@bluerider
Haaa, mais c’est qu’on serait susceptible aussi...
(Parcourez mes articles, Carl, et revenez me dire s’il s’agit de propagande..)
Pierre EYBEN, le 6 mars 2013
http://pierre.eyben.be/article454.html
Il est des moments où l’on perçoit plus qu’à d’autres la force de la pensée dominante et l’arrogance de ses nervis. Ainsi en est-il des commentaires à la mort de deux figures mondiales de la gauche, très différentes mais toutes deux chères à la plupart de celles et ceux qui pensent qu’un autre monde (plus juste et solidaire faut-il le préciser ?) est possible.
Il y a d’abord Stéphane Hessel, l’un de ces « magnifiques vieux » qui avec Edgar Morin ou Alain Badiou, le regard profond et aussi perçant que leur pensée, nous invitent à la réflexion et à l’indignation. Stéphane Hessel qui a fait oeuvre de pédagogie pour rappeler à toute une génération ce qu’étaient les acquis du Conseil National de la Résistance et la dynamique qui a prévalu à l’élaboration de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme. Un Homme de gauche qui poussait la qualité jusqu’à aimer la poésie.
Il y a Hugo Chavez aussi, l’homme dont l’action politique (car c’est bien de cela dont il est question et pas de son caractère ou de son vocabulaire trop cru aux yeux de certaines « belles personnes ») a battu en brèche l’idée selon laquelle « there is no alternative », ouvrant la voie dans de nombreux pays d’Amérique Latine (et on l’espère ici aussi un jour) à un autre mode de développement, au « Socialisme du XXIème siècle ».
Entre 1999 et 2010, le taux de pauvreté au Venezuela a baissé de 21 %, la mortalité infantile est passée de 25/1000 à 13/1000, le nombre de médecins par habitants est passé de 18/10.000 à 58/10.000, le taux de scolarisation secondaire a plus que doublé (dépassant les 70 %), et près de 2 millions d’adultes ont été alphabétisés, le nombre de bourses universitaires a été multiplié par 8, la « Mission Santé » créée en 2003 a réalisé plus de 265 millions de consultations gratuites entre 2003 et 2011 et a sauvé plus de 1,7 million de vies, le nombre de centres de santé a été triplé, environ 4 millions d’emplois ont été créés, la durée hebdomadaire du travail est passée de 44 à 40 heures, le congé de maternité à 26 semaines et le congé de paternité à 14 jours... !!
Alors qu’ici on sabre sans cesse dans les dépenses sociales, le Venezuela a investi en 12 ans 594 milliards d’euros dans les secteurs sociaux. Pour celles et ceux que la dimension environnementale intéresse aussi, en matière de souveraineté alimentaire, alors que 90 % de la nourriture était importée en 1990, ce chiffre et désormais tombé à moins de 30 %.
Bien évidemment, la gauche radicale (celle qui va à la racine du glissement de société actuel et interroge le capitalisme et les logiques productivistes), notamment parce que son histoire est lourde de sens, a le devoir de regarder avec vigilance ce qui est fait au nom du socialisme. On trouvera que les soutiens politiques de Stéphane Hessel à certains sociaux démocrates étaient incompréhensibles. On se demandera si les alliances politiques qu’a tenté Hugo Chavez face à l’axe impérialiste étaient toujours judicieuses.
Mais, en ces tristes moments de leur disparition, on aimerait pouvoir rendre hommage à ces figures qui ont porté notre combat sans avoir à subir encore l’indécence et la souillure de certains, notamment à travers les médias. On ne veut pas entendre l’insupportable Richard Prasquier, soi-disant ’représentant’ des Juifs de France, mais en fait vice-ambassadeur d’Avigdor Lieberman à Paris, vomir sur Stéphane Hessel en raison de son engagement aux côtés des Palestiniens dans leur lutte contre l’occupation coloniale israélienne.
On ne veut pas lire sur le site de la RTBF que Hugo Chavez a « régné sans partage pendant 14 ans sur le Vénézuela », parce qu’il n’est pas comme Albert II et a, lui, été élu et réélu par un peuple qui très majoritairement soutenait sa politique . On ne veut pas lire dans Le soir qu’il « monopolisait les antennes des médias vénézuéliens », quand les médias privés qui le combattaient de façon acharnée sont dans ce pays largement majoritaires et jouissent d’une grande liberté.
Sans doute la rage de certains à l’encontre de ces Hommes est-elle à la hauteur de la rupture de leur pensée, de la qualité de leur action. Sans doute y a-t-il aussi pour certains beaucoup de sottise, de méconnaissance, de soumission inconsciente à la pensée dominante.
Mais on a quand même envie de leur dire, et même de leur crier : Taisez-vous, quelques jours au moins, et laissez-nous honorer en paix la mémoire de ces Hommes qui demeureront des exemples pour la vraie gauche, cette gauche qui à ceux qui se limitent à dire « sans nous ce serait pire » préfère ceux qui démontrent en terme de justice sociale « qu’avec eux, c’est mieux ».
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« Il nous appartient de veiller tous ensemble à ce que notre société reste une société dont nous soyons fiers : pas cette société des sans-papiers, des expulsions, des soupçons à l’égard des immigrés, pas cette société où l’on remet en cause les retraites, les acquis de la Sécurité sociale, pas cette société où les médias sont entre les mains des nantis, toutes choses que nous aurions refusé de cautionner, si nous avions été les véritables héritiers du Conseil National de la Résistance (Stéphane Hessel - extrait de »Indignez-vous« ) »
« A ceux qui me souhaitent la mort, je leur souhaite une très longue vie pour qu’ils continuent à voir la Révolution Bolivarienne avancer de bataille en bataille, de victoire en victoire » (Hugo Chavez - 14 décembre 2012)
Les charognards seraient mieux inspirés de la fermer, ne fut-ce qu’un jour.. ! Mais c’est sans doute déjà trop leur demander..
Quand Sarko, lui, rentrait dans le rang, mettant la France à la botte du commandement militaire US, en réintégrant l’OTAN !
Des dizaines d’articles !? Vous voulez dire les chroniques de l’anti-chaviste patenté Paranaga du Monde ? Ou de Libération.. ? Ou de Alexandre Adler ?
Une déception sans doute pour l’auteur qui pensait, avec ce bon article, faire oeuvre de pédagogie.. Tandis que ça brait et que ça anônne et que ça déblatère à tout va. Misère.. !
