Mille euros pour casser une vieille voiture ! Le Père Noël de l’Elysée est fauché
Comme prévu, le gouvernement sort la solution magique de la prime à la casse. En fait, une prime à la caisse puisque le citoyen doit passer à la caisse pour s’offrir une caisse et envoyer à la casse sa vieille caisse. Combien de gens sont-ils réellement concernés ? Est-ce une mesure utile et efficace ?
La prime à la casse fut une solution déployée par Les résidents de Matignon Edouard Balladur puis Alain Juppé pour doper les achats automobiles en ces années moroses de 1995. Maintenant, c’est Sarkozy qui devrait annoncer cette mesure à nouveau. Les chansonniers vont ironiser sur la sarkozette, fillonnette, pirouette, cacahouète… 1000 euros !
1000 euros, voilà ce que proposerait le gouvernement pour que le citoyen se débarrasser de sa vieille automobile qui forcément, pollue, est invendable sur le marché de l’occasion ; puis achète un véhicule propre, avec le bonus écologique en prime. J’avoue n’avoir jamais pigé comment cette prime à la casse a pu fonctionner par le passé. A moins de jouer au niveau psychologique. C’est l’histoire d’un gars qui a une vieille caisse n’ose pas passer une annonce et affronter le client pour la revendre. Ce bon gars se dit qu’il contribue à améliorer le parc automobile, il est fier et il va toucher la prime, pas comme son voisin dont la caisse n’est pas assez vieille. Il fait le pas pour ne pas passer à côté de l’occasion. Et justement c’est à cette occasion que le comportement irrationnel des individus s’est manifesté. Certains ont sans doute envoyé à la casse une automobile qui rendait des services et pouvait se négocier sur le marché de l’occase un peu plus que la prime offerte par le gouvernement.
Sous Balladur, la prime était de 5000 francs, récession oblige. Un peu de croissance est arrivé. La prime est passée à 7000 francs sous Juppé. 750 euros de 1993, faites le calcul avec l’inflation, c’est plus que les 1000 euros de 2008. Et les 1067 euros de 1995, c’était un super cadeau. A moins d’être nul en calcul et en bon sens, il y a fort à parier qu’après avoir alléché l’opinion avec une prime de 1000 euros, notre président annoncera 1200 voire plus comme chiffre définitif, ce qui est un minimum. On reconnaît là la fine psychologie de l’Elysée. On promet moins que ce que l’on va donner, du coup, le président apparaît comme généreux. Et si le chiffre de 1000 est maintenu, c’est que vraiment, les caisses de l’Etat sont vides pour permettre aux constructeurs de vider leur stock de caisses neuves à peine sorties de l’usine.
Mais même 1200, ça ne ferait pas le compte. Parce que le parc automobile de 2008 est bien plus large que celui de 1995. Parce que les mentalités ont changé et que la France entre comme les States dans l’ère de la frugalité. Parce que si un type roule dans une caisse qui vaut 1000 euros ou un peu plus, c’est qu’il n’a pas les moyens d’en changer et que le marché de l’occasion étant ce qu’il est, avec un peu de liquidités, il préfèrera acheter une occase de 5000 euros en vendant son véhicule 1000 euros voire plus, au lieu de l’envoyer à la casse pour un neuf qui lui sera facturé au moins 10000, voire 15000, selon le type de véhicule dont il a besoin. Autant dire que cette mesure semble inefficace. Pourtant, elle émane de l’Elysée et ne peut être que géniale si on en croit les avis de Claude Allègre sur la réactivité de Sarkozy dans la gestion de la crise. C’est exact. Pourquoi suis-je si mécréant. J’imagine des tas de type fourguant leur vieille caisse à la casse pour s’acheter une berline avec équipements et ABS de chez Zozo, après avoir contracté un crédit bancaire alloué grâce aux dispositifs de Sarkozy qui relance le crédit avec injection de liquidités malgré la colère de Bruxelles ; sans compter la garantie des fonds bancaires et des prêts.
Mais au final, le système économique est moribond dans ses lubies fondamentalistes sur le gavage consumériste, le productivisme, la croissance, les profits financier. Et que cette prime à la casse symbolise l’envoi à la casse du système. Une fois épurés les comptes et les esprits, un nouveau système se dessinera. Et les gens pourront y circuler, y compris avec des vieilles automobiles qui ne sont pas si polluantes. Quoi qu’il en soit, le marché de l’automobile est en baisse et c’est dans la logique économique. On ne peut pas forcer les gens à consommer plus que nécessaire et plus que la solvabilité ne le permet. La prime à la casse de Sarkozy est une mesure inadaptée mais on pardonnera tout à notre président qui fait tout pour nous sortir de la crise. Allez, M. Sarkozy, faites nous rêver, osez mettre 2000 euros pour la casse, soyons fous, consommons à en perdre la raison, pour satisfaire les impératifs de la croissance et sauver notre industrie automobile ! Mais non, c’était une boutade, revenons à la raison !
On ne condamnera pas Sarkozy pour une mesure capable de montrer à l’opinion qu’il ne cesse d’agir pour contenir la crise. Mais pourquoi ne pas s’en remettre au libéralisme. Avons-nous réfléchi à ce concessionnaire belge qui pour une caisse à 25 000 euros, en offre une valant 10 000 euros. C’est efficace paraît-il. Si cette mesure ne paraît pas généralisable, elle en dit long tout de même sur les marges des vendeurs. Alors, pourquoi une prime à la casse alors que 1000 euros, c’est une décote moyenne pour un petit véhicule genre 106 ou Twingo ; et que lorsqu’on montre dans la gamme, des rabais de plusieurs milliers d’euros sont tout à fait possible.
Cette prime à la casse montre bien le peu d’inventivité et de marge de manœuvre d’un gouvernement et d’un président qui croit encore que le volontarisme permet de tout solutionner voire améliorer. Mais la réalité ne fonctionne pas ainsi. Une prime de 2000 euros eut été plus efficace mais on imagine le tollé à l’Assemblée, lorsque les députés eurent constaté que les centaines de millions d’euros dépensés pour le bonheur de constructeurs qui ne sont pas tous français, loin d’en faut, les Allemands, les Italiens, les Japonais occupant le terrain. Alors imaginons pour rigoler la tête de Manuel Barroso lorsque Christine Lagarde annonce une prime à la casse pour acheter un véhicule PSA ou Renault ! C’est aussi un coup à fâcher Angela Merkel pendant dix ans. On ne rigole pas avec les règles de la concurrence non faussée.
Aux dernières nouvelles, la prime à la casse risque bel et bien de partir à la casse, aux côtés des fausses bonnes idées pour temps de crise. Annoncée dans le Monde daté de mercredi puis relayée dans les JT de mardi soir, cette mesure vient de susciter le tollé de Patrick Devedjian (AFP, 10h42) secrétaire général de l’UMP, qui considère cette prime comme inutile, surtout par ces temps où il ne faut pas gaspiller l’argent public.
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