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« En fait, l’UCK était donc très largement composée de trafiquants et tortionnaires en tous genres, et le gouvernement actuel est composé d’anciens membres de ladite UCK. Et tout cela bien sur, sans que personne n’y trouve à redire. Cherchez l’erreur. »
La conclusion est encore une fois sublime ! Après un laïus de je ne sais combien de pages, où l’auteur n’a été a aucun moment en mesure de démontrer son propos et où il s’est contenté d’insinuer au lieu d’exposer des faits avérés, il conclut gentiment que « l’UCK était donc très largement composée de trafiquants et tortionnaires en tous genres ». Quelque lignes plus tôt il précise que la justice internationale a acquitté la plupart des chefs de l’UCK qu’elle avait inculpée (et qui se sont TOUS présentés de leur propre chef aux convocations du tribunal, soit dit au passage) et que aucun n’a été condamné pour crime contre l’humanité. Juste derrière, il conclut tout le contraire.
Il faut donc comprendre que l’auteur a menée des enquêtes bien plus poussées et sérieuses que celles du TPIY, qu’il a accumulé des preuves qu’il n’a malheureusement pas eu le temps ni la possibilité de nous présenter de manière cohérente, et se permet donc de tirer ses propres conclusions qui sont en totale contradiction avec celles de la justice internationale.
Cet article n’est ni plus ni moins qu’un incroyable condensé de mauvaise foi, d’à peu près, de sensationnel à deux sous. Il n’y a aucune analyse ni aucune recherche des faits. Juste la volonté de parler et de faire parler en véhiculant des thèses qui sous couvert d’être novatrices et spectaculaires, ne sont ni plus ni moins que celles propagés par la propagande du régime de Belgrade et des partis radicaux serbes depuis pas moins de 30 ans. C’est du X-Files à la sauce Slobo. Vide et sans saveur.
« Il y a aussi le réseau de « collecte » de fonds auprès des expatriés albanais et kosovars, dans les années 90. Ca se faisait, de 1992 à 1998, via des comptes bancaires appelés ’ Vendlindja thërret ‘, ou VT (« la patrie t’appelle »), sur lesquels les expatriés pouvaient directement verser une partie de leur salaire pour financer l’UCK. En fait de collecte, certains parlent d’un « impôt » mis en place dès 1992, qui s’élevait à au moins 3% des salaires. Cet argent servait donc essentiellement à se procurer des armes. Du coup, plusieurs affaires de trafic d’armes éclatent juste avant le conflit au Kosovo. En 1998, la police fédérale suisse évoquait « Un gros trafic d’armes et de munitions d’une valeur de près d’un million de francs mis au jour en rapport avec le conflit du Kosovo. Une grande partie du matériel a été interceptée fin octobre 1998 à la douane de Durrës (Albanie). Par ailleurs, d’importantes sommes d’argent ont été séquestrées en Suisse ».
Il y a peu, il y avait le Téléthon. Je vous avouerai que je n’ai pas suivi, mais j’ai appris que des gens, dont la majorité n’avaient STRICTEMENT aucun problème de santé, ont décidés de donner plus de 95 000 000 d’euros. Par les temps de crise qui courent, excusez du peu.
Que s’est il passé entre 1989 et 1998 ? Le régime d’apartheid mis en place par le régime de Milosevic a conduit tout les jeunes albanais du Kosovo en âge de travailler à essayer de quitter le pays. Plus de 200 000 se sont retrouvés en Suisse, plus de 300 000 en Allemagne, plus de 80 000 en Belgique et plus de 500 000 aux USA. Bien entendu, ils n’ont fait que rejoindre une diaspora qui existait déjà dans ces pays là et dont ils ont grossis les rangs. Sauf que cette génération d’immigrants est arrivée en masse et très remontée contre le régime de Belgrade. Personnellement, si demain je devais quitter la France parce que je suis gaucher et que le gouvernement ne supporte plus les gens qui écrivent de la main gauche au point de m’interdire d’aller à l’école, de travailler dans la fonction publique, d’aller à la piscine, de faire du sport etc… je pense que je serai plus que remonté contre ce gouvernement. Toujours est il que cette diaspora a été sollicitée par ceux qui n’ont pu partir. Dans un premier temps (entre 1990 et 1998) il s’agissait de financer les institutions parallèles mises en place du temps de la résistance pacifique et de la désobéissance civique de Rugova. Ensuite, elle a été sollicitée pour financer l’achat des armes de ceux qui risquaient leurs vies contre l’armée de Milosevic.
