@Bernard Dugué Inutile de discuter alors, il ne s’agit pas de pensée spéculative mais d’une réalisation effective. Comme dans Shankaracharya, et dans tous les sages encore vivants de l’Inde, pour ne citer que cette tradition, et qui ne sont aucunement des résidus, mais plutôt des diamants.
@ADEL Merci, il y a aussi les références, le point de vue selon lequel on se place, les problèmes de vocabulaire, j’ai l’impression que l’Etre selon les philosophes modernes n’est pas la même chose que chez les théologiens, et c’est encore autre chose dans des textes orientaux où la notion d’être ne se trouve pas ou d’une autre manière. La pensée est tributaire du langage dans lequel elle s’exprime. Pour l’occidental l’Etre est une certitude, il apparait aussi dans le Dieu révélé, il est affirmé, l’Etre est le fondement de la personne et de la réalité des choses. Enlevons l’Etre, ou enlevons son affirmation certaine, la personne (au sens d’individu) disparait comme certitude, le monde devient une illusion.
Par rapport à ce que dit Bibou1334 : il y a une tendance notamment chez les Allemands, en matière de philosophie, à l’inflation de langage, cette langue étant apte à créer des notions et des relations ressemblant plus à un simple exercice mental, sans réalisation effective, qui peut certes avoir un sorte de beauté chorégraphique ou poétique comme chez Jankélévitch.
Concernant la métaphysique, l’avis de Guénon c’est que la théologie occidentale est resté a niveau de l’Etre (principalement car il y a aussi des théologies négatives qui font référence au Non—Etre ), donc qu’elle n’a pas vraiment abordé le domaine métaphysique en son entier, et la philosophie humaine n’a pu faire mieux si l’on peut dire. La perspective de Guénon ( et de la métaphysique orientale) toutefois est à l’opposé de la croyance à un progrès de la pensée dans le domaine intellectuel pur. Il n’y a que des adaptations par rapport au temps et aux sociétés, la vérité est immuable, c’est le « Sanathana dharma » de l’hindouisme ou la religion pérenne de l’islam ’Al dîn al qayyum« , l’idée d’une religion première et dépassant les formulations particulières a aussi été évoquée par St Augustin, ces formulations particulières sont toutefois nécessaires chacune dans sa sphère de compétence propre.. La réalisation métaphysique n’est pas uniquement une affaire de spéculation de l’intellect individuel, de la raison humaine, il ne s’agit pas non plus de dépasser l’homme historique tout en restant dans schéma temporel, mais de retourner à la racine intemporelle. »La réalisation« , car il s’agit de réaliser, pas uniquement de spéculer, même si la spéculation peut être soit un mode d’exposition de la métaphysique, soit une voie d’approche qui reste une »philosophie« , un amour, un désir de la sagesse, si elle n’est pas accompagnée d »une méthode adéquate de transformation. La métaphysique est, étymologiquement et intellectuellement, au delà du monde physique, or le temps est une des conditions du monde physique, ce n’est pas à l’intérieur de cette dimension qu’il y a de la métaphysique, Après on peut très bien dire que c’est inconnaissable par définition, ne pas s’en occuper ou nier toute révélation attestant d’un au-delà. Mais d’un « point de vue » universel, qui est d’ailleurs l’absence de tout point de vue particulier, il n’y a pas de « transhumanisme » qui serait une sorte de dépassement de l’humanisme, de la réduction de l’homme à lui-même après qu’il ait nié/renié son origine divine, le dépassement vient d’abord du retour de l’homme à son origine divine. Je n’arrive pas trop à comprendre comment on peut oublier l’être en « s’égarant dans la métaphysique », alors que d’une part l’’Occident a très peu abordé la métaphysique et sa réalisation et que d’’autre part la métaphysique, le Non Etre, est la racine de l’Etre (toujours selon les doctrines orientales par exemple chinoises, mais toutes ont la même approche de l’Etre). Je crois plutôt que la tendance occidentale est de « tirer » et d’interpréter l’Etre du coté des phénomènes, et que ces phénomènes « tirent » et « interprètent » en direction d’un éclatement de la conscience, non en direction d’une saisie unitive. Je ne vois pas dans cet éclatement de solution positive pour l’homme.
Ibn Khaldoun est souvent qualifié de père de la sociologie. Il faut retenir le caractère encyclopédique de son oeuvre, quatre siècles avant les philosophes européens. Merci à Garibaldi2 pour les liens vers le texte complet, tout à fait accessible et intéressant.
« Le Livre des exemples (ou Livre des considérations sur l’histoire des Arabes, des Persans et des Berbères), daté de 1375-1379, en est le joyau. Somme de connaissances sans nul autre pareil sur son époque et sur « tout ce qui concerne la civilisation », regroupé en sept tomes, il s’agit d’une œuvre considérable à laquelle personne n’a songé avant lui et qui transcende largement son époque. Le fruit d’une démarche quasi encyclopédique, quatre siècles avant celui des Lumières en Occident. Portant à l’origine sur l’histoire des Berbères, Ibn Khaldoun élargit finalement son champ d’étude pour embrasser une histoire plus universelle. Le tome I, le plus connu de tous, est la Muqaddima (Prolégomènes en français), qui se lit comme une préface théorique au Livre des exemples et que certains considèrent comme le premier essai de réflexion philosophique sur l’Histoire. Les tomes II à V retracent, eux, l’histoire de l’humanité jusqu’à l’époque de l’auteur. Enfin, les tomes VI et VII traitent de l’histoire des peuples berbères et du Maghreb. Au final, le texte livre une pensée très moderne et une réflexion profondément universelle. En effet, nombre des questions qu’Ibn Khaldoun s’est posées à l’époque, en particulier sur la religion sont toujours d’actualité. La lecture du Livre des exemples permet ainsi de mieux comprendre la civilisation islamique en tant que composante de l’histoire universelle, travaillée elle aussi par des processus globaux ».