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Fabrice Gabarrot

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  • Fabrice Gabarrot 26 avril 2007 08:41

    Bonjour,

    Permettez moi de reprendre quelques points ici dans le désordre.

    D’une part, je voudrais signaler que l’article de Michaël ne portait pas a priori sur le « généticisme » des généticiens, qui font probablement preuve de plus de prudence (je l’espère) que M. Sarkozy, mais bien du généticisme de monsieur-tout-le-monde, et qui donc relève plus de l’idéologie et de la croyance, que du savoir « objectif ». Donc, certains des commentaires qui vont suivre sont probablement hors-sujet par rapport à l’article. Cependant, il y a certains points qui méritent d’être débattus, notamment ceux concernant le rôle de l’idéologie dans les sciences (« dures » ou sociales).

    « Une théorie scientifique doit décrire des mécanismes permettant d’expliquer des faits, être féconde pour la recherche et offrir la possibilité de tests de réfutation. C’est le cas de la génétique.  »

    C’est également le cas de la psychologie sociale. Libre à vous de demander à Michaël ses différents questionnaires de généticisme, et d’intolérance, de le faire passer à une centaine de personnes, de traiter les résultats, et d’en tirer vos conclusions. Les recherches en psychologie sont aussi soumises à ses critères de réplicabilité et de « réfutabilité ».

    « Les concepts utilisés dans une étude scientifique doivent être en cohérence avec la problématique intrinsèque du domaine et ne pas être contaminés par des considérations idéologiques ou morales. C’est le cas par exemple du concept de »code génétique« , ce n’est pas celui de »généticisme« dont on va montrer par la suite qu’il est corrélé à des concepts immoraux. »

    Les questionnaires utilisés permettent tout autant de montrer une corrélation avec des comportements de tolérance, et d’ouverture, bref, des comportements « moraux », qu’avec des comportements contraires, « immoraux ». Le truc, c’est que la corrélation entre la croyance au déterminisme génétique et les comportements « moraux » est négative, et qu’elle est positive avec les comportements « immoraux ». Il ne faut pas confondre ce qui est fait pendant la recherche, et ce qui est résumé dans le présent article. D’ailleurs, avez-vous lu la recherche de Keller ou celle de Dambrun, pour tirer des conclusions aussi hâtives ?

    Cependant, il est vrai que, comme soulevé plus haut, les recherches de Keller et de Dambrun ont probablement été faites avec des non-spécialistes comme participants de l’expérience. Généralement, ces études utilisent des étudiants à l’université comme participants. Mais pourquoi ces étudiants à l’université seraient moins spécialistes de la génétique que le futur présidentiable dont il est question ici ?

    Pour revenir sur la question de la scientificité, le problème le plus important dans la science est que, même en sciences dures, comme la génétique, les recherches sont guidées idéologiquement. Un chercheur qui veut trouver des différences génétiques entre 2 groupes de personnes à de fortes chances de les trouver, alors que celui qui cherche à montrer qu’il n’y a pas de réelles différences, risque également de trouver ses résultats. L’avantage de la psychologie sociale, et des autres sciences sociales, par rapport aux sciences dures est qu’elles savent qu’elles sont guidées par l’idéologie du chercheur, et qu’il faut lire les résultats avec précaution, en prenant en compte cette dimension.

    Le fait de penser la science comme idéologiquement neutre n’émancipe nullement de l’influence de l’idéologie dans la science. La recherche scientifique, tant qu’elle sera faite par des humains, sera teintée idéologiquement (soit par un intérêt politique, ou par un intérêt financier, ou même par l’intérêt propre du chercheur qui d’une part doit publier -ou mourir-et qui d’autre part ne peut pas se permettre de publier des résultats qui viennent contredire ses 15 dernières années de recherche). A mon avis, seule la conscience de cette idéologie permet de pouvoir lutter contre. Si les sciences dures, et surtout la biologie, mais pas uniquement, ignorent la composante idéologique qui vient teinter l’interprétation des résultats, on risque pas mal de sur-interprétations, et toutes les dérives qui en découlent (dont certaines ont été soulevées dans les commentaires).

