Comment la France exploite sa précarité ?
Bonjour. Cet article est une vision de la précarité par son usager. Si les médias parlent souvent de la violence perpétrée par les personnes, j’espère que pour une fois, au travers de cet article et de la dimension citoyenne d’agoravox, le citoyen peut regarder un peu le cynisme et la violence perpétrée par « le système » contre les personnes précaires.
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Au travers de cet article de regard témoin, je suis concerné, parfois en deux mots, et ne peut le proposer à votre attention sans changer l’angle critique et affectif habituel du traitement journalistique de la précarité. Il y a les idéologies, les principes, les solidarités actives, les opinions, et les faits quand on y et, du mauvais côté. Je vous propose de regarder comment fonctionne une partie de la réalité Française vue d’en-dessous et d’un peu plus près.
On pense souvent quand on est précaire, que l’on n’a et n’est plus rien d’intéressant ni d’utile. Mais pour le système, le précaire, son corps et sa santé sont utilisés comme révélateur épidémiologique par les services sanitaires. Le précaire est plus proche des risques de contagion, de malnutrition, et autres causes de risques de troubles à la santé public, surtout quand on vit dans la rue.
Avec le traitement informatique de la CMU, la santé du précaire indique rapidement la hausse d’apparitions virales, par exemple. Processus qui permet ensuite de plus rapidement circonscrire le risque de contagion, et induire la logistique de santé public, comme commander les médicaments et vaccins adéquates le cas échéant, le tout pour le bénéfice sanitaire des non précaires logiquement infectés plus tard.
Dans le cadre d’un centre de médecine préventive, la précaire a droit à une visite par an, sa prise de sang est stockée dans une cohorte distincte de l’hémathèque et il remplit des questionnaires supplémentaires et autres mesures afin de permettre des recherches spécifiques à la précarité, et il va de soi que la plupart des cobayes volontaires pour la science et qu’une bonne partie des donneurs de sang réguliers sont des précaires.
Du point de vue médical et de la santé public, la précarité est utilisée comme une poche de sang d’urgence, un réservoir a cobaye disponible au besoin, et en rempart organique permanent face aux risques de contagions, le tout permettant ainsi d’améliorer sa qualité et sa rapidité de traitement des risques au bénéfice des tous les citoyens.
Quand on est précaire, les 400 euro de RMI devenu RSA, on s’aperçoit bien vite en sortant de la logique culpabilisante imposée, que finalement la citoyenneté le paye pour lui éviter un plus grand recours à la violence, et autres méthodes pour survivre. Il ne s’agit pas de solidarité, mais d’un moyen par le politique de s’acheter de la sécurité.
On constate alors qu’en conséquence de la hausse de la violence en filigrane continue, on est passé du RMI qui était une prison de précarité aux issues fermées par le grand cœur de gauche, au RSA, pour donner l’impression au citoyen que l’on va mieux pouvoir punir les « hors système » maintenant que l’issue de travailleur pauvre est « possible ».
Mais du point de vue économique des fluides et de la gestion de la France, où va l’argent distribué au nom de la politique sociale ? Sur les 400 euros, pour le précaire sous un toit, vous enlevez un loyer HLM, EDF, GDF, orange le seul opérateur à fournir une « réduction » de pacotille, et vous constatez que sur les 400 euro, plus d’un tiers est déjà reparti vers les caisses indirectes de l’état. Sur le restant, vous enlevez le cout d’une banque ( notamment la poste pour quasi tous les précaires en zone rurale), et la TVA que vous payez sur tous vos achats, achats effectués ou en grande surface ( souvent de grande marque Française) ou dans le petit commerce de proximité ( buraliste, boulangerie, bars, etc...)
Et là on constate que les 400 euro sont dans leur quasi intégralité des subventions indirectes de l’état à lui-même, et une aide accordée aux entreprises et petit commerce Français via des clients captifs.
Ce n’est pas le précaire qui va acheter sur internet. Ainsi, le cout de précarité en France n’est rien de moins qu’une façon efficace pour l’état de réinjecter de la consommation au bénéfice de lui-même et des entreprises Françaises.
Plus efficace parce que contrairement à d’autre politique de relance par la consommation, le précaire ne peut quasiment pas consommer de produits d’importations à forte valeur ajoutée. On achète des nouilles chinoises dont 90% du prix de vente reste en France, pas un modèle high tech dernier design japonais...
Le dispositif RSA, tel qu’imposa la politique, oublie d’expliquer aux citoyens non concernés qu’à ce stade de revenu, 400 euros, travailler coûte plus qu’il ne rapporte. Les frais de transports, de bouches, d’habillements, entre autres nécessaires pour faire les quelques heures de travail par semaine, absorbent la quasi intégralité du gain issu du travail. Sans rentrer dans le détail, vous gagnez le droit de payer une assurance et de l’essence, et de consommer un peu plus dans ce qui est déjà vos habitudes de consommation en tant que client captif.
Ainsi, le dispositif RSA permet de faire gagner de l’argent aux groupe pétroliers, les seules qui n’avaient pas encore accès à la subvention de l’État indirecte qu’est sa politique d’aide sociale.
Pour le précaire, la formation crée l’espoir d’un emploi pour lui, mais beaucoup plus certainement le boulot des formateurs. Et il applique une semblable logique à l’ensemble des intervenants qu’il est dans l’obligation de rencontrer parce que précaire.
La notion d’obligation est importante parce qu’elle est à elle seule la raison de la peur. Le fait de passer en commission, pour le moindre dossier, rappelle tellement le conseil de discipline, et autre moment infantilisant où un groupe décide de votre avenir sans que vous ayez votre mot à dire, qu’angoisse, frustration et parfois leur copine colère deviennent fidèles compagnes des états d’âme.
