Nicolas Sarkozy, l’Etat et l’identité nationale (1)
Dans un discours du 9 mars prononcé à Caen, Nicolas Sarkozy a déclaré notamment : « A force de demander à la France d’expier son passé... c’est notre participation à un destin commun qui est remise en question ». Une affirmation grave, qui ne relève plus de l’union nationale, lieu commun de l’actuelle campagne présidentielle, mais de ce que l’on s’est mis à appeler l’identité nationale. Le présent article, premier d’une série, aborde la question du statut des langues dites « minoritaires » et des réticences officielles à leur égard : craindrait-on que le mot « autodétermination » puisse être un jour prononcé pour certaines parties du territoire français ?
« El cominciò liberamente a dire :
"Tan m’abellis vostre cortes deman,
qu’ieu no me puesc ni voill a vos cobrire.
Ieu sui Arnaut, que plor e vau cantan ;
consiros vei la passada folor,
e vei jausen lo joi qu’esper, denan.
Ara vos prec, per aquella valor
que vos guida al som de l’escalina,
sovenha vos a temps de ma dolor !".
Poi s’ascose nel foco che li affina. »
Extrait de Dante Alighieri, (Divina) Commedia, Purgatoire, 139-148 du chant XXVI.
Arnaut Daniel, dont l’oeuvre reste à ce jour internationalement connue, de même que celle de Marcabru évoquée dans mon article du 5 mars, n’écrivait pas dans une langue que l’Etat français reconnaisse actuellement. Ce fut pourtant la langue européenne la plus importante d’une partie du Moyen-Age. Que lui est-il arrivé ? Tout simplement, que l’Etat français a progressivement organisé, au fil des siècles, sa marginalisation et sa quasi-extinction.
(...)
[fin de citation]
L’article du 5 mars auquel se réfère cet auteur, et qui également été censuré par Agoravox, est celui-ci :
Les autres liens sont bons. D’ailleurs, comme le dit Universitaire, on retrouve partout les bons liens en cliquant sur « lien permanent » pour chaque commentaire. Ce qui permet de vérifier que j’avais bien mis les liens corrects, et que c’est l’informatique d’Agoravox qui les dénature.
Quant à la censure des articles de cet auteur, et de beaucoup d’autres, cela prouve (à supposer que tel ait jamais été le but) qu’Agoravox n’a pas réussi à devenir un site où une véritable critique du système puisse s’exprimer librement.
Agoravox reste, à ce jour, un site du système. Avec quelques « ouvertures » qui ne servent qu’à confirmer cette réalité dans la bonne conscience.
je trouve intéressant ce morceau. Car en réalité, les comités « transversaux » montés par Sarkozy (Attali, Balladur, celui avec Rocard...) et les « missions » du même acabit (Védrine...) ont pour objet de se substituer au Parlement :
4. Un « Parlement fantôme », machine à voter des lois
Avec l’aide des médias, Nicolas Sarkozy crée l’illusion d’une « proximité » apparente. Il est omniprésent, comme ses ministres, dans les journaux, sur les écrans de télévision, à la radio... Mais cette « proximité » de façade est un leurre. En réalité, le monde politique français continue à s’éloigner de plus en plus de la grande majorité de la population.
Qui peut obtenir une réponse d’un député ou d’un sénateur sur un problème le concernant, si en juillet dernier le Parlement a examiné trente-cinq lois plus d’autres textes, et si à présent Sarkozy et son gouvernement annoncent une deuxième « tournée » du même tonneau ? Le nouveau fonctionnement des instances parlementaires revient à bannir ouvertement de leur activité l’examen des « cas particuliers », devenus de plus en plus nombreux au fur et à mesure que la détresse se généralise. Non seulement « on ne peut pas s’occuper de toute la misère du monde », mais à présent il en est de même pour celle de la France. Dans Les Confessions, Jean-Jacques Rousseau avait écrit : « ... je me rappelai le pis-aller d’une grande princesse à qui l’on disait que les paysans n’avaient pas de pain, et qui répondit : Qu’ils mangent de la brioche. J’achetai de la brioche ». C’était au XVIII siècle, sous la monarchie.
