Le troisième livre de Charles de Gaulle, porteur de théories
militaires peu conformistes, n’a en France qu’un bref succès de
curiosité. De Gaulle part d’un constat simple : l’Allemagne d’Hitler se
réarme et menace la paix. La France, elle, conserve des doctrines
militaires obsolètes alors que sa frontière nord-est est poreuse. Il
faut, d’urgence, renverser la vapeur : de Gaulle réclame dans son
ouvrage la formation d’un corps de blindés, utilisé de façon autonome et
offensive. Le degré de technicité des engins motorisés exige qu’ils
soient servis par des soldats professionnels et toujours disponibles
(d’où la nécessité de former une armée de métier). S’il s’inscrit dans
l’héritage du général Estienne, précurseur des chars, de Gaulle va
au-delà d’une réflexion purement stratégique. Son livre critique
durement les armées de masse, mais aussi la politique défensive de
l’état-major, arc-bouté derrière la ligne Maginot. Pour de Gaulle, la
France doit pouvoir agir et non pas subir la loi de l’adversaire.
Condamné par la majorité des généraux français, et par les socialistes
qui craignent la suppression du service militaire, le livre attire en
revanche l’attention du général Gudérian, créateur de la force mécanique
allemande.