Enfin, Robert, JL, machiavel, heureusement que vous passiez par là..
(alors, suite..)
Veni, Vidi, Vinci
Donc, le 30 décembre 2010, Thierry Mariani, secrétaire d’Etat chargé des transports, a paraphé le contrat de concession du nouvel aéroport Grand-Ouest. Signé par la société concessionnaire des aéroports du Grand Ouest, filiale de VINCI Concessions (85 %), en partenariat avec la Chambre de Commerce et d’Industrie de Nantes (10%) et Entreprise de Travaux Publics de l’Ouest (ETPO – CIFE) (5 %), il est entré en vigueur le 1er janvier 2011.
Comme un bonheur n’arrive jamais seul, Vinci a obtenu la reprise de l’exploitation des aéroports de Nantes-Atlantique et de Saint-Nazaire Montoir, en plus de la conception, le financement, la construction, l’exploitation et la maintenance du nouvel aéroport du Grand Ouest Notre-Dame des Landes pour une durée de 55 ans.
Ce projet ultra-moderne déposé par Vinci présente deux pistes de 2.700 et 2.900 mètres : trop courtes pour y faire atterrir des A 380, mais comme les gros porteurs ne sont pas trop à la mode, on s’en dénoyaute la cerise. Puisqu’on vous dit que c’est ultra-moderne. Faut suivre un peu.
Deux pistes pour 4 millions de passagers. Une bande de sauvages autochtones qui vit là-bas, l’ACIPA (Association Citoyenne Intercommunale des Populations concernées par le projet d’Aéroport de Notre Dame des Landes) soutient qu’il n’existe aucune règle européenne allant dans ce sens. Peut-être, mais qu’est-ce qui leur dit que demain on ne va pas construire 8 pistes supplémentaires à Roissy, avec 60 millions de passagers sur 4 pistes ? Le bon sens n’est pas toujours près de chez vous, vous diront les experts.
Le projet devrait coûter 561 millions d’euros (aucun budget de dépassement n’a été prévu vu que ça n’arrive jamais sur des gros chantiers), ce qui heureusement en période de crise est une somme tout à fait modeste parfaitement employée. Ce n’est pas comme si avec 561 millions d’euros on pouvait créer des logements, financer des projets écologiques, faire de la recherche… Une paille donc, mais dans l’oeil.
La répartition de l’enveloppe globale s’établit comme suit :
Vinci apporte autour de 310 M€ des 441 M€ évalués pour la réalisation de la plateforme aéroportuaire qui se répartit comme tel :
- 100 millions d’euros c’est le résultat du bénéfice fait sur Nantes Atlantique entre 2010 et 2017 (sic !)
- 100 millions d’euros empruntés sur les marchés financiers cautionnés par les collectivités locales, noir sur blanc dans le cahier des charges (re-sic !)
- 100 millions d’euros des actionnaires de Vinci avec un rendement annuel de 12% imposé. (re-re-sic !)
L’Etat (130,5 M€) et les collectivités publiques (115,5 M€) se sont engagés sur une contribution publique totale de 246 M€, financement partagé au travers d’un syndicat mixte comprenant :
- Les Conseils régionaux des Pays de la Loire (40,4 M€) et de Bretagne (28,9 M€),
- Le Conseil général de Loire-Atlantique (23,1 M€)
- Nantes Métropole (17,9 M€)
- La communauté d’agglomération de Saint-Nazaire (2,9 M€) et celle de La Baule-presqu’île de Guérande (2,3 M€)
On rappellera tout de même que lors du débat public de 2002-2003, le baril de pétrole (brent) était entre 30 et 40 dollars. Aujourd’hui c’est plutôt autour de 100 dollars le baril, mais ça n’a évidemment aucune sorte d’importance.
Cinq enquêtes publiques se sont déroulées du 21 juin au 7 août 2012. Quelque 400 contributions ont été déposées ou envoyées aux commissaires enquêteurs, et certains viendront chicaner sur “la précipitation à organiser l’enquête pendant l’été, avant l’entrée en application de la réforme des enquêtes publiques, ce qui a permis à l’Etat d’organiser la procédure conformément à l’ancienne règle, alors que la nouvelle aurait permis une instruction plus longue”.
Il y aura bien des pisse-froid pour venir arguer également que les centaines d’hectares requis pour le nouvel aéroport sont des zones humides, en tête de deux bassins versants, que leur artificialisation est contraire aux dispositions du SDAGE Loire Bretagne.
Que normalement ce projet ne peut satisfaire aux exigences de la loi sur l’eau, mais heureusement l’Etat et Vinci proposent une solution, dite loi-du-contournement-de-la-loi, qui permettrait de passer outre : le concessionnaire Vinci-Aéroport du Grand Ouest aurait recourt à des « unités de compensation zones humides » calculées selon des coefficients de 0,25 à 2 pour évaluer l’intensité de la réponse compensatoire des mesures.
Bon ok, c’est un peu violer la loi française et la directive européenne cadre sur l’eau, parce que normalement une zone humide détruite doit être compensée par deux hectares construits sur le même bassin versant, or ici toute la zone du projet et ses alentours sont classés en zones humides. D’accord, il n’est donc pas possible de compenser, l’approche retenue par AGO en termes de fonctionnalités n’est pas viable, mais bon puisqu’on vous dit que tout ça c’est pour le développement économique. L’état a bien le droit de contredire ses propres directives, sans compter qu’en 2012, on s’en fout de l’eau, après tout.
Les indemnités proposées aux propriétaires qui sont priés de dégager illico de la zone avant l’arrivée des pelleteuses sont de 27 centimes par m². Quand on sait que l’un d’eux a par exemple acheté son terrain 24 centimes par m² en 1977, ça laisse rêveur.
Il paraîtrait aussi que le marché des émissions de CO², qui renchérit le coût de l’aviation, a été omis dans les études. Comme ces trucs de CO² sont encore de lubies de baba-cools avec des fleurs sur leurs sandales en cuir, on en tiendra évidemment pas compte.
D’autres empêcheurs de bétonner en rond viendront pérorer que la concurrence du TGV n’a pas été prise en compte. Mais qui prend encore le TGV entre Nantes et Paris de nos jours ?
Et comme si la nouvelle liaison TGV Rennes-Paris prévue pour 2020-2025 allait inciter beaucoup de Rennais à prendre l’avion à Paris plutôt qu’à Notre-Dame-des-Landes. N’importe quoi.
