Bonjour Paul,
Le 2ème volet de « Les métamorphoses de la modernité » écrit par le jeune auteur Clément Gustin et dont j’ai publié le 1er volet, Je le publie ici des extraits :
Du cogito cartésien au Siècle des Lumières
Extrait de l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert
1. Avec son cogito, Descartes inaugure la modernité philosophique en faisant de la raison l’outil d’élucidation par excellence de la réalité. Il donne une méthode inspirée des mathématiques et de la géométrie, à la connaissance, stipulant que toute idée se voulant exacte doit être le résultat de raisonnements logiques évidents avec la clarté et la distinction comme impératifs nécessaires à toute recherche de la vérité. Le défaut provenant de l’imagination et des sens, peut être trompeur. S’ensuit que rien n’est irrémédiablement insondable ou inaccessible à l’entendement humain. Si les hommes échouent à percer les secrets de la nature, c’est avant tout car ils manquent de rigueur, s’en remettent à des jugements obscurs et confus dérivés de leurs sensations. Il ne tient qu’à l’individu rationnel de triompher de l’erreur en s’appuyant sur les facultés logiques de son esprit.
Toute la philosophie occidentale comme la science, l’était. La révolution scientifique commence à voir le jour au XVIIe siècle comme étant le résultat d’une aspiration en premier lieu religieuse en saisissant l’essence divine en découvrant les lois universelles du monde physique, qui, pour les philosophes de l’époque, en étaient des manifestations. Ainsi Newton pensait voir se dessiner l’image de Dieu en découvrant la gravitation céleste.
L’hostilité qui ne cessera de croître entre la science et l’Église était donc surtout une question de moyens. La voie empruntée par la science, avec le temps, devait nécessairement entrer en contradiction avec celle de l’Église, puisqu’en faisant de l’expérience individuelle et de l’exercice de la raison une autorité à part entière — capable de parvenir à ses propres vérités —, elle se passait de tout intermédiaire hiérarchique et venait s’arroger un pouvoir dont seul le clergé détenait jusqu’à présent la légitimité : celui d’interpréter le macrocosme.
[....]« Leur horreur augmente, quand on leur dit qu’on voit tous les jours, dans les pays catholiques, des prêtres, des moines qui, sortant d’un lit incestueux, et n’ayant pas encore lavé leurs mains souillées d’impuretés, vont faire des dieux par centaines, mangent et boivent leur dieu, chient et pissent leur dieu. Mais quand ils réfléchissent que cette superstition, cent fois plus absurde et plus sacrilège que toutes celles des Égyptiens, a valu à un prêtre italien [le pape] quinze à vingt millions de rente, et la domination d’un pays de cent milles d’étendue en long et en large, ils voudraient tous aller, à main armée, chasser ce prêtre qui s’est emparé du palais des Césars. Je ne sais si je serai du voyage, car j’aime la paix ; mais quand ils seront établis à Rome, j’irai sûrement leur rendre visite⁵. »
Du « palais des Césars » à celui des Bourbons, il n’y avait qu’un pas. Quand la première édition du Dictionnaire philosophique fut publiée en 1764, Descartes était mort depuis une centaine d’années ; la Révolution française éclatait vingt-cinq ans plus tard.