Carnage de Maillé (1) : un des nombreux massacres nazis de 1944
Par son passage rapide à Maillé, Nicolas Sarkozy a braqué les projecteurs médiatiques sur ce petit village oublié de l’Histoire. Récupération ou travail de mémoire ? Petit retour en arrière. Première partie.
Le 25 août 1944, le petit village de Maillé, en Indre-et-Loire, à la frontière entre la Touraine et le Poitou, a subi un sort funeste. Le quart de la population a été massacré et les quatre cinquièmes des maisons détruites (quatre-vingts obus tombèrent sur le bourg).
Maillé
La position géographique du village, à la ligne de démarcation entre la zone occupée et la zone libre jusqu’en novembre 1942, a fait que de nombreuses troupes allemandes stationnaient aux alentours, attisant de nombreux actes de résistance de la part de la population locale (en février 1944, l’abbé Henri Péan, curé de Maillé, fut même arrêté car il était chef d’un réseau).
En représailles à un fait de résistance (faut-il parler d’attentat dans ces circonstances ?), ce 25 août 1944, soixante à quatre-vingts soldats nazis sous la direction du sous-lieutenant Gustav Schlüter, membre du parti nazi depuis 1931 et condamné à mort par contumace par le tribunal militaire de Bordeaux en 1952, tuèrent toute la matinée tous les habitants visibles au fur et à mesure qu’ils avancèrent dans le village.
124 habitants (de 3 mois à 89 ans) de Maillé, sur les 627 au total, périrent, dont de nombreuses femmes et enfants (49 enfants de moins de 14 ans, même plusieurs bébés de quelques mois). Certains n’eurent la vie sauve que parce qu’ils avaient su se cacher à temps ou qu’ils simulèrent leur propre mort au milieu d’autres corps.
Grâce au curé du village, l’abbé André Payon, qui savait parler allemand et qui, absent ce jour-là, revenait d’un autre village, la fin du carnage fut négociée en fin d’après-midi.
Les survivants ont enterré leurs morts et le village s’est vite reconstruit. On n’oublia pas, mais on n’insista pas non plus. « La mémoire collective s’était construite autour d’Oradour-sur-Glane (...). Après la guerre, il fallait évacuer le passé pour reconstruire et se reconstruire. » constate aujourd’hui l’historien Christophe Prime du Mémorial de Caen.
Si bien qu’il semblerait bien difficile de savoir aujourd’hui la raison exacte de ce carnage (seulement deux billets mal écrits laissés pour dire : « C’est la punission des terroristes et leurs assistents. », voir illustration en fin d’article). Ou de savoir s’il s’agissait des soldats de la Wehrmacht ou des SS.
Renforçant un certain "oubli national", la date elle-même, le 25 août 1944, la même que la Libération de Paris, ce qui fait que les personnalités nationales se devaient d’être présentes à la commémoration parisienne chaque 25 août.
L’historien Sébastien Chevereau, chargé de la Maison du souvenir de Maillé inaugurée en 2006, explique : « On s’est rendu compte qu’il y avait un vide considérable dans la connaissance des faits. ».
Quelques archives ont commencé à apparaître seulement en 1995 pour le cinquantenaire du massacre. Le 15 juillet 2007, le procureur général de Dortmund (en Allemagne), Ulrich Maas, a fait le déplacement après avoir demandé l’autorisation des autorités françaises : depuis 2004, le procureur allemand instruit une enquête judiciaire après avoir été alerté par un historien de Stuttgart.
La vraie inconnue reste sur la nature des troupes allemandes : pour Christophe Prime, « les Allemands s’interrogent sur des crimes qu’on pourrait imputer à la Wehrmacht, l’armée régulière, et non plus uniquement aux SS, l’armée politique. ».
Oradour-sur-Glane
Le massacre de Maillé vient se greffer sur un fond de mémoire collective d’Oradour-sur-Glane.
À Oradour-sur-Glane le 10 juin 1944, 642 de ses habitants (dont 247 enfants) furent abattus ou brûlés vif par des SS (seulement 52 corps ont pu être identifiés). L’idée de conserver les ruines en l’état a tout de suite été adoptée par les élus locaux après la guerre.
