Bibracte : une erreur de localisation inexcusable et scandaleuse
En Gaule, depuis longtemps, l'autorité suprême était aux Héduens (César, DBG VI, 12). Bibracte est l'oppidum qui, chez eux, a l'autorité la plus grande (DBG VII, 55). Il est l'oppidum de beaucoup le plus important et extrêmement bien pourvu (sous-entendu en ressources agricoles) (DBG I, 23). L'Héduen Eporedorix, jeune homme né de ce lieu suprême, de la maison suprême... (DBG VII, 39, traduction au plus près du texte). César installe en quartiers d'hiver - pour le ravitaillement - une légion à Chalon, une autre à Mâcon et lui même hiverne à Bibracte (DBG VII, 90) avec sa cavalerie (DBG VIII, 2).
Le déroulement des opérations, les distances indiquées par César, la localisation ou la description des champs de bataille - à Sanvignes contre les Helvètes, à Magetobriga contre les Germains - ne permettent de situer Bibracte qu'à Mont-Saint-Vincent et certainement pas au mont Beuvray (explications détaillées dans le texte qui suit, deuxième partie)
Entre le "Doubios" (la Dheune) et l'Arar (la Saône) habite le peuple des Héduens. Leur appartiennent la citadelle/place forte de Bibracte (φρούριον) et l'agglomération commerciale/cité (πόλιν ἔχον) de Cabyllynum/Chalon, sur la Saône (Strabon, géographie, II, IV, 3, 2).
Le texte de cet auteur grec qui écrivait vers l'an 18 après J.C. ne permet pas de mettre Bibracte au mont Beuvray mais dans l'ancienne ville murée de Mont-Saint-Vincent (explications détaillées dans le texte qui suit, première partie).
I. Strabon et le malentendu des deux "Dubis"
Μεταξὺ μὲν οὖν τοῦ Δούβιος καὶ τοῦ Ἄραρος οἰκεῖ τὸ τῶν Αἰδούων ἔθνος, πόλιν ἔχον Καβυλλῖνον ἐπὶ τῷ Ἄραρι καὶ φρούριον Βίβρακτα.
Entre le Δούβιος/Doubios/la Dheune et l'Ἄραρος/l'Araros/l'Arar/la Saône, se trouve le peuple des Eduens...
Dans la page Bibracte/discussion, après m'avoir traité d'ignare, on me soutient que Strabon parle du Doubs, le même "Dubis" évoqué par César et que, de toutes façons, sur le plan étymologique, le mot Dubis n'a pas pu se transformer en Dheune. Soyons sérieux ! Tous ces soi-disant spécialistes parlent en l'air en se reférant à des traductions souvent peu fiables. En réalité, Strabon utilise le mot "Doubios" et les écrits médiévaux permettent bien de retrouver l'évolution logique du mot : de Doubios en Dubios en Dubos en Dubina en Duina en la Dheune.
Personne ne prétend que les Eduens aient pu se trouver entre la Saône et le Doubs, d'autant plus que c'était le territoire bien attesté des Séquanes. On en a donc déduit que Strabon se trompait ainsi que les auteurs dont il s'inspire, ce qui est absurde. Une erreur de cette importance de la part d'un géographe grec est inconcevable à une époque où les grandes voies de circulation de la Gaule étaient parcourues par les marchands romains depuis déjà un certain temps. Ajouter à cela qu'il faudrait, dans cette hypothèse, admettre que Strabon ait fait la même erreur pour Lyon et les Ségusiaves, c'est du délire.
Ceci étant dit, le texte de Strabon nous dit pratiquement tout sur le carrefour fluvial qu'était alors la région chalonnaise : L'Arar vient aussi des Alpes ; il forme la limite entre les Séquanes, les Aeduens et les [Lingons] , puis reçoit le "Δοῦβιν" (Dubis/le Doubs), autre rivière navigable, descendue également de la chaîne des Alpes ; de là réunis sous le nom d'Arar, qui a prévalu, ces deux cours d'eau vont se mêler au Rhône, dont le nom prévaut à son tour, et qui poursuit son cours sur Vienne... (Strabon, géographie, IV, I, 11, extrait du site de Philippe Remacle http://remacle.org/)
A moins que cela soit dû à la négligence d'un copiste, Strabon utilise indistinctement les mots Δοῦβις, Δούβιος, Δοῦβιν pour désigner soit le Doubs, soit la Dheune.
Les marchandises reçues d'abord par l'Arar passent ensuite dans le "Δοῦβις" (Dubis/Dheune), affluent de l'Arar (la Saône) ; puis on les transporte par terre jusqu'à la Sequanas (la Brenne, l'Armançon, la Seine) dont elles descendent le cours, et ce fleuve... jusqu'à l'océan (Strabon, géographie, IV, I, 14)... sans compter qu'il y a bien 1000 stades de Lugdunum (185 km) jusqu'à cette voie Sequanas (géographie, IV, 3, 3). Tout cela, je l'ai déjà expliqué dans mon étude sur les voies de l'étain en Gaule http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/d-alesia-a-bibracte-les-85643
César confirme les deux "Dubis" de Strabon.
Quant au texte de César, si le mot latin utilisé est bien "Dubis" il est précédé dans les manuscrits par celui de "alduas" ; je dis bien "dans les manuscrits" car dans le texte retenu, on l'a tout simplement supprimé ou mis entre parenthèse car, n'en comprenant pas le sens, on a pensé que c'était une glose rajoutée par un copiste (DBG I, 38). Sachant que "al" est une abréviation attestée pour aliter ou alter et que duas évoque le chiffre deux, deuxième ou les deux, j'en déduis , en toute logique, qu'il s'agit d'une expression équivalente à "alterutrum", l'autre des deux. Il faut donc comprendre qu'en se plaçant à la confluence de Verdun-sur-le Doubs, César voyait à l'ouest, le Dubios de Strabon, alias Dubis (Dubios/Dubos/ Dubina/Duina,la Dheune) et à l'est, l'autre des deux Dubis (le Doubs). (Voir mon croquis en bleu, en haut et à droite).
