Lettre de mission : détruire l’Etat !
Tout devient transparent. La mission du jeune élu est de détruire l’Etat et de préparer la venue d’un temps nouveau. Les étapes sont efficaces : déconsidérer une partie du peuple, briser les systèmes de protection, terroriser mentalement, affaiblir l’économie et fragiliser les institutions.
La mission
Jeune énarque*, votre mission à la tête de l’Etat, est de le détruire. La tâche peut vous paraître insurmontable mais c’est faux. Le travail de sape a commencé depuis de nombreuses décennies. Les multiples réformes de l’enseignement ont doté le pays de nouvelles générations ignorantes de leur passé et le plus souvent incapables de développer un raisonnement original, faute de pensée critique et de libre arbitre. Si vous rencontrez des doutes dans l’exercice de votre mission, vous pourrez vous rapprocher de vos homologues, choisis eux aussi pour mener dans leur pays le même travail de destruction. Par ailleurs, vous pourrez compter sur nos équipes techniques et nos conseillers recrutés au sein des diverses institutions internationales. Ils pourront vous prodiguer des conseils avisés pour affaiblir et détruire ce qui pourrait vous résister. Alors, ce job, vous l’acceptez ?
Le jeune énarque n’a pas hésité longtemps pour dire oui. Les prémices de l’aventure étaient trop belles et stimulantes : des meetings ultra sonorisés et sponsorisés, des shows télévisuels flamboyants et une incessante succession de reportages dans les principaux médias sur sa personne, ses amours, ses lectures, son intelligence, ses affinités intellectuelles et sa gloire naissante. Le kiff, pour un narcisse numérique !
Le jeune homme bien chaperonné n’a pas déçu. Avec lui, pas besoin de trop s’user les doigts à tirer les ficelles. Il accomplissait avec zèle, pertinence et succès le travail de déconstruction de la société et de ses institutions. Il ne réfléchissait pas beaucoup mais il s’amusait terriblement à briser la vaisselle, à voir se déliter une société qu’il percevait comme un reliquat moribond du passé.
Les étapes stratégiques
L’étape de la stigmatisation d’une partie du peuple fut assez excitante. Cela a commencé par le mépris caché sous une pellicule d’intellectualisme : il y a ceux qui ont réussi, peu nombreux, et ceux qui ne sont rien, la multitude. Il y a ces assistés incapables de traverser la rue pour prendre le premier emploi qui se présente. Il y a tout ce pognon de dingue gaspillé auprès de ces perfusés aux aides sociales… Le dire et le redire avec l’impunité que lui offre sa fonction et se délecter de voir les visages se défaire sous le coup des mots et de l’impuissance à réagir le galvanisaient.
L’étape de la casse des grands acquis a eu ses charmes retentissants. La réforme des retraites, véritable machine à paupériser par la magie de la valeur d’un point modifiable à souhait, aura été assez fun. Manifestations, roulements de mécanique des syndicats puis un beau 49.3, comme un uppercut, en plein front. Le peuple sonné. Tout à fait sonné ? Non, il y a eu cette « giletjaunisation » des gueux si délicieusement décrite par certains journalistes à la botte des maîtres. Les bougres, ils ont bien défilé mais ils se sont bien fait rosser. Certains y ont perdu un œil ; d’autres ont été passés à tabac mais on a caché tout ça par l’action de grâce de casseurs qui, tout à fait spontanément, sont venus occupés la presse et les écrans par leurs destructions et leur violence. Efficace, très efficace la dévalorisation d’un mouvement de contestation sociale. Il est vrai, avec une presse globalement amorphe, car pur produit des dernières générations sans culture et sans libre arbitre, tout devient facile, trop facile même.
Le jeune énarque s’est particulièrement amusé avec la crise du nouveau coronavirus : apothéose de l’inversion accusatoire, de la vérité fabriquée et du mensonge érigé en outil de gouvernance. Là, ce fut presque jouissif. D’abord, surtout ne rien faire. Laisser le virus entrer sur le territoire et attendre. De toute façon, le virus ne connait pas les frontières… Des tests ? Des masques ? Surtout pas. Laissons le mal se répandre puis confinons toute la population pendant deux bons mois. On rend inopérant, inaccessible et inutile un service d’urgence en disant d’appeler le 15 à celles et ceux qui se sentiraient mal à leur domicile, après avoir avalé des dolipranes pendant plusieurs jours, histoire de laisser monter la charge virale. Effet saturation garanti ! Les suspicions de Covid-19, les AVC ou les crises cardiaques ont été mis sur la voie de garage ; le 15 est injoignable ! Les pompiers ne sont pas sollicités ; les médecins de ville sont terrorisés par des menaces de poursuite s’ils tentent de soigner leurs malades ; les cliniques privées sont ignorées. Il ne reste que les pompes funèbres !
