C’est bien moins le mauvais score de Bayrou qui m’a surpris, que l’excellent résultat de Daniel Cohn-Bendit, avec ses 52 % d’avis favorables
L’image de marque d’une personnalité est quelque chose de surprenant et de mystérieux. Le Pen a une image de marque détestable, elle lui colle à la peau et elle le suivra dans la tombe. Sa fille Marine parviendra peut-être à faire un peu mieux, mais, plombée par son patronyme, un peu mieux seulement.
A l’opposé, Cohn-Bendit a une excellente image de marque, entretenue depuis quarante ans par les médias. La large révélation de ses aveux pédophiles ne l’a même pas ébréchée. Là, où Le Pen aurait reçu l’étiquette indélébile de « gros porc », l’ex-gauchiste est, de toute évidence, absout pour ce que l’« on » considère, manifestement, comme des péchés (véniels) de jeunesse.
En d’autres temps, le dénommé Jean-Luc Delarue, occupant la plus haute marche du podium en catégorie « gendre idéal » a aligné les comportements inadmissibles par ce qu’ils révélaient d’imbuvable suffisance et de mépris à l’égard de ses subordonnés. Ils ne lui ont pas porté le moindre préjudice, auprès du grand public, en termes de sympathie.
Patrick Poivre d’Arvor a adopté une conduite particulièrement honteuse, avec sa fausse interview de Fidel Castro, en 1991, sans que cela nuise à son audience. Le même a été condamné, en 1996, pour recel d’abus de biens sociaux, à quinze mois de prison avec sursis et 200’000 francs d’amende. Cela ne l’a nullement empêché de célébrer la grand-messe du 20 heures, jusqu’en 2008.
Obama a montré son vrai visage d’opportuniste cynique en annonçant, lors de sa campagne électorale, la fermeture du centre de détention de Guantanamo, alors qu’il n’avait pas, et aujourd’hui encore, la moindre idée de qu’il conviendrait de faire des prisonniers… Ses propos sur le voile islamique ne l’ont pas davantage pénalisé en Europe
Alors on ne peut que s’interroger sur la capacité de l’opinion publique à faire abstraction des incartades en tous genres de ses idoles, petites et grandes, et sur la nature de la fameuse goutte qui est susceptible de faire déborder le vase. Les aveux de Cohn-Bendit montrent que même des faits d’une extrême gravité passent par profits et pertes, avec une stupéfiante facilité.
P.S. – Pendant que je rédigeais cette intervention, Fergus est venu nous parler de « énorme connerie » commise par Bayrou contre Cohn-Bendit, et n’a pas un mot pour les actes répugnants du second. Je laisse à Fergus, le soin de réfléchir à ce qu’aurait été sa réaction si la situation avait été inversée, avec (le catholique) Bayrou dans le rôle du pédophile et Cohn-Bendit dans celui de l’accusateur…