Bref, autant dire que ces gens avaient mille fois plus de raisons de donner que ceux qui n’ont aucun problème de santé et ont pourtant donnés plus de 95 000 000€ lors du dernier Téléthon. Et devinez quoi ? Ils ont donnés. Cet argent a en effet servi a financer l’achat d’armes pour l’UCK. Et alors ? Et c’est CET argent qui a été gelé par Carla del Ponte (on en parlait un peu plus tôt).
Voici une autre lacune essentielle de l’article. L’auteur prétend que les origines de la guerre sont floues pour vite se jeter sur ce qu’il trouve de plus croustillant et vendeur : l’à peu près ! Or, je pense avoir démontré que si l’auteur avait pris le temps de comprendre les origines de la guerre, le reste lui aurait été un peu plus clair.
« Et puis, l’UCK s’est allègrement livrée à des crimes de guerre et certains de ses chefs ont été inculpés par le TPIY (pour « meurtre, torture, viol et traitement cruel ») avant d’êtreinnocentés le plus souvent. »
Encore une phrase magnifique dont l’auteur a le secret. « Certains de ses chefs ont été inculpés […] avant d’être innocentés le plus souvent ». Pour nous prouver que l’UCK s’est « allègrement livrée à des crimes de guerre » l’auteur nous parle de ses chefs innocentés par la justice internationale. Il y a une logique qui m’échappe quelque part mais qui est bien propre à l’auteur et à son esprit flouté. Non parce que dans le monde où je vis, un homme accusé est un homme innocent tant que sa culpabilité n’a pas été prouvé lors d’un procès équitable. Et visiblement, la justice internationale a estimée que ces hommes n’étaient pas coupables.
« Comme en demandant à des militaires US basés là-bas de faire disparaître des preuves -ainsi qu’Haradinaj lui-même durant la guerre- au nez et à la barbe des enquêteurs du TPIY. »
Je ne sais pas si ça mérite réellement un commentaire. Mais déçus que les accusés n’aient pas été condamnés, l’auteur nous explique tranquillement que c’est parce qu’ils ont demandés aux soldats US (encore ces enfoirés de Yankees) de faire disparaître les preuves. Bien entendu les soldats US se sont exécutés. Bien entendu, il n’est pas utile de demander à l’auteur les sources de ces renseignements qui pourraient faire tomber des têtes au Pentagone.
« Hashim Thaci, quant à lui, a été arrêté en juin 2003 à Budapest (en effet, le bougre était sous mandat d’arrêt et recherché par Interpol pour le procès au TPIY). Mais, il a été relâché à la demande de la MINUK selon TF1, ou du ministère français des Affaires étrangères selon d’autres. »
En effet, il y avait un mandat d’arrêt international contre Thaci en 2003. Parcontre, ce n’était pas un mandat émis par le TPIY mais par Belgrade. Et quand les autorités Bulgares se sont rendues compte du mandat qu’ils étaient en train d’exécuter, ils ont tout naturellement libérés Thaci. Le mandat demandait à ce qu’il soit livré à Belgrade et non à la Haye.