Dès le 5 mars 1945, le général de Gaulle se rendit sur place pour reconnaître ce sinistre symbole : « Ce qui est arrivé à Oradour-sur-Glane nous enseigne aussi autre chose. C’est que, pour réparer et pour conserver le souvenir, il faut rester ensemble comme nous le sommes maintenant. (...) Jamais plus, même une fois, il ne faut qu’une chose pareille puisse arriver à quelques points que ce soit de la France. Et pour que cela n’arrive plus (...), il y a des dispositions à prendre, des dispositions qui ne sont pas seulement des formules, des dispositions qui ne consistent pas simplement à faire confiance aux autres, même quand ces autres ont la meilleure volonté du monde. Il faut se faire confiance à soi-même, et s’assurer sa sécurité soi-même. ».
Le film Le Fusil (1975) avec Philippe Noiret a donné également un écho particulier à la tragédie d’Oradour-sur-Glane (à ceci près que les nazis ne possédaient pas de lance-flammes à Oradour-sur-Glane).
Les sentences prononcées par le tribunal militaire de Bordeaux le 12 février 1953 ont été vivement contestées (trop sévères pour les Malgré-Nous alsaciens qui avaient participé au massacre, pas assez selon les survivants) et la loi d’amnistie du 19 février 1953 (qu’ont votée entre autres François Mitterrand, Jean Lecanuet, Pierre Pflimlin, député de Strasbourg, et la plupart des gaullistes, afin d’assurer l’unité du pays) a profondément outragé les rescapés qui renvoyèrent toutes les décorations et refusèrent toute présence de représentants de l’État à l’exception de de Gaulle en 1962. L’un des bourreaux d’Oradour-sur-Glane, Heinz Barth, fut retrouvé et condamné en Allemagne en 1981, et mourut libre à 86 ans en 2007.
300 000 personnes par an visitent chaque année le mémorial. L’endroit et son silence sont impressionnants.
Une très longue liste, hélas...
Pourtant, les massacres d’Oradour-sur-Glane et de Maillé ne furent pas hélas isolés au printemps et été 1944. Beaucoup d’actes de résistance eurent pour conséquence le massacre aveugle de civils des villages environnants, réaction d’autant plus atroce et gratuite que les nazis étaient en pleine déroute.
À Brantôme les 26 et 27 mars 1944, les SS tuèrent 40 civils parfois originaires de Strasbourg.
À Sainte-Marie-de-Chignac le 27 mars 1944, les SS massacrèrent 25 habitants.
À Rouffignac le 31 mars 1944, le village fut entièrement détruit (145 immeubles furent rasés) et il fut honoré par le général de Gaulle le 5 mars 1945. Des civils et des gendarmes furent déportés en Allemagne.
À Ascq les 1er et 2 avril 1944 (le jour des Rameaux), 86 habitants périrent fusillés par les SS à la suite d’un acte de résistance contre un train. Dans la nuit, des commandos SS rassemblèrent les hommes de 15 à 50 ans, parfois encore en pyjama, pieds nus ou en pantoufles, et les massacrèrent à la mitrailleuses, les achevant parfois au révolver. Le 5 avril 1944, près de vingt mille personnes assistèrent aux obsèques et, dès le 15 avril 1944, Maurice Schumann, la voix de de Gaulle, relata la tragédie à Radio Londres. Le 7 juin 1944, 6 résistants furent fusillés pour l’explosion du train d’Ascq.
À Montpezat-de-Quercy le 2 mai 1944, les SS tuèrent 5 personnes, en déportèrent 15 autres et pillèrent et incendièrent le village.
Autour de Figeac les 11 et 12 mai 1944, les SS s’en prirent à la population civile par des rafles, tortures, massacres, déportations, pillages et destructions de maisons faisant plusieurs centaines de victimes (à Lauzès, Orniac, Blars, Grèzes, Latronquière, Sousceyrac, Cardaillac, Gorses, Molières, Le Bourg, Lacapelle-Marival, Terrou, Saint-Céré, Figeac, Lunan et Saint-Félix).
À Frayssinet-le-Gélat le 21 mai 1944, 14 villageois périrent : 3 femmes furent pendues et 11 hommes fusillés par les SS, dont un instituteur qui s’était proposé d’être pris en otage en échange des autres (il a seulement été rajouté aux autres).