D’autres encore vous expliqueront que la construction du tram/train depuis Nantes, estimée à 150 millions d’euros, n’est pas prise en compte dans le projet, alors que ses effets sont inclus dans le calcul de bénéfices pour la société Vinci. C’est juste parce qu’ils ne savent pas anticiper sur les bénéfices que réalise le privé à partir des investissements des deniers publics. En attendant, vous viendrez à l’aéroport en voiture et vous paierez le parking, à Vinci bien sûr, qui a obtenu le passage dans le projet de 7 000 à 11 000 places de parking tandis que les pistes ont été revues à la baisse faute de moyens.
En terme d’emploi, de drôles de sbires contestent l’étude estimant que 1000 emplois sont crées par million de passagers tout ça parce qu’elle se base sur les statistiques des trois grands hubs internationaux qui comptent également le fret, alors qu’en France, pour les aéroport régionaux la norme est de 256 emplois par million de passagers. Les gens sont vraiment tatillons quand il s’agit de leur boulot, c’en devient pénible.
A contrario, l’étude de Déclaration d’Utilité Publique nous explique – c’est un ravissement sans égal quand on fait de la politique – que l’aéroport Grand-Ouest de Notre-Dame-des-landes rapportera entre 600 et 700 millions d’euros à la collectivité. N’en déplaise à l’étude du cabinet CE-Delft de 2011.
D’ailleurs qui s’intéresse à l’avis d’un cabinet hollandais, organisme indépendant de recherche et de conseil spécialisé dans les solutions innovantes aux questions environnementales, qui alerte sur les risques d’un déficit entre 90 millions et 600 millions d’euros selon les scénarios, et auteur il y a quelques années d’un rapport ayant contribué à l’abandon de l’extension de l’aéroport d’Heathrow à Londres ? Surtout quand il conclue que l’optimisation de Nantes-Atlantique apparaît plus génératrice de richesses pour la France que la construction d’un nouvel aéroport à Notre-Dame-des-Landes.
Franchement, on s’en fout un peu, qui va aller tenir compte de ça, sérieusement ?
Certainement pas Vinci, qui nous propose un monde merveilleux à Notre-Dame des landes :
De 4 millions de passagers à la mise en service, le trafic (actuellement 3,2 millions par an à Nantes-Atlantique) passera à “9 millions de passagers par an d’ici 2065” (ils sont aussi fins démographes). C’est promis. Vinci réduira aussi “la consommation d’énergie par 3 par passager”. Vinci utilisera des “techniques de construction innovantes pour l’ensemble du chantier”. Vinci aura un “bilan carbone positif sur la durée du projet en intégrant la construction”. Vinci est tellement balèze qu’à l’extérieur, “les jardins diffuseront les parfums spécifiques des essences locales” (si si, c’est dans le projet). Comment ne pas être émerveillé par l’odeur de la nature en patch ? Encore un peu de forcing et les agriculteurs du coin pourront même peut-être négocier des horaires de diffusion des odeurs de bouse de vache, ça leur rappellera le bon vieux temps.
Libérer des terrains de l’aéroport Nantes-Atlantique, dans cette partie sud-ouest de l’agglomération répond surtout à une logique d’aménagement global (en fait l’aéroport nous emmerde un peu dans nos projets) : “Selon l’Insee”, répète le commandeur Jean-Marc Ayrault, “Nantes accueillera 150 000 habitants supplémentaires d’ici 2030”. En urbanisme, on appelle ça régler le problème par le vide. En politique et nombre de voix, on appelle ça régler le problème par le plein.
Et qui vient d’obtenir la concession de cinq aéroports de l’Ouest, et aura le droit de construire de nouveaux quartiers sur les terrains libérés par l’ancien aéroport de Nantes Atlantique ?
Vinci, bien sûr. (Vous aviez deviné ? vous avez gagné le droit de financer le projet NDDL).
Décidément, nos politiques sont des génies, mais les gens de chez Vinci, ils sont vraiment trop forts.
PS : On me dit que sur place, le dialogue bat son plein, emmené par un Manuel Valls grand amateur de débats démocratiques. Vous pouvez donc dormir sur vos deux oreilles, en comptant les avions.
Pierre Deruelle
Hououou, mais c’est que ça remonte à plus loin encore, c’t’ histoire !
(bon, d’accord, c’est long, mais c’est bon !)
http://www.pierrederuelle.com/notre-dame-des-landes-un-projet-de-1967-pour-repondre-aux-defis-de-notre-temps/
Notre-Dame-Des-Landes : Un projet de 1967 pour répondre aux défis de notre temps
Bon, c’en est assez. Moi ça me fait peine. Beaucoup trop de contre-vérités sont énoncées quotidiennement sur l’affaire de l’Aéroport Grand-Ouest, outrageusement raccourci en NDDL par les supporters de la bande de squatteurs basanés polygames crypto-anarchistes néo-staliniens qui ne se lavent même pas tous les jours. Il est peut-être temps de prendre UN PEU de hauteur, de dépassionner le débat, et de ramener UN PEU de sérieux sur ce sujet de haute voltige.
Un peu d’histoire(s)
Le site de Notre-Dame-Des-Landes fut choisi en 1967 (selon les normes européennes environnementales et de préservation de la biodiversité qui devaient à l’époque déjà probablement être les mêmes qu’aujourd’hui) par le Service technique des bases aériennes, puis validé en 1970 par le Comité Interministériel d’Aménagement du Territoire pour remplacer le “déjà” actuel aéroport de “Nantes Atlantique” notamment pour y développer le fret, et aussi un peu pour pouvoir accueillir fièrement le tout nouveau Concorde. Mais si, vous savez, cet avion qui a eu un petit souci le 25 juillet 2000, tuant 113 personnes, et qui ressemblait à un burn-out de cigogne sous extasy avec une paire de Ray-Ban.
S’il semble aujourd’hui – mais je m’avance un peu peut-être – que le projet n’accueillera finalement pas le Concorde, dès mai 1967, les autochtones du crû les plus civilisés pouvaient déchiffrer dans la presse locale avec leurs quelques rudiments de langue française que “La métropole Nantes-Saint Nazaire pourrait devenir le Rotterdam aérien de l’Europe par la création d’un aéroport international de fret au nord de la Loire”. Les hommes politiques et leurs experts avaient parlé. Et tout le monde sait ça, ils tiennent toujours leurs promesses.
