En 2002, Bayrou n’était clairement pas prêt, pas encore « habité » par la fonction. L’année dernière, j’avais en revanche prédit à des amis Anglais sa victoire en 2007 -ils ne m’avaient pas cru il y a 11 ans quand je leur disais que Blair allait gagner.
Bayrou a confirmé son potentiel au moment de son université d’été, et au cours d’une prestation mémorable au JT de TF1 face à Claire Chazal. Il a bénéficié d’un boulevard à la suite de la victoire de Royal aux primaires du PS : seul DSK pouvait lui barrer la route, le non-choix de Royal reflétant l’indécision du PS entre la réforme et l’archaisme, le triomphe de la forme sur le fond du débat.
Et pourtant il a échoué. Parce qu’il a subi des coups bas de sa gauche comme de sa droite, mais aussi parce qu’il n’a pas su passer la 3e vitesse au moment decisif, devenir une authentique force de proposition.
J’apprécie l’homme et son jugement, mais il n’a jamais vraiment démontré sa capacité à jouer en équipe, à transformer son potentiel, à mettre en oeuvre sa vision.
Au vu de la rencontre Bayrou-Royal, ce sentiment s’est confirmé : ce brave homme n’a pas vraiment marqué des points pour son futur Parti Démocrate.
J’ai voté pour Sarkozy en dépit des réserves que j’avais sur le personnage... tout comme vous en avez pour Royal. A mes yeux, ces deux personnalités sont dangereuses mais pour des raisons différentes : Sarkozy aime trop le pouvoir, et Royal n’accepte ni la contradiction ni l’engagement (là où Sarko se lit comme un livre ouvert, Ségo refuse totalement de révéler sa personnalité). Le plus psychorigide et autocrate des deux n’est peut-être pas celui que l’on pense .
Je trouve le programme de Sarkozy plus réaliste et cohérent : ses promesses fantaisistes y forment un « bruit » là où elles constituent l’essence même du pacte présidentiel à géométrie variable de Royal. Le candidat du PS n’accepte pas l’évidence que l’Etat français n’a plus les moyens de sa générosité, et qu’il doit se réformer avant de devenir plus généreux encore.
Surtout, je n’ai aucune confiance dans le mode de gouvernement de Royal alors que je sais comment Sarkozy fonctionne en équipe. Et lui dispose de gardes-fous efficaces : son pacte présidentiel à lui, il l’a signé avant d’entrer en campagne avec les centristes et les chiraquiens de son propre camp, qui n’hésiteront pas un instant à le plaquer s’il venait à déraper.