Certes, le port de la burka est encore occasionnel, mais je crains qu’il ne s’amplifie si les laïques ne réagissent pas et que, d’ici une génération, dans certaines villes, puis dans nos pays, la majorité « démocratique » musulmane (déjà 30 % à Bruxelles !) remplace nos lois par la charia …
Il est un fait que, face à la laïcisation croissante de la société, du moins dans nos régions, toutes les religions sont, plus ou moins, en perte de vitesse. Elles réagissent donc en essayant de réinvestir les consciences et de re-confessionnaliser l’espace public, surtout depuis Jean-Paul 2, Benoît 16 et le chanoine-président Sarkozy 1er. Dans le cas de l’islam, de plus en plus de musulmanes s’occidentalisent. Il était donc prévisible que les musulmans fondamentalistes réagissent eux aussi en imposant, parfois plus que dans leur pays d’origine, le port du voile, ostentatoire voire prosélyte, et qu’ils cherchent à présent à imposer l’ « indigne » burka : c’est dans la logique des autres revendications religieuses croissantes, notamment dans les piscines, les cantines, les hôpitaux, les administrations, etc … Pourquoi les musulmans fondamentalistes, même s’ils sont encore peu nombreux chez nous, cesseraient-ils de profiter de l’électoralisme politique de certains, et de notre conception « voltairienne » mais laxiste de la « tolérance », de la neutralité, de la liberté individuelle, et finalement de la laïcité politique ?
Ne perdons quand même pas de vue qu’ils prennent le coran à la lettre et visent donc à long terme l’islamisation de la planète, tout comme d’ailleurs les chrétiens évangéliques visent sa christianisation. Je crains fort qu’ils ne s’affrontent dans les décennies à venir ... Sans être paranoïaques, les laïques se doivent d’être vigilants et préventifs. Mais la « laïcité politique » française (dont le principe est toujours inexistant dans la Constitution belge !), ne suffit plus : elle incite au communautarisme, au repli sur soi et donc à l’intolérance. Elle devrait donc être complétée par la « laïcité philosophique » qui, si elle refuse toute référence religieuse dogmatique, n’est pas pour autant antireligieuse : elle prône le libre choix des convictions philosophiques OU religieuses.
Dans cette optique, à mes yeux, la « question de société » fondamentale sous-jacente au port de la burka et de tous les signes religieux, même si elle est délicate, c’est le respect de l’article 18 de la Déclaration Universelles des Droits Humains, de 1948 : « Toute personne a DROIT à la liberté de conscience et de religion ; ce droit implique la liberté de changer de religion ou de conviction (…) ».
Or, ce droit, en l’absence de conditions éducatives permettant de le concrétiser, me paraît actuellement plus symbolique qu’effectif …Si les musulmans de chez nous étaient libres de choisir leurs convictions philosophiques ou religieuses, certains n’hésiteraient pas à se déclarer athées. Il est vrai que la peine de mort est prévue par le coran pour les apostats … Quant aux musulmanes, est-ce en toute liberté qu’elles portent le voile ou la burka ? Quoi qu’elles en disent, sont-elles libres de choisir une autre option philosophique ou religieuse que l’islam ? Peuvent-elles choisir en connaissance de cause, entre, d’une part, la soumission, l’obéissance à un texte « sacré » et à des traditions religieuses, phallocratiques et inégalitaires d’un autre temps, et, d’autre part, l’autonomie, la responsabilité individuelle, la libre pensée … ? Comment expliquer que l’immense majorité des musulmanes, même issues de l’ULB, libre exaministe, telles que la députée bruxelloise Madame Ozdemir, confirme la corrélation apparemment totale entre une éducation coranique et la persistance de la foi musulmane ? C’est , à mon sens parce qu’elles ont été conditionnées à la soumission dès la prime enfance, au point parfois d’être sincèrement convaincues, en l’absence d’alternatives non aliénantes, d’avoir choisi librement cette soumission !