En 1971, une vague histoire de choc pétrolier mit semble-t-il un peu de sable d’embargo de pays arabes de l’OPEP dans le moteur du projet de nouvel Aéroport à Notre-Dame-Des-Landes. Enfin, comme ces problèmes de pétrole sont définitivement derrière nous, ne vous inquiétez pas, l’histoire peut reprendre son cours.
Après ces quelques années de trafic stagnant, dans les années 80 la CCI qui gérait Nantes Atlantique posa la question totalement saugrenue de construire une nouvelle piste perpendiculaire à l’existante, qui eu permis aux avions de ne plus survoler Nantes. C’était sans compter sur l’avis du Conseil général de l’époque qui considéra qu’importaient peu trajectoires rectilignes, sens des vents dominants, et beaucoup moins de nuisances sonores sur la population : “Faisons au plus simple, de toutes façons, après, il y aura Notre Dame des Landes”.
La solution retenue par les experts fut donc de prolonger la piste existante, très mal orientée selon les pilotes et par voie de conséquence selon les riverains qui ne comprennent décidément rien aux expertises des experts agrées par des hommes politiques experts dans l’art d’agréer les experts des expertises.
Les mêmes experts de prévisions de trafic de l’époque annonçaient donc entre 5 et 9 millions de passagers pour l’an 2000, et comme vous l’avez compris puisqu’ils ne se trompent jamais, l’aéroport de Nantes Atlantique en accueille aujourd’hui 3,2 millions par an.
Heureusement, en 2000, sous le gouvernement Jospin, parce qu’on peut être de gauche et moderne, le projet ressortit enfin des cartons.
Mieux qu’un aéroport de fret, un aéroport international ! Il remplacerait partiellement l’existant restant en fonctionnement pour la société Airbus, qui heureusement pour les riverains ne fait jamais décoller d’avion. Quel rêve merveilleux pour les hommes politiques locaux de s’imaginer accueillir à bras fiscaux ouverts les hommes d’affaires du monde entier apportant la croissance et la mondialisation dans leurs valises en descendant de gros aéronefs sur deux pistes neuves ! Et quel argumentaire économique merveilleux pour un programme de réélection à un mandat local ! Faire décoller et atterrir des avions c’est un peu magique non, vous ne trouvez-pas ?
L’actuel aéroport de Nantes Atlantique
La France compte plus de 156 aéroports, contre 44 en Allemagne et 43 en Grande-Bretagne. S’il faut bien qu’on les batte sur quelque chose, c’est fait.
L’aéroport actuel de Nantes-Atlantique s’étend sur 320 hectares. Sa piste mesure 2.900 mètres par 45 mètres, et a été bétonnée en 1939, parce que l’herbe, c’est quand même plus pratique pour jouer au golf que pour faire atterrir mamie qui rentre des Seychelles. Cette piste permettrait d’absorber 35 avions par heure, même s’il n’y en a que 10 à 12 actuellement, mais c’est un argument de gauchiste en tongs pas rasé.
Le décret n° 2001-705 du 31/07/2001 a inscrit l’aéroport de Nantes Atlantique parmi ceux sur lesquels l’Autorité de Contrôle des Nuisances Sonores Aéroportuaires (ACNUSA) a des compétences élargies (10 aéroports en France). Traduction : il casse les oreilles à 42 000 personnes, mais comme le nouvel aéroport va arriver, on ne va surtout pas construire une nouvelle piste orientée correctement, ni même régler les questions de gestion du trafic aérien.
Forcément, il a toujours un collectif de crypto-anarchistes pilotes de lignes doutant de la pertinence du projet de Notre-Dame-des-Landes pour affirmer que “30 % des avions qui survolent le centre-ville pourraient l’éviter en passant par le sud de l’agglomération”. Comment croire Thierry Masson, cet officier-pilote de ligne de 50 ans basé à Nantes qui a tout du conspirationniste notoire quand il déclare : “Deux tiers du trafic transitent par le sud-est de l’agglomération. J’aimerais bien savoir pourquoi, en arrivant de Limoges, de Poitiers ou de Bordeaux, il faut faire un détour par le nord-est de l’agglomération et survoler le centre de Nantes”
Par sa superficie, Nantes-Atlantique a déjà la dimension d’un aéroport international.
En 2011, pour 60 800 mouvements (les décollages/atterrissages sont un peu les pompes/abdos du contrôleur aérien) l’aéroport à reçu 3,2 millions de passagers.
Sa surface est plus grande que celle de l’aéroport de Londres-Gatwick, qui, par comparaison, assure 280 000 mouvements par an et reçoit 31 millions de passagers, et quasi-égale à celle de l’aéroport de San Diego, en Californie (USA) qui voit passer annuellement 223 000 mouvements et achemine 17 millions de passagers. L’aéroport de Genève, qui ne possède qu’une seule piste, accueille 10 millions de passagers par an, 170 000 mouvements d’avions, et occupe 340 hectares.
En fait, ce qui sature un aéroport ce n’est pas le nombre de passagers mais bien évidemment le nombre de décollages/atterrissages, et sur ce point Nantes Atlantique est passé de 54 858 mouvements en 2007 à 60 800 mouvements en 2011. En suivant cette courbe, Nantes Atlantique devrait atteindre les 200 000 mouvements en 2750 après la troisième apocalypse, quand Nantes sera devenue la capitale du monde.
Du coup, Nantes-Atlantique a reçu le trophée ERA Award 2011-2012 du meilleur aéroport européen, ce qui est donc une excellente raison pour en construire un nouveau.
Cerise on the cup-cake, il y a donc une usine Airbus en bordure de la piste de Nantes-Atlantique qui emploie 2300 salariés à la fabrication notamment des radômes (extrémités avant des avions) et des caissons centraux de voilure de toute la gamme Airbus, pièces qui partent pour assemblage à bord du Beluga, l’avion-cargo d’Airbus. Que se passera-t-il pour Airbus si Nantes-Atlantique ferme ? Airbus ne va quand-même pas délocaliser sa production ? La piste sera donc privatisée pour son bénéfice ? A moins – idée lumineuse – qu’on refile l’un des aéroports européens les mieux notés aux bons soins de Vinci, qui saura bien en faire quelqu’usage rentable : les bâtiments de l’aéroport seront peut-être transformés en skate-park, en agence Pôle-Emploi, ou en crèche pour les futurs pilotes de ligne.
