Pour une poignée de Vélib’s
J’ai beaucoup lu sur le Velib’ depuis la mise en service effective. Honnêtement, je ne voyais pas ça d’un bon œil, connaissant le comportement habituel du Parisien moyen à vélo. Cependant, avant de critiquer quelque chose, il convient de le tester décemment. A ce niveau, le blocage est surtout psychologique : entre le fait de passer pour un bobo et les désagréments dont témoignent les premiers usagers, l’idée nécessite une certaine maturation.
L’Aventure (avec un grand A) commence donc samedi soir, après force apéros entre gens de bonne compagnie. N’écoutant que notre bon sens (proportionnel, comme chacun le sait, à la quantité d’alcool absorbé) nous décidons alors de nous vélibporter d’Alésia (14e) à Simplon (18e). Le but n’est pas l’économie ni la rapidité, bien sûr, mais plutôt d’effectuer le test dans les meilleures conditions : nuit idéale, pas de vent, peu de voitures.
Nous nous mettons donc en quête de nos montures, non sans avoir fait le plein de « bon sens » pour tenir tout le trajet. Ici, il convient de noter quelques faits : les contrôles d’alcoolémie sont beaucoup moins fréquents à vélo, et le vélib semble disposer d’une relative bienveillance de la maréchaussée (les municipales ne sont pas loin...). En ces temps de prohibition éthylique dans les déplacements, ce sont des critères à prendre en compte. J’apprécie à sa juste valeur la dive bouteille, il me sied donc de n’avoir pas à me soucier des 0,5 g/l fatidiques.
Première étape : station Jean Moulin (14010). Là, c’est Byzance : il y a pléthore de vélos, et en cadeau bonux un technicien en camionnette venant réapprovisionner ! Décidément, la nuit est belle...
Me saisissant de ma précieuse Carte Bleue, je prends le contrôle de la borne. Celle-ci m’ayant délivré mon précieux sésame, je poursuis la procédure. L’automate m’annonce alors qu’il n’y a aucun vélo disponible, niant ainsi l’évidence. Le technicien m’interpelle alors. « La borne ne marche plus, toutes les bornes tombent les unes après les autres... ». Une vague de déception me submerge alors. Point de monture, point de liberté, tout s’effondre. Mais hauts les cœurs, l’objectif de la soirée n’est plus discutable, le rubicond est franchi, si moyen il y a, a vélib la nuit fera. Et puis il y a un technicien, tout est possible, le professionnel a toujours la solution. Et il l’a. Tout du moins, il y croit très fort. « Avec votre carte, vous devez pouvoir débloquer l’un des vélos que je viens de poser ». La situation dégénère alors rapidement. Il me demande en effet de passer ma carte sur la borne. Mais voilà, je ne souscris pas à Navigo (le Big Brother façon RATP). Il ne semble pas comprendre que je ne puisse en être équipé. Il essaye alors de passer successivement ma CB et mon ticket d’abonnement sur la borne sans succès. Je lui explique pendant ce temps que si ma CB était équipée d’une puce RFID « sans contact », je serais au courant. Et qu’un bout de carton fait rarement réagir l’électronique. En s’excusant de ne pouvoir faire mieux, il m’explique que lui et ses collègues sont lâchés sur le terrain sans formation. Le système bug depuis le début, et les bornes se ramassent à la pelle.
Je refuse, je réfute, je m’insurge ! Qu’à cela ne tienne, cette borne me rejette, j’en trouverai une autre. J’enjoins alors mon compagnon de bordée de prendre son abonnement. Or, étant étudiant, le bougre est également indigent. Il refuse donc de payer sans être sûr de pouvoir utiliser.
Nous partons pour la station voisine après consultation de la carte imprimée. En théorie, la borne est capable de l’indiquer sur l’écran, mais icelle sera mauvaise jusqu’au bout. Station des Plantes (14026). Cette station délivre des vélos, et elle est approvisionnée, mais le côté CB ne fonctionne pas. Impossible donc pour mon ami de s’abonner. Station suivante rue du Château (14031), pas de vélo.
Et enfin, mairie du 14e (14032), la délivrance. La borne fonctionne, le deuxième abonnement à la journée est payé, vérification des vélos, retrait, et en route. Nous sommes sortis à minuit à la chasse aux vélib, il est 00 h 41...
Le trajet prévu nous emmène dans le nord de la ville, à proximité du métro Simplon. Le constat est clair : les vélos sont lourds et les trois vitesses limitent la vélocité. La première fait pédaler dans le vide à la moindre descente, la troisième soulage la peine dans les montées, mais sans plus. Cependant soyons justes, si le propos est à la balade d’agrément, c’est bel et bien suffisant.
Arrivés à destination (18022), nous nous amarrons au premier point d’attache qui se présente, et finissons à pieds, pour découvrir une station encore plus proche du point de rendez-vous. Le vent tourne, notre côté optimiste reprend force : on aura peu à marcher pour retrouver un vélo.
Quelques heures et verres plus tard, la survie est dans le mouvement. Il est quatre heures du matin passées, la nuit n’est pas finie. En selle, direction Bastille. Je tapote mon numéro d’abonné et j’apprends que mon vélo n’a pas été retourné. Je l’avais pourtant bien enclenché, entendu le bip, vu la loupiotte passer au vert... Nous retournons donc à la station précédente, qui me propose également de parquer mon vélo que je n’ai plus. Je demande de l’aide à cette brave borne et j’essaye trois fois de joindre une assistance en ligne, rien. Je souscris donc un nouvel abonnement, seule solution envisageable à ce stade, et nous embrayons pour Filles du calvaire (11040). Cette fois, je demande un reçu, préférant éviter la souscription d’un troisième abonnement.
Dernière étape, nous reprenons des véhicules PHM (propulsés à l’huile de mollet) pour boucler la boucle. Retour donc à Jean Moulin vers 6 heures pour découvrir une station pleine, mais vraiment. Consultons le plan : une jeune fille nous paye de son pot belge à base de malt et de soda au caramel tout en nous indiquant les stations qu’elle a déjà essayées. Pause cigarette, c’est reparti pour Général Leclerc (14019), Les Plantes (14026), mairie du 14e, pour finir à Mouton Duvernet (? ??), station que je ne trouve pas sur le plan.
Bilan de la nuit : une vingtaine de kilomètres parcourus, un abonnement avec un vélo non retourné, deux demi-heures supplémentaires. Le système est donc loin d’être rodé, tant au niveau technique (les bornes) que logistique (les stations pleines dans un secteur donné), mais pour une poignée d’euros le service est sympathique. Enfin la bobo attitude est accessible à tous !
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