Effondrement du système Aeschlimann à Asnières : danger en Sarkoland ?
Les Hauts-de-Seine ont connu dimanche 16 mars 2008 le début du plus grand bouleversement politique que ce département ait vécu depuis sa naissance. Le Sarkoland, comme beaucoup appellent le 92, est ébranlé dans ses tréfonds. Une des villes piliers de l’UMP sarkozyste a été perdue pour ce parti face à une liste républicaine unitaire PS-Divers droite-MoDem. C’est la perte la plus significative pour l’avenir du Sarkoland. D’autant que l’effondrement du système Aeschlimann, comme l’appelait L’Express en septembre 2006, est susceptible d’avoir des conséquences en chaîne plus que ravageuses en Sarkoland. Regardons les faits d’un peu plus près.
L’effondrement du système Aeschlimann mine-t-il les fondements du Sarkoland ?
La défaite électorale de Manuel Aeschlimann, qui était député-maire UMP d’Asnières, et n’est plus que député depuis le 16 mars 2008, peut maintenant être comparée à la mise en marche d’un cataclysme politique possible dans le département le plus « cher » à l’UMP, celui d’où est sorti le sarkozysme, ses idées, ses appuis, ses modes de fonctionnement.
On apprenait hier par de multiples médias, dont Le Parisien et l’AFP, que Manuel Aeschlimann, l’ex-maire battu, avait été « entendu » plusieurs heures par la BRDE (Brigade de répression de la délinquance économique) à Nanterre dans trois affaires distinctes.
Selon la presse et lui-même, l’ancien maire d’Asnières a été interrogé sur :
- une affaire d’usage présumé de fonds parlementaires pour payer les salaires de la nounou de ses enfants, donc des affaires privées. Si cette affaire aboutissait à un renvoi en correctionnelle, Manuel Aeschlimann risquerait alors, entre autres peines et sanctions, l’inéligibilité en tant que député ;
- une affaire sur l’utilisation présumée de « fichiers ethniques » basés sur les informations des listes électorales de la commune. Ce dossier peut être relié aux accusations portées contre Manuel Aeschlimann par ses adversaires de « politique communautariste » sur la ville ;
- la troisième affaire concernait une convention passée entre la mairie et la société Avenance, que les opposants aujourd’hui en mairie avaient dénoncée à l’époque de son vote par la majorité de Manuel Aeschlimann. Cette affaire a aussi déjà valu 36 heures de garde à vue à son ex-directeur général des services, Bernard Loth.
A cela, se rajoute une histoire qui pourrait trouver sa place dans un roman de Marcel Pagnol par son caractère ubuesque : avant de laisser son siège de maire à son successeur Sébastien Pietrasanta, outre le fait que la presse a révélé que la broyeuse municipale avait beaucoup « travaillé » entre le 17 et le 22 mars 2008 . L’ex-maire, devenu de par sa défaite et la loi, simple gestionnaire des « affaires courantes et urgentes » de la ville, a fait envoyer le 21 mars à plus de 25 000 électeurs de la commue, sur du papier glacé luxueux, le fameux Rapport de la Chambre régionale des Comptes d’Île-de-France dont il disait auparavant qu’il ne pouvait être divulgué SANS avoir été étudié et discuté par le Conseil municipal.
Encore mieux, il a accompagné ce Rapport qui épingle fortement sa gestion depuis 2001 d’un toujours luxueux placet de plus de vingt pages pour expliquer en substance, que, malgré les analyses et faits présentés par les magistrats financiers, « sa gestion aurait laissé la ville dans une situation saine ».
Au passage, il consacre comme VRAI un Rapport qu’il dénonçait comme « FAUX » voici quelques semaines... Plus risible encore, son envoi postal groupé aux citoyens d’Asnières met en cause aussi au passage sa propagande électorale récente.
Voilà au moins un avis totalement objectif et neutre puisque signé par le gestionnaire même de ce bilan !!!