« D’autres ont été plus ou moins inquiétés, comme un des seconds d’Haradinaj, Idriz Balaj, qui commandait une unité sobrement nommée « les Aigles Noirs », et a risqué 15 ans en 2005 pour le meurtre (etc.) d’une soixantaine de civils Serbes et Roms du Kosovo avant d’être acquitté. Lahi Brahimaj, membre de l’UCK qui dirigeait le camp de Jablanica, a pris 6 ans pour mauvais traitements et torture de prisonniers en avril 2008, un autre de l’UCK, Haradin Bala, a pris 13 ans et a fait appel…. Haradinaj, pourtant créateur des « Aigles Noirs », a été acquitté aussi « faute de preuves » (cependant le procureur du TPIY a fait appel) après un procès auquel une vingtaine de témoins n’ont pas osé se présenter, et où 9 autres témoins de l’accusation (dont trois protégés et deux policiers) sont morts de manière suspecte. Quoi qu’il en soit, aucun crime contre l’humanité n’a été retenu contre eux, et beaucoup ont été acquittés. »
Finalement, malgré tout ce que dit l’auteur, la justice internationale a fait son travail. Elle a enquêtée, elle a rassemblée des preuves, elle a inculpée des suspects, des procès ont eu lieux. Ceux contre qui les preuves étaient suffisantes ont été condamnés pour les charges retenues contre eux. Les autres, ceux pour qui il n’y avait pas assez de preuves ont été acquittés. C’est le propre du fonctionnement d’une justice indépendante dans un pays démocratique. Mais je sens bien que cela ne convient pas à l’auteur. Visiblement, il préférerait qu’on condamne un peu plus de gens, pour les chefs d’accusations qui lui conviennent à lui, parce qu’il a entendu dire que ces gens là, finalement, ne peuvent être que coupables. Je n’ai aucune envie de vivre dans le pays imaginaire de l’auteur car il m’a l’air bien effrayant. Avec lui, les accusés d’Outreau auraient été raccourcis avec leurs avocats, bien avant d’avoir pu dire un seul mot
« En 1992 est annoncée la création de l’UCK, dont le président du Kosovo Ibrahim Rugova disait douter de l’existence jusqu’en 97. « L’Uceka a bénéficié d’un appui venant de structures diverses, et avant tout des mafias responsables du trafic de drogues en Turquie et en Albanie », expliquait encore ledit Ivasov, précisant au passage que l’UCK se finançait en partie par le trafic de drogue, « 45 % de ces ressources ayant été utilisées pour la fourniture d’armements et de divers équipements ». Et les réseaux d’expatriés albanais et kosovars en Europe se chargeaient d’écouler la marchandise pour financer l’UCK. »
Je ne sais pas qui est ledit Ivasov mais si l’auteur me dit que je dois lui faire confiance alors il n’y a pas de problème. Je prendrai pour argent comptant tout ce qu’il aura eu envie de dire. Et si il ne m’explique pas de quelles études il sort ses chiffres peu importe.
« Un rapport du BND, les services allemands, écrit avant la guerre du Kosovo, mentionne que « à partir de ses points d’appuis en Albanie, Macédoine, et surtout dans la province serbe du Kosovo, la mafia albanaise dirige le trafic d’héroïne qu’elle utilise aussi comme monnaie d’échange contre des armes (...) C’est ainsi que le trafic d’héroïne en Europe Occidentale est devenue une de leurs sources de revenus. »
Voilà que maintenant le BDN, vous vous souvenez, celui qui en 90 avait décidé de créer un Kosovo indépendant et qui après avait mis en place l’UCK, se tire une balle dans le pied en enquêtant sur ses propres activités et en plus en publiant des rapports. Il y a encore une incohérence là non ? Ah c’est pas grave ? Après tout, un de plus ou un de moins, il en restera bien quelque chose.
« De son côté, en 2000, le département fédéral suisse de la justice et de la police écrivait que « l’héroïne achetée et consommée en Suisse arrive de Turquie, principalement par voie de terre, en empruntant les différentes routes des Balkans. Le trafic d’héroïne est en grande partie contrôlé par des Albanais originaires du Kosovo et de l’Albanie. En dépit du conflit du Kosovo, le marché n’a pas connu de problème d’approvisionnement. »
Sachant qu’avant 1998 il y avait 70000 policiers et soldats serbes au Kosovo, que pendant le conflit il y avait presque le double, que le Kosovo est aussi grand que deux départements français, comment était il possible aux albanais du Kosovo de à la fois faire la guerre, se cacher et approvisionner l’Europe en héroïne ? De deux choses l’une, soit l’importance du prétendu trafic n’était finalement pas si grande, soit albanais et militaires serbes collaboraient gaiement pour faire planer les jeunesses d’Europe.