Quelle extase de dézinguer un possible traitement au motif que son évaluation n’a pas suivi une méthodologie récitée par cœur notamment par des armées de jeunes diplômés incapables de s’adapter à la réalité du terrain et pour lesquels, l’observation et l’empirisme sont ringards et sans résonances dans leur compréhension du monde. La méthodologie, rien que la méthodologie, toute la méthodologie véritable fin en soi. Ce fut très suave d’interdire l’hydroxychloroquine sur la base d’une étude bidon dénoncée par trois de ses quatre auteurs. Le plus suave fut de n’avoir pas levé cette interdiction après le dévoilement de l’imposture de cette étude. La jouissance fut approchée quand on se mit à faire semblant de ne pas voir les études qui annonçaient que la molécule interdite était efficace. La jouissance fut enfin atteinte quand on autorisa le Remdesivir, au prix prohibitif, pour un usage autre que son autorisation de mise sur le marché sur la base d’études qui mettent en exergue son inefficacité en termes de diminution de la mortalité. Quelle joie de promouvoir un médicament en ne se fondant pas sur des résultats d’essais conduits selon les méthodologies sacrées du randomisé etc… Contradiction ? Pas du tout. On assume l’incohérence. Pour tout dire, on se moque bien de ce que peuvent dire celles et ceux qui se montrent lucides et qui sont encore capables de raisonner. Ils contestent les actions conduites mais ce n’est pas gênant. Il suffit de déverser des sondages pour montrer que la majorité du peuple approuve l’action du Gouvernement et trouve que la crise a bien été gérée. Mentir, mentir, il en restera bien quelque chose disait ce grand menteur de Voltaire. Dans cette affaire de pandémie, le jeune énarque s’est cru dans un rêve éveillé. Comme c’était bon de dire que l’on avait tout bien fait, tout bien géré, tout bien anticipé alors que la réalité est exactement l’inverse. C’est jubilatoire de raconter des balivernes en voyant qu’elles refaçonnent la réalité dans les médias, sans être contredit. C’est vrai et c’est ainsi parce que moi, je vous le dis.
La nouvelle étape est de briser ceux qui veillent à l’application des lois de la République. Le cas des policiers a été vite réglé. Les faire passer pour des gens violents, haineux, stupides et racistes est si facile. Le coup ultime est de leur montrer leur ministre mettre genou à terre en repentance des comportements criminels prêtés à ses subordonnés. Belle humiliation publique. Maintenant, il faut briser la justice. Laisser se répandre le poison du doute, du dégoût et de l’incompréhension. Il faut laisser sans voix ces magistrats qui n’ont pas encore compris que dans le nouvel ordre mondial, ils n’ont pas leur place. La bonne idée est de reprendre la méthode utilisée pour les policiers : les lâcher par le haut ! Facile : on nomme Garde des sceaux un homme qui n’a eu de cesse que de vilipender les magistrats au point de leur vouer presque une haine naturelle. Ahhh, on va bien rire en les voyant se contorsionner, s’émouvoir, et être humiliés. Si avec ça, on ne dégoûte pas une bonne partie de ces serviteurs de l’Etat, c’est à désespérer.
Il y a bien quelques espiègleries qui trainent dans les méandres du cerveau reptilien du jeune énarque. Il va falloir recaser l’ancienne porte parole du Gouvernement et l’ancien ministre de l’intérieur. Ce serait trop rigolo de nommer la première, conseiller d’Etat en service extraordinaire ou inspectrice dans un corps prestigieux, et le second… à la Cour des Comptes ou au Conseil constitutionnel…
Détruire pour reconstruire
Casser, casser l’Etat. Détruire la nation, les nations. Effrayer les populations en évoquant une pandémie mondiale à plusