@filo
Comme je suis un peu fatigué et quelque peu écoeuré par ce que je lis en ce moment sur AgoraVox, je vais laisser Voltaire vous répondre à ma place par un extrait de l’article « Torture », dans l’Encyclopédie. Vous me direz qu’on n’a pas fait brûler ces pauvres filles, mais c’est que depuis le moyen-âge, il y a eu quand même un certain nombre de bons esprits pour s’élever contre ces sortes d’horreurs. Sinon, on y serait encore. Certains, sur AgoraVox, trouvent que deux ans, pour ces « pétasses » (sic.) ce n’est vraiment pas assez. J’ai même lu il y a quelques mois un message qui protestait parce qu’on prenait la défense d’une femme condamnée en Iran à la lapidation : elle l’avait bien mérité. A quand, en France, un rétablissement du délit de blasphème, assorti des peines ad hoc ? Et pourquoi ne pas rétablir, pendant qu’on y est, ce que Michel Foucault appelait « l’éclat des supplices » ?
Le texte de Voltaire, maintenant :
"Lorsque le chevalier
de La Barre, petit-fils d’un lieutenant
général des armées, jeune homme de beaucoup d’esprit et d’une grande
espérance,
mais ayant toute l’étourderie d’une jeunesse effrénée, fut convaincu
d’avoir chanté des chansons impies, et même d’avoir passé devant une
procession
de capucins sans avoir ôté son chapeau, les juges d’Abbeville, gens
comparables
aux sénateurs romains, ordonnèrent, non seulement qu’on lui arrachât la
langue,
qu’on lui coupât la main, et qu’on brûlât son corps à petit feu ; mais
ils
l’appliquèrent encore à la torture pour savoir combien de chansons il
avait
chantées, et combien de processions il avait vues passer, le chapeau sur
la
tête.
Ce n’est pas dans le
XIII° ou dans le XIV° siècle que cette aventure
est arrivée, c’est dans le XVIII°. Les nations étrangères jugent de la
France
par les spectacles, par les romans, par les jolis vers, par les filles
d’Opéra,
qui ont les moeurs fort douces, par nos danseurs d’Opéra, qui ont de la
grâce,
par Mlle Clairon, qui déclame des vers à ravir. Elles ne savent pas
qu’il n’y a
point au fond de nation plus cruelle que la française.«
Je vous laisse à deviner ce que Voltaire pourrait penser de l’aventure des trois punkettes et de tant de réactions... médiévales ! »Ecraser l’infâme !" ; c’était devenu sa devise. Apparemment, l’infâme bouge encore.