“Un aéroport qui réponde aux défis de notre temps” [Jean-Marc Ayrault]
Suite à une enquête publique conclue fin 2006, la Commission d’enquête remit en avril 2007 un rapport au préfet de la région Pays de la Loire.
C’est monsieur Bernard Boucault qui était le préfet en poste à l’époque à la préfecture de la région Pays de la Loire. Il avait à peine eu le temps de lire le rapport et de reconnaître le projet d’utilité publique qu’il fut nommé en juin 2007 directeur de l’ENA, jusqu’à 30 mai 2012 où il fut nommé au poste de préfet de police de Paris. Comme quoi même faire les grandes écoles n’empêche pas de finir au poste.
C’est monsieur Bernard Hagelsteen qui lui succèda le 20 juin 2007 au poste de préfet de la région Pays de la Loire et préfet de la Loire-Atlantique. Une carrière à talonnettes que celle de monsieur Bernard Hagelsteen : en 1984 il devint secrétaire général de la préfecture des Hauts-de-Seine, puis obtint entre 1989 et 1992 le poste de directeur de la police générale à la préfecture de police de Paris, et plus récemment celui de secrétaire général du Comité interministériel de prévention de la délinquance. Proche collaborateur du ministre de l’Intérieur de l’époque, un certain Nicolas Sarkozy, Bernard Hagelsteen avait eu pour tâche de préparer et de défendre la loi sur la prévention de la délinquance, promulguée en mars 2007.
Un mois après l’élection de Nicolas Sarkozy, il était donc nommé au poste de préfet de la région Pays de la Loire et préfet de la Loire-Atlantique, et héritait donc du dossier du décret d’utilité publique de l’aéroport.
Ce fameux décret d’utilité publique est finalement publié le 10 février 2008, suite à une enquête publique dans laquelle 80 % des contributions faites aux sept enquêteurs étaient opposées au projet. Mais comme on arrête pas le progrès, l’enquête s’est quand même avérée positive pour déclarer une DUP même si sur les sept enquêteurs qui ont fait le travail, deux ont abandonné leur position avant la fin de la commission d’enquête.
Et puisque la mode était à un truc médiatique appelé Grenelle de l’environnement, le décret comportait la réserve que cet aéroport soit de haute qualité environnementale(norme HQE).
Contesté par la suite devant le Conseil d’Etat, ce décret sera confirmé en 2009 et en 2010.
L’esprit mal tourné pourra s’indigner de ce que la présidente de la section des travaux publics au Conseil d’Etat fut Madame Marie Dominique Monfraix, épouse du préfet Bernard Hagelsteen en charge du décret en question, alors qu’il s’agit bien évidemment du fruit du hasard. Un hasard qui valait bien que Madame Monfraix-Hagelsteen fut élevée au grade de Commandeur de la Légion d’honneur le 13 Juillet 2009, ce qui n’a strictement rien à voir, nous ne salirons pas ici la mémoire une femme irréprochable, décédée depuis.
Le hasard total également si son époux désormais veuf monsieur Bernard Hagelsteen a pris sa retraite le 1er décembre 2011 pour devenir non pas conseiller à la Cour des comptes comme il l’avait annoncé initialement, mais conseiller auprès du DG de Vinci Autoroutes, puis responsable des péages pour ASF, filiale de Vinci. Vinci en charge du projet du nouvel aéroport. Tout ne peut pas être dramatique, le hasard fait parfois bien les choses, n’en déplaise à la loi dite de pantouflage concernant les représentants de l’état.
Les scénarios d’optimisation de l’aéroport existant de Nantes-Atlantique n’ont pas été posés, les solutions alternatives n’ont pas été étudiées : aucun intérêt, puisqu’on fait l’aéroport Grand-Ouest de NDDL. Quand au Grenelle de l’environnement, qui préconisait l’étude de solutions alternatives pour les projets à fort impact environnemental, c’est de toute façon aujourd’hui un truc complètement dépassé, d’ailleurs on en parle même plus à la télévision. J’en ai discuté avec un lobbyste du bétonnage pas cher, on vous jure mordicus que la norme HQE ça sert à rien.
Alors certains viendront braire que la vraie motivation pour ce projet en 2000 a été de faciliter une opération de rénovation urbaine importante dont une partie se situait dans le périmètre des nuisances sonores de l’actuel aéroport. Et vont s’imaginer que pour ne pas s’embarrasser de contraintes d’insonorisation trop fortes, on préfère se débarrasser de l’aéroport et en construire un nouveau.
Et pourquoi pas aussi fantasmer sur les soit-disant appétits économiques des soit-disant lobbies du BTP, tout ça parce que les Président et Directeur général de VINCI ont pu faire ensemble quelques voyages au Cambodge avec monsieur Thierry Mariani.
Écoutez plutôt Jean-Marc Ayrault, un homme qui a eu une vision prophétique de la magnificence de Nantes et lui souhaite “un aéroport qui réponde aux défis de notre temps”. Mais si, vous savez, Jean-Marc Ayrault, l’homme qui a réussi à rendre François Fillon charismatique : ancien maire PS de Nantes depuis 1989, ancien député, ancien président du groupe socialiste, il est aujourd’hui conseiller municipal de Nantes, conseiller communautaire de Nantes Métropole (qui participe au financement du projet) , et accessoirement semble-t-il 1er ministre.
Nantes-sur-Ayrault la sublime, nouvelle capitale française : Pensez-donc, avec 1 650 hectares cet aéroport de Notre Dame des Landes (toutes infrastructures comprises) sera donc plus grand que la surface aéroportuaire de Roissy Charles de Gaulle qui accueille sur 1 400 hectares 540 000 mouvements d’avions et 55 millions de passagers par an (pour une surface totale de 3.257 hectares). Si avec ça Nantes-sur-Ayrault ne devient pas Nantes-sur-Ayrault-la-magnifique …
(suite ci-dessous)
Monsieur le Président,
Monsieur le Président, j’ai reçu un message par internet de mon ami Ziad Medhouk. Mon ami qui demeure à Gaza. Mon ami poète et brillant enseignant de français. Mon ami sous les bombes, cette fois encore, et encore, et toujours. Mon ami enfermé et sans pays, ailleurs qu’en son cœur.
