Il y a ceux qui nous pompent l’air...
…Et ceux qui le brassent,
Les premiers s’entêtent dans un nucléaire sans avenir, les autres préfèrent les pales d’une éolienne.
Comme dit un sage : « si nous ne nous passons pas du nucléaire, c’est la Terre qui se passera de nous ».
En France, ils sont 77% à souhaiter sortir du nucléaire, et nul doute que la catastrophe de Fukushima, 25 ans après celle de Tchernobyl y soit pour quelque chose, la question qui reste étant : dans quel délai ?
Les plus pessimistes évoquent 40 ans, ce qui laisse largement le temps de permettre une nouvelle catastrophe, et les autres voudraient bien commencer tout de suite, les uns et les autres se traitant mutuellement d’irresponsables.
Au-delà de ces querelles, voyons comment, dans les meilleurs délais, on pourrait tourner définitivement la page nucléaire.
La production totale d’énergie primaire en France en 2010 est de 266 Mtep (millions de tonnes équivalent pétrole) (lien), dont 16,1 % nous vient de l’énergie nucléaire.
Mais sur cette « offre d’énergie primaire » 144,7 Mtep seulement arrivent chez le consommateur, une bonne partie de l’énergie étant perdue lors de sa fabrication, ou pendant son transport. lien
En effet, ce ne sont pas moins de 25 000 MWh, soit l’équivalent de la production de 3 réacteurs nucléaires, qui sont perdus lors du transport dans les lignes THT (très haute tension). lien
La part de l’énergie nucléaire produite en France en 2008 représentait 99,6 Mtep (lien) dont seulement 55 Mtep sont arrivées chez le consommateur, qu’il s’agit donc de remplacer le plus rapidement possible.
Chacun des 58 réacteurs nucléaires du pays produit donc 1,72 Mtep.
Si on décidait de décentraliser l’énergie, c'est-à-dire de ne plus la transporter aux 4 coins du pays, et d’utiliser sur place la totalité de ce qui est produit, il ne suffirait plus théoriquement que de remplacer 32 réacteurs au lieu de 58 pour arrêter le nucléaire.
Prenons l’exemple de l’unité « totem » tournant au méthane : l’électricité produite est consommée sur place, et l’eau de refroidissement du moteur sert au chauffage de l’habitation, de la ferme.
Commençons par nous pencher sur l’isolation des habitations, sans écarter au passage celle des entreprises et des commerces.
Un programme national encourageant une meilleure isolation des habitations, et des entreprises, utilisant des matériaux naturels (laine de mouton, chanvre, lin…) outre le fait qu’il serait générateur d’emplois, permettrait d’économiser 30% sur nos factures de chauffage. lien
Les travaux sont simples et rapides, si l’on choisit le soufflage de matériaux isolants, comme le montre cette vidéo
Mais il y a mieux, c’est l’habitat dit passif, qui permet de réduire sa facture de chauffage de 80 à 90% et encore mieux avec les maisons à énergie positive, qui outre qu’elles ne consomment pas d’énergie, en produisent. lien
Or le chauffage des habitations représente 35 Mtep chaque année, ce qui représente l’énergie fournie par 20 réacteurs nucléaires. lien
Théoriquement donc, une bonne isolation des habitations, et des entreprises permettrait de fermer un grand nombre de réacteurs nucléaires très rapidement, et serait par la même occasion créatrice de milliers d’emplois.
Pour compenser le reste c’est le moment de se tourner vers la géothermie.
En effet, tout comme le Japon, la France est riche en eau chaude de grande profondeur.
La Nappe du Dogger s’étend sous la quasi-totalité de Paris et de sa banlieue, de quoi chauffer avec cette énergie renouvelable et propre le 1/5ème de la population française.
Mais on trouve aussi des nappes d’eau chaude dans d’autres régions de France : en Alsace, tout près de la région Lyonnaise (Dombes) dans la région de Toulouse, dans celle de Bordeaux, du coté de Valence, en plein Massif Central, et même en Corse.
Le potentiel de cette énergie renouvelable et pas chère, ne produisant pas de déchets, est de 30 Mtep, soit l’équivalent d’au moins 17 réacteurs nucléaires. lien
Si l’on se souvient qu’il n’y avait plus que 32 réacteurs nucléaires à remplacer, on s’aperçoit qu’entre une meilleure isolation des habitations, des entreprises, et l’utilisation de la géothermie de grande profondeur, on remplace l’équivalent de 37 réacteurs nucléaires.
Et pourtant, en France, seulement 200 000 logements sont raccordés aux réseaux chaleur utilisant l’énergie géothermique. lien
D’ailleurs d’autres installations géothermiques sont possibles, même lorsqu’il n’y a pas de nappe d’eau chaude : en Suisse, des sondes géothermiques s’enfoncent jusqu’à 400 mètres de profondeur afin d’aller chercher la chaleur du sous sol, et la remonter grâce à un fluide caloporteur véhiculé dans des tubes en matière synthétique résistants à la pression. lien
Mais oublions la géothermie, et voyons quelles autres formes de production énergétique propres et renouvelables nous pourrions utiliser.