    « La croyance abusive, en l’état de nos connaissances, dans le rôle des gênes comme déterminants de la personnalité et des comportements doit être combattue par les moyens scientifiques fournis par la théorie génétique. »

    Il est donc nécessaire que d’autres sciences, comme l’épistémologie, la sociologie des sciences, ou la psychologie sociale, s’interrogent sur ces sujets, et viennent tirer la sonnette d’alarme en montrant que, parfois, les croyances de certains viennent orienter les recherches qu’ils font, et les résultats qu’ils trouvent (ou du moins, l’interprétation de ces résultats). L’avantage de la psycho sociale, est qu’elle peut fournir des « preuves » empiriques de ce qu’elle avance. Une fois que cette ingérence de l’idéologie dans la recherche scientifique a été mis à jour, il est plus facile pour les généticiens de se poser la question de savoir comment leur idéologie va teinter leurs recherches. On demande aux chercheurs de faire une déclaration d’intérêts (pour qui la recherche a-t-elle été faite ?, y-a-t-il un brevet à la clé ? qui finance ? etc.) avant de publier dans les revues scientifiques comme Nature, Cell ou Science, parce que l’intérêt de l’organisme financeur est de ne pas publier de résultats contradictoires. Pourquoi ne leur demanderait-on pas une « déclaration d’intérêt idéologique », puisque c’est l’intérêt même du chercheur de ne pas publier de résultats contraires à ses idéaux ?

    Cordialement,

    Fabrice.



  • Fabrice Gabarrot 26 avril 2007 07:56

    Pour revenir sur cet article, il faut noter certaines désinformations qu’il contient.

    « In the womb, the body of a developing fetus is female by default and becomes male if the male-determining gene known as SRY is present. »

    C’est absolument faux, et les recherches récentes montrent que l’humain n’est pas féminin « par défaut » (une sorte de passivité de la différenciation en femme), mais que la différenciation sexuelle est très active dans les 2 sens. De plus, le gène SRY (porté par le chromosome Y) n’est pas le seul impliqué dans cette différenciation, et cette différenciation nécessite probablement plusieurs gènes, portés par différents chromosomes, dont des autosomes.

    « Several advances in the last decade have underlined the bizarre fact that the brain is a full-fledged sexual organ, in that the two sexes have profoundly different versions of it. »

    Il n’y a rien qui puisse différencier de façon systématique le cerveau des hommes et des femmes dans leur manière de fonctionner. Le cerveau se forme avec l’éducation, si bien qu’il y a autant de différences de fonctionnement entre un homme et une femme, qu’entre 2 hommes ou entre 2 femmes, ou qu’entre un pianiste et un rugbyman, entre une nageuse, et une physicienne.

    « Techniques for imaging the brain have begun to show that men and women use their brains in different ways even when doing the same thing. In the case of the amygdala, a pair of organs that helps prioritize memories according to their emotional strength, women use the left amygdala for this purpose but men tend to use the right. »

    Cette observation est probablement vraie. Mais elle n’est absolument pas expliquée par la génétique. C’est le fruit d’une éducation différenciée, qui apprends aux femmes à être émotionnelles, et à exprimer ces émotions, et qui apprends aux hommes à être fort, et à ne pas pleurer. Cette différence se retrouverait-elle chez des nouveaux nés d’à peine quelques heures ?

    L’hypothèse d’une utilisation différenciée des 2 hémisphères est aussi aujourd’hui remise en cause par les avancées des neurosciences.

