Les Verts et le pic pétrolier : Cécile Duflot parle de résilience !
Alors que l’ensemble des partis politiques français se démènent pour ou contre les réformes proposées (ou imposées) par le gouvernement actuel, certains discours n’apparaissent pas vraiment aux heures de grande écoute !
Cécile Duflot, Secrétaire Nationale des Verts publie une tribune sur le site Libération.fr au sujet des 2 grands défis que devra relever notre société : les changements climatiques et le pic pétrolier. Ce dernier est rarement abordé par les partis nationaux tant les solutions à mettre en œuvre sortent des sentiers battus !
C’est en 2005 qu’Yves Cochet publiait l’excellent « Pétrole Apocalypse » -ouvrage au titre effrayant, décrivant les conséquences de la baisse de production pétrolière sur l’économie mondiale-. Depuis, aucun parti n’a assumé publiquement ce phénomène et les changements qu’il impose.
Je précise aux lecteurs que je n’ai pas la carte des Verts et que mon jugement n’est pas politicien (au sens des partis politiques) mais il a simplement pour but d’analyser l’outil politique envisagé (au sens de la gestion du territoire).
"Le pic pétrolier est un défi pour la stabilité économique et sociale"
Après une introduction incluant un petit rappel sur la marée noire aux Etats Unis, Cécile Duflot indique qu’il est primordial d’anticiper le pic pétrolier pour pouvoir répondre par ailleurs aux conséquences des changements climatiques. Ce qui est tout à fait pertinent car ces deux thématiques sont intimement liées.
D’une part, parce que le réchauffement climatique est principalement causé par nos émissions de CO2 et qu’anticiper le pic pétrolier reviendrait à diminuer drastiquement nos besoins énergétiques et donc à diminuer nos émissions de GES.
D’autre part parce que ces deux problématiques vont débuter prochainement, si ce n’est pas déjà fait ! Il sera d’autant plus difficile de faire face à la modification du climat si nous n’avons pas effectué notre transition énergétique auparavant.
"L’alternative énergétique relève d’une stratégie de résilience fondée sur l’anticipation du choc pétrolier"
Vous aurez certainement remarqué que la stratégie de résilience est, de mon point de vue, la piste à suivre absolument pour anticiper la hausse des prix du pétrole ou les problèmes d’approvisionnement. Lire ces mots rédigés par une représentante d’un parti national ne peut que me conforter dans mon analyse. La résilience locale est effectivement une caractéristique fondamentale vers laquelle il faut faire tendre nos territoires.
Mais avancer ce type d’argumentation très réaliste et raisonnable n’est pas sans risque à ce niveau politique. En effet, cette logique consiste en une inversion du modèle économique. Il s’agit de privilégier les économies locales par rapport aux lobbies et grands groupes internationaux qui font aujourd’hui la fierté de notre pays et de l’Europe.
"Sortir de la dépendance au pétrole, c’est d’abord abandonner notre modèle de développement basé sur le gaspillage et la surconsommation."
C’est effectivement la première étape indispensable, basée essentiellement sur le bon sens et la relocalisation de l’économie. Il est fondamental de mettre en place sur chaque territoire (ville, agglo, communauté de communes) une réponse aux besoins essentiels de la population.
L’objectif est double :
1/ Améliorer la résilience et donc la capacité d’adaptation en cas de perturbation
2/ Rendre durables et non délocalisables les activités mises en place localement
"Le nucléaire qui ne représente que 2% de la consommation d’énergie dans le monde ne résoudra rien."
Je retrouve là encore un élément important de la stratégie de résilience. Il faut aller vers une décentralisation de l’énergie, une amélioration de l’efficacité, l’augmentation de la part dédiée aux énergies renouvelables et une baisse énorme des gaspillages, or le nucléaire se situe à l’opposé de tout cela.
De plus, si l’on considère que nous aurons à vivre des périodes de crise, il faut se demander s’il sera toujours possible de suivre avec rigueur, et en toutes circonstances, le fonctionnement des installations nucléaires coûteuses et vieillissantes de notre pays.
"Loin des chantiers pharaoniques, coûteux et parfois délirants, l’efficacité et la sobriété énergétiques impliquent de gérer différemment notre mobilité en adaptant nos modes de transport, de relocaliser nos activités économiques et de produire autrement."
C’est un atout majeur de la stratégie de résilience. Elle laisse la place aux petites solutions, aux idées de chacun dans un esprit de réappropriation des besoins du citoyen, par les citoyens. Le prix à payer sera celui d’une transition économique, c’est-à-dire la disparition de certaines activités pour la création de nouvelles.
L’efficacité, la durabilité et la proximité remplaceront la logique de centralisation et de rentabilité purement économique de court terme, basée sur la disponibilité de l’énergie bon marché. Les principales victimes seront probablement les structures qui ont basé leur activité sur des logistiques nombreuses et complexes. Les supermarchés, par exemple, paieront certainement le prix fort de la transition car leur fonctionnement n’est aucunement résilient et dépend très fortement des transports.
"La fin de notre accoutumance à l’or noir sera soit imposée brutalement par la réalité du pic pétrolier et organisée de manière autoritaire par en haut, soit assumée par en bas, par une société mobilisée."
C’est le choix que nous devons faire pour l’avenir : préparer ou subir ! C’est pourquoi j’invite la population et les élus, dans mes articles, à se mobiliser et ne pas attendre que l’Etat mette en place les solutions.
Conclusion
Je suis donc satisfait par cette tribune qui ose dire les choses telles qu’elles sont même si je reste malgré tout un peu sceptique sur la place que peut prendre une telle ambition dans un programme politique national, surtout dans un pays qui rêve encore au miracle technologique.
Un petit détail également concernant le délai indiqué de "tout au plus quelques dizaines d’années". Je considère que parler d’un délai aussi vague et aussi lointain ne permettra jamais de faire adhérer le plus grand nombre. En effet, quel intéret aurions-nous à faire une transition alors qu’il nous reste plusieurs dizaines d’années devant nous ? Il s’agit plutot de 5 à 10 années maximum selon la plupart des rapports !
C’est pourquoi il me reste aujourd’hui de nombreuses questions dont celles-ci :
1/ Le gouvernement d’un pays comme la France peut-il démocratiquement mettre en place une telle politique et être élu sur la base d’un tel programme ?
2/ Cette tribune est-elle la vision idéale d’une militante ou le résumé du prochain programme des verts à la présidentielle ?
3/ Ce virage indique-t-il que si les Verts étaient au gouvernement, ils laisseraient suffisamment de moyens aux collectivités locales pour mettre en œuvre leurs propres outils ?
4/ Sachant que les outils et solutions sont propres à chaque territoire, les Verts au gouvernement seraient-ils prêts à ne donner que des objectifs de résultats tout en laissant une grande liberté (contrôlée) de moyens ?
Quoi qu’il en soit, je suis rassuré de voir qu’au sein des principaux acteurs politiques, se trouvent des personnes qui assument publiquement la problématique majeure du pic pétrolier et qui mettent en avant des solutions défiant toutes les politiques actuelles.
A l’avenir, si les Verts n’ont pas la possibilité de mettre en œuvre ces idées à l’échelle du pays, j’espère qu’ils n’hésiteront pas à le faire dans les collectivités locales où ils seront présents.
44 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON