Les
politiques monétaires expansionnistes des banques centrales permettent
de circonscrire l’incendie à court terme mais elles envoient des signaux
faussés aux marchés qui se paieront à long terme estime Nicolas Bouzou,
économiste chez Asterès.
Contrairement à ce qu’on a pu lire ici ou là, la crise actuelle a très peu à voir avec celle des années 1930.
Parmi toutes les différences, le comportement des politiques
économiques, restrictives après 1929, incroyablement expansionnistes
après 2008, tant du point de vue budgétaire que monétaire. Les
banques centrales, qui devraient être en principe des temples de
conservatisme, ont beaucoup innové, mettant au point quantitative easing
et LTRO (refinancements à long terme des banques). Aux Etats-Unis,
mais surtout au Royaume-Uni et encore plus au Japon, les banques
centrales monétisent les dettes publiques dans les grandes largeurs.
Résultat : les marchés sont inondés de liquidités, qui viennent
s’investir là où elles le peuvent : matières premières, immobilier haut
de gamme, actifs financiers (obligations publiques bien sûr mais aussi
actions d’entreprises...).
Comme toujours en économie, pour juger
du bien-fondé de ces politiques, il faut mettre dans la balance les
coûts et les avantages, sachant que, comme souvent, les avantages se perçoivent à court terme, alors que les coûts s’exprimeront à long terme
(pour les puristes de la politique économique, il faudrait introduire
dans le raisonnement un « taux d’actualisation » qui permette de donner
un « prix » au temps). Les avantages, on les voit clairement : les Etats
peuvent se désendetter en douceur, les marchés ne plongent pas, les
banques restent à peu près liquides, en tous cas suffisamment pour
continuer leurs activités de base à peu près normalement. Des coûts en
revanche on ne parle jamais. Et pourtant ils sont bien réels : trop de
liquidité, ce sont des prix d’actifs qui envoient des signaux faussés
(exemple : la délirante introduction boursière de Facebook ou la
surévaluation de certains marchés immobiliers) et donc des
investissements qui ne sont pas forcément au bon endroit (les
anglo-saxons parlent de malinvestment). N’oublions pas que la crise
de 2008 trouve justement ses racines dans les excès de liquidité hérités
de l’ère Greenspan aux Etats-Unis.
L’idée, largement
partagée par les acteurs financiers, selon laquelle il faut toujours
plus de liquidité, est donc incroyablement dangereuse. Elle traduit l’incapacité du secteur à se projeter dans une logique de moyen et long terme, toujours au profit du court terme.
en clair , ça ne résoud pas les problèmes structurels