À Limogne-en-Quercy, à Cadrieu et à Frontenac le 1er juin 1944, 9 civils furent tués par les SS.
À Linac, à Viazac et à Bagnac-sur-Célé le 3 juin 1944, 19 habitants furent fusillés par les SS.
À Ugine le 5 juin 1944, les SS massacrèrent 28 habitants au quartier des Fontaines et à la place de la gare.
À Caen le 6 juin 1944, 87 prisonniers de la maison d’arrêt (dont au moins une femme, la plupart étaient des résistants) furent exécutés d’une courte rafale dans la nuque. La tuerie dura toute la journée avec une pause à midi pour le déjeuner. Ils auraient dû être déportés à Compiègne puis en Allemagne, mais l’arrivée des troupes américaines sur les plages, à douze kilomètres de la prison, précipita les événements. La Gestapo de Rouen a tout fait pour cacher ce massacre, brûlant les archives pour ne pas identifier les victimes et faisant disparaître les corps. Selon certains, les corps n’ont jamais été retrouvés, mais d’autres ont évoqué la découverte de certains corps le 30 juin 1944 dans la prison elle-même.
À Issendolus le 8 juin 1944, 44 personnes furent massacrées par les SS et 70 autres déportées.
À Saint-Floxel le 8 juin 1944, un soldat tua sans la moindre raison 8 femmes et enfants cachés derrière un abreuvoir.
À Rouffilac et Carsac-Aillax le 8 juin 1944, 29 habitants (dont des femmes et des enfants) furent massacrés par les SS.
À Tulle le 9 juin 1944, 5 000 hommes furent raflés par les SS. 3 500 furent libérés par le choix des autorités françaises et 120 furent condamnés à la pendaison. 99 finalement furent pendus (parfois après torture) et 149 furent déportés le 2 juillet 1944 dans le camp d’extermination de Dachau (101 y moururent). Au total, 218 furent tués à Tulle jusqu’à 16 août 1944, quand les troupes allemandes en Corrèze se rendirent. Un procès déboucha à Bordeaux le 5 juillet 1951 sur la condamnation de 5 acteurs seulement de ces odieuses pendaisons.
À Argenton-sur-Creuse le 9 juin 1944, 67 habitants (dont des femmes et des enfants, et aussi des membres des FFI) furent massacrés dans les rue en fin d’après-midi par des SS (parmi les 67, 11 furent fusillés le lendemain). Trois autres furent blessés. Le député-maire du village, l’ancien ministre socialiste Michel Sapin, écrivait dans une plaquette commémorative : « Le 9 juin 1944 fut un jour de sang et de fureur animale qui blessa profondément la population d’Argenton-sur-Creuse ».
À Issoudun le 10 juin 1944, un convoi nazi attaqua un rassemblement se déroulant sur le place des Marchés et tuèrent 11 personnes.
À Marsoulas et Mazères-sur-Salat le 10 juin 1944, 32 civils (dont 6 femmes et 12 enfants, notamment 2 jumeaux de 5 ans) furent tués par les SS après les avoir fait sortir des maisons. Le massacre de Marsoulas fut jugé au cours du procès de Nuremberg.
À Bagnères-de-Bigorre, Pouzac et Trébons du 10 au 12 juin 1944, 57 habitants (dont des femmes et des enfants) furent massacrés par les SS.
Au Mont-Mouchet, en Auvergne les 10 et 11 juin 1944, environ 100 civils et 238 résistants furent tués pas les troupes nazies.
À Mussidan le 11 juin 1944, à la suite d’une attaque de train blindé, les SS fusillèrent 52 habitants et pillèrent la ville.
À Orville le 11 juin 1944, 10 habitants furent fusillés.
À Valréas le 12 juin 1944, la Wehrmacht tua 26 civils et 27 résistants. Emil Bauer, un des soldats allemands présents, témoigna : « Pendant leur trajet, les gars me racontèrent leurs derniers combats. Ils pouvaient exécuter les prisonniers, qu’ils soient coupables ou non coupables, ou bien piller et incendier les maisons. C’est pourquoi, lors de ce trajet, je ne présageais rien de bon. Pendant ce temps, les hommes de troupe avaient commis un acte abominable. Les occupants furent criblés de balles par les soldats, ensuite ils s’approchèrent du véhicule, mirent le canon de carabine chargée d’explosifs russes dans la bouche des blessés graves et appuyèrent sur la détente. Les morts restèrent là, comme une splendide illustration de la culture nazie ! À Valréas, ils avaient rassemblé des jeunes et des moins jeunes. Ils étaient debout, le visage contre le mur et ils furent fusillés par le 1er bataillon. Nous étions une foule débauchée. Nous ne faisions jamais de prisonniers, tout le monde était fusillé. Nos expéditions ressemblaient à des expéditions du diable. ».