II. César et le malentendu concernant la bataille des Helvètes.
Parler de malentendu est un euphémisme. Le terme de falsification me semble plus approprié. Car c'est bien une falsification que les partisans du mont Beuvray ont commise en faisant "obliquer" les Helvètes vers Montmort où aurait eu lieu, selon eux, la bataille. Et cela, alors que César dit textuellement qu'ils ont fait demi-tour (intinere converso, DBG I, 23), littéralement : leur cheminement ayant été inversé, ce qui signifie qu'ils sont revenus sur leurs pas.
Comme tout le monde s'accorde pour dire qu'ils venaient de Sanvignes, l'honnêteté intellectuelle voudrait qu'on les ramène à Sanvignes par le même chemin. Une étape aller suivie d'une étape retour. Mais cela signifie qu'il faut localiser Bibracte dans cette direction retour, vu que les Helvètes poursuivaient César qui s'y rendait pour se ravitailler. Et en effet, les preuves abondent pour faire de Mont-Saint-Vincent la Bibracte de César. Le druide Divitiac et le vergobret Liscus étaient à Bibracte/Mt-St-Vincent lorsque César s'entretint avec eux sur l'itinétaire aller (DBG I, 16-20). Les Helvètes s'étaient arrêtés au pied d'un mont (Sanvignes), à 8000 pas du camp de César (Gourdon au pied de de Mt-St-Vincent, DBG I, 21). 8000 pas, soit 11km800, c'est la distance à vue entre la hauteur de Gourdon et le mont de Sanvignes. Autre preuve du retour des Helvètes, la répétition à l'aller et au retour de "proximus collis". Il s'agit du mouvement de terrain où César a déployé ses légions, à l'aller lors de son coup de main manqué, et au retour lors de la bataille. Autres preuves encore, la description du champ de bataille par César qui se reconnaît parfaitement à Sanvignes ainsi que l'explication de son déroulement, la localisation de la bataille de Magetobriga (DBG I, 31) à Magobrigum/Mesvres au pied du mont Beuvray... mont Beuvray/Gorgobina qui ne peut donc être la Bibracte de César. Enfin, les quartiers d'hiver de César à Bibracte/Mt-St-Vincent, en retrait et en liaison directe avec ses légions installées à Mâcon et à Chalon.
III. Mon long combat pour une archéologie de vérité et de qualité (extraits)
Face au refus des maisons d'édition qui se font conseiller par des archéologues en cour : sept livres publiés en auto-édition, à mes frais. 249 articles publiés sur Agoravox dont quelques-uns que j'ai envoyés, pour les informer, au ministère de la Culture, à ses services, à des représentants de la nation et à des médias.
30/10/81. Lors d'une réunion sur le site d'Alise-Sainte-Reine, je prends position pour y situer l'Alésia de César - le Monde me cite dans son édition du 11/11/81 - mais ne sont retenus ni mon explication de la bataille, ni mes mises en garde sur la localisation de Bibracte. Le Monde précise que je suis en train d'écrire un livre sur la défaite (?) des Gaulois.
3/3/94. Malgré le désir du lieutenant-colonel Mourey d’organiser une causerie à Autun, la société éduenne n’entend pas l’inviter.
10/11/95. Ma société d'histoire se désolidarise de ma démarche.
14/4/99, FR3 Bourgogne : ma thèse fait légèrement sourire au mont Beuvray, simple agitation, juge-t-on ici, d'un amateur peu averti (cf. mon interview qui a précédé celle de Vincent Guichard).
Christian Goudineau, professeur au Collège de France, titulaire de la chaire des Antiquités nationales, se déchaîne dans ses ouvrages et articles contre les historiens qui ne sont pas de métier mais quand un journaliste lui demande d"exposer ses arguments, il se défile. Je cite : « Il les écarte (mes arguments) avec le bouclier de la science et l’armure de l’institution, sans se donner la peine de les réfuter. ». Jean-Philippe Mestre, Le Progrès de Lyon du 18/04/1999.
2002. On me fait passer pour un farfelu. Du désir à la réalité, il y a un fossé. Ou plutôt... des fossés, relevés par les archéologues. Aux savantes interprétations, ces derniers opposent mille faits objectifs : plans, armes... (extrait du catalogue de l’exposition de Bibracte "sur les traces de César" sous l'autorité de Vincent Guichard, actuel directeur du Centre archéologique européen du mont Beuvray). Ma polémique tient du combat d'arrière-garde.
A Wikipédia, je me fais incendier par son représentant Luscianusbeneditus. Personne dans la communauté scientifique ne me répond car personne n'a à perdre de temps avec mes absurdités... Ma lecture de Strabon est totalement arbitraire... E. Mourey et ses élucubrations... mes lubies (page Bibracte discussion http://fr.wikipedia.org/wiki/Discussion:Bibracte).
11/6/2013. Au député Christophe Siruge qui l'interroge sur le bien-fondé de la localisation de l'oppidum de Bibracte au mont Beuvray, Aurélie Filippetti, ministre de la Culture, répond, en langue de bois, que les questionnements relatifs à la stricte identification de Bibracte au site du Mont Beuvray s'avèrent d'un intérêt accessoire.
Au mont Beuvray, le site internet de Vincent Guichard proclame toujours sans état d'âme qu'il est la capitale éduenne.
On ment au peuple en toute connaissance de cause.
E.Mourey, 9 juillet 2013
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