    En bref, cet article est pour moi un ramassis d’inexactitudes et d’informations erronées qui servent une idéologie particulière. Il y a autant de chercheurs et de recherches que celles citées dans cet article qui viennent contredire ces dernières, seulement, celles-ci n’ont pas été sélectionnées parce qu’elle ne servent pas l’idéologie de l’auteur. De même, il ne faut pas prendre la science comme parole d’évangile, et les « vrais » scientifiques (généticiens, neurobiologistes, ...) sont autant soumis à une certaine idéologie dans l’interprétation de leur résultats que les chercheurs en sciences sociales. La seule différence peut-être serait que l’idéologie majoritaire chez ces derniers est plutôt une idéologie humaniste (de gauche, et encore, pas toujours).

    Je vous renvoie aux ouvrages de Catherine Vidal (neurobiologiste, directrice de recherche à l’institut pasteur), pour prendre le contrepied de ce qui est présenté dans cet article du NYT, mais aussi dans des livres comme « Mars et Vénus ».

    Bonne journée.

    Fabrice



  • Fabrice Gabarrot 25 avril 2007 14:40

    Bonjour,

    Je voudrais juste réagir à ce commentaire, en deux points.

    1 - Ramener la différenciation sexuelle à la simple présence d’une paire de chromosomes XY (vs. XX) est déjà une aberration en soi. La détermination du phénotype Homme (vs. du phénotype Femme) est multidéterminée. Si bien qu’il existe des cas d’hommes XX (1 naissance sur 20000) et des femmes XY (une naissance sur 10000). C’est justement ce genre de réductionnisme qui amène au généticisme, et au dogmatisme, dont parle Michael.

    2 - Supposer que la présence de chromosomes XX (vs. XY) suffit à expliquer pourquoi les femmes diffèrent des hommes dans leurs comportements sociaux est une autre erreur importante. D’une part, on ne peut pas tirer ce genre de conclusions si on a pas trouvé le moyen de contrôler toutes les autres sources possibles de variations dans le comportement des uns et des autres (l’éducation différenciée, la stigmatisation des unes et des autres, le rôle des médias dans la construction de l’identité sexuelle, etc.) Autant dire que la simple présence d’une paire de XX ne permet pas d’expliquer pourquoi les femmes se comportent de telle manière, et que les hommes se comportent de telle autre. D’autre part, penser que le génome guide notre comportement (c’est à dire, supposer que le contenu de notre cerveau est codé par des gènes ou ensembles de gènes spécifiques), c’est ignorer (peut-être sciemment) les découvertes d’autres sciences telles que la neurobiologie, qui mettent en avant, depuis plusieurs années, la capacité extraordinaire qu’a notre cerveau de se modifier, d’évoluer avec l’environnement (cf. la notion de plasticité cérébrale). Beaucoup de scientifiques ( des vrais, pas que des chercheurs en sciences sociales smiley ) assument que les comportements humains ne peuvent être réduits aux seuls gènes. Je citerais, pour l’exemple, François Jacob (Généticien, membre de l’académie des sciences) :

    “ Comme tout organisme vivant, l’être humain est génétiquement programmé, mais programmé pour apprendre. Chez les organismes plus complexes, le programme génétique devient moins contraignant, en ce sens qu’il ne prescrit pas en détail les différents aspects du comportement, mais laisse à l’organisme la possibilité de choix. L’ouverture du programme génétique augmente au cours de l’évolution pour culminer avec l’humanité. ” (François Jacob, Le jeux des possibles, éditions Fayard, 1981)

    Jusqu’à présent, la génétique (comme science) a pu montrer sans trop d’ambigüité [1] le rôle des gènes sur certains aspects mécaniques de l’humain (pourquoi 2 bras et pas 3, la couleur des cheveux ou des yeux, etc.) mais, en ce qui concerne son rôle dans l’aspect psychologique de l’humain, c’est une autre paire de manches.

    [1] Et encore, même pour l’aspect strictement mécanique, la génétique doit parfois faire appel à l’épigénétique (qui renvoie à des facteurs biologiques déterminant le phénotype, mais qui ne sont pas codés dans les gènes), pour expliquer ce qu’elle ne peut expliquer sur la base des gènes.


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