L’école publique est attaquée
Il y a urgence : dès cette rentrée 2006, une nouvelle loi vient d’entrer en vigueur. En effet, en application de la loi du 13 août 2004, les communes devront obligatoirement participer financièrement à la scolarisation des élèves domiciliés dans la commune et qui fréquentent une école privée située dans une ville voisine.
Hold-up de l’enseignement privé sur l’argent des contribuables
Cette disposition vise donc à prendre obligatoirement l’argent des contribuables d’une commune pour le donner à une école privée, au détriment évident des élèves normalement scolarisés dans les écoles publiques de la commune. Attaque directe contre la laïcité, cette mesure vise à détourner les budgets communaux des écoles publiques pour financer des écoles privées. Rappelons que l’école publique ne bénéficie d’aucun autre financement que les budgets publics. En revanche, l’enseignement privé dispose non seulement de subventions publiques, mais aussi de toute une gamme de financements privés.
Rappelons aussi que l’école publique accueille tous les enfants, sans distinction de fortune, et qu’elle obtient des résultats scolaires équivalents ou supérieurs à ceux de l’enseignement privé, qui sélectionne pourtant ses élèves par l’argent.
Cette nouvelle disposition est aujourd’hui combattue par de nombreux élus et maires de France, de droite comme de gauche, qui refusent d’être contraints de financer des écoles privées, souvent religieuses, alors que l’école de tous, l’école de la réussite et de la République, manque cruellement de moyens.
Un amendement d’origine socialiste voté à l’unanimité du Sénat
Michel Charasse, sénateur socialiste réputé laïque, a ouvert un boulevard aux tenants de l’école privée en proposant un amendement lors du vote de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et aux responsabilités locales.
Le texte de l’amendement est des plus simples :
"Les trois premiers alinéas de l’article L. 212-8 du code de l’éducation sont applicables pour le calcul des contributions des communes aux dépenses obligatoires concernant les classes des écoles privées sous contrat d’association."
Il convient donc de se reporter à l’article L212-8 du code de l’éducation, et c’est là que ça se gâte. Cet article prévoit les conditions de financement par une commune à la scolarité d’enfants dans une autre commune. Cette disposition part d’un principe simple : si la commune n’a pas d’école (petite commune rurale) ou si sa capacité d’accueil est dépassée, les enfants peuvent aller à l’école de la ville voisine. La commune du domicile finance alors cette scolarisation. Entre écoles publiques, cette disposition est légitime.
La loi prévoit en outre que, si des parents souhaitent une dérogation pour inscrire leur enfant dans une autre école publique que celle de leur domicile (dérogation à la carte scolaire), l’autorisation du maire est obligatoire, ce qui lui permet de maîtriser à la fois sa carte scolaire et son budget. C’est la réalité que vivent beaucoup de familles.
Sauf que. Contrairement à une inscription dans une école publique d’une autre commune, l’inscription dans une école privée échappe à la carte scolaire et ne requiert aucune autorisation du maire de la commune de domicile... Ainsi donc, le choix des parents de scolariser leurs enfants dans une école privée d’une commune voisine entraînera obligatoirement le financement de ce choix par la commune du domicile ! Et voilà comment deux lignes d’un amendement peu réfléchi cassent l’école publique !
Destruction programmée de l’école publique
Alors que l’on parle beaucoup de remettre en cause la carte scolaire, sans dire vraiment ce que l’on veut mettre à la place, la destruction des principes de l’école publique est déjà en marche. Par des mesures techniques, que le citoyen ne peut pas voir arriver facilement, les adversaires de la laïcité attaquent les moyens financiers de l’enseignement public : les budgets de l’Education nationale régressent, les effectifs de personnels enseignants et éducateurs diminuent. Les communes soucieuses de préserver la qualité de l’enseignement primaire sont contraintes de suppléer comme elles le peuvent les carences de l’état. Et c’est dans ces circonstances, où chacun sait que l’enjeu majeur de notre avenir réside dans une école de qualité, que l’on choisit de prendre à l’école publique pour donner au privé !
Les citoyens avec leurs maires pour sauver leur école
Le Collectif pour la défense de l’école publique est composé de citoyens, parents d’élèves mais aussi enseignants, élus, responsables d’associations, des républicains de droite comme de gauche profondément confiants dans l’excellence de l’enseignement public. N’oublions jamais que c’est l’enseignement public, et lui seul, qui a permis et permet encore à tous les enfants de France d’apprendre à lire, à écrire, à compter. C’est l’enseignement public, et lui seul, qui a permis et permet aujourd’hui à tous les enfants de France d’avoir, sur les bancs de l’école, une égalité parfaite des chances de réussite.
C’est pourquoi le Collectif pour la défense de l’école publique, en dehors de toute considération partisane, a choisi de soutenir l’Appel des maires pour le retrait de la circulaire du ministre de l’Education nationale n°2005-206 du 2 décembre 2005.
Car ce sont les maires des petites et grandes communes qui se trouvent face à ce hold-up, ce sont eux qui peuvent y faire obstacle, ce sont eux qui sont garants de la laïcité quotidienne dans nos villes, soutenus par des citoyens vigilants.
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