialiste des conditions de vie mais la force irrésistible des Idées.

                Des différentes visions de l’Homme que les philosophes antiques élaboraient l’appliquant à l’organisation et à la vie de la Citée jusqu’aux grandes utopies idéologiques modernes du Communisme théorique jusqu’à l’anarchisme total en passant par la démocratie. Parmi toutes ces idées, une idée forte domine toute les autres : Les hommes sont égaux en droits et en devoirs et nul n’est légitime à se prétendre au-dessus des autres.

                Ce que souhaite les promoteurs de l’enseignement d’une autre histoire, c’est supprimer la diversité de ces idées philosophiques et en particulier cette idée néfaste de l’égalité entre les hommes. Ils veulent imposer leur seule vision du passé et de l’avenir, à savoir :


                - Certains sont nés pour diriger et d’autres pour obéir.

                - Les riches et les puissants ne le sont pas devenus par hasard mais parce qu’ils sont d’une essence supérieure.

                - La Loi du commun décidée par la classe dirigeante doit s’appliquer avec rigueur aux classes inférieures.

                - La classe dirigeante est au-dessus des lois du commun et bénéficie de droits supérieurs.

                C’est peut-être cela qui fait peur à Mr Darcos, homme du commun au service de la classe dirigeante.



                • finael finael 30 octobre 2008 23:55

                  "Les hommes naissent et demeurent égaux en droit"

                  C’est de l’Histoire, et on l’apprend à l’école.

                  Quoi que vous fassiez, l’Histoire servira toujours à construire une mémoire commune, mais je ne sais quels professeurs vous avez eu, les miens étaient passionnés par leur discipline et nous ont toujours encouragé à approfondir par nous mêmes les sujets traités.

                  "Fresres humain qui après nous vivez,

                  N’ayez les coeurs contre nous endurciz

                  ...."

                  François Villon, vers 1350

                  C’est aussi de l’histoire !

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