« Environ 400 kilos d’héroïne avaient été saisis en 1999, autant qu’en 1998. Cette année-là, Carla del Ponte décide de geler l’argent des kosovars déposé en Suisse, dont ceux de l’UCK. »
Je garde la phrase en entier car je trouve qu’en elle-même elle résume tout le « travail » de l’auteur. Après nous avoir expliqué par des sources on ne peut plus dignes de confiance et fiables que les albanais du Kosovo tenaient et dirigeaient le trafic d’héroïne en Europe, l’auteur nous explique qu’il y a eu 800kg saisis entre 98 et 99. Où ? On ne sait pas trop. Par qui ? On ne sait pas non plus. En tout cas, 800kg ont été saisis et c’est 800kg étaient censés nourrir tout le marché européen des toxicos. Ils devaient être méchament en manque les toxicos pendant cette période. Vous vous rendez compte… 800kg saisis quelque part par quelqu’un !
Plus sérieusement, aucune saisie de drogue au Kosovo ou en Albanie (entrée ou sortie) n’a jamais atteint la demi tonne. Pour les plus curieux, allez taper « saisie drogue record » sur google. Vous verrez qu’on ne vous présentera pas une affaire à moins de 2 tonnes. Pourtant, notre auteur est fier de 800kg saisis quelque part par quelqu’un sur une période de 2 ans pour nous expliquer que les albanais du Kosovo contrôlent le trafic de drogue en europe.
Mais l’auteur ne s’arrête pas à cette vilaine tentative pour étayer ses théories. Juste derrière il ajoute que « cette année là, Carla del Ponte décide de geler l’argent des kosovars déposé en Suise, dont ceux de l’UCK ». Sans le dire, il sous entend, mais tout le monde comprend, que c’est parce que quelqu’un a saisi quelque part entre 98 et 99 800kg de héroïne que Carla del Ponte décide de geler l’argent de l’UCK. Pourquoi l’auteur ne le dit pas aussi clairement que moi ? Car il sait que c’est faux. Mais il sait aussi que beaucoup de ceux qui liront son article ne savent pas que c’est faux. Alors il cherche à faire croire. Faire croire qu’il sait des trucs spéciaux qu’on nous cache et qu’on nous dit pas et que lui il va tout nous dire de la vérité vraie. Procédé encore une fois éculé et minable de petit propagandiste pigiste à la NKVD.
Quand je vous disais que cette phrase résumait à elle seule tout l’article et tout le savoir faire journalistique, scientifique et méticuleux de l’auteur !
« L’UCK s’est procuré des armes par différents moyens via différentes mafias, quand ce n’était pas l’OTAN qui s’en chargeait, ou les Etats Unis. Ou des intermédiaires, comme un certain Jean Paul Chirouze, arrêté en 2001, soupçonné d’avoir été payé par des Kosovars exilés en Suisse pour faire acheter des armes antichar en Bulgarie par un ivoirien, qui les a ensuite revendues au Kosovo. Ledit Chirouze a versé 300 00 euros pour être libéré sous caution après 6 mois de prison. Selon Stephane Ravion, journaliste de l’agence CAPA, Chirouze avait déjà trempé dans un trafic d’armes, à destination du Turkménistan et du Caucase, à la demande d’un certain Michel Fradin, ancien du SDECE impliqué dans différentes escroqueries notamment en Suisse où il a été recherché. Heureusement pour lui, Fradin est dans les petits papiers de l’Etat puisque son nom est dans les fichiers ‘secret défense’, ce qui empêche toute investigation à son sujet. Ce n’était manifestement pas le cas pour son collègue Chirouze. »
L’UCK s’est procurée des armes ??? Mais quel scoop ! C’est vrai qu’ils auraient du essayer de se battre contre une des armées les mieux équipées et les plus aguerries d’europe avec des fusils de chasse et des lance pierres. Il y aurait eu plus de challenge. Au lieu de ça, ces enfoirés ont voulu acheter des vraies armes pour se battre. Et en plus, comme ils n’étaient ni une armée ni un état, ils ne pouvaient pas acheter leurs armes au salon du Bourget mais devaient passer pars des voies bizarres et compliqués avec toutes sortes d’escrocs et d’intermédiaires véreux. Vraiment incroyables ces gens là !