Déjà en 1966, le psychologue-chanoine Antoine VERGOTE, à l’époque professeur à l’Université catholique de Louvain, écrivait, dans « Psychologie religieuse », sans doute à son grand dam : « La disponibilité religieuse de l’enfant ne prend forme qu’à la condition d’être précocement éduquée » (...) « . »Les gestes et le langage religieux des parents (...), la célébration des fêtes religieuses, marquent de façon INDELEBILE les souvenirs d’enfance de nombreux adultes et déterminent leur sentiment d’appartenance religieuse". En d’autres termes, en l’absence d’éducation religieuse, la foi n’apparaît pas spontanément … !
Je cite également le neurobiologiste Henri LABORIT : « Je suis effrayé par les automatismes qu’il est possible de créer à son insu dans le système nerveux d’un enfant. Il lui faudra, dans sa vie d’adulte, une chance exceptionnelle pour s’en détacher, s’il y parvient jamais. (...). » Vous n’êtes pas libre du milieu où vous êtes né, ni de tous les automatismes qu’on a introduits dans votre cerveau, et finalement, c’est une illusion, la liberté !« . Je n’irai pas jusqu’à dire que »le libre arbitre n’existe pas« , mais les neurosciences tendent à le relativiser. On peut comprendre que certains athées, comme Richard DAWKINS, ou certains agnostiques, comme Henri LABORIT, au risque de paraître intolérants, perçoivent l’éducation religieuse, bien que sincère et de »bonne foi", comme une malhonnêteté intellectuelle et morale ...
D’ailleurs, les neurosciences, par leurs observations psycho-neuro-physio-génético-éducatives du phénomène religieux, expliquent l’origine et la persistance de la foi : comme le confirme l’IRM fonctionnelle, l’éducation religieuse, forcément affective, confortée ensuite par un milieu croyant unilatéral, laisse, à des degrés divers, des traces indélébiles, par plasticité neuronale, dans le cerveau émotionnel. Il en résulte, à des degrés divers, une anesthésie ultérieure du cerveau rationnel, et donc de l’esprit critique, dès qu’il est question de religion, indépendamment donc de l’intelligence et de l’intellect. L’éducation coranique, exigeant une soumission totale, est évidemment plus marquante que la judaïque et la chrétienne. On comprend mieux l’imperméabilité des croyants, à des degrés divers, aux arguments rationnels : les leurs sont jésuitiques ( par exemple : science et foi sont conciliables parce qu’elles relèvent de sphères, de registres, de niveaux différents, …)
Bien sûr, la prévention, par l’éducation, serait préférable à l’interdiction, mais c’est impossible actuellement : à mes yeux, idéalement, il faudrait pour cela que notre système éducatif permette, à toutes et à tous, de choisir, aussi librement que possible, de croire OU de ne pas croire, à partir d’une information minimale, objective et non prosélyte, à la fois sur le « fait religieux » ET sur le « fait laïque », c’est-à-dire l’humanisme laïque, ses valeurs universalisables, ses options, ses objectifs, la spiritualité laïque, etc ...actuellement occulté par les religions. Hélas, au mépris de l’intérêt supérieur de l’enfant, nos Constitutions accordent aux parents le droit de leur imposer leur croyance religieuse, et interdisent à l’école de compenser cette influence culturelle unilatérale.
Il est plus donc plus que temps, selon moi, de repenser les limites de notre tolérance, et de promouvoir une laïcité, non plus seulement politique mais aussi philosophique, dans le but de mettre en place préventivement un système éducatif permettant un meilleur « vivre ensemble » et une réelle citoyenneté. Vivement un débat sur cette « question de société » !
Michel THYS à Waterloo.
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
Agoravox utilise les technologies du logiciel libre : SPIP, Apache, Ubuntu, PHP, MySQL, CKEditor.
Site hébergé par la Fondation Agoravox
A propos / Contact / Mentions légales / Cookies et données personnelles / Charte de modération