En tant que précaire, je vis ce joli paradoxe, je n’ai pas de travail, mais qu’est-ce que j’en donne aux autres, sinon... Je dois aussi déclarer que je suis toujours pauvre tous les 2 mois, comme si le vivre ne suffit pas, et pour rassurer le brave gens, et il n’y a évidemment aucune autre solutions moderne pour vérifier qu’un précaire l’est et le reste sans avoir à lui demander de le confirmer par courrier, démarche hautement fiable...
Autre paradoxe amusant quand on s’interroge sur l’estimation de 30 à 40 milliards d’euros due à l’évasion fiscale et la fraude sociale Française, donner par la cour des comptes en un seul et même chiffre pour justifier de la politique de contrôle des précaires. On admire l’évidence qu’entre la Fraude fiscale qui est une perte sèche pour l’état, et le % d’argent fraudé socialement, qui lui finit dans la consommation française, c’est la même chose...
Quand le précaire fait la somme des heures de file d’attente, de rendez vous, de fois où il explique sa situation et signe des papiers pour des structures qui ne peuvent rien faire d’autre que tenter de justifier leurs salaires et fonctions en appliquant des protocoles à l’efficacité restant souvent à prouver, il en résulte un constat d’efforts vains et vides expliquant à eux seuls pourquoi autant de précaire « rechignent » à « faire les papiers et les démarches ».
Ce n’est pas qu’un syndrome de résignation acquise ou de la fainéantise comme aime à le croire les gens qui ne supportent pas que d’autres ne « foutent rien » pendant qu’ils triment, c’est aussi le constat empirique que cela fait perdre du temps, coute, et ne sert à rien. Il faut se rendre compte que l’on est plus proche de la maison qui rend fou dans Asterix qu’en confiance dans l’efficacité saine et sereine de la démarche, et malheur à qui cherche une potion magique pour tenir le coup.
A titre personnel, et sans que cela soit une généralité, ma dernière et lointaine tentative de démarche de formation, je suis allé 4 fois à l’AFPA, 4 fois à traverser ma ville à pied, de bon matin, faute d’argent pour prendre un bus, pour que finalement on me signale un refus parce que la formation pour laquelle je postulais était déjà commencée... En attendant sur leurs bilans comptables, ils touchent des subventions à hauteur du nombre de demandeurs de formations qui ont rempli la démarche écrite, et non au nombre de formation effective ; quand j’en suis sorti, eux ont gagné de l’argent, moi j’ai perdu du temps.
Je n’y suis jamais retourné. Ce type de déconvenue arrive à d’autres aujourd’hui, comme dans mon dernier article, ce qui m’a prouvé que la situation de la formation en France est encore dans sa logique de l’inefficace. Monsieur X fait pour l’instant le bonheur d’un vendeur de psychotropes qu’il a rencontré mû par la peur de péter les plombs et de trouver une formation, certes, mais en prison.
Et enfin, même si il faut saluer l’ensemble des solidarités sincères, des moments d’humanité et d’entraide que l’on rencontre dans la précarité, tout comme la conscience professionnelle et le sincérité de ceux qui font tenir l’aide sociale à bout de bras et parfois de foi.
Je ne peux conclure cet article sans rentrer dans « l’impudeur » de parler du nombre d’abus d’autorité et de faiblesse, parfois sexuels, perpétrés sur les précaires. Il faut savoir ce que c’est d’être à la rue confronté à nombres de propositions pour « aider » à s’en sortir à son exclusif détriment et qui ne se résument qu’à de l’exploitation brute loin de tout recours à une notion de justice pour défendre des droits dont certains ignorent même jusqu’à l’existence.
L’éthique du contrat n’existe pas loin de l’esprit des lettres et des lois, surtout lorsque ces derniers, vus du trottoir, semblent si constamment accusatoires.
Personnellement, j’ai croisé un éducateur spécialisé à la double casquette de dealer recrutant ses revendeurs dans son foyer pour adolescent, aujourd’hui en prison heureusement, et cette charmante dame d’une cinquantaine esseulée qui m’a proposée à 21 ans, dans son bureaux d’aide social de participer à autre chose qu’à la réunion d’aide au jeune, une sorte de demande d’aide de service à domicile qui a glissé sur place vers la demande de démonstration de douce gentillesse virile pour au final me faire prendre poliment fuite, et voir mon dossier classer sans suite.
Et qui connait la précarité jeune et en bande est rapidement conscient des offres qui sont faites sur le marché de la seconde chance de démarrer sa vie Française, rapidement informé et recruté avec l’efficacité toute financièrement motivée de ceux qui rôdent autour des foyers sociaux.
Désir d’avenir, envie de possible et d’un peu de fric tout de suite ? Alors entrer dans la prostitution, le film X, le plan du mariage blanc, le deal, et quantité d’autres aspects de la réalité Française que la société du loisir médiatique ne veut pas voir autrement que sublimée sur écran, deviennent mirages d’opportunités de carrière dans des regards d’adolescents...
amicalement, barbouse. KECK Mickaël.
PS : Pour diverses raisons, je ne peux plus garder mon illusion d’anonymat derrière mon pseudo, Malgré bien des envies et des raisons de disparaître, moi aussi j’ai peur de perdre le peu que j’ai, j’ai décidé de signer de mon nom et de continuer. Je suis effectivement l’auteur de l’essai « le miroir des hommes brisés », celui qui circule dans l’underground du net des amateurs de textes interdits et de lectures secrètes depuis bientôt 6 ans, et j’assume autant le travail d’enquête fourni pour l’écrire, que ma plume.
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