Journalisme citoyen et cinquième pouvoir
L’Internet est parfois appelé la toile. Et s’il est aussi dit virtuel, il faut bien reconnaître qu’il s’agit de tout un monde où chacun peut venir et vivre en toute liberté. Sans les contraintes des pouvoirs établis ou évidents. Que ceux-ci soient financier ou juridique. Avec Internet, le citoyen a toute sa place et peut donner son avis sur l’actualité. Jusqu’à la donner lui-même. Mais, face à ce mouvement récent, certains professionnels du journalisme crient au scandale et au danger. Ce qui est appelé le journalisme citoyen ne serait-il pas que du journalisme amateur déguisé ? Intelligente interrogation ou accusation de mauvaise foi ? Si le journalisme citoyen appelle à devenir le cinquième pouvoir, il s’agirait là d’une véritable chance pour la démocratie et non d’un plaisir malsain ou vicieux. Sous certaines conditions tout de même.
Du journalisme au journalisme citoyen
Un journaliste est un professionnel. Le journalisme est un métier. N’est pas journaliste qui veut. Est journaliste celui qui est payé pour écrire des articles qui portent sur l’actualité. Pour être journaliste, il est possible de suivre une formation encadrée qui amène à cette profession. En général, le mot d’ordre pour la presse est d’être neutre. En effet, un journaliste doit rapporter l’information (d’où le terme de reporter) telle qu’elle est, de la façon la plus simple possible et sans donner son avis. Le lecteur lit un article pour connaître les faits et non pour connaître l’avis de l’auteur de l’article sur le sujet qu’il a composé. Ce devoir du journalisme est de plus en plus contesté aujourd’hui. Le monde actuel se plaint de la corruption des médias. Le public lit la presse tout en la soupçonnant de corruption. Le fait que les plus importants groupes financiers soient propriétaires des principaux médias, et tiennent même entre leurs mains la vie de la presse, fait gronder l’opinion.
Les médias ne sont plus seulement accusés de donner une opinion sur l’actualité, mais tout simplement de fabriquer cette dernière. Ainsi, le public pense selon l’opinion que lui dictent les journaux puisqu’ils fabriquent eux-mêmes l’information. Même les médias ne doutent plus de leur corruption puisqu’ils parlent eux-mêmes de ce sujet et semblent parfois s’en plaindre. Ainsi, le lecteur trouvera toujours un journal qui parlera de people-isation ou de corruption chez certains confrères, mais jamais pour eux-mêmes. Or, si chacun se plaint du confrère, alors c’est que tout le monde se prête au jeu de ce qu’il se plaint. Le résultat est simple : aucun média n’est crédible. Mais, loin d’être un problème, cette accusation devient un atout. Elle devient un sujet d’actualité. La presse parle de la crise de la presse, les médias de la corruption des médias. Et au lieu d’être un suicide collectif, le monde de l’information renaît de ses cendres. Le lecteur achète le journal parce qu’il s’intéresse à ce sujet et que les journalistes, qui sont seuls à pouvoir en parler en ont fait l’actualité. Ainsi, pour lire un article sur la corruption de la presse, il faut acheter un article de presse. Résultat : la presse est gagnante.
Cependant, à l’aube du troisième millénaire, le temps du papier est révolu. En effet, celui-ci, autrefois si prestigieux, est délaissé par la population qui vit avec son temps. Et l’information ne s’achète plus dans un kiosque, mais se consulte en ligne. Le moyen de diffusion est simple. Tous les médias s’y sont mis. Il s’agit d’Internet. Monde de demain, mais déjà d’aujourd’hui. Monde virtuel et pourtant tellement présent. Autant le papier laisse paraître une certaine classe, autant ce réseau informatique est un moyen utile dont le constat de l’utilisation régulière, fréquente, incontournable et nécessaire s’impose à chacun. Tout passe désormais par Internet : c’est une évidence ! Le lecteur est un homme qui ne peut vivre sans celui-ci. Et s’il lit l’information sur la toile, il voit aussi que cette dernière lui permet l’inimaginable. Ainsi, le lecteur peut devenir auteur. Ainsi, le lecteur mécontent peut corriger l’actualité. Lui aussi peut se prendre pour un journaliste et diffuser ses articles. En les mettant en ligne, il est clair que tout le monde peut les voir. Ainsi, le lecteur prend autant de place qu’un journaliste dans le monde de l’actualité. Le lecteur n’est plus seulement un client, il peut même devenir un adversaire.
Différence entre journalisme amateur et journalisme citoyen
Une question s‘impose : pourquoi écrire ? Pourquoi accomplir à son tour le travail de journaliste ? Il est évident qu’il y a assez de professionnels pour ne pas se mêler soi-même de l’information. Celui qui tient un blog sur l’actualité ne fait-il pas preuve ainsi d’égoïsme ? D’ego mal maîtrisé ? La reconnaissance à tout prix. Peu importe les moyens, seule compte la fin. L’internaute n’aurait donc qu’un but : connaître à son tour la reconnaissance, voire le succès. L’internaute redeviendrait un enfant qui rêve de gloire et fuit l’affrontement de la réalité que lui impose la vie. L’internaute écrirait à son tour alors que des journalistes sont au chômage ou que des pigistes peinent à boucler leurs fins de mois, ce qui prouve bien que la presse n’a pas besoin de lui. En même temps, puisque l’internet lui donne la possibilité de se lancer dans cette aventure de l’information, pourquoi ne la saisirait-il pas ?
Le journalisme que peut développer l’internaute serait donc du journalisme amateur. En effet, l’internaute se rendrait chaque matin à son travail et le soir en rentrant, ou quelquefois sur son poste de travail dans la journée, il écrirait quelques articles sur l’actualité. Chômeur ou employé, chacun peut ainsi, par l’intermédiaire de la toile, se prêter au jeu du journalisme, être un journaliste amateur. La vie infligerait ainsi à l’Homme le travail pénible auquel il doit se plier au quotidien pour subvenir à ses besoins, mais lui permettrait avec le web de s’épanouir dans une passion : le journalisme. Jusqu’à être plus que passionné, mais véritablement amateur.
Cependant, l’amateurisme journalistique représenterait tout de même quelques problèmes, voire même quelques dangers. En effet, celui qui est amateur est en général celui qui aspire à devenir professionnel ou qui n’y est pas parvenu. Ainsi, un sportif commence sa carrière en amateur et vise à intégrer l’élite où il espère faire carrière. Un journaliste amateur, lui, semblerait être un simple passionné, qui fait partager sa passion dans le but de vivre sa passion. Or, si le journaliste amateur n’est pas défendu d’inventer un nouveau genre, en l’occurrence le journalisme amateur, il semble évident que celui-ci comporte quelques incohérences. En effet, l’information n’est pas faite pour qu’un passionné couche sa plume sur du papier ou pose ses doigts sur un clavier afin de parler d’elle.
Non, l’information a pour objet d’informer le public parce que celui-ci veut connaître la réalité du monde dans lequel il vit. C’est pourquoi le journalisme est une profession. L’information est l’œuvre de professionnels. Elle doit être contrôlée. Il n’est pas possible qu’il soit raconté n’importe quoi au public. D’ailleurs, l’informateur ne raconte pas, mais rapporte. Il rapporte des faits. De la manière la plus simple possible. Le reporter doit s’en tenir au fait. Et c’est ainsi que le lecteur juge. C’est pourquoi la presse se veut être neutre. Elle ne doit influencer le jugement du lecteur, mais lui permettre de se faire une opinion. Le lecteur pense grâce à la presse.
L’existence de la presse libre et neutre manifeste l’existence de la démocratie. La presse est un pilier de la démocratie. C’est pourquoi elle doit être le quatrième pouvoir. Ainsi, parce qu’elle a la mission de veiller au respect de l’existence de la démocratie, la presse s’est spécialisée dans une catégorie particulière : le journalisme d’investigation. Cette fois, le reporter a pour mission de rapporter la vérité au cours d’une longue enquête. Il doit étudier longuement et sérieusement le dossier parce qu’il en va du maintiens de la démocratie. Le journaliste d’investigation a pour mission l’existence de la démocratie. C’est sa raison d’enquêter.
Malgré cela, malgré toutes ses raisons qui doivent être pour les concernés une véritable maxime, le journalisme, qu’il soit d’investigation ou non, n’est pas à l’abri de manipulations des plus forts. Il suffit d’avoir les moyens financiers pour créer un journal ou en racheter un et ainsi, la manipulation de l’opinion peut être faite. La presse et le journalisme ne sont pas à l’abri de la corruption. Et si le journalisme est corrompu, alors le citoyen doit réagir parce que la démocratie est menacée et que si la démocratie est menacée, c’est sa propre existence qui est en danger. De fait, le citoyen n’existe que dans un régime républicain démocratique. Cela s’est révélé définitivement au cours du siècle dernier. Mais, déjà dans l’Histoire, le Citoyen participait à la vie politique. Par exemple au temps des cités. Et, au cours du temps et par le développement de la réflexion philosophique, le citoyen s’est retrouvé comme une preuve de la démocratie.
En particulier depuis la Révolution française où le citoyen contre le sujet. Le premier est libre parce qu’égal des autres citoyens devant la loi tandis que le second est soumis au Roi. Seule une nation citoyenne est démocrate parce que la démocratie, c’est le respect de tous les citoyens. Un régime totalitaire ne peut être une nation citoyenne car tous ses résidents ne jouissent pas des mêmes droits et n’ont pas les mêmes devoirs. La citoyenneté, c’est le respect de l’autre. Pour le maintiens de la paix, les citoyens oeuvrent pour la démocratie. Celle-ci passe par la liberté de la presse. Et cette dernière est accusée d’être corrompue aujourd’hui. Une presse corrompue par des forces malsaines est le mouvement d’une démocratie en danger. Le citoyen se doit de réagir. Un citoyen est engagé. Il a des devoirs civiques et moraux. La presse est un pouvoir que le citoyen se doit de contrôler. Avec Internet, ce contrôle est possible. Le citoyen doit s’en servir. C’est la naissance du journalisme citoyen. Si le journalisme amateur relève du plaisir, le journalisme citoyen relève du devoir.
Du journalisme d’investigation au journalisme citoyen
Il existe déjà un genre de journalisme qui a pour but la vérité parce que la démocratie dépend de celle-ci. C’est le journalisme d’investigation. Celui-ci a révélé de grandes enquêtes comme l’Histoire nous le montre. Cependant, comme déjà souligné précédemment, le problème de ce journalisme, c’est que comme toute profession, il est dirigé. Et le directeur peut être corrompu à corrompre le genre. C’est le danger de toutes professions. Peu importe les maximes et les valeurs. Celles-ci peuvent être balayées par le simple vécu de la réalité. L’Homme ne cède pas parfois à la tentation. Dans le cas de la presse, il en va de l’existence de la démocratie. Les libertés de paroles et d’opinions passent par la liberté de la presse. Si le citoyen a des droits grâce au régime démocratique, il a des devoirs envers lui. La démocratie est vécue par le citoyen. Elle ne peut être que défendue par lui. Le citoyen doit donc pour cela contrôler le quatrième pouvoir. Le citoyen doit exercer son pouvoir sur la presse dans une fin démocratique.
C’est le cinquième pouvoir, qui est appelé le journalisme citoyen. En effet, le citoyen écrit à son tour. Il rivalise ainsi avec le journalisme professionnel. Mais, à la différence du journalisme professionnel, il n’écrit pas seulement pour informer. Mais, dans le but de faire pression sur la presse et de rétablir la vérité au cas où cette dernière manquerait à son devoir. Le journaliste citoyen se doit donc d’être au mieux interrogateur, au pire de donner son opinion. Le journaliste citoyen ne peut rester neutre car dans ce cas, il serait inutile puisque la maxime de neutralité relève du journalisme professionnel. Il doit marquer sa différence. Le journaliste citoyen doit pousser le lecteur à réfléchir plus encore que ne le fait un journaliste. Mais, à la différence de la presse professionnelle, son arme n’est pas la neutralité.
Cependant, donner son opinion ou interpeller par son texte ne revient pas non plus à être démagogique. En effet, le journaliste citoyen est un citoyen qui accomplit volontairement un devoir de citoyenneté. Il œuvre ainsi pour la démocratie et l’une de ses maximes est de repousser l’extrémisme qui est de la corruption. Il ne faut pas oublier que la base del’engagement du journaliste citoyen est le combat contre la corruption. Le journaliste citoyen est donc un démocrate qui lutte contre la corruption. C’est un citoyen engagé. Il est appelé journaliste citoyen. Ce n’est pas sa profession. C’est un devoir auquel il obéit volontairement. C’est pourquoi il ne peut prétendre au titre de journaliste. Il y a une différence entre un journaliste et un journaliste citoyen. Le premier est un professionnel qui a pour objectif d’informer tandis que le second est un volontaire (bénévole) qui accomplit un devoir de citoyenneté. Il n’est donc ni amateur, ni professionnel, mais volontaire d’une mission citoyenne.
Du volontaire particulier à la mission collective
Avec Internet, tout le monde peut mettre ses écrits en ligne. Il suffit de créer un blog ou un site pour cela. Seulement, pour que la mission réussisse, il faut que les articles soient lus par le plus grand nombre. Sinon, l’écrit et la réflexion resteront vains et le journalisme citoyen ne pourra vivre. A quoi bon écrire si ce n’est pas pour être lu ? Comment interpeller le public si des millions de citoyens qui ont la même mission se dispersent sur la toile ? L’éparpillement est un danger pour ce genre de journalisme étant donné que le monde du web est infini. Pour être lu, les journalistes citoyens ne doivent pas rester enfermés dans leurs blogs respectifs, mais écrire dans un journal qui aura autant d’audimat qu’un journal professionnel. Il s’agit d’un journal citoyen. Le journaliste citoyen doit écrire sur un journal citoyen. Ainsi, le journalisme citoyen développe un véritable sens. Chacun écrit avec sa liberté, mais le public se rend sur le même site au lieu de chercher pendant des heures un blog qui lui convienne. Le journal est le centre du journalisme citoyen. C’est ainsi que ce dernier devient un véritable pouvoir : le cinquième, derrière la presse et devant Internet. Le Monde ne peut plus se passer du journalisme citoyen. Et les citoyens se découvrent une nouvelle possibilité d’action.
De plus, ce qui fait la différence entre un journal ordinaire et un journal citoyen, c’est que le premier peut obéir à une ligne politique, excluant l’adversaire de toute intervention, tandis que le second regroupe en son sein toute la diversité la plus absolue, qui est d’ailleurs le principe même de la démocratie. Ainsi, le journal citoyen ne peut être corrompu puisque tout citoyen, quelque soit ses opinions, peut intervenir. Et c’est cette diversité qui ressort et qui interpelle le lecteur et lui permet de juger. Ainsi, de se faire sa propre opinion. Grâce à la diversité des journalistes citoyens qui interviennent, le journal citoyen permet de penser de façon objective.
Le journaliste citoyen, comme le journalisme citoyen, est un garant de la démocratie. Cette dernière redevient l’œuvre du citoyen.
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