Monsieur le Président, ce soir j’ai reçu un e-mail de mon ami. Un e-mail terrible, un e-mail horrible. Il me dit que l’immeuble qui jouxte le sien a été soufflé par les bombes. Il me dit que, lui qui ne pleure jamais, pleure aujourd’hui les larmes de son corps. Il me dit que dans cet immeuble de 5 étages qui n’existe plus vivait la famille Dalou. Dans cette immeuble pulvérisé, 12 morts, 12 cadavres, 12 horreurs. Et une montagne de larmes et de souffrances. Et le regard sans âme d’une barbarie méprisante…
Monsieur le Président, vous n’avez pas le temps, je ne vous parlerai pas des blessés, pas des angoisses, pas des deuils impossibles, pas même de tous ces morts. Je vous parlerai des enfants, juste des enfants… Vous aurez bien un tout petit peu de temps, pour des enfants, pour ces obscures enfants entrés dans la mort. Il est important que vous pensiez à eux, eux pour qui il est trop tard. Pour eux vous ne pouvez plus rien. Puis vous pensez aux autres, envers qui vous pouvez tant.
Monsieur le Président, j’ai vu ces enfants, ces enfants sortis des photos, sortis de ce trou et des gravats souvenir de ce qui fut un immeuble de vie. Je vois ce sauveteur, ce voisin, ce parent ( ?) sortant ce petit corps pantelant. Sur une autre photo je vois un brancard, un pauvre brancard tout petit où sont posés collés l’un à l’autre ces corps minuscules, comme endormis, comme se touchant l’un l’autre pour se rassurer, comme pour se dire que ce n’est que la mort.
Monsieur le Président, ne me dites pas que vous ne pouvez rien. Que vous compatissez mais ne pouvez rien.
Monsieur le Président, je dois aussi vous parler de Nathan Blanc. Il a 19 ans et demeurait à Haifa. Il est Israélien. Aujourd’hui il demeure en prison. Nathan n’avait pas connaissance de ce témoignage de Ziad, mais il savait ce qui était en train d’advenir. Nathan a eu le courage de dire non, au prix de la prison.
Monsieur le Président, vous ne pouvez pas abandonner Nathan, ce tout jeune pacifiste israélien, et dans le même mouvement tourner le dos à mes amis israéliens, juifs comme moi, qui ont le courage d’affronter cette folie guerrière. Au nom de mon pays la France, au nom de ce pays qu’ont rejoint mes grands parents avec un énorme espoir de liberté et de dignité vous devez vous engager, clairement, fermement. Monsieur le Président, les pacifistes israéliens attendent de nous, les pacifistes palestiniens attendent de nous. N’abandonnez pas au désespoir Leïla Shahid confrontée au mur colonial.
Après l’horrible opération « Plomb durci » qui avait vu le massacre d’un habitant sur 1.000, 5 sur 1.000 blessés, le « crime de guerre, voire contre l’humanité » avait été évoqué. Et puis rien. Et puis le silence. Et puis pas de Tribunal. Alors, alors ça recommence, cette danse macabre des êtres sans conscience, sans dignité, sans humanité. Monsieur le Président, les silences, les lâchetés, libèrent les bêtes sauvages. Monsieur le Président, le silence est un crime de lâcheté. Simplement appeler à « de la retenue » est un silence, une fuite devant les responsabilités.
Monsieur le Président, vous pouvez tant pour mettre fin à cette horreur. Vous pouvez clamer que la France ne se taira plus, que ça suffit. Vous pouvez affirmer l’engagement de la France pour l’application du Droit International, sans faiblesse, pour que la Palestine entre à l’ONU, pour que les frontières intégrales de 67 soient reconnues et imposées.
Vous pouvez, Monsieur le Président, appeler à la convocation du Tribunal International que ceux qui commettent ces morts répondent de leurs actes.
Monsieur le Président, la paix demande du courage. La paix demande de la détermination. La paix demande du Droit. En vous honorant d’œuvrer pour le Droit vous défendrez la vie, vous porterez la place et l’histoire de notre pays.
Serge Grossvak
Le 19 novembre 2012
Bah, Teddy-Bear, il ne s’agit - au mieux - que d’une poignée de sayanim. Toujours les mêmes au demeurant, on les compte sur les doigts d’une main..
Leurs propos ignobles, dans ces circonstances tragiques une fois encore, les disqualifient complètement. Il vaut mieux échanger informations et analyses et les ignorer.
Bonne continuation !
Merci à vous Teddy-Bear pour cet article de très bonne facture.
Dans le prolongement de sa lecture, permettez-moi de reproduire ci-dessous l’analyse très intéressante de BILL VAN AUKEN, qui en élargit encore le champ.
Excellente journée à vous !
http://www.mondialisation.ca/israel-rappelle-75-000-soldats-sous-les-drapeaux-pendant-que-les-bombardements-se-poursuivent-a-gaza/5312286
L’armée israélienne s’est vantée vendredi après-midi d’avoir mené plus de 500 frappes aériennes contre le territoire très peuplé de Gaza depuis le lancement de sa dernière offensive, nommée Pilier de défense. Cette offensive aérienne de plus en plus intense se déploie en même temps que des signes de plus en plus évidents indiquent que le gouvernement israélien est sur le point de lancer une invasion terrestre de Gaza qui entraînerait une énorme aggravation de ce bain de sang.
Ce bombardement ininterrompu a entraîné des destructions très étendues et un carnage, le bilan officiel atteignant 29 morts et 300 blessés vendredi soir. Parmi les dernières victimes, il y a eu un garçon palestinien de 2 ans. La majorité des morts et des blessés sont des civils, dont huit enfants et une femme enceinte.
Le gouvernement et l’armée israéliens ont sans cesse déclaré que les frappes sur Gaza ne visent que des « terroristes » et que toutes les pertes civiles sont la faute du Hamas qui se « cache » parmi la population. La réalité, pourtant, est que les bombes et les missiles détruisent des maisons, des écoles, des lieux de travail, des bureaux du gouvernement et des commissariats.
Il a été confirmé vendredi que l’armée israélienne avait envoyé des textos à au moins 12.000 téléphones portables à Gaza prévenant les gens de rester à l’écart de toute personne liée au Hamas, qui gouverne ce territoire long de 40 Km, s’ils ne veulent pas risquer d’être tués.
