Les robots et la révolution
Employés de service, ingénieurs, médecins, professions du droit, fonctionnaires de l’administration, etc. peuvent tous être remplacés par des machines. Même les métiers qui ont déjà connu des vagues de mécanisation vont être à nouveau modifiés par l’arrivée des IA. Dans l’agriculture et l’industrie par exemple, des machines intelligentes sont plus efficaces que les grandes machines. Les nouvelles machines remplacent avant tout d’autres machines.
La question est alors simplement de savoir quand tel ou tel modèle d’IA sera suffisamment développé pour trouver des applications dans le travail (productif ou improductif). Le prix des machines diminuant constamment, ce n’est qu’une question de temps pour que tel modèle d’IA devienne bientôt suffisamment peu cher pour être rentable dans une entreprise. Comme nous l’avons dit, aucun travail humain n’est trop compliqué pour les machines. Si ce n’est pas possible aujourd’hui, alors c’est seulement que ça ne l’est pas encore, mais ça le sera bientôt. Si c’est le travail manuel qui a été remplacé en premier, c’est uniquement parce que les machines de l’époque avaient un degré d’intelligence suffisant uniquement pour remplacer le travail manuel. Mais avec le progrès des IA, tout travail peut être remplacé par une machine.
http://www.proletaire.altervista.org/marxisme/textes/robots-revolution.php
Robot est un mot issu de l’ancienne langue des slaves. On retrouve par exemple ce mot en russe, работа (rabota) qui signifie « travail ». C’est assez contradictoire, car dans la définition marxiste du travail, les robots précisément, ne « travaillent » pas. Le travail est une activité qui nécessite la conscience de soi, l’imagination du but avant sa réalisation. Les robots actuels en tout cas, n’en sont pas à ce niveau. Ils ne sont pas des producteurs, mais plutôt des outils, des intermédiaires. A ce titre le mot de machines, du grec, μῆχος (mêkhos) qui signifie « moyen », traduit mieux la réalité de ce que sont les outils de production moderne à l’état actuel de leur développement.
Insistons d’abord sur le fait que tout travail humain peut à terme être remplacé par une machine. L’idée que seul le travail manuel et répétitif est remplaçable par la machine est une idée complètement fausse destinée à rassurer les travailleurs intellectuels. Les innovations actuelles ne sont plus simplement des bras mécaniques qui travaillent sur des chaînes de montage de voitures. Le progrès des machines se concentre aujourd’hui sur le domaine de l’intelligence artificielle, dont nous allons devoir expliquer l’histoire.
Le mot artificiel ne doit pas être compris comme l’opposé de naturel. En effet l’homme fait partie de la nature, comme tout l’univers, et à ce titre, ses inventions sont également naturelles. L’artifice dérive de la notion d’art au sens de travail, donc de produit du travail humain. L’intelligence artificielle désigne simplement les machines produites par l’homme qui possèdent un certain degré d’intelligence. Il n’y a rien de « magique », mais le faible degré de connaissances du public dans ce domaine nous oblige à expliquer un peu ce qu’est l’informatique.
Le point de départ de l’informatique se situe dans l’électronique. Un fil électrique peut en effet avoir plusieurs états, selon le courant qui passe dedans. Le premier domaine d’application fut le courant analogique, et tout ce qui touche à l’analogique en général (comme les ondes hertziennes avec les radios, les vielles télévisions, ou encore les oscilloscopes). Le courant peut en effet faire des « vagues » (on parle dans ce cas de courant alternatif et de courant continu dans l’autre cas), c’est à dire qu’il se déplace alternativement dans les deux sens, ce qui permet de transporter de l’information selon la largeur de la vague par exemple (longueur d’onde). Ce mode analogique n’est en revanche d’aucune utilité pour faire des calculs.
L’apparition du numérique supposait de pouvoir utiliser l’électricité pour faire des calculs simples, tels qu’une addition. Mais avant même d’en arriver là, il fallait déjà pouvoir stocker les nombres, et le plus simple qui fut trouvé fut le système binaire : si le courant passe dans le fil, le nombre est 1, sinon c’est 0. Avec des systèmes de semi-conducteurs, il est possible de réaliser des circuits simples qui permettent de faire les calculs de ce qu’on appelle l’algèbre de Boole. Par exemple les fonctions et, ou, ou exclusif : (0 et 1) est faux (0), (1 et 1) est vrai (1), (0 ou 1) est vrai, etc. Ces fonctions de base, qui sont donc sous formes de petits circuits électriques, peuvent ensuite être combinées pour faire des calculs plus compliqués tels que l’addition, et de là, beaucoup d’autres opérations. Les nombres peuvent également être stockés dans des condensateurs (mémoire RAM), pour pouvoir être réutilisés. Le processeur est simplement la partie de l’ordinateur qui contient tous ces circuits électriques qui font les calculs.
Ainsi sont apparus l’informatique et des ordinateurs, dont la puissance de calcul n’a fait qu’augmenter, et continue d’augmenter. Il faut savoir que les ordinateurs fonctionnent avec le système binaire (0 et 1), qu’ils font essentiellement des calculs (addition, soustraction, multiplication, division) sur des nombres stockés dans des mémoires (appelées registres), que ces nombres peuvent être stockés également dans mémoires plus grandes (mémoire RAM) ou encore être stockés plus longtemps que la durée d’exécution du programme (par exemple dans un disque dur). Les premiers ordinateurs avaient donc pour principale fonction de faciliter les calculs, c’étaient simplement des calculatrices. Ils travaillaient uniquement sur des quantités. Le domaine des ordinateurs était donc la logique binaire et les mathématiques, c’est à dire la science des quantités.
Un programme informatique est simplement une suite d’instructions envoyées au processeur qui les exécute les unes après les autres. L’algorithmique est une branche des mathématiques qui s’occupe de l’enchaînement d’instructions (et de tests, ainsi que de boucles) et qui trouve une application directe dans l’informatique.
Les ordinateurs sont donc devenus de plus en plus performants mais sans changer fondamentalement de base, c’est à dire qu’ils restaient toujours dans le domaine des calculs sur des quantités.
Avec la puissance de calcul croissante et la naissance des premiers langages de programmation (et leur évolution), il est devenu possible de réaliser des programmes de plus en plus complexes, capables de faire des logiciels tels que nous les connaissons aujourd’hui, mais aussi les jeux, etc. Il faut déjà bien se rendre compte que tout ce qui se passe sur un ordinateur n’est rien d’autre qu’une série de calculs, qui se font dans le processeur, du système d’exploitation, au navigateur internet, et aux jeux, il n’y a rien qui n’ait derrière été programmé à l’avance par des programmeurs.
C’était sur ce principe que reposaient aussi les premières intelligences artificielles, c’est à dire qu’elles n’étaient en fait que l’intelligence du programmeur sous formes d’instructions. Par exemple dans le cas d’un simple jeu d’échecs, le programmeur devait prévoir à l’avance un grand nombre de cas possibles, « expliquer » à la machine les règles du jeu, bref lui apprendre tout sur le jeu et les techniques pour gagner, en fonction des situations auxquelles elles se trouvait confrontées. Le tout sous forme de lignes de codes par milliers. Pas très pratique quand on connaît le nombre de possibilités de certains jeux… Les premières intelligences artificielles pouvaient donc être très efficaces pour faire une tâche précise, quoique déjà un peu complexe, mais arriver à battre l’homme dans ce domaine.
Le problème de ces premières IA (intelligences artificielles), c’est qu’elles n’étaient pas du tout capables de s’adapter. Par exemple une IA faite pour un jeu d’échecs ne pouvait évidemment pas jouer à la bataille navale. C’est que jusque là, l’IA n’avait pas sa propre intelligence, elle n’apprenait pas elle-même, c’était au programmeur de tout lui apprendre. Jusque là, on suivait donc le bon vieux précepte de Lao Tseu, qui disait : « Si tu donnes un poisson à un homme, il mangera un jour. Si tu lui apprends à pêcher, il mangera toujours. »
Sauf que l’IA n’est pas un homme. En réalité, les concepteurs d’IA ont par la suite suivi un autre chemin, c’est à dire qu’au lieu d’ « apprendre à pêcher » à la machine, ils ont compris qu’il fallait faire encore mieux : lui apprendre à apprendre.
