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Accueil du site > Actualités > Société > Grattes ciels à Paris : Trois petites tours et puis s’en vont (...)

Grattes ciels à Paris : Trois petites tours et puis s’en vont ?

La bataille fait actuellement rage, à Paris, entre les tenants et les opposants des immeubles de grande hauteur.
Selon les sondages avancés par les verts, qui siègent au conseil municipal de Paris, 67% des Parisiens y seraient opposés et le parti des écologistes préconise qu’un référendum soit organisé.

La division qui existe au sein de la population et chez les politiques, se vérifie également chez les Architectes.
Pourquoi les tours divisent-elles ? Qu’est-ce qui fonde l’attrait ou le rejet, exprimé ?

Ce qui peut être versé à l’actif de ces immeubles hauts :
Incontestablement ce sont de magnifiques objets qui racontent toute la suprématie de l’homme sur la technique. Pour preuve, les grandes capitales, en font l’emblème de leur modernité.
A ce stade, on pourrait ouvrir une parenthèse et permettre de s’interroger sur cette question de la modernité :
Si la modernité est le pendant de l’innovation technique, à cet égard les Tours sont restées, depuis les premières édifiées à Chicago ou à New York dans les années1870 un signe de modernité.
Tout d’abord parce qu’elles ont rompu avec l’immeuble traditionnel, en introduisant l’acier dans les structures et le verre dans les façades, les libérant ainsi de toute portée. (Question N°1 : Modernité =Rupture ?)

En construisant de plus en plus haut, en propulsant les tours vers les nuages, c’est tout un ensemble d’équipements technique qui est révolutionné et des innovations innombrables, qui sont mises au point : Ascenseurs, systèmes d’accrochage des façades, natures des vitrages, équipements de sécurité…. la liste est longue.

Sur le plan de l’architecture et de l’ingénierie, les cylindres ou les paraléllépipède de verre, laissent de plus en plus place à des formes plastiques plus sensuelles, qui ne sont pas dénuées d’attrait. Les sections rétrécissent au profit de la hauteur, pour augmenter l’élancement, et obtenir des profils en lames de rasoir.

Mais il ne faut perdre de vue, que les Tours ont été envisagées pour répondre à des contraintes de rentabilité foncière. (Question N°2 : Modernité = Rentabilité ?)
Avec l’accroissement des préoccupations environnementales, cet aspect tend à prendre une signification plus politiquement correcte ; celle de l’économie du sol.

L’argument mis en avant, est qu’en s’étendant, les villes vont consommer davantage de territoire, développer les réseaux routiers, polluer davantage, au détriment des forêts et des écosystèmes.
La réponse de la densification ou de la surdensification, peut apparaître comme une réponse possible voire recevable.
Le caractère résolument écologique ou prétendu comme tel, est presque étayé avec des projets de tours dites écologiques, parce qu’elles intègrent des dispositifs pour répondre aux économies d’énergies (éoliennes, capteurs solaires, récupération des eaux pluviales etc ou qu’elles font la part belle à la végétalisation.)

Pourquoi les tours font-elles peur ?
La peur ou l’insécurité sont les arguments négatifs récurrents, qui grèvent leur passif.
Les réponses filmographiques surgissent dans l’imaginaire collectif : la Tour qui se transforme en piège de cristal, se décline à loisir .
Plus grave et plus réaliste, le drame du 11 Septembre 2001, a mis en exergue des failles dans la sécurité (étanchéïté aux fumées des cages d’escaliers, notamment) qui ont contribué à aggraver le bilan des pertes humaines.

La sécurité est un des points les plus critiques : en cas de problème important, la tour peut se transformer en une fourmillière, de laquelle il peut être très difficile de s’échapper.

Autres inconforts ou angoisses évoqués : les ombres portées ; les effets « Venturi » en pied d’immeuble ; les temps de « voyage » jugés trop longs, dans les ascenseurs ; peut-on ouvrir sa fenêtre si on habite au 15 ème étage avec la même désinvolture que si on habite au 7ème étage ?
Peut-on faire pousser des plantes sur son balcon au 20ème étage, quand on connaît les effets dépressionnaires ?
La perte de convivialité et de notion de voisinage : trop de monde, on ne se reconnaît pas entre voisins.

Les risques d’incendie quant à eux, sont plutôt bien cadrés, par la réglementation en France :
Celle qui s’applique à ces immeubles, dits de grande hauteur (IGH) est inspirée de celle des bâtiments de la marine :
Dans un IGH, en cas de problème, seul le compartiment (un ou deux étages, suivant la surface par niveau) est évacué dans un premier temps.
Et si l’ampleur du sinistre impose l’évacuation complète des effectifs (les occupants), le bâtiment ainsi que ses principaux organes de sécurité, doivent résister au feu pendant 2heures.
Ce délai étant jugé largement suffisant pour évacuer la totalité de l’immeuble.

On touche ici, un problème crucial qui est la nécessaire fiabilité des dispositifs associés à la sécurité : celle-ci représente un coût d’investissement mais surtout un coût d’exploitation.
La question qui va se poser, dans ce débat du pour ou contre, est celle de l’information des futurs occupants sur le volume des charges (30 à 50 % plus élevées que dans un immeuble standard) sachant qu’au fil du temps, le vieillissement des équipements va encore alourdir cette ardoise !

Il reste une dernière question de poids qui mérite d’être abordée :
En France la réglementation IGH, s’applique pour les bureaux à partir de 28m (dernier plancher à + de 28m) alors que pour le logement, elle n’est appliquée qu’à partir de 50m.
Ce paradoxe, dont on comprend bien les incidences économiques, n’occulte pas la disparité entre les exigences de sécurité :
Cette disparité réglementaire, peut-elle, doit –elle être perpétuée dans le futur ?

Autre question : Le modèle de la Défense, traduit peut-être l’attrait du monde de l’Entreprise (institutionnelle souvent) pour les tours de bureaux. Mais est-ce que cela fait pour autant de la Défense, un quartier où il fait bon vivre ?

La juxtaposition de beaux objets architecturaux ne fait pas la ville et
l’alchimie du BIEN VIVRE ENSEMBLE n’est ni question de verticalité, ni d’horizontalité, mais plutôt, de prise en compte des besoins de la population.
Et si on abordait la ville sous l’angle du bonheur, plutôt que celui de la hauteur ?


Ouiza Abdat architecte

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10 réactions à cet article    


  • Fergus fergus 27 décembre 2008 18:05

    Il est un fait : la réglementation en vigueur dans les IGH (j’ai habité dans l’une de ces tours du 13e arrondissement) est très contraignante et rend ce type d’habitation beaucoup plus sûr que nombre d’immeubles de moindre hauteur.

    Il est un autre fait : ces tours sont, pour la plupart d’entre elles, laides et dégradées, avec à la clé une pollution visuelle souvent insupportable. Cela explique sans doute pour beaucoup le rejet (justifié) d’une large majorité de la population.


    • Halman Halman 27 décembre 2008 20:16

      "Sur le plan de l’architecture et de l’ingénierie, les cylindres ou les paraléllépipède de verre, laissent de plus en plus place à des formes plastiques plus sensuelles, qui ne sont pas dénuées d’attrait."

      Ces grandes tours grises et sinistres sont aussi sensuelles que des autoroutes.

      Et puis, en tant qu’astronome amateur, cela me fera encore une partie de ciel caché qui me masquera encore plus les planètes à observer.

      Quand déjà à Paris on ne voit même plus la Voie Lactée.

      Quand ces tours font tellement d’ombre qu’on cherche le rare soleil parisien.

      Encore des caches étoiles, encore des caches soleil.

      Quand on aura que des tours de plusieurs centaines de mètres qui nous cacheront définitivement le ciel.

      Encore des lubies d’architectes à gros contrats juteux.


      • krolik krolik 27 décembre 2008 20:36

        A Londres, le Prince Charles a vivement critiqué l’ordre des architectes britanniques (équivalent) pour avoir hérissé la ville de tours. Il avait pris comme modèle et félicité la ville de Paris justemnt piur l’absence de tours.
        Il est un fait qu’à Londres comme touriste je cherchais à visiter Dt Paul Cathedral... il a vraiment fallu que je "tombe dessus" pour arriver à la voir, elle est entourée d’IGH.

        Il y a eu la tour Montparnasse au début des années 70, mais cette construction avait été décidée pour des raisons militaires. Lorsque vous montez par l’ascenseur au 56ème étage pour la visite panoramique et que vous vous décidez à monter à pied sur la terrasse, vous devez passer deux étages sans ascenseur..
        La ferraille des ascenseurs baladeurs aurait gêné les faisceaux hertziens militaires qui sont dans les deux derniers étages.
        Mais la raison militaire ne s’appliquerait pas aux nouvelles tours.
        Le mode de construction français des tours impose un noyau en béton... Depuis Henri IV, les grands travaux, le développement du génie civil a été fait sous l’égide des bétonniers. Le béton a le gros avantage de résister à l’incendie. Il est certain qu’un 911 sur la tour MOntparnasse n’aurait pas eu les mêmes effets d’effondrement. La ferraille à ferrer les baudets au-delà de 250°C ça devient de la guimauve. Le béton, lui il tient jusqu’à 800°C sans trop de problème s’il a été bien fait ce qui est usuellement le cas. L’argumentation pour ou contre du WTC ne tient pas à Paris.
        @+


        • Fergus fergus 28 décembre 2008 09:22

          Concernant Londres, il est vrai que la ville a été largement défigurée par la construction de tours plus hidueses les unes que les autres aux abords mêmes des sites historiques. En revanche, le quartier de Canary Wharf, pensé de manière globale et homogène, est plutôt réussi.


        • sobriquet 27 décembre 2008 22:08

          Inévitablement, l’augmenation de la densité des habitations et des bureaux, ici par l’élevation de tours, multiplie la dépendance de ces structures à l’extérieur :

          - besoin de trouver des espaces verts suffisamment proche et en quantité suffisante,

          - augmentation des surfaces agricoles pour nourrir ceux qui s’y trouvent,

          - augmentation des besoins énergétiques, même si l’on peut trouver quelques compensations

          - augmentation des besoins en eau, même si là aussi on peu imaginer quelques compensations,

          - augmentations des besoins en biens de consommation,

          - augmentation des dépenses d’entretien,

          - il en découle une augmentation des besoins en matières premières.

          - etc.

          La satisfaction de ces besoins devient beaucoup plus critique, la tolérance aux défauts d’approvisionnement est drastiquement réduite. La factorisation de certaines charges peut atténuer cette vulnérabilité accrue, mais pas l’annuler.

          Ces équipements doivent donc s’assurer les moyens de garantir leur sécurité :

          - principalement par des rentrées d’argent suffisante pour financer leurs besoins,

          - plus prosaïquement en se prémunissant des actes malveillants et en adoptants des règlements de plus en plus contraignants pour s’en protéger,

          - en se prémunissant contre les accidents, là encore, entre autre, en adoptant des règlements de plus en plus contraignants,

          - diplomatiquement et politiquement en s’assurant de bonnes relations avec les zones environnantes, et de plus en plus, en imposant que ces zones environnantes s’adaptent aux zones à fortes densité. Que serait Paris sans la Beauce ?

          En conséquence, on le voit, l’augmentation des densités ne peut pas s’envisager sans une concentration des pouvoirs, qui va de pair avec une augmentation des contraintes sur toutes les populations environnantes.

          On ne peut pas favoriser ce type de construction sans favoriser en conséquence la réduction des libertés individuelles.


          • stephanemot stephanemot 28 décembre 2008 08:29

            En preambule, vos "grattes ciels" sont affreux : il n’y a qu’un ciel a Paris comme ailleurs et pas de S a gratte (sauf peut etre pour Hendrix).

            Ensuite, posons la question du pourquoi.

            Un IGH pour un IGH cela n’a pas de sens. Ce qui compte, c’est de construire quelque chose, petit ou grand, qui fasse sens. S’il y a une volonte politique d’augmenter la densite dans la capitale, il faut que le reste suive au niveau infrastructures.

            Vouloir construire un nouveau "landmark" ? Pourquoi pas, mais la quete de hauteur dans ce cadre releve de la pure vanite, comme le Burj Dubai ou la fleche plantee au milieu de St Petersbourg. Le projet triangulaire pour Paris, je demande a voir son usage. Ca peut etre affreux si l’on considere l’hotel Ryugyong a Pyeongyang, ou totalement absurde si l’on considere la TGB Mitterrand, concue pour accueillir des livres mais trop transparente pour les conserver correctement.

            C’est justement de transparence dont on a besoin. Un tel dossier ne devrait surtout pas passer a la hussarde comme pour le Tramway, sans concertation avec les voisins et avec de troublantes operations immobilieres a la clef.


            • Bof 28 décembre 2008 14:34

              BRAVO et MERCI . Pour ce qui est de votre conclusion : " Et si on abordait la ville sous l’angle du bonheur, plutôt que celui de la hauteur ?" oui, bien sûr. Mais, cependant pour la question des bureaux, ce que l’on y fait doit prendre toute son importance. On doit lutter contre les" spéculateurs de bureaux", c’est à dire contre les jeunes diplômés qui se scotchent à leur place dans leur beau bureau en passant leur vie de week end en week end attendus dès le lundi matin et qui ne profitent pas de leur compétence pour améliorer le sort de leurs semblables comme la société est en droit d’attendre d’eux . Je crois que la tour de la défence fait parti de ces places enviées où dès 35 ans, on peut préparer sa retraite imméritée pour certains bureux au moins.


              • thomthom 28 décembre 2008 18:52

                Les grands immeubles PEUVENT clairement etre une solution à l’engorgement et au manque de foncier dans les grandes aglomérations. Au dela des idées recues et des idéologies figées, je ne suis pas sur que parmi tous ceux qui sont aujourd’hui pas ou mal logés en ile de France soient vraiment opposés à ce principe si ca peut aider à leur trouver un logement raisonnablement proche de leur lieu de travail à prix raisonnable.


                Cependant, les grands immeubles, c’est comme plein de chose dans la vie : ca peut etre tres bien ou tres mal, tout dépend comment ils sont conçus et ce qu’en fond leur "utilisateurs".

                Je pense qu’il est idiot d’etre opposé à la construction de tels immeubles, quasi "par principe", ou pour tout un tas de raison qui sont des idées reçues issues des échecs du passé. La seule démarche constructive à avoir, c’est de porter un regard critique sur chaque projet, et si ce dernier n’apporte pas satisfaction, de voir comment il peut etre amélioré. Et ce n’est qu’après avoir fait cette démarche pour chaque projet que, si on arrive à la conclusion que les impacts négatifs sont décidément trop important et ne peuvent etre raisonnablement amoindris qu’il devient raisonnable d’envisager un abandon du projet.


                Cela dit, tant que la densité de population moyenne dans notre pays reste raisonnable (ce qui est largement le cas), je suis d’accord avec ceux qui disent que la meilleure solution est clairement de répartir les activités sur un territoire bien désservi en infrastructures de transport, plutot que de tout concentrer comme on le fait dans une mega-capitale tentaculaire et omnipotente.... mais c’est un autre débat, et la mise en application de ce principe constituerait un projet nationnal d’une toute autre ampleur (et difficulté) !


                • norbert gabriel norbert gabriel 28 décembre 2008 19:51

                  est-ce que les tours USA sont construites avec les mêmes technqiues ’noyau en béton’ ? il y a eu pas mal de polémiques sur les Twin towers et leur effondrement, étaient-elles construites avec les mêmes techniques qu’en Europe ? 


                  • ASINUS 29 décembre 2008 19:20

                    tsss tsss aux USA les tours elles sont plus grandes plus belles plus solides
                    plus mieux construitent plus mieux pensées
                    plus mieux tout quoi comme tout aux USA resultat elles sont aussi plus mieux par terre yep

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