« En fait, le trafic de drogue a au moins en partie servi à financer les achats d’armes, ainsi que le proxénétisme dans les bordels locaux et sur les trottoirs de l’ouest. »
Entre nous, on ne comprend pas trop comment l’auteur fait le lien entre l’UCK, le trafic d’armes et la prostitution. Mais il le fait et c’est ce qui compte. Il en restera bien quelque chose à un moment, vous ne croyez pas ? Je ne sais pas vous, mais j’aime beaucoup le « proxénétisme dans les bordels locaux » qui sert à financer « les achats d’armes ». Pour faire simple, plantons de nouveau le décor. Kosovo, deux départements français, guerre, 120000 soldats serbes, 1 million de réfugiés sur une population de 2 millions, des bordels tenus par l’UCK, de l’argent pris par l’UCK pour faire entrer des armes au Kosovo puis faire la guerre aux soldats serbes. C’est mignon non ?
« LA PROPAGANDE
En fait, même le départ de cette guerre reste plus que flou. »
En effet, tout ceci m’a l’air bien flou… surtout dans l’esprit de l’auteur. Le départ de la guerre reste flou ! C’est fantastique non ? Presque un sujet de philo au bac. L’auteur est censé faire du journalisme, mais il nous explique que « le départ de la guerre reste plus que flou ». Autant dire qu’il n’a pas envie d’en parler, qu’il n’a pas envie de chercher, que ça le fatigue, et qu’il voudrait vite passer à autre chose. A quelque chose de plus croustillant, un peu plus dans le genre de sa bande annonce du départ.
Malheureusement, le départ de la guerre n’est absolument pas flou. Il découle d’un passé historique chargé, de conflits larvés qui ont éclatés au grand jour dès la mort de Tito (en 1980), d’une escalade ininterrompue depuis lors. La guerre du Kosovo ne peut en aucun cas être dissociée des autres guerres de l’ex-Yougoslavie pendant les années 1990. Le conflit au Kosovo est à l’origine de ces guerres mais il en est également la conséquence finale et inéluctable. Le conflit au Kosovo s’explique par une politique d’apartheid menée par le régime de Belgrade depuis 1989. Une politique qui elle-même est dans la droite lignée des préceptes adoptés dans la Serbie de 1937.
http://albania.dyndns.org/Special%20Kosovo/Documents/arnaoutes.htm
Le lien ci-dessus est le seul où j’ai retrouvé le texte dans son intégralité et en français. Il s’agit ni plus ni moins que du mémorandum présenté par l’académicien Vasa Cubrilovic au roi Serbe et sobrement intitulé : « L’expulsion des Albanais ». L’académicien expliquait que la Serbie devait coloniser le Kosovo, qu’elle devait chasser la population albanaise vers la turquie pour y installer des colons, et qu’après tout redeviendrait rose en Serbie. Ce plan a commencé à être mis en place avant d’être arrêté pour cause de roi en fuite à cause de l’arrivé des allemands. Toujours est il que Cubrilovic a occupé des hautes fonctions même dans la Yougoslavie de Tito, et que Milosevic lui a offert des funérailles nationales et grandioses. Comme quoi, le début de la guerre n’est pas si flou que l’auteur veut bien nous le faire croire. Mais certes, l’histoire c’est moins sexy que des femmes en string qui se piquent dans des parcs suisses avec un AK47 dissimulé entre leurs cuisses.
A noter, juste pour l’anecdote, que l’académicien qui a inspiré une grande partie des dirigeants politiques serbes des années 1980, a également participé à l’organisation de l’attentat qui a conduit à la boucherie de 1914.
« La guerre du Kosovo a commencé en 1999, après les « négociations » de Rambouillet auxquelles les représentants kosovars, dont Hashim Thaci, ont exigé l’indépendance. »
C’est tout simplement faux mais ce n’est pas grave. A Rambouillet, la délégation albanaise après pressions des occidentaux, a acceptée un plan qui leur accordait bien moins que ce qui leur avait été pris par la force et les armes en 1989 et que la constitution de la RSFY leur garantissait. Là aussi, il y aurait beaucoup à dire et de longues pages à noircir sur le statut du Kosovo dans le cadre de la constitution de 1974. Je me contenterai de rappeler que cette constitution a été violé par la Serbie qui, en 1989, a utilisé l’armée pour supprimer de manière illégale le statut du Kosovo. Cette violation de la constitution a servie de base légale aux autres républiques (Slovénie, Croatie, Macédoine) pour se dégager de leurs obligations à l’égard de la Fédération et proclamer leur indépendance. Cette violation de la constitution et la mise en place du régime d’apartheid qui s’en est suivi n’ont jamais été acceptés par la population qui s’y est opposé pendant 10 ans de manière pacifique (les années Rugova) puis par les armes (se révolter contre la tyrannie est un droit de chaque homme… cf DUDH). Quand je vous disais que l’origine de la guerre n’avait rien de flou.
« Sont ensuite venues les batailles de chiffres sur ledit « génocide », au final on a trouvé autour de 3.000 personnes dans des fosses communes au Kosovo, essentiellement des prisonniers. »
Je ne m’attarderai pas sur le fait que « l’essentiel [des victimes sont] des prisonniers », ce qui dans l’esprit de l’auteur doit vouloir dire que exécuter des personnes désarmés et ne présentant aucun danger n’est après tout pas bien grave. En revanche, les chiffres de l’auteur sont tout simplement faux.
http://www.hlc-rdc.org/stranice/Linkovi-modula/Kosovo-Memory-Book.en.html
Sur le lien suivant, les derniers chiffres publiés par le Humanitarian Law Center, et la liste aussi complète que possible de TOUTES les victimes (nom, prénom, date de naissance, lieu du meurtre, civil/militaire/policier). Il y en a « légèrement » plus que les 3000 mais l’auteur nous a déjà montré qu’il n’est pas à une approximation près.
« ORIGINE DE L’UCK
L’indépendance du Kosovo était un des buts de cette guerre, arrêté au moins depuis le début des années 90 par certains Etats européens, ainsi que par l’Albanie et les séparatistes kosovars. Dès 1995, l’Allemagne et l’Albanie signaient un accord appelant à « l’autodétermination des peuples », et l’Allemagne installait le BND (Service de renseignement allemand) à Tirana pour faciliter la mise en place d’une milice kosovare.
Avant l’UCK, dès les années 80, il y a eu par exemple le Mouvement Populaire pour la République du Kosovo qui « disposait d’un réseau très large dans des pays tels que l’Allemagne, la Suisse et d’autres pays européens, de même qu’aux Etats-Unis » (selon le général russe Ivasov, interrogé lors du procès de Milosevic), ou le Mouvement National pour la Libération du Kosovo, qui a commis quelques attentats contre des Serbes, à Bruxelles puis au Kosovo jusque dans des camps de réfugiés, le 11 février 1996. »
Après nous avoir expliqué que l’origine de la guerre était plus que flou, l’auteur semble avoir un soudain éclair de génie. A présent, il sait que l’un des buts de la guerre du Kosovo était l’indépendance du pays et que ce but avait été arrêté par certains Etats européens dès 1990.
Comment il le sait ? Eh, ho, faut pas trop lui en demander non plus. Il le sait et puis c’est tout. C’est l’Allemagne qui est à l’origine des guerres en ex yougoslavie parce que d’abord les allemands c’est que des méchants à la solde des USA qui veulent faire du mal à tous les gentils de la terre. Ses sources ? Pourquoi s’encombrer de tels détails. Il est journaliste après tout, pas vendeur d’eau.
Problème. La théorie de l’Allemagne qui par le biais de ses services et avec l’aide de la CIA (parfois sur instruction de la CIA… les plus belles histoires ont plusieurs variantes comme tout le monde le sait) qui manigance, coordonne et lance les diverses guerres en ex Yougoslavie n’est pas nouvelle. C’est tout simplement la théorie du régime de Slobodan Milosevic largement relayée par la RTS et tout ceux, d’où qu’ils soient, qui ont envie de la relayer. Mentez, mentez, il en restera toujours quelque chose.
Cette théorie éculée est tellement vide qu’elle ne vaut pas la peine qu’on s’y penche. Pourtant, je ne peux m’empêcher de relever quelques incohérences flagrantes qui ne sauteront pas forcément aux yeux des moins avertis. Ainsi, l’auteur nous explique que certains Etats européens avaient décidés dès 1990 que le Kosovo devait être indépendant. Question : pourquoi, alors que TOUTE l’ex Yougoslavie est à feu et à sang entre 1991 et 1995, il n’y a pas de guerre au Kosovo ? Me dites pas que ce n’était pas dans l’intérêt de ces Etats européens d’ouvrir un front supplémentaire dans le dos de la Serbie pour l’affaiblir ?
