L’intégration : un vœu pieux ?
Les 500,000 Tunisiens de France ont voté massivement pour le parti islamiste Ennahda, qui récolte ainsi 4 des 10 sièges leur attribués à l’Assemblée constituante. Ce résultat en dit long sur le succès de l’intégration que nos élus vantent à longueur d’année et sur le réel attrait que nos valeurs républicaines et humanistes exercent sur les musulmans domiciliés en France. Bien sûr, de nombreux musulmans sont parfaitement intégrés, mais quel pourcentage représentent-ils ? On établit peu de chiffres sur la population d’origine extra-européenne en France, par crainte de « racisme », ce mot terrifiant, passe-partout, l’arme-blanche des associations « antiracistes ».
Comment expliquer l’approbation générale de la charia dans le monde musulman ? Dans la plupart des pays les enfants commencent à apprendre le Coran dès leur petite enfance, et à 10 ans ils savent réciter par cœur beaucoup de sourates. Bien entendu, ils ne comprennent pas ce qu’ils récitent. C’est une litanie, mais qui reste, en quelque sorte indélébile. Adultes, ils sont imprégnés des préceptes islamiques et, à l’inverse de la plupart des chrétiens aujourd‘hui, ils sont croyants et pratiquants et prient plusieurs fois tous les jours. Comment voulez-vous qu’ils puissent prendre assez de recul pour examiner les dogmes islamiques avec un esprit rationnel et critique ? La société musulmane est donc profondément religieuse et très pudique ou, pour éviter ce mot devenu péjoratif, disons discrète, polie. Alors, comment voulez-vous que les musulmans ne soient pas heurtés par le spectacle de nos mœurs relâchées, et scandalisés par l’impudique vulgarité de mainte jeune fille dans la rue, exhibant ses atouts (ou »charmes » selon la traduction du livre saint) comme une prostituée ? On voit même des élèves arrivant au lycée attifées comme des cocottes. Comment voulez-vous qu’ils ne soient pas horrifiés devant la dégradante scène publique de cet occident si fier de sa modernité, si satisfait de sa prouesse technique et technologique ? Comment s’étonner que, choqués par cet indécence, ils se replient sur eux-mêmes, reculent et se retirent, pour chercher la compagnie de leurs semblables dans les communautés musulmanes ? Par peur et par écœurement, ils cherchent à se protéger de la pollution morale de nos cités. Leur éducation les dirige vers la spiritualité, et vers un comportement moral, modeste et respectueux. Est-ce une faute ?
Si l’enseignement de Mohammed laisse beaucoup de liberté aux hommes, la vie de la femme, plus réglementée, est si différente de celle de la femme occidentale, qu’elles semblent se contredire et s’opposer. Les valeurs s’opposent. L’adaptation (pour ne pas parler d’intégration) de la musulmane est difficile. Si l’Europe veut accueillir des musulmans toujours plus nombreux, comment résoudre le problème d’intégration ? Tolérance ? Mais ce serait à sens unique, puisqu’on ne peut demander aux musulmans de tolérer ce qu’ils voient comme immodestie, vulgarité, manque de spiritualité et athéisme. Peut-on attendre de gens persuadés que la loi islamique est la meilleure voie à suivre, qu’ils s’intègrent à notre European way of life, frivole et licencieuse ? Loin de vouloir s’intégrer, on voit de jeunes filles, nées ici, opter pour le port du voile, qui, c’est généralement reconnu, n’a pas grande chose à faire avec islam, et qui symbolise non seulement une Foi, mais aussi une volonté de différence fondamentale, spirituelle et sociale, un rejet, justement, de cette décadence occidentale qui éclate aux yeux des musulmans pieux. Ces jeunes filles, ont-elles tort ? L’intégration, serait-elle de notre part un vœu pieux, un quadrature du cercle, ou pourrait-on envisager un islam adapté à l’Europe ?
