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jcm jcm 8 mars 2009 14:30

Aux adeptes de la censure, quelques réminiscences...

J’ai une soixantaine d’années et suis donc un peu plus âgé que le Net, cependant...

J’avais droit à "Coeurs Vaillants" acheté au sortir de la messe, pas à Tintin (le journal) et encore moins aux illustrés de toutes sortes (Mickey, ceux de la sphère communiste, "Vaillant" etc...) et encore encore moins à bien d’autres oubliés depuis, souvent en noir et blanc, parfois d’origine US.

Eh oui, sur le chemin de mon école j’étais souvent doublé par un camion dont je revois l’arrière marqué de "Caution Air Brakes" en noir sur jaune, des forces américaines stationnées en France.

Il nous venait, par d’obscures filières, des illustrés favoris de ces soldats qui ne nous exposaient pas que des tendresses et, si le texte nous restait hermétique, les images parlaient.

J’étais, très jeune, lecteur obsessionnel : des années durant j’ai probablement lu au moins 30 livres par mois et n’ai jamais compté les nuits passées aux toilettes avec quelques bouquins, remettant à toujours plus tard l’heure du coucher.

Livres de toutes sortes, illustrés glanés un peu partout... vers 12 ans le "Dracula" de Bram Stoker m’a nettement plus marqué que Sade, et j’ai dû passer en revue tout ce qui s’apparentait de près ou de loin à OSS117, vous savez ces livres "d’espionnage" où des individus se régalaient lorsqu’ils réussissaient une décapitation à la corde à piano en passant du premier coup entre 2 vertèbres et sans que la carotide crache trop de sang sur leur costume...

A la maison je disposais de "Science et Avenir", de "Atomes" (devenu par la suite "La Recherche" et autres revues scientifiques, de "Jardin des Arts" entre autres revues artistiques, j’écoutais France Culture et France Musique (vers 10 ans déjà) et je bénéficiais d’une éducation parentale assez solide (même si je la transgressais par mes lectures) et de pas mal de littérature d’assez bonne qualité : des "classiques", sans compter ceux que j’empruntais à quelques bibliothèques.

J’ai donc bravé autant que faire se peut toutes les censures non par défi mais parce-qu’elles prétendaient me masquer ce qui était susceptible de m’intéresser.

J’ai également lu tout ce que je pouvais trouver sur les guerres mondiales, et inutile de préciser que de véritables horreurs y étaient décrites.

Sur le plan de la violence et du sexe (car il y en avait aussi dans tous ces écrits) j’avais donc très tôt été documenté de façon assez large.

Je ne suis pas pour autant (ni les copains avec lesquels je pratiquais des échanges de bouquins) devenu un tueur à la corde à piano, ni un agresseur sexuel, ni un tortionaire, ni... car l’éducation reçue permettait de faire correctement la part des choses entre ce qui relevait de l’information, de la sphère littéraire, des comportements que l’on pouvait adopter (et des raisons de devoir les adopter) et de ceux que l’on ne devait pas avoir (motifs explicites, et expliqués, à la clef).

Cela pour dire qu’il y a toujours eu des interdits, des tentatives de censure, des personnes qui ont respecté les interdits, d’autres qui ont transgressé certains de ces interdits et, ayant été l’une de ces personnes, qui n’ont pas déduit que l’on pouvait agir "n’importe comment" parce-que, une fois encore, une certaine éducation agissait pour marquer non des limites arbitraires mais une cohérence entre son propre comportement et l’équilibre de la société, via en particulier la notion de réciprocité.

"Ce que tu ne veux pas que l’on te fasse, ne le fais pas aux autres" pour être bref.

Que le vecteur s’appelle "papier" ou "Internet" ne change rien à l’affaire : le décapiteur à la corde à piano, passé de mode, sera remplacé par un autre "éradicateur", l’éventreur de pucelles, noir comme l’encre, trouvera un alter ego dans un "hentai".... et chacun disposera plus ou moins facilement, quel que soit son âge, de documents de toutes sortes.

Pour ma part l’ensemble de mes lectures m’a permis de me forger un ensemble de visions du monde et je ne regrette aucune d’entre elles.

En d’autres termes si j’avais 12 ans demain et si le Net était censuré je ferais tout mon possible pour contourner cette censure afin de parvenir à cet éclectisme qui fonde (qui a fondé) ma vie intellectuelle.

Heureusement il n’existe à ma connaissance aucune censure qui soit absolue et j’espère qu’il ne pourra jamais en exister.

Heureusement avec ses millions de nouveaux sites, ses centaines de millions de nouvelles pages chaque jour il est impossible de censurer le Net de façon parfaite.

Toute censure sera donc imparfaite au point de générer plus d’inconvénients que d’avantages et ne passera donc pas l’épreuve du temps, sans compter qu’il existe des moyens informatiques....

Reste donc un chantier à revoir souvent de fond en comble : celui de l’éducation que reçoit chaque enfant, qui dépend elle-même fortement du contexte socio économique...

Comment faire de chacun un citoyen équilibré, capable de tout apprendre, de tout voir de ce qui l’intéresse à un moment donné et d’en tirer des enseignements qui l’aideront à conforter son équilibre ?

C’est en résolvant cette question que nous aboutirons à une société équilibrée, dans laquelle toute idée de censure apparaîtrait comme une incongruité : nous en sommes malheureusement loin...



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