Il y a encore mieux : la dépense pour ce document envoyé par La Poste à 25 000 citoyens se monte approximativement, selon la mairie d’Asnières, à 40 000 euros !!!
Tout cela APRES les élections et alors que ce Rapport a été divulgué largement par de nombreux sites et blogs AVANT.
Danger en Sarkoland : qui sera le bouc émissaire ?
Au-delà de ces aspects tragicomiques, les « affaires judiciaires » enclenchées sur Asnières, sans oublier celle où Manuel Aeschlimann est déjà mis en examen - « dossier du Festival International » de juin 1998 « pour complicité de favoritisme dans l’attribution d’un marché public » -, commencent à faire penser à de nombreux dirigeants et responsables UMP du département qu’il serait plus que temps de laisser l’ancien maire assumer seul ses responsabilités d’ancien édile d’Asnières.
Ce sentiment peut avoir quelque légitimité si l’on sait que d’autres dossiers sont pendants, suite justement au Rapport de la Chambre régionale des Comptes, notamment sur deux BEA (Baux emphytéotiques administratifs) relatifs à deux écoles qui semblent être très critiquables au regard des intérêts de la commune et des contribuables asniérois et à des opérations immobilières qui mettent en cause l’ancien adjoint Antoine Bary, fils de l’ex-maire de Neuilly, à travers la société dont il est un des cadres.
Ainsi, de « dossier » en « affaire », l’effondrement du système Aeschlimann crée des ondes de choc sur tout le Sarkoland.
En témoigne bien sûr ce qui est dit plus haut, mais aussi la mise en examen de la fille de l’ancien maire de Neuilly Louis-Charles Bary, Fabienne, dans le dossier du Festival International de 1998.
Par ailleurs, les auditions de jeudi dernier peuvent aussi créer des remous dans les sociétés privées ayant passé des contrats, BEA ou conventions avec la ville d’Asnières. Sachant que certaines de ces entreprises travaillent avec des communes du département, les ondes de choc de ce qui se passe à Asnières pourraient être appelées à s’étendre sur le Sarkoland.
En effet, des irrégularités éventuelles sur Asnières pourraient attirer l’attention des magistrats de la Chambre régionale des Comptes, de la justice, d’élus, d’associations ou de citoyens d’autres villes du 92 sur les contrats ou conventions passés sur leur commune...
L’audit financier de la gestion de la ville d’Asnières et l’examen attentif de la gestion passée par la nouvelle majorité unie sont aussi susceptibles de faire naître d’autres interrogations sur cette gestion passée.
Tout ceci ne peut que provoquer une inquiétude croissante en Sarkoland pour l’image publique de ce département, de ses élus et au final de Nicolas Sarkozy.
Après les pathétiques remous politiques de la campagne municipale à Neuilly, alors que Puteaux vient de connaître un terrible coup de semonce électoral adressé à son maire et que l’UMP vient de perdre Colombes, malgré la présence médiatisée de Rama Yade, ce qui se déroule à et autour d’Asnières ne peut qu’attirer l’attention publique sur les évolutions en cours en Sarkoland.
Selon certains militants de l’UMP, il serait question d’établir une sorte de « cordon sanitaire » autour d’Asnières et de laisser la justice faire sereinement et totalement son travail, quitte à ce qu’à l’arrivée, le parti "chahuté" du président puisse avoir trouvé un bouc-émissaire sur la gestion d’Asnières.
L’essentiel serait, selon ces militants, non pas de « sauver le soldat Aeschlimann », considéré par presque tous comme « déjà perdu », mais le reste du Sarkoland des conséquences des processus en cours à Asnières.
Un connaisseur de l’UMP 92 et nationale suggérait ainsi avec son humour quelque peu flegmatique que Manuel Aeschlimann devrait lire maintenant, non plus les oeuvres complètes de Machiavel qu’il se vantait de bien connaître, mais plutôt la fable de Jean de la Fontaine Les Animaux malades de la peste.
Et le même spécialiste de ce milieu politique de conclure avec un brin d’ironie détachée : « il pourrait y trouver des indications morales sur son destin ».
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