Certains penseurs musulmans rêvent d’un islam réformé, débarrassé de ses sourates archaïques, qui, compréhensibles et justes dans le contexte de la société en Arabie au VII° siècle, sont devenues caduques, vidées de leurs sens par l’évolution technique et sociale d‘aujourd‘hui. Mais, pour la majorité de musulmans dans le monde, un islam ainsi réformé serait un islam occidentalisé, totalement inacceptable, même hérétique à leurs yeux. Déjà parler de sourates archaïques est un blasphème. Ne sont-elles pas la parole de Dieu, transmise à Mohammed par Gabriel ? Les sourates sont intemporelles, éternellement et universellement valables. Les réformateurs musulmans sont des hérétiques qui risquent de payer cher leur blasphèmes.
Le terme « islamiste » est employé par les médias pour dédouaner l’islam de ses excès voire de ses crimes, attribués ainsi à un « islamisme » compris comme un islam exacerbé. On distingue ainsi entre un islam extrémiste et l’islam « modéré ». La bien-pensance nous impose si ardemment de dire la modération de l’islam, que la clairvoyance nous échappe. Nous ne sommes pas assez lucides, assez courageux pour assumer le fait que nos valeurs sont incompatibles avec les valeurs islamiques. Il existe 4 déclarations islamiques des Droits de l’Homme, proclamées en opposition aux nôtres à des époques différentes et par des pays divers, mais se réclamant toutes du Coran et de la charia. Ce qui est bien normal. Parmi ces droits universels figure (pour n’en citer qu’un) la supériorité de l’homme par rapport à la femme, confirmée déjà par la sourate IV,34, et ensuite par plusieurs autres sourates. La naïveté de nos dirigeants, vantant sans cesse l’islam modéré, ne cache qu’un souci électoraliste. Les concessions qu’ils font à l’islam s’accumulent et pénètrent même dans l’école, justifiées par le fait qu’il s’agit de « la deuxième religion de la France », formule qui masque le pourcentage réel de ses pratiquants dans la population. Tous les accommodements et dérogations vont à l’encontre de l’intégration. Dans « l’islam des interdits » Anne-Marie Delcambre écrit : « On ne pourra pas éternellement faire comme si le Coran ne comportait que des versets de paix et de tolérance et comme si le Prophète n’avait jamais appelé à la vengeance, jamais versé le sang. Au risque de choquer, il faut avoir le courage de dire que l’intégrisme n’est pas la maladie de l’islam. Il est l’intégralité de l’islam. Il en est la lecture intégrale, globale et totale de ses textes fondateurs. L’islam des islamistes, c’est tout simplement l’islam juridique qui colle à la norme ».
Dans une France largement déchristianisée, la natalité avantageuse des musulmans, ainsi que leur énergique persistance à négocier en permanence des concessions, encouragés aussi par l’alacrité du gouvernement à faire des gestes en ce sens même sans être demandés, par exemple la suppression de symboles chrétiens dans les décorations publiques de Noël, l’éventualité d’une prédominance de l’islam n’est pas exclue. Ceux à qui une telle évolution déplairait auraient intérêt à prendre leur courage à deux mains et défier la menace d’islamophobie pour exprimer leur inquiétude. Même les non-croyants pourraient, par exemple, soutenir le christianisme en tant que héritage culturel. Mais c’est surtout nos élus qui pourraient montrer plus de fermeté. A la formule ironique de M. Erdogan, « L‘Europe, est-elle un club chrétien ? », ils auraient du répondre « Oui, vous avez raison, M. Erdogan, elle est bien un club chrétien, Dieu merci ! En outre, si la duplicité de certains gouvernements vous a trompé quant à la volonté des Européens à accueillir votre pays dans notre club, vous auriez raison de les traiter de menteurs ! Songez donc, M. Erdogan, la Turquie serait le plus grand pays d’Europe, avec 80 millions de musulmans. Vous ne voulez quand même pas en faire un club musulman ? ».
Dans la situation où se trouve l’Europe aujourd’hui, avec une population musulmane rapidement grandissante, dont une grande partie adhère fidèlement aux préceptes fondamentaux de l’islam, notamment en ce qui concerne la laïcité, le statut de la femme, les règles alimentaires et vestimentaires, les principes de modestie et décence, ainsi que l’observation des rites (les 5 piliers), comment résoudre le problème d’intégration ?