C’est bien sur en s’inspirant de l’intelligence humaine qu’est venue cette idée. En effet l’homme peut très bien apprendre de nouvelles choses par lui-même en expérimentant lui-même, et sans forcément qu’on lui explique les règles.
Avec les réseaux de neurones artificiels, l’apprentissage profond, la méthode dite heuristique, ou encore les algorithmes génétiques, les programmeurs ont testé de nombreuses façons de faire en sorte que la machine se programme elle-même en quelque sorte, puisse s’adapter et apprendre de nouvelles choses par elle-même sans l’intervention de l’homme.
Les réseaux de neurones artificiels sont un outil mathématique inspiré des neurones, qui consiste à traiter l’information en reproduisant la façon dont y circule (ou pas), par exemple avec des seuils de passage. Ce système change complètement par rapport aux mathématiques binaires et à l’algorithmique, car ici, la machine apprend et retient après plusieurs apprentissages successifs. Cette technologie trouve une application directe dans la reconnaissance d’images, dans tout ce qui touche à la reconnaissance en fait, de motifs, de courbes (on l’utilise par exemple dans le trading haute fréquence pour la spéculation).
Au début les ordinateurs n’avaient pour entrée que le programme qu’on leur donnait, et éventuellement par la suite des entrées au clavier, à la souris, puis des communications entre les ordinateurs eux-mêmes. Mais c’était très limité. Avec l’apparition des caméras et des micros numériques, et puis de la robotique, les ordinateurs ont des yeux, des oreilles, voient le monde, le sentent, le touchent, se déplacent. Les mathématiques (c’est à dire la science des quantités), ne sont pas adaptés pour traiter le monde réel, qui ne peut pas être réduit à de simples quantités, ou à de la logique binaire. C’est un monde au contraire où il faut prendre en compte les nuances, les liens de choses entre elles, le mouvement, etc. Tout autant de choses qui nécessitaient de nouvelles méthodes.
La première grande idée dans l’IA a été de comprendre par exemple qu’il n’était pas possible que l’IA comprenne ce qu’on lui raconte (en langage humain) tant qu’elle n’avait pas des images correspondant aux mots. Ainsi fut abandonnée l’idée d’une IA qui soit simplement une machine à penser en dehors du monde. La théorie matérialiste a été brillamment confirmée par l’évolution des IA, qui prouve que toute intelligence commence par les sens. Comment en effet comprendre ce qu’est une chaise ? On peut très bien donner une définition avec d’autres mots, mais ces mots eux-mêmes ne renvoient qu’à d’autres mots. Une IA a besoin, comme nous, d’être rattachée au monde réel pour pouvoir comprendre le langage. C’est à dire, qu’au lieu de donner une définition d’une chaise, l’IA voit la chaise, retient ce qu’est la chaise, et le mot « chaise » est simplement relié à cette représentation.
L’IA tend de plus en plus à ressembler au fonctionnement de la pensée animale voire humaine, c’est à dire par associations des représentations entre elles (ce qu’on appelle l’imagination), la possibilité du coup de se remémorer des choses en lien entre elles. Par exemple si l’IA voit une feuille et un stylo en même temps, puis qu’elle revoit plus tard une feuille, elle pensera aussi peut-être au stylo. Mais le monde est fait de relations plus complexes que le simple fait de choses les unes à côté des autres : ce sont des relations complexes de cause à effet, qui elles-mêmes ne sont qu’un cas particulier des interactions réciproques entre les choses. Bref, dans un monde où les choses sont reliées entre elles, la machine doit elle aussi utiliser la méthode dialectique pour connaître le monde, c’est à dire qu’elle doit relier les faits entre eux. C’est ce qui explique que les IA sont déjà capables de reconnaître des visages, de comprendre ce qu’on dit et de répondre, de s’adapter à des situations complexes. Elles ne sont plus les programmes rectilignes, mécaniques et limités du début mais des intelligences adaptées au monde réel.
Et donc, les machines peuvent devenir conscientes. Notons là encore que c’est une confirmation brillante du matérialisme que fait advenir le développement des IA. En effet, on se demande, comment une machine peut avoir une « âme ». Les idéalistes ont un dogme : « le monde matériel est inerte », de ce dogme ils en concluent que la conscience humaine doit être faite d’autre chose que de matière. Or le développement des machines montre au contraire qu’il n’en est rien, qu’on peut très bien faire de l’intelligence avec de la matière.
En réalité, les idéalistes abaissent la matière, la rendant incapable de penser. Le matérialisme n’abaisse pas la conscience à la matière, mais élève au contraire la matière à la capacité de penser. L’univers tout entier a cette capacité de penser, capacité qui bien sur, ne se réalise qu’à des degrés très divers, avec des sauts qualitatifs. La conscience n’est qu’une manifestation de ce fait plus large (dialectique), de l’unité du monde matériel, tout étant lié, chaque chose se conditionnant réciproquement. La conscience n’est qu’un cas particulier de ce lien universel. Notre conscience est le produit de l’évolution et de la sélection naturelle alors que les intelligences artificielles sont le produit du travail humain.
« Appliqué aux phénomènes psychiques, cela signifie que même sous sa forme non organisée la matière. n'est pas privée de cette aptitude fondamentale à la « sensation » qui procure de si riches fruits « spirituels » aux animaux supérieurs. Mais dans la matière non organisée, cette aptitude existe à un degré extrêmement faible. C'est pourquoi elle est absolument insaisissable pour le chercheur et nous pouvons l'égaler à zéro, sans aucun risque de commettre une erreur tant soit peu sensible. Mais pourtant on ne doit pas oublier que cette aptitude est inhérente à la matière en général et qu'il n'y a donc pas de raison de la regarder comme quelque chose de miraculeux là où elle se manifeste avec une force particulière, comme nous le voyons, par exemple, chez les animaux supérieurs en général, et principalement chez l'homme. »
Plékhanov commente Tchernychevski, rapporté dans les cahiers philosophiques de Lénine
L’avantage des IA est qu’elles peuvent, contrairement aux humains, avoir plusieurs corps simultanément (reliés par le réseau), accumuler une expérience bien plus grande. Dans ce domaine de recherche, les IA ont un potentiel de progression qui dépasse déjà les capacités humaines. Ainsi au lieu d’avoir un processeur par corps robotique, on peut très bien avoir un processeur qui contrôle plusieurs corps, reçoit d’eux des informations en permanence et apprend simultanément de plusieurs situations à des endroits différents. Les IA sont déjà capables d’élaborer leur propre langage et d’échanger entre elles sans que les humains ne puissent comprendre ce qu’elles disent.
Bref, l’IA est de plus en plus autonome grâce à sa capacité d’apprendre toute seule. Combinée à la puissance de calcul de l’informatique moderne et à la puissance de la robotique (qui permettent, grâce aux capteurs modernes, d’avoir bien plus d’informations qu’un humain), et enfin grâce au réseau, les IA peuvent déjà dépasser les humains, et vont encore les dépasser dans tous les domaines.
Employés de service, ingénieurs, médecins, professions du droit, fonctionnaires de l’administration, etc. peuvent tous être remplacés par des machines. Même les métiers qui ont déjà connu des vagues de mécanisation vont être à nouveau modifiés par l’arrivée des IA. Dans l’agriculture et l’industrie par exemple, des machines intelligentes sont plus efficaces que les grandes machines. Les nouvelles machines remplacent avant tout d’autres machines.
La question est alors simplement de savoir quand tel ou tel modèle d’IA sera suffisamment développé pour trouver des applications dans le travail (productif ou improductif). Le prix des machines diminuant constamment, ce n’est qu’une question de temps pour que tel modèle d’IA devienne bientôt suffisamment peu cher pour être rentable dans une entreprise. Comme nous l’avons dit, aucun travail humain n’est trop compliqué pour les machines. Si ce n’est pas possible aujourd’hui, alors c’est seulement que ça ne l’est pas encore, mais ça le sera bientôt. Si c’est le travail manuel qui a été remplacé en premier, c’est uniquement parce que les machines de l’époque avaient un degré d’intelligence suffisant uniquement pour remplacer le travail manuel. Mais avec le progrès des IA, tout travail peut être remplacé par une machine.