Le Parlement bourgeois a toujours été globalement une institution « sous contrôle » et au service des puissants. Mais à présent, la politique de « blitz » législatif de Sarkozy le réduit à une simple chambre d’enregistrement à la va-vite qui ne possède plus de réelle disponibilité à l’égard des citoyens. La notion même de contrôle de l’action du gouvernement et des administrations part en fumée, dans un dispositif politique tenu en main par Sarkozy et par ses proches collaborateurs qui ne connaissent que trop bien ce qu’attendent d’eux les milieux financiers et les multinationales.
On atteint ainsi une sorte de stade ultime de la décomposition du parlementarisme sous le système capitaliste. Au point que les élus ont à peine le temps de prendre connaissance des textes de loi qu’ils sont censés voter. Personne ne semble s’en étonner : après tout, nous dit-on, ce n’est que le programme sur lequel le nouveau Président s’était engagé. Pourtant, les élections parlementaires sont indépendantes des élections présidentielles et l’article 27 de la Constitution Française prévoit que « tout mandat impératif est nul » et que « le droit de vote des membres du Parlement est personnel ». Ce principe devrait au moins impliquer, ne serait-ce que sur le plan des apparences, que l’ensemble des députés disposent d’un temps suffisant pour étudier chacune des lois sur lesquelles leur vote est sollicité. La pratique parlementaire s’éloigne de plus en plus de ce principe constitutionnel.
Votre article n’est pas très original. Avant les présidentielles de 2002, on faisait la chasse aux « trolls » dans un certain nombre de listes de discussion de « gauche ». Y compris, de la « gauche de la gauche ». Il y avait même un ou deux attachés parlementaires parmi les « modérateurs » qui jouaient à ce sinistre jeu. Tout ce qui n’était pas jospiniste était « troll ». Résultat : en tout cas, on a vu ce qui s’est passé en avril 2002. Quant au « retour » de Jospin...
Matière « trolls », parlons aussi de votre admirée Marina Le Pen. Force est de constater qu’elle a fait perdre une montagne de voix à son papa avec le « recentrage » du FN. Le FN était une force électorale tant qu’il promettait, on ne savait pas très bien quoi, mais en tout cas de la casse par rapport à un « système » qu’il dénonçait mais qu’il ne définissait pas. En voulant devenir plus « normal », le FN s’est démasqué et tout le monde a compris que c’est un parti des capitalistes comme les autres. Dès lors, aucun intérêt pour ceux qui en attendaient autre chose.
La « chasse aux trolls » est une expression du totalitarisme des groupes politiques et lobbistes qui cherchent à contrôler la Toile pour vendre leur camelote.
« Par contre, ça pourrait effectivement être intéressant de publier un article retraçant les collusions entre les membres de l’actuel gouvernement et certains think tank et lobbies industriels. Sur ce, on vous attend. »
Vous me faites marrer. Lisez un peu ces trois articles censurés par Agoravox, précisément d’un auteur qui dénonce les réseaux :
Sarkozy, Strauss-Kahn, Bush, transversalité et targaires de la politique
(...)
Ce n’est pas tout. Nicolas Sarkozy aurait-il, de fait, choisi le candidat du Parti Socialiste aux présidentielles de 2012, en aidant Dominique Strauss-Kahn (DSK) a accéder à la présidence du Fonds monétaire international (FMI) ? La question a aussitôt été tacitement posée, et l’hypothèse continue à faire le tour de Toile. Jusqu’au parallèle avec le président sortant du FMI, Rodrigo Rato, démissionnaire avant la fin de son mandat au moment où commence de fait la campagne pour les élections espagnoles de mai 2008. La « demande européenne » d’un parti français à façade « sociale-démocrate » n’est sans doute pas étrangère à l’opération de promotion de DSK. Mais, de toute façon, Sarkozy et Strauss-Kahn ont fait les deux partie, depuis le début des années 1990, des « élites » que rassemblent les cénacles de la « transversalité » française comme le Siècle. Pareil pour Bernard Kouchner et, depuis bien avant, Jack Lang ou Jacques Attali. Ou encore François Fillon, Luc Ferry, François Hollande, plus récemment Didier Migaud ou Rachida Dati, et bien d’autres. Le monde politique est un mouchoir. Mais ces cercles se caractérisent surtout par le rôle qu’y jouent les représentants des milieux financiers et industriels, véritables patrons de la politique réelle.
