Voltaire et Rousseau seraient-ils taxés d’Islamisme ?
Voltaire louait l'islamisme. Il est censuré.
Quand un cinéaste de l'une des nations de l'Iran ne peut par le jeu de pressions politiques réciproques, se produire à Cannes, il est acclamé par toutes les mains jolies ou fanées qui font le concert de l'opinion publique ; et des doctes à la voix cassée ou au contraire enflammée par la précipitation de ton d'une jeunesse qui veut vite engloutir le savoir, nous expliquent que l'Enfer commence par le voile et se termine à l'excision africaine. Qui oserait interrompre cette fureur ?
Des immigrés apeurés en viennent à changer de prénom, et clament qu'à être musulmans par le destin, ils ne sont pas islamiques ou islamistes par choix, désignant par ceux-ci des extraterrestres capables d'atteindre consécutivement par deux fois les tours jumelles de New York au mépris d'une armée formidable, prévoir par une magie diabolique l'absence des Israéliens, ou aussi de foncer sur le Pentagone sans abîmer sa pelouse, avant de se volatiliser ! Mais imaginez que par un miracle soudain, certain mort illustre revienne chez nous, qu'un Voltaire rajeuni nous dise :
« Dans un livre dédié à la femme savante
Qui traduisait Newton et charmait mon esprit
Se déroule à vos yeux de nation insolente
Et d'athées religieux le Destin que m'apprit
La vie de Mahomet, plus sage que vos Rois,
Qui courent leurs maîtresses, avides de pouvoir
Et de trésors lointains. Loin de couvrir d'effrois
Des peuples qu'abusait un faux sens du devoir
ll maîtrise et hausse l'éloquence prudente,
Qui persuade et étend la langue du poète. »
Il reprendrait ensuite le courant de la prose et réciterait aux laïques étonnés ce passage mal connu de son beau livre présentement censuré, à savoir l'Essai sur les Mœurs et l'Esprit des Nations :
« C'est un préjugé répandu parmi nous, que le mahométisme n'a fait de si grands progrès que parce qu'il favorise les inclinations voluptueuses. On ne fait pas réflexion que toutes les anciennes religions de l'Orient ont admis la pluralité des femmes. Mahomet en réduit à quatre le nombre illimité jusqu'alors. Il est dit que David avait dix-huit femmes, et Salomon sept-cents, avec trois-cents concubines. Ces rois buvaient du vin avec leurs compagnes. C'était donc la religion juive qui était voluptueuse, et celle de Mahomet était sévère. C'est un grand problème parmi les politiques, si la polygamie est utile à la société et à la propagation. L'Orient a décidé cette question dans tous les siècles, et la nature est d'accord avec les peuples orientaux, dans presque toutes espèce animale, chez qui plusieurs femelles n'ont qu'un mâle ».
Un point aura frappé les spectateurs de cette résurrection, c'est d'entendre ce qu'aucun Musulman en servitude n'osera publier pour éclairer un monde enténébré.
Cette page devrait être lue partout, placardée dans les lieux de culte et le
prestige de la France s'en porterait mieux :
« La prohibition de tous les jeux de hasard est peut-être la seule loi dont on ne puisse trouver d'exemple dans aucune religion. Elle ressemble à une loi de couvent plutôt qu'à une loi générale d'une nation. Il semble que Mahomet n'ait formé un peuple que pour prier, pour peupler et pour combattre.
Toutes ces lois qui, à la polygamie près, sont si austères, et sa doctrine qui est si simple, attirèrent bientôt à sa religion le respect et la confiance. Le dogme surtout de l'unité d'un Dieu, présenté sans mystère, et proportionné à l'intelligence humaine, rangea sous sa loi une foule de nations ; et jusqu'à des nègres dans l'Afrique, et à des insulaires dans l'Océan indien.
Cette religion s'appela l'Islamisme, c'est-à-dire, résignation à la volonté de Dieu, et ce seul mot devait faire beaucoup de prosélytes. Ce ne fut point par les armes que l'Islamisme s'établit dans plus de la moitié de notre hémisphère, ce fut par l'enthousiasme, par la persuasion, et surtout l'exemple des vainqueurs, qui a tant de force sur les vaincus...
Le peu que je viens de dire dément bien tout ce que nos historiens, nos
déclamateurs et nos préjugés nous disent ; mais la vérité doit les combattre.
Bornons-nous toujours à cette vérité historique : le législateur des musulmans, homme puissant et terrible, établit ses dogmes par son courage et par ses armes ; cependant sa religion devint indulgente et tolérante. L'instituteur divin du christianisme, vivant dans l'humilité et dans la paix, prêcha le pardon des outrages ; et sa sainte et douce religion est devenue par nos fureurs, la plus intolérante de toutes, et la plus barbare » (1).
« De l'Arabie heureuse aux marches syriennes,
La tradition veut croire en des tribus rivales
Que la race maintient par des voies féminines
Mais que des usuriers abusent en paroles.
Aux mages le Prophète a emprunté l'idée
D'un paradis, jardin où les hommes revivent,
Leurs sens perfectionnés : à l'âme est concédée
Un corps si purifié que les Amours le suivent !
Les femmes l'écoutaient, et l'ennemi divisé
Par son fort caractère s'est tu galvanisé ! »
Mais c'est l'austérité qui sur terre prépare ce bonheur, marche dernière vers
l'absorption en Dieu. Et le Français d'écrire, après avoir relevé, dans le
chapitre cité plus haut, la sévérité du jeûne : « Il n'y a point de religion dans laquelle on ait recommandé l'aumône. La mahométane est la seule qui en ait fait un précepte légal, positif, indispensable. L'Alcoran ordonne de donner deux et demi pour cent de son revenu, soit en argent, soit en denrées ».
Les lectrices de Rousseau sont-elles voilées ?
Pareille lecture verrait encore la saine philosophie au secours de nos mœurs, conclurait une Musulmane, du moins du type de celle que Cohn-Bendit ne choisirait pas, comme le fantôme d'Alexandre rejoint celui de Roxane dans l'Histoire convertie en roman : elle prendrait un texte de Rousseau dans ses mains d'artiste et lirait à ses compagnes ce qu'aucune lycéenne ou lycéen
modérément resté garçon, exception faite du système scolaire japonais,
n'oserait soutenir devant sa maîtresse, ceinte aux couleurs que l'on devine : « montre la vanité des disputes sur la préférence ou l'égalité des sexes : comme si chacun des deux, allant aux fins de la nature selon sa destination
particulière, n'était pas plus parfait en cela que s'il ressemblait davantage à
l'autre ! En ce qu'ils ont de commun ils sont égaux ; en ce qu'ils ont de
différent ils ne sont pas comparables. Une femme parfaite et un homme parfait ne doivent pas plus se ressembler d'esprit que de visage, et la perfection n'est pas susceptible de plus et de moins ».(2)
Je lui laisse le soin de parcourir le roman épistolaire de Rousseau La Nouvelle Héloïse où les sociétés de femmes de Genève se forment elles-mêmes « ordinairement » à leur propre tâche et ne se mêlent que « quelquefois », précise Rousseau, aux hommes, sauf à l'occasion de fêtes, chacun des deux maintenant par lui-même le corps entier du peuple (3) : « Suivons les indications de la nature, consultons le bien de la société, nous trouverons que les deux sexes doivent se rassembler quelquefois et vivre ordinairement séparés ».
Alors donner ainsi en exemple la valeur occidentale pour l'opposer à la civilisation islamique est aussi inculte que mensonger, car ceux qui se livrent à cet exercice trompent le monde, et échafaudent une sorte de
nouvelle philosophie qui ment et qui tue.
Serait-ce à dire que l'islamophobie est une seconde campagne, comparable à la réaction contre ce protestantisme que serait l'Islam, que la fin de cette campagne est de soumettre à la société de consommation, à une république sans peuple, de transformer en un débris de races, mot honni par nos citadins, ceux auxquels les attaches agraires conservent un instinct naturel. C'est ce que penserait Rousseau, dites-vous, s'il apparaissait parmi nous, comme l'enfant de la crèche, et il ne pourra pas être contredit par la raison pratique de toutes les écoles qui se disputent par leur intelligence, mais s'inclinent devant l'instinct qui en est le fond, le seul à mériter le titre de divin ? En fait l'Islamisme dans un temps indéterminé pourrait bien restituer à l'Europe l'âme que la prétendue Révolution ou conspiration des esprits-forts lui a ôtée. Mais l'instinct naturel, espérons-le, maîtrisera l'instabilité de l'instinct révolutionnaire. En réalité l'Islam a déjà germé parmi nous, dans plusieurs penseurs et donc dans la pensée. C'est normal que les virus réagissent, comme à la croissance.
1 - Essai sur les Mœurs, Ch. VII De l'Alcoran et de la loi musulmane. Examen si la
religion musulmane était nouvelle, et si elle a été persécutante
2 - L' Émile, livre V
3 - Lettre à D'Alembert sur les Spectacles
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