Parmi les cibles démolies vendredi, il y avait le Service des affaires civiles du Ministère de l’intérieur dans la ville de Gaza, lequel abrite les registres d’état civil des Palestiniens des 70 dernières années. Une usine familiale de textiles qui employait 20 personnes a également été frappée, ainsi qu’un magasin d’alimentation.
En réaction à l’assaut israélien, des groupes de résistance palestiniens ont tiré des roquettes sur Israël. Bien qu’elles soient largement inutiles, l’une d’entre elles a atteint la zone de Tel-Aviv vendredi, et une autre a atterri près de Gush Etzion, une colonie sioniste illégale près de Jérusalem dans la zone occupée de la Palestine. Mercredi, une roquette a touché un immeuble dans la ville de Kiryat Malachi au Sud, tuant deux israéliennes et un homme.
Tout indique que les trois premiers jours de la terreur déchainée par l’Etat israélien ne sont qu’un début. « Nous allons intensifier significativement l’opération, » a déclaré un responsable de haut rang aux médias israéliens.
Cette menace est tombée après que le cabinet du Premier ministre Benjamin Netanyahu ait approuvé la demande de rappel de 75 000 réservistes. Durant la dernière opération terrestre à Gaza, l’opération Plomb durci en 2008-2009, qui a coûté la vie à 1400 palestiniens, le gouvernement n’avait rappelé que 10 000 réservistes.
Reuters a rapporté, dans ce qui indique des préparatifs d’invasion, que vendredi après-midi, « les avions israéliens, les drones et les hélicoptères ont détourné leur attention des sites présumés de roquettes palestiniennes pour se concentrer sur la frontière Nord de Gaza, où leurs bombes ont créé des couloirs d’incursion en détruisant les champs de mines et des nids de mitrailleuses. »
L’armée israélienne a interdit aux civils l’usage de la principale autoroute menant à Gaza ainsi que de deux routes au bord de cette enclave appauvrie où les Palestiniens sont confinés. Des chars, des voitures blindées et de l’artillerie auto-tractée ont été massés le long de la frontière.
Un porte-parole du Hamas a juré que toute invasion serait confrontée à une résistance. « Il faut que les Israéliens soient conscients des graves conséquences d’un tel raid, et ils devraient apporter leurs sacs mortuaires », a déclaré le porte-parole du Hamas, Sami Abu Zuhri.
Pendant ce temps, l’état-major israélien a publié des instructions aux autorités municipales pour faire des préparatifs de défense civile pour sept semaines de guerre à Gaza. La dernière guerre contre Gaza il y a près de quatre ans a duré trois semaines du début des frappes aériennes jusqu’à la fin de l’invasion au sol.
Même après seulement trois jours, le blitzkrieg israélien fait planer le spectre d’un désastre humanitaire à Gaza, dont la population de 1,7 millions d’habitants a été soumise à un blocus sans répit de la part des Israéliens. Des documents publiés récemment ont révélé que le gouvernement israélien est allé jusqu’à calculer le nombre minimum de calories nécessaires pour ne pas souffrir de malnutrition chronique pour déterminer la quantité de nourriture autorisée à rentrer dans ce territoire.
Des docteurs des hôpitaux de Gaza ont prévenu qu’ils sont déjà débordés par le nombre de victimes causées par l’offensive israélienne, et que les médicaments et matériels médicaux indispensables s’épuisent rapidement. Vendredi, le ministre de la santé de l’Autorité palestinienne, Hani Abdenne, a fait savoir que l’armée israélienne refusait d’autoriser l’accès à Gaza d’un convoi de 15 camions qui apportaient des médicaments et du matériel médical envoyés par le gouvernement de Ramallah.
Il y a une dose d’extrême témérité dans cette dernière campagne d’agression militaire israélienne. L’affirmation selon laquelle Israël a été contrainte de lancer son offensive par des tirs de roquettes depuis Gaza est un mensonge patent. Les officiels israéliens ont admis que ces attaques, qui n’ont causé aucun décès cette année jusqu’à la frappe de riposte de mercredi, avaient largement baissé lorsque l’opération Pilier de défense a été lancée avec l’assassinat du chef militaire du Hamas, Ahmed Jabari.
Derrière cette nouvelle guerre provoquée délibérément, il y a les calculs au sein du gouvernement Netanyahu selon lesquels une poussée de militarisme servira à divertir l’attention des tensions sociales grandissantes en Israël. Le pays est caractérisé par l’un des plus hauts niveaux de pauvreté et d’inégalité du monde développé, avec 75 pour cent des travailleurs gagnant 1300 euros ou moins par mois et tout juste 20 familles contrôlant l’essentiel de l’économie. Les conditions se sont fortement détérioré sous l’effet de la crise économique mondiale et des politiques économiques et sociales de droite du gouvernement Netanyahu.
Beaucoup ont accusé Netanyahu de jouer un jeu cynique en lançant la guerre quelques semaines seulement avant les élections nationales prévues pour janvier. En réalité, sa coalition de droite n’est confrontée à aucune opposition majeure dans le camp politique sioniste. Ce qui les inquiète bien plus, c’est l’éclatement de luttes de classes et de protestations sociales venant du bas de la société.
L’autre facteur intervenant dans l’assaut contre Gaza est la volonté du régime israélien de mener une guerre contre l’Iran. Cela a été indiqué vendredi dans un article du spécialiste des affaires militaires du quotidien israélien Haaretz, Amir Oren. Intitulé « Pour Netanyahu, l’escalade à Gaza pourrait ouvrir la voie à une frappe contre l’Iran, » l’article prédit que Netanyahu et son ministre de la défense, Ehud Barak, « n’ont pas abandonné le rêve de mener une opération majeure contre l’Iran », et que l’attaque contre Gaza « pourrait servir de…prélude à une opération contre l’Iran. »
« En théorie, » écrit Oren, « une force qui est capable de mener une frappe contre Ahmed Jabari serait capable de repérer la position du président Iranien Mahmoud Ahmadinedjad. Et une force qui a détruit des roquettes Fajr serait à même d’atteindre leurs grands frères, les Shihabs, ainsi que les installations nucléaires iraniennes. »
Cette opération, poursuit-il, permet aux commandants militaires Israéliens de tester leurs armes et leurs tactiques qui seraient utilisées dans une attaque contre l’Iran. Elle permet également à Israël de mesurer la réaction internationale.
L’assaut contre Gaza a été soutenu de façon inconditionnelle par Washington à l’aide de déclarations répétées de la part de la Maison blanche et du ministère des Affaires étrangères affirmant le « droit » d’Israël « à se défendre ».