Pourquoi ces Etats européens décident en 1990 de faire du Kosovo un Etat indépendant après que Milosevic ait déjà engagé les hostilités en 1989 (en supprimant par la force le statut du Kosovo) ? Comment est il possible que la classe politique européenne des années 90 (Mitterrand, Major, Kohl) ait pris des décisions aussi contraires aux intérêts de la Serbie, alors que pendant toute la guerre de Bosnie cette classe politique a été on ne peut plus pro-serbe ? Il a fallu attendre l’arrivée d’une nouvelle génération (Chirac, Blair, Schröder) pour que la politique européenne à l’égard du régime de Milosevic change enfin.
Hélas, la réalité est beaucoup moins sexy qu’un épisode de l’inépuisable James Bond. Encore une fois, les origines des guerres en ex Yougoslavie ont bien peu à voir avec les forces occultes et cachés de Octopus. Elles s’expliquent par l’histoire de ce pays, les rapports entres les différentes nations qui la composaient, et la folie de quelques hommes politiques qui ont cru pouvoir régler tous leurs problèmes par les canons.
Voilà un « article » qui commence fort, avec une belle accroche digne des plus beaux polars. C’est presque un blockbuster hollywoodien qu’on nous présente, avec d’entrée, grosse voix off dopé à la testostérone en arrière fond pour être tout de suite dans l’ambiance.
Un Etat qu’on peut légitimement qualifier de "voyou" (ça, c’est la trame de fond du film qu’on va nous vendre)
dont les représentants (ça, c’est les stars du film… leurs noms viendront plus tard : Thaci, Haradinaj, Ceku…)
avalisés par l’Europe et l’OTAN (tiens, ça rime en plus, la classe totale pour une bande annonce)
font du fric grâce à différents trafics, comme la drogue, les femmes ou les armes.
Si avec un décor planté comme ça vous n’avez toujours pas envie de voir le film, c’est à ne rien y comprendre.
Parce que les Kosovars tiennent le haut du pavé, dans ce domaine comme dans beaucoup d’autres. (ça, c’est la phrase qu’on comprend moins. Non seulement elle est on ne peut plus approximative, mais elle ne veut rien dire… au regard de ce qui précède. Mais c’est ce qui fait tout le charme d’une bande annonce de blockbuster US)
Et pourtant, une fois la place de cinéma payée, tout comme pour la grande majorité des films à gros budget, en cinéphile averti on ne peut qu’être déçu par un contenu creux, un scénario improbable, un jeu d’acteurs pathétique et des dialogues tout simplement à chier.
L’auteur qui a entrepris la lourde tâche de vouloir analyser une situation géopolitique et historique extrêmement complexe pour nous livrer un regard nouveau (si, si la bande annonce dit que c’est inédit) et sans concessions, se vautre mollement dans l’à peu près et surtout dans le rabâchage de thèses soutenues depuis belle lurette par des milieux bien identifiés.
Décortiquons donc pas à pas ce navet. Au départ, je souhaitais le faire de manière cohérente, c’est-à-dire en restructurant totalement le propos de l’auteur. Finalement, la tâche est bien trop pénible. Et si l’auteur n’a pas jugé utile de structurer son propre laïus, je ne vois pas l’utilité de le faire à sa place (vous savez, l’histoire avec la confiture et les cochons).
Je vais donc me contenter de citer l’auteur et de commenter au grès de mon humeur. Tout comme il semble l’avoir fait pour traiter d’un sujet aussi sérieux.
« C’est étrange comme on entend souvent parler des kosovars dans les trafics en tout genre, alors qu’il ne reste que 2 millions et quelque d’habitants (dont seulement 120 00 serbes) dans ce minuscule pays. Et en général, ceux qui se livrent à ces activités sont de véritables brutes. Alors, que se passe t’il au Kosovo ? »
Je dois avouer que ça, c’est quelque chose. Quoi ? Je ne sais pas. C’est étrange comme on entend souvent parler du lichtenstein lorsqu’on évoque les paradis fiscaux. Et pourtant, il ne reste que 36000 habitants dans ce miniscule pays, dont 10 000 banquiers et 26000 conseillers en gestion patrimoniale. Et en général, ceux qui se livrent à ces activités sont des véritables cracs de la finance internationale.