A tout seigneur tout honneur, il y a bien sur le solaire, soit par capteurs thermiques, placé sur les toits des habitations permettant de produire de l’eau chaude sanitaire, soit par capteurs photovoltaïques, transformant la lumière en électricité.
La aussi, il serait plus sage de consommer sur place l’énergie produite, plutôt que de mettre en œuvre d’immenses étendues de capteurs, dont fatalement un bon tiers de l’énergie sera perdu lors du transport.
Ça n’empêche pas de gigantesques projets de se réaliser, comme celui décidé au Japon, en janvier dernier, consistant à installer des capteurs solaires le long des autoroutes, qui produiront 28 millions de Kilowatts d’ici 2020, alimentant ainsi plus de 5 millions de foyers. lien
On peut aussi s’inspirer de l’exemple belge : ils viennent d’installer 50 000 m2 de capteurs solaires sur le toit d’un tunnel ferroviaire, produisant 3 300 Mwh, permettant à 4000 trains de consommer sur place l’énergie produite, devenant ainsi les premiers trains solaires. lien
Et puis en matière solaire, la technique progresse et l’on vient de voir naitre une nouvelle génération de capteurs : les panneaux Graëtzel.
Du nom de leur inventeur, Michel Graëtzel, ils sont souples, et transparents, et peuvent même remplacer les vitrages des habitations.
Si leurs performances sont équivalentes à celles des panneaux photovoltaïques traditionnels, ils sont bien meilleur marché, et seront donc plus vite amortis.
Au lieu d’utiliser du silicium amorphe, ils fonctionnent à l’oxyde de titane, s'inspirant de la fonction chlorophyllienne des plantes pour produire de l’énergie. lien
Du soleil, passons au vent.
Là aussi la tendance est à la réalisation d’immenses parcs d’éoliennes géantes, ce qui génère fatalement une perte énergétique.
Pourtant le Danemark, l’un des premiers, en 1980, à choisir l’énergie du vent avait montré la voie en installant à Tvind une éolienne de grande taille, d’une puissance de 2000 kW, et fournissant toute l’énergie nécessaire aux 800 habitants du village. lien
Ce n’est pas une raison pour oublier qu’il existe de l’éolien adapté à l’habitation, et que les traditionnelles éoliennes ne sont pas une fatalité, comme par exemple ce modèle à axe vertical, moins encombrant, et plus économique ou cet autre modèle, du à Ben Storan, qui a obtenu le premier prix de la compétition « Sustainability Awards 2007 » 3 fois plus puissante que les éoliennes domestiques traditionnelles.
Restons au Danemark pour évoquer le méthane, produit par exemple à Lemvig, grâce au lisier provenant de 75 fermes et qui fournit l’énergie à 1000 foyers (21 millions de kwh/an), résolvant ainsi le problème de la gestion du lisier, de celui des algues vertes, et qui pourraient intéresser nombre de nos agriculteurs. lien
Ainsi que je l’ai démontré dans un article ancien, tout le méthane produit en France, une fois purifié et compressé, pourrait remplacer le pétrole nécessaire aux véhicules du pays, poids lourds y compris, puisque le potentiel énergétique du méthane atteint 54 Mtep/an ce qui est la consommation annuelle de pétrole en France en ce qui concerne le transport.
Quant au prix à la pompe, il avoisine les 60 cts le litre. lien
Outre toutes ces solutions énergétiques propres, simples à mettre en œuvre, il y a bien sur l’hydraulique classique, mais aussi les hydroliennes, nouvelle technologie prometteuse, avec un potentiel de 20 Mtep (lien), prolongement de la vieille usine marémotrice de la Rance, toujours en activité. lien
L’hydraulique permet 15% de la production française électrique, mais pourrait faire beaucoup mieux, en respectant l’environnement, et de plus on pourrait augmenter nettement la production de la très petite hydraulique qui aurait l’avantage d’être consommée sur place. lien
Dans les années 60, l’hydraulique représentait 56% de notre production électrique. lien
Comme on le voit, fermer définitivement la porte du nucléaire est réalisable très vite.
Le programme EPR va dépasser les 6 milliards d’euros, pour produire 12 Twh, ne donnant de l’emploi qu’à 600 personnes, avec les risques que l’on sait, alors que la même somme dépensée dans des projets alternatifs serait créatrice de 10 800 emplois. lien
Mais le gouvernement actuel s’entête dans le choix nucléaire, sans en mesurer le risque, car comme dit souvent mon vieil ami africain :
« On peut résister à tout, sauf à la tentation »
L’image illustrant l’article provient de « lesshadoks.blogspot »
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