À Jeu-les-Bois le 12 juin 1944, 17 hommes furent tués.
À Mouleydier le 21 juin 1944, le village, en insurrection depuis le 7 juin 1944, en position stratégique avec son pont sur le Dordogne, fut pillé et entièrement incendié par les SS. 22 maquisards furent fusillés.
À Thauvenay le 25 juin 1944, 16 civils (dont 6 jeunes et 1 enfant de 7 ans) furent abattus et 23 habitations incendiées.
À Dun-les-Places le 26 juin 1944, après l’attaque du camp de résistance de Vermot, 27 civils (dont le maire) furent rassemblés puis tués par les SS au fusil-mitrailleur et à la grenade. Les maisons furent ensuite pillées et incendiées les 27 et 28 juin 1944. Comme élu local (député de la Nièvre) puis comme président de la République, François Mitterrand a assisté régulièrement aux commémorations du 26 juin 1944 à Dun-les-Places.
Au Cheylard le 7 juillet 1944, la Wehrmacht tua entre 30 et 50 civils lors d’une opération contre un centre de résistance.
À Portes-lès-Valence le 8 juillet 1944, 32 personnes furent fusillées par les nazis alors qu’à Magnac-Laval, 19 personnes furent massacrées par des miliciens (le milicien responsable fut jugé puis fusillé par Vichy le 22 juillet 1944).
À Bélâbre le 10 juillet 1944, 46 hommes (dont plusieurs maquisards de Chauvigny) furent massacrés.
À Dompierre-sur-Mont le 11 juillet 1944, 22 habitants sur un total de 171 furent fusillés par les nazis.
À Dortan du 12 au 22 juillet 1944, 25 habitants de Dortan et d’Oyonnax (dont le curé de Dortan, une femme et un adolescent de 15 ans) furent torturés et tués dans des conditions abominables, des femmes violées et leur village incendié par la Wehrmacht. Une cité provisoire fut construite pour reloger les survivants et fut inaugurée après la guerre par le président de la République Vincent Auriol.
À Vassieux-en-Vercors le 21 juillet 1944, 82 habitants (dont des femmes, des enfants et des vieillards) ainsi que 120 combattants des FFI furent massacrés par les SS et le village fut complètement détruit (à 97 %).
À la Valchevrière les 22 et 23 juillet 1944, les nazis détruisirent complètement ce hameau habité seulement par quelques agriculteurs pendant l’été, mais devenu un camp stratégique pour les maquisards du Vercors. Les résistants sous le commandement du lieutenant Chabal se sacrifièrent pour défendre ce passage. Pour m’y être rendu plusieurs fois, j’ai pu observer que de nombreux Allemands viennent encore aujourd’hui se recueillir dans cet endroit fantôme, resté tel quel.
À Guerry le 24 juillet 1944, 36 Juifs de Saint-Amand-Montrond (dont 8 femmes) furent jetés vivants (ou parfois tués par balles) dans un puits de 35 mètres de profondeur par la Gestapo. Au cours d’une rafle, le 22 juillet 1944, tous les Juifs de Saint-Amand-Montrond (soit 70 civils) avaient été arrêtés et emmenés dans une prison de Bourges par des miliciens.
À Saint-Germain-du-Salembre le 27 juillet 1944, 29 maquisards et la quasi-totalité des habitants du hameau furent massacrés par les nazis informés par un traître (français) qui fut jugé, condamné à mort et fusillé dès le soir même.
Dans la grotte de la Luire le 27 juillet 1944, les SS torturèrent et massacrèrent 25 blessés du Vercors alors qu’ils étaient allongés sur leur lit d’hôpital. Beaucoup de civils furent tués également à La Chapelle-en-Vercors et Saint-Nizier-du-Moucherotte. Les auteurs de ce massacre ne furent pas beaucoup inquiétés après la guerre (voir ce premier lien et ce second lien).