Dans l’ensemble, les partis politiques sont devenus des courroies de transmission de stratégies qui ne s’élaborent, ni dans leur sein, ni même à l’Elysée ou à Matignon, mais dans les coupoles du monde des affaires. Le reste relève de la mise en scène. Le rôle, de plus en plus symbolique, du Parlement consiste à rassurer l’opinion en lui fournissant une apparence de débat et en opérant quelques mises en forme. Quant aux directions syndicales, elles se sont rapprochées des mêmes cercles et réseaux que le monde politique. Pas seulement en France, où Nicole Notat fréquentait déjà le Siècle dans les années 1990, mais aussi au niveau international. Le rôle de dirigeants de la CGT et d’autres centrales au sein du « think tank » Confrontations Europe est bien connu, de même que l’appartenance du président de l’AFL-CIO américaine John Sweeney à la Commission Trilatérale.
François Bayrou, candidat entre deux eaux et à coloration variable
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La création de la Commission Trilatérale est d’ailleurs intervenue à un moment (1973) où les Etats-Unis venaient de se désengager du Viêt Nam dans des conditions défavorables. D’où la stratégie, de la part des milieux financiers, d’impliquer dans la « gouvernance mondiale » l’ensemble des puissances du monde capitaliste de l’époque. Une orientation incontestablement intelligente, du point de vue de la défense des intérêts de la grande finance.
Dès janvier 1974, on trouve le futur premier ministre français Raymond Barre parmi les membres la Trilatérale. En même temps qu’un certain James E. Carter, Jr, gouverneur de la Géorgie.
Mais François Bayrou, membre également de la Trilatérale jusqu’en 2005 et héritier autoproclamé de la tradition « centriste », ajoute un troisième ingrédient à connotation médiévale à l’actuel panorama politique : l’appel à la paix civile, dans un pays où règne d’après lui : « Perpétuellement la guerre entre le PS et l’UMP, perpétuellement en embuscade l’un contre l’autre ». Raison pour laquelle, poursuit notre homme providentiel : « J’ai vu mon pays décliner, s’appauvrir ». Rien de moins. La mondialisation, les élargissements de l’Union européenne, le méga-espace économique du Conseil de l’Europe, les exportations de capitaux, les délocalisations, le marché mondial de la main d’oeuvre, le dumping social... n’y sont semble-t-il pour rien. Toute la faute revient à la « guerre entre le PS et l’UMP »... Curieux, dans ce cas, qu’on ait tant de mal à trouver des textes d’une législature franchement désavoués par la législature suivante après une « alternance ».
Nicolas Sarkozy, l’Etat et l’identité nationale (1)
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Dans ces conditions, il paraît très difficile d’empêcher un européen, « juge » ou « simple » citoyen et quelle que soit sa nationalité, d’avoir sa propre opinion sur l’histoire et le fonctionnement institutionnel des pays voisins. Ce qui n’impliquerait pas pour autant, de la part de ce citoyen, un positionnement favorable à la construction d’institutions européennes dont il peut craindre à terme, précisément, un comportement et un fonctionnement trop proches de celui des puissances du passé. Avec une circonstance aggravante : un Etat européen ou mondial du XXI siècle risquerait d’être un Etat privé. En 1991, le fondateur de la Commission Trilatérale David Rockefeller avait déclaré notamment : « La souveraineté supranationale d’une élite intellectuelle et de banquiers est sûrement préférable à l’autodétermination nationale pratiquée ces derniers siècles ». Tout un programme, où on voit mal ce qu’il adviendrait des langues dites « minoritaires » sous une telle théocratie financière.