Non seulement il le peut, mais il le doit, car la concurrence que se livrent les capitalistes les oblige continuellement à perfectionner les machines, il y a toujours de la demande pour de nouvelles machines, qui permettent d’utiliser moins de travailleurs et donc de rester dans la course.
« D'ailleurs s'il arrive qu'un producteur parvient à fabriquer à meilleur compte et à vendre moins cher, par conséquent à occuper plus de place sur le marché, ses concurrents se voient obligés, l'un après l'autre, d'appliquer également un procédé plus économique, apportant une nouvelle réduction de la quantité de travail socialement nécessaire. »
Karl Marx, Le Capital - Livre III, §2, X
La tendance au remplacement du capital variable (l’investissement dans des travailleurs, les salaires) par du capital constant (des machines) est l’un des sujets les plus importants abordés dans Le Capital. C’est ce qui entraîne la baisse tendancielle du taux de profit et condamne le capitalisme.
Pour que cette loi économique aboutisse à un véritable effondrement du capitalisme, il faut donc que les machines soient développées au plus haut point et puissent remplacer le travail humain dans tous les domaines. Marx prédisait que si le travail humain disparaissait avec le développement des machines, alors ce serait la révolution à cause du chômage.
« Un développement des forces productives qui aurait pour effet de diminuer le nombre absolu des ouvriers et de permettre à la nation tout entière de produire en moins de temps tout ce dont elle a besoin, provoquerait une révolution, parce qu'il mettrait sur le pavé la plus grande partie de la population. Ici se manifeste de nouveau la limite qui est assignée à la production capitaliste et se montre une fois de plus que celle-ci, loin d'être la forme absolue du développement des forces productives, doit nécessairement entrer en conflit avec lui à un moment donné. Ce conflit se traduit en partie par des crises périodiques, résultant d'un excès de population ouvrière, tantôt dans l'une, tantôt dans l'autre industrie. La production capitaliste est indifférente à l'épargne de temps de travail que la société pourrait réaliser et elle n'est intéressée au progrès de la production que pour autant qu'il en résulte une augmentation du surtravail qu'elle prélève sur la classe ouvrière ; elle est ainsi en contradiction avec elle-même. »
Karl Marx, Le Capital - Livre III, §3, XV, 4
Qu’on ne vienne pas dire après que le marxisme est une idéologie d’un autre siècle. Bien au contraire, Marx a anticipé de manière brillante les problèmes de notre époque, en montrant la limite du développement du capitalisme à cause du développement des machines. Les IA, la robotique et tous les autres développements de la technique, dont on constate déjà les conséquences, confirment avec succès les prédictions de Marx, en dépit de toutes les tentatives pour faire du marxisme une idéologie « dépassée ».
C’est que la loi du développement de la société humaine (matérialisme historique) part précisément du fait que l’évolution de la société se fait avec l’évolution des forces productives (les machines), qui, à un certain stade de leur développement, entrent en contradiction avec les rapports sociaux (les rapports de propriété). Car il est évident que les machines et les IA ne posent un problème que par rapport au capitalisme. Les moyens de productions sont en effet, dans le capitalisme, la propriété privée d’une minorité de gens. Autrement dit, ils sont conçus et améliorés non pour satisfaire les besoins de la société, mais pour permettre à des individus de vendre, de faire des profits. Or, à qui vendre une fois qu’il n’y a plus personne qui travaille et qui ne touche de salaire ? C’est sur cette contradiction que bute fondamentalement le capitalisme, et qui fait de lui un système dépassé. A la façon de produire qui existe actuellement (production sociale qui emploie des machines, et donc de plus en plus productive), doit également correspondre des rapports sociaux nouveaux, une propriété sociale des moyens de production. Tant que nous resterons dans les rapports sociaux actuels, fondés sur la propriété privée, il y aura continuellement de nouvelles crises, et à la fin, il ne peut y avoir que l’effondrement du capitalisme et la révolution.
Comment ne pas voir l’actualité du marxisme quand on lit ce qu’écrivait Marx, en 1847 :
« Les conditions bourgeoises de production et d'échange, le régime bourgeois de la propriété, la société bourgeoise moderne, qui a fait surgir de si puissants moyens de production et d'échange, ressemblent au magicien qui ne sait plus dominer les puissances infernales qu'il a évoquées. Depuis des dizaines d'années, l'histoire de l'industrie et du commerce n'est autre chose que l'histoire de la révolte des forces productives modernes contre les rapports modernes de production, contre le régime de propriété qui conditionnent l'existence de la bourgeoisie et sa domination. Il suffit de mentionner les crises commerciales qui, par leur retour périodique, menacent de plus en plus l'existence de la société bourgeoise. (…) Les forces productives dont elle dispose ne favorisent plus le régime de la propriété bourgeoise ; au contraire, elles sont devenues trop puissantes pour ce régime qui alors leur fait obstacle ; et toutes les fois que les forces productives sociales triomphent de cet obstacle, elles précipitent dans le désordre la société bourgeoise tout entière et menacent l'existence de la propriété bourgeoise. Le système bourgeois est devenu trop étroit pour contenir les richesses créées dans son sein. »
Karl Marx, Le manifeste du parti communiste, 1847
Dans, Les principes du léninisme, Staline remarquait déjà que « Les forces productives sont, par conséquent, l'élément le plus mobile et le plus révolutionnaire de la production. »
Notons que les IA ne sont qu’un élément de ces forces productives nouvelles. Les imprimantes 3D, la robotique, la découverte de nouvelles ressources spatiales, sont autant de progrès des forces productives qui condamnent un peu plus chaque jour le mode de production capitaliste.
Qu’on ne soit donc pas étonné si les milliardaires mettent en garde contre le « danger des IA » et que tous les opportunistes actuels se complaisent dans les théories du retour en arrière, du retour au « bon vieux temps » de la campagne et de la petite production. Inutile de dire que ces théories réactionnaires qui tententd’effrayer l’humanité sur ce « danger » dévoilent surtout le danger que font peser les forces productives nouvelles sur la minorité d’exploiteurs actuelle. Lapremière partie de la révolution se fait en ce moment-même avec les machines, qui sapent chaque jour un peu plus la base du mode de production capitaliste.
Dans la société socialiste, les forces productives se développeront encore et même bien plus car elles ne seront plus en conflit avec les rapports de propriété, les machines seront utilisées pour répondre aux besoin de la société. Les possibilités offertes par ces forces productives nouvelles annoncent des changements positifs pour l’humanité, à condition qu’ils soient au service de la société toute entière.
L’une des applications des robots va être dans le domaine de l’état avec la possibilité de remplacer les hommes armés par des machines. Une première étape a été franchie avec les avions sans pilotes (drones) commandés à distance, mais qui en fait pourraient très bien fonctionner de façon presque totalement autonome. Si la police et l’armée sont remplacés par des machines, il est possible aussi que des révolutions se fassent avec des robots, c’est à dire non pas une révolte des machines, mais les machines comme outil de guerre. Un nombre très réduit de personnes pourrait alors mener les guerres modernes ce qui ouvre aussi la possibilité à une redéfinition complète du jeu politique. En effet la force armée serait beaucoup moins chère. Cette perspective deviendra plus réaliste lorsque les machines deviendront capable de se répliquer, c’est à dire se produire elles-mêmes. Elles n’auront alors plus aucune valeur, car ne nécessitant plus aucun travail humain pour être fabriquées. Il n’y aurait plus besoin de payer des hommes armés pour gouverner et il n’y aurait plus besoin non plus des masses pour faire de la politique. Il suffirait d’avoir beaucoup de soldats robotiques.Qu’on ne balaie pas d’un revers de main cette hypothèse, les questions stratégiques n’ont rien d’un dogme, et par conséquent le futur ne fonctionnera peut-être pas avec les règles que nous connaissons.
Quoi qu’il en soit, la question des machines, qui apparaît nettement aujourd’hui comme une question centrale, est en fait l’un des points les plus importants dans la compréhension marxiste de l’histoire, ce qui prouve la validité du marxisme, mais nous oblige en même temps à prendre en compte les nouvelles évolutions technologiques et toutes leurs implications. Il faut suivre de près les évolutions technologiques en cours. La question des machines doit avoir une place dans la réflexion marxiste contemporaine.
Source : http://www.proletaire.altervista.org/marxisme/textes/robots-revolution.php
D'autres analyses communistes => http://www.proletaire.altervista.org
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