POUR SARKOZY, L’ISLAM A AUSSI DU BON
Et si le foulard n’avait été qu’un divertissement destiné à l’opinion ?
Pendant qu’à droite et à gauche on s’excitait à hauts cris sur quelques dizaines de fillettes, le ministre de l’Intérieur était au boulot. Et là, on a cessé brusquement de diaboliser l’islam pour, cette fois, travailler avec.
- La tentative de Sarkozy de créer de toutes pièces un épiscopat musulman censé permettre un meilleur contrôle sur la communauté (le Conseil français du culte musulman, CFCM) a eu pour effet contre-indiqué l’émergence d’un islam revêche, incarné par l’Union des organisations islamiques de France (UOIF), pourtant peu représentatif de la majorité des musulmans d’ici.
Sarkozy a voulu une structure à sa botte, il se retrouva avec un nid de problèmes. Dans une imitation un peu grotesque de la « démocratie » militaire algérienne, il imposa alors à la présidence du CFCM le candidat qui venait de se prendre une râclée aux élections communautaires, marquées, il est vrai, par un fort taux d’absentéisme : le recteur de la mosquée de Paris, Dalil Boubakeur, un « modéré » qui a surtout l’avantage d’entretenir d’excellentes relations avec la place Bauveau et la préfecture de police.
Car c’était bien là l’enjeu de la manip’ : se garantir des « interlocuteurs » qui serviraient à la fois de relais, de collaborateurs et d’indics.
L’affaire n’a peut-être échoué qu’en apparence. Déjà, on rapporte que le ministère de l’Intérieur « a engagé des relations de confiance » avec l’UOIF (L’Express, 18/09/2003). Laquelle, en échange de cette « confiance » sûrement pas gratuite, pourrait bien appeler ses troupes à voter UMP aux prochaines élections (aux dernières, elle avait soutenu le PS).
Si certains jeunes veulent croire en un « islam politique » et contestataire, on est, avec ces dignitaires-là, très loin de Malcolm X.
Les responsables musulmans, à la fois repoussoirs et supplétifs de police ?
Quoi qu’il en soit, l’utilisation des autorités religieuses locales comme supplétifs du pouvoir est déjà bien amorcée. Les militants de quartiers sont les premiers à en subir les conséquences : chaque fois qu’ils montent au front d’une injustice ou d’un crime policier, ils trouvent les « bu-bars » sur leur route.
1) Exemple : en novembre 2001, des associatifs tentent de mobiliser les habitants du Val-Fourré, à Mantes-la-Jolie, pour qu’ils viennent assister au procès à Versailles de Pascal Hiblot, le policier qui avait tué le jeune Youssef Khaïf d’une balle dans le dos 10 ans plus tôt. « Des hommes proches de la mosquée sont venus nous dire qu’on avait tort d’être solidaire avec la famille Khaïf, témoigne un habitant du quartier, membre du MIB. Ils ont dit que si Youssef est mort, c’est parce que Dieu l’a voulu.
Normal : la mosquée de Mantes appelle à voter Pierre BEDIER (UMP), maire de Mantes et ministre des programmes immobiliers de la justice. »
2) Exemple, plus frappant encore : Dammarie-les-Lys. Durant l’été 2002, un habitant de cette cité de Seine-et-Marne, Mohammed Berrichi, meurt après sa prise en chasse par la brigade anti-criminalité (BAC). L’association de quartier « Bouge qui bouge » organise alors une manifestation pour réclamer justice. La manif est pacifique et rassemble plusieurs centaines d’habitants, dont beaucoup de jeunes. Créée après le décès en 1997 d’un autre de leurs voisins, abattu à 17 ans d’une balle policière dans la nuque, Bouge qui bouge s’emploie depuis à mener un « combat démocratique passant par la parole et l’écrit », comme dit l’un de ses fondateurs.
Résultat : le 24 juin 2002 à l’aube, 200 policiers déboulent sur le quartier pour perquisitionner les locaux de l’association, soupçonnée de « trouble à l’ordre public ».
Bilan : destruction de la photocopieuse, matraquage d’un gamin de 12 ans et embarquement au poste de Kader Berrichi, le frère de la victime.
Que font alors les autorités pour « apaiser les esprits » ? Elles dépêchent sur place les recteurs des mosquées d’Evry et de Dammarie, avec pour mission de convaincre les jeunes en colère de prier plutôt que de manifester. Comme si, dans nos banlieues déclassées, un conflit relevant de la chose publique ne pouvait être résolu que par la chefferie traditionnelle, comme au bon vieux temps des colonies.
« En quoi un imam ou un recteur de mosquée sont-ils qualifiés pour régler la question politique qui est posée par les militants ? ».
- Les exemples de ce genre sont légion. Repoussoirs commodes lorsqu’il s’agit de désigner quelques gamines à la vindicte publique, les dignitaires musulmans sont aussi très appréciés pour le contrôle qu’ils exercent - ou projettent d’exercer - sur les « barbares » des quartiers.
A la mosquée, au moins, les jeunes ne dérangeront personne. Et s’ils en ressortent un jour avec l’idée de faire porter le voile à leur frangine, il sera toujours temps de crier à l’intégrisme, de nommer une commission des sages et d’envoyer un « philosophe » sur le plateau d’Arlette Chabot.
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