Ah, ça y est, je viens de trouver comment ça s’appelle. Un cliché ! Les clichés c’est très apprécié en photographie. Un peu moins en journalisme.
« D’ailleurs, les violences contre les serbes du Kosovo continuent allègrement, à tel point qu’en 2004 le commandant de l’OTAN pour le Sud-Est de l’Europe, l’amiral Gregory Johnson, parlait de « nettoyage ethnique », quand un ancien général de l’OTAN disait qu’on s’était trompés de côté pour les bombardements. »
Oui, en effet, il y a eu des grosses violences en Mars 2004 contre la population serbe. Résultat des courses : 19 morts dont 11 albanais. Carramba ! Ca c’est du nettoyage ethnique.
Mais surtout, on est en 2008. Est il si difficile pour l’auteur d’aller nous chercher les statistiques des violences au Kosovo entre 2004 et 2008 (un petit tour par le site de l’UNMIK aurait suffi). Ah mais bien sur, les chiffres ne collent pas avec le message qu’on veut faire passer. Soit. Ne parlons pas des chiffres.
« Récemment, Carla del Ponte, procureure du tribunal pénal international de La Haye (TPIY), a publié un livre dans lequel elle parle d’un trafic d’organes prélevés sur des prisonniers serbes, mis en place par les albanais du Kosovo pendant la guerre. Les autorités suisses ont finalement imposé à l’ancienne magistrate de ne plus parler de son bouquin, puisque les kosovars sont des victimes et pas des bourreaux. Omerta, donc. »
En effet, Carla del Ponte a parlé de cela. Du temps où elle était procureur du TPIY elle a reçue des informations sur ce genre de pratiques. Elle a enquêté. Elle n’a rien trouvé. Mais elle s’est dit que ça faisait bien d’en parler dans son livre. On s’est remis à enquêter. On n’a toujours rien trouvé. Mais elle a parlé. Magnifique ! Sinon, Paco Rabbane avait parlé de la station Mir en 1999. Il en avait parlé.
Mais comme le sujet est bien trop sérieux, et que me mettre au niveau de l’auteur me devient de plus en plus difficile, faisons un peu le travail dont il s’est abstenu. Suite au livre de Carla del Ponte, la porte parole du TPIY qui a travaillé de longues années à ses côtés s’est également exprimée par le biais d’une tribune dans Le Temps. Voici quelques extraits pour ceux qui n’auront pas envie de cliquer sur le lien :
« Carla Del Ponte n’avait pas la moindre preuve pour étayer un éventuel trafic d’organes prélevés sur des prisonniers aux mains des rebelles kosovars, affirme son ex-porte-parole. En parler dans son livre est "irresponsable" et "indigne", dénonce-t-elle. […]
"S’il est du devoir d’un procureur de n’écarter aucune piste, est-il judicieux de révéler celles qui furent abandonnées du fait de l’absence de toute forme de preuve ?", s’interroge l’ancienne porte-parole. »
Voici quelques liens parmi d’autres. Une simple recherche sur google permettra aux plus curieux de se faire un avis :
http://www.lexpress.fr/actualite/monde/trafic-d-organes-la-controverse-carla-del-ponte_472137.html
Alors à mon tour de me poser quelques questions sur les intentions de l’auteur. Etait il si difficile d’évoquer la réaction de Florence Hartman (qui soit dit en passant n’est vraiment pas passée inaperçue) ? Où peut être que les propos de celle-ci ne sont pas autant dignes de foi que ceux de Madame Del Ponte ? Ou peut être que tout simplement, sous couvert d’enquête journalistique fantastique et à rebondissement, l’auteur ne cherche finalement qu’à présenter des demi-faits pour mieux nous les vendre comme LA vérité qu’on nous cache ? Procédé ni nouveau, ni surprenant, mais avant tout procédé d’un propagandiste bas de gamme. Ca tombe bien, juste après l’auteur a décidé de parler de la propagande.
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