Il a également le potentiel de torpiller toute tentative du gouvernement Obama d’entrer en négociations avec Téhéran au sujet du programme nucléaire iranien.
L’autre front surveillé par Tel-Aviv est la réaction des régimes bourgeois arabes, y compris le gouvernement des Frères musulmans du Président égyptien Mohamed Mursi. Vendredi a vu une brève visite du Premier ministre égyptien, Hisham Kandil, à Gaza, mais, significativement, pas de Mursi lui-même. Le gouvernement de Mursi n’a donné aucune indication qu’il se préparerait à rompre les accords de Camp David ou à prendre des mesures concrètes pour ouvrir ses frontières avec Gaza et permettre à de l’aide, militaire et humanitaire, d’y entrer.
La ligue arabe devrait se réunir au Caire lundi pour discuter de la crise de Gaza. En anticipation de cette réunion, l’envoyé de l’Irak, Qais el-Azzawy, a publié un communiqué vendredi appelant les Etats arabes à utiliser « l’arme du pétrole » pour faire pression sur Israël et ses alliés, principalement les États-Unis. Quelques heures après, pourtant, son ministère s’est distancé de sa remarque et a affirmé que l’Irak n’avait aucune proposition à présenter à la Ligue arabe.
C’est un résumé exact de l’attitude des régimes de la bourgeoisie arabe, dont beaucoup voient le massacre à Gaza comme une distraction malvenue de leur participation dans la guerre américaine pour un changement de régime en Syrie.
Parmi les masses de travailleurs de la région, cependant, l’attaque contre le peuple de Gaza et la perfidie des classes dirigeantes dans leurs pays créent une colère et des troubles grandissants, ce que l’on peut constater dans les manifestations qui ont eu lieu vendredi au Liban, en Égypte, au Yémen et ailleurs pour dénoncer l’attaque israélienne.
Bill Van Auken
Monsieur le Président,
Monsieur le Président, j’ai reçu un message par internet de mon ami Ziad Medhouk. Mon ami qui demeure à Gaza. Mon ami poète et brillant enseignant de français. Mon ami sous les bombes, cette fois encore, et encore, et toujours. Mon ami enfermé et sans pays, ailleurs qu’en son cœur.
Monsieur le Président, ce soir j’ai reçu un e-mail de mon ami. Un e-mail terrible, un e-mail horrible. Il me dit que l’immeuble qui jouxte le sien a été soufflé par les bombes. Il me dit que, lui qui ne pleure jamais, pleure aujourd’hui les larmes de son corps. Il me dit que dans cet immeuble de 5 étages qui n’existe plus vivait la famille Dalou. Dans cette immeuble pulvérisé, 12 morts, 12 cadavres, 12 horreurs. Et une montagne de larmes et de souffrances. Et le regard sans âme d’une barbarie méprisante…
Monsieur le Président, vous n’avez pas le temps, je ne vous parlerai pas des blessés, pas des angoisses, pas des deuils impossibles, pas même de tous ces morts. Je vous parlerai des enfants, juste des enfants… Vous aurez bien un tout petit peu de temps, pour des enfants, pour ces obscures enfants entrés dans la mort. Il est important que vous pensiez à eux, eux pour qui il est trop tard. Pour eux vous ne pouvez plus rien. Puis vous pensez aux autres, envers qui vous pouvez tant.
Monsieur le Président, j’ai vu ces enfants, ces enfants sortis des photos, sortis de ce trou et des gravats souvenir de ce qui fut un immeuble de vie. Je vois ce sauveteur, ce voisin, ce parent ( ?) sortant ce petit corps pantelant. Sur une autre photo je vois un brancard, un pauvre brancard tout petit où sont posés collés l’un à l’autre ces corps minuscules, comme endormis, comme se touchant l’un l’autre pour se rassurer, comme pour se dire que ce n’est que la mort.
Monsieur le Président, ne me dites pas que vous ne pouvez rien. Que vous compatissez mais ne pouvez rien.
Monsieur le Président, je dois aussi vous parler de Nathan Blanc. Il a 19 ans et demeurait à Haifa. Il est Israélien. Aujourd’hui il demeure en prison. Nathan n’avait pas connaissance de ce témoignage de Ziad, mais il savait ce qui était en train d’advenir. Nathan a eu le courage de dire non, au prix de la prison.
Monsieur le Président, vous ne pouvez pas abandonner Nathan, ce tout jeune pacifiste israélien, et dans le même mouvement tourner le dos à mes amis israéliens, juifs comme moi, qui ont le courage d’affronter cette folie guerrière. Au nom de mon pays la France, au nom de ce pays qu’ont rejoint mes grands parents avec un énorme espoir de liberté et de dignité vous devez vous engager, clairement, fermement. Monsieur le Président, les pacifistes israéliens attendent de nous, les pacifistes palestiniens attendent de nous. N’abandonnez pas au désespoir Leïla Shahid confrontée au mur colonial.
Après l’horrible opération « Plomb durci » qui avait vu le massacre d’un habitant sur 1.000, 5 sur 1.000 blessés, le « crime de guerre, voire contre l’humanité » avait été évoqué. Et puis rien. Et puis le silence. Et puis pas de Tribunal. Alors, alors ça recommence, cette danse macabre des êtres sans conscience, sans dignité, sans humanité. Monsieur le Président, les silences, les lâchetés, libèrent les bêtes sauvages. Monsieur le Président, le silence est un crime de lâcheté. Simplement appeler à « de la retenue » est un silence, une fuite devant les responsabilités.
Monsieur le Président, vous pouvez tant pour mettre fin à cette horreur. Vous pouvez clamer que la France ne se taira plus, que ça suffit. Vous pouvez affirmer l’engagement de la France pour l’application du Droit International, sans faiblesse, pour que la Palestine entre à l’ONU, pour que les frontières intégrales de 67 soient reconnues et imposées.
Vous pouvez, Monsieur le Président, appeler à la convocation du Tribunal International que ceux qui commettent ces morts répondent de leurs actes.
Monsieur le Président, la paix demande du courage. La paix demande de la détermination. La paix demande du Droit. En vous honorant d’œuvrer pour le Droit vous défendrez la vie, vous porterez la place et l’histoire de notre pays.
Serge Grossvak
Le 19 novembre 2012
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