À Lyon place Bellecour le 27 juillet 1944, à cause de l’explosion, la nuit précédente, d’un café très fréquenté par les nazis, la Gestapo fusilla 5 résistants qui avaient été pourtant arrêtés bien avant cet acte de résistance (et donc innocents).
Au Vigeant le 4 août 1944, 12 jeunes résistants de Millac furent fusillés par des nazis et des miliciens.
À Saint-Pol-de-Léon le 4 août 1944, 25 hommes (dont le maire et un adolescent de 17 ans) furent massacrés par la Wehrmacht. Lors de la commémoration de 2008, particulièrement émouvante, la maire de Morlaix, Agnès Le Brun, a affirmé : « C’est notre devoir [de nous souvenir], car de tels actes sont révélateurs de la fragilité de la paix et de la démocratie que tous doivent s’efforcer de construire, pour les générations futures, mais aussi en mémoire de tous ceux qui sont tombés pour elles. ».
À Gourvily le 5 août 1944, les nazis incendièrent un commerce et fusillèrent les 5 personnes qui tentèrent de s’y échapper, en représailles d’actes de résistance.
À Gouesnou le 7 août 1944, des troupes de l’armée allemande massacrèrent 42 habitants dont des femmes et des enfants au moment même où les premières troupes blindées américaines arrivèrent à Brest. En effet, des parachutistes français arrivaient dans la commune en début d’après-midi, et les nazis, pris de panique, commencèrent par assassiner les quatre habitants de la ferme Philep de Penguerec puis raflèrent et mitraillèrent toutes les personnes qu’ils croisèrent.
À Saint-Julien-de-Crempse le 9 août 1944, 17 civils (de 18 à 80 ans) ainsi que 11 maquisards furent sauvagement massacrés par les SS.
À Longny-au-Perche le 12 août 1944, 5 otages pris au hasard dans le village furent fusillés à la suite de la mort suspecte d’un nazi.
À Tourouvre le 13 août 1944, 18 habitants furent massacrés et une cinquantaine de maisons furent détruites par des SS.
À Grenoble le 14 août 1944, 20 maquisards du Vercors furent fusillés par les nazis à l’angle de la rue Ampère et du cours Berriat, quelques jours avant la libération de Grenoble. Une commémoration se tient tous les 14 août au square des Fusillés (sur les lieux du massacre).
À Longeville le 15 août 1944, les troupes allemandes tuèrent 6 maquisards au combat et ils achevèrent et brûlèrent 7 autres maquisards. L’Indre (du côté de La Châtre) connut une terrible répression nazie en été 1944 : le 27 juillet 1944 à Dampierre-Gargilesse ; le 16 août 1944 à Valençay ; le 30 août 1944 à Sainte-Gemme.
À Sainte-Radegonde (près de Rodez) le 17 août 1944, 30 personnes furent fusillées par les nazis.
À Saint-Michel-de-Livet le 18 août 1944, une famille de 7 personnes fut décimée à coups de grenades et de mitraillette par des SS pour avoir accueilli avec sympathie une avant-garde de l’armée britannique.
À Nérondes le 18 août 1944, une douzaine d’habitants furent massacrés et plus d’une trentaine de maisons furent brûlées.
À Saint-Genis-Laval le 20 août 1944, 110 Juifs furent assassinés par les nazis.
À Bron le 21 août 1944, 109 Juifs furent massacrés par les nazis.
À Buchères le 24 août 1944, 68 civils (dont 35 femmes, 10 enfants de moins de 10 ans, des bébés de 6 à 18 mois, 5 vieillards de plus de 70 ans) furent fusillés par les SS et tout le village fut incendié.
À Châtillon-sur-Indre le 25 août 1944, des maquisards et des civils furent fusillés à la Riperie par les troupes nazies qui remontaient vers l’Est.
À Terre-Noire (au col du Petit-Saint-Bernard, à 1 971 mètres d’altitude dans le val d’Aoste) le 27 août 1944, 28 jeunes hommes des villages de la Tarentaise furent fusillés par la Wehrmacht s’enfuyant vers l’Italie (les circonstances de ce massacre restent encore inconnues, notamment sur le statut des victimes : civils, résistants, maquisards).
À la ferme de Franclieu (dans la commune de Bengy-sur-Craon) le 29 août 1944, 8 personnes qu’un convoi allemand croisa furent fusillées sommairement, puis des fermes furent incendiées.
À Couvonges et dans les villages environnants (Robert-Espagne, Beurey-sur-Saulx, Mognéville) le 29 août 1944, 86 hommes (dont 26 sur les 44 que comptait Couvonges, âgés de 17 à 85 ans) furent froidement tués par la Wehrmacht. 54 des 60 maisons de Couvonges furent détruites. À la demande notamment de la ville de Bar-le-Duc, le général de Gaulle vint s’y recueillir le 28 juillet 1946.
À Tavaux le 30 août 1944, 20 habitants furent massacrés par les SS.
À Plomion le 31 août 1944, 14 habitants (de 16 à 72 ans) furent fusillés par les SS.
À Basse-sur-le-Rupt (près de La Bresse dans les Vosges) les 20 et 21 septembre 1944, 86 maquisards furent fusillés par les nazis.
À Étobon le 27 septembre 1944, 39 habitants furent fusillés par les SS contre l’église protestante de Chenebier et 27 autres furent emmenés puis, pour 9 d’entre eux, fusillés près de Belfort, et les 18 autres, déportés dans un camp d’extermination.
Par ailleurs, à Nîmes de nombreuses exécutions sommaires par pendaison furent décidées par la Gestapo pendant l’occupation de la ville entre 1942 et 1944 (Nîmes fut libéré le 27 août 1944).
Ne pas oublier
Cette longue liste n’est sans doute pas exhaustive et ne concerne que les cas de massacres gratuits et aveugles perpétrés contre une population civile (parfois contre des bébés et des vieillards) dans des villages français au moment de la déroute des troupes nazies. Elle inclut parfois l’assassinat sommaire de résistants, mais exclut ceux tués au cours des combats, nombreux en été 1944 pour libérer les territoires occupés.
En lisant cette énumération, on ne peut avoir que la nausée, les larmes aux yeux et la terreur à l’esprit en imaginant les scènes réelles. Le nombre de victimes n’est qu’une donnée qui ne fournit aucune indication sur le degré d’horreur : une seule mort gratuite suffit à me scandaliser et à m’écœurer.
Il faut aussi tenter de prendre en compte (sinon comprendre) que la plupart des troupes SS ou de la Wehrmacht étaient composées de jeunes d’une vingtaine d’années souvent immatures, parfois des adolescents de 17 ans, et étaient commandées par des jeunes de 25 à 30 ans. La plupart venaient du Luxembourg et de l’Alsace-Lorraine germanisée, mais certains revenaient aussi du front russe qui connut encore beaucoup plus d’atrocités et de massacres aveugles de populations civiles qu’en France. Revenir de l’Est était un gage de courage et de force pour ceux qui dirigeaient les troupes.
Dans ces villages (ou villes parfois), chaque année est célébrée cette mémoire. Des monuments, des stèles, des croix jonchent nos nombreuses routes de campagne. Parfois dans la plus grande indifférence.
Alors, oui, se souvenir, ne pas oublier que cette détestable horreur humaine a eu lieu il y a seulement soixante-quatre ans et, surtout, qu’elle a recommencé déjà à de nombreuses reprises hors de France (je ne peux même pas dire hors d’Europe) et qu’elle peut recommencer à tout moment, même ici.
Dans le prochain article, j’évoquerai la venue à Maillé du président de la République, Nicolas Sarkozy, les critiques qu’on pourrait lui adresser et les conséquences de cette intervention solennelle.
Aussi sur le blog.
Sylvain Rakotoarison (29 août 2008)
Pour aller plus loin :
La répression en France à l’été 1944 (colloque de Saint-Amand-Montrond du 8 juin 2005).
Témoignages de deux rescapées au massacre de Maillé (recueillis notamment en 2000).
Répression et persécution en France occupée de 1940 à 1944 (Thomas Fontaine, avril 2008).
La 2e Division SS ‘Das Reich’ (Wikipédia).
La 2e Division SS ‘Das Reich’ (exactions commises).
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