Au contraire de la France, où le débat sur l’immigration était (mal) lancé par Sarkozy avec la question sur l’identité nationale, en Allemagne le débat n’était pas l’œuvre du gouvernement mais provoqué par la sortie du livre de Thilo Sarrazin (SPD) « L’Allemagne court à sa perte ». Le débat orageux en Allemagne a montré à quel point des questions et des inquiétudes remuent la population. A présent les gouvernements Français et allemand ont pris conscience des difficultés et de l’exclusion des populations immigrées et des erreurs commises lors des décennies précédentes en politique d’intégration. Ainsi Sarkozy à Grenoble en juillet 2010 : « Nous sommes si fiers de notre système d’intégration. Peut-être qu’il faut se réveiller. Il a marché. Il ne marche plus ». De même en Allemagne l’illusion d’une nation multiculturelle qui a « complètement échouée« , selon le mot d‘Angela Merkel en octobre 2010.
Le débat en Allemagne s’échauffe sur l’attitude que la société doit adopter face à ceux qui sont rétifs à un processus d’intégration. On envisage des sanctions contre les immigrés qui ne participent pas aux cours d’intégration et qui expriment ainsi leur manque de volonté dans la société d’accueil. La discussion sur la question : l’Allemagne est-elle un pays d’immigration ? a laissé la place à celle sur la régulation de cette immigration. Les différences culturelles et religieuses entre la société d’accueil et la société d’origine sont présentées comme la source des problèmes, ce qui a mené à l’idée d’un principe d’immigration « choisie » ou « sélective ». Au début le gouvernement allemand avait la sagesse de prévoir les problèmes éventuels que l’arrivé de l’islam pourrait provoquer, et pour cette raison les immigrés avait le statut de « Gastarbeiter », littéralement « visiteurs-travailleurs ». Un séjour permanent, et encore moins une naturalisation n’étaient pas envisagés. C’était du bon sens, mais comme beaucoup de bonnes intentions, elles n’étaient pas respectées : les Turcs sont restés, et les prévisions inquiétantes du début se sont réalisés. « The road to hell is paved with good intentions », G.B.Shaw.
Pour réussir l’intégration des musulmans en Europe, trois facteurs sont primordiaux : l’égalité des chances en éducation ; l’égalité des chances sur le marché du travail ; et l’abolition de la ségrégation dans les communautés ethniques et à l’école. Il faut miser sur l’école pour intégrer les jeunes enfants, parce que c’est l’éducation qui est la pierre angulaire d’une intégration réussie. Jusqu’ici, le passage à l’enseignement supérieur et l’accès au monde du travail sont les barrières principales à l’intégration. Une politique de mixité sociale pour éviter la ségrégation dans les zones urbaines sensibles serait un premier pas vers ces buts. Les plus gros problèmes se concentrent dans ces zones, qui sont le résultat d‘un manque flagrant d‘infrastructures et un manque de considération par nos gouvernements depuis des dizaines d‘années. Mais une politique de mixité sociale nécessite une interconnexion des politiques d’intégration et des politiques de développement urbain, afin de mettre un terme aux mécanismes d’exclusion que constituent les banlieue en France et les quartiers à problème.
L’islam ne s’adaptera pas à l’Europe. Le credo islamique l’exclut d’emblée : le Coran est incréé ! Il n’y a pas de réponse à cette assertion. Le rationalisme reste bouche bée. Le Coran n’est pas un simple reportage comme la Bible. Le Coran est la parole directe de Dieu, transmise à Mohammed par Gabriel. Impossible d’y modifier quoi qu’il soit. Les experts discutent à longueur de l’année sur le sens exact des mots, mais l’islam ne changera pas. Le seul espoir est une évolution de la mentalité des musulmans. A l’école publique les enfants musulmans relativiseront peu à peu les préceptes qui nous heurtent. L’islam ne changera pas, mais sa pratique en Europe pourrait arriver à se concentrer sur l’essentiel en se débarrassant de ces préceptes. Toujours faudrait-il que l’école cesse de se plier aux revendications musulmanes, cesse d’accorder des dérogations et accommodements qui vont à l’encontre de l’intégration.
Vaste programme ! Ou plutôt un vœu pieux ?
Réf. :
Anne-Marie Delcambre : L’islam
L’islam des interdits
Régis Debray : Ce que nous voile le voile
Hamadi Redissi : L’exception islamique
Mathias Rohe : Der Islam
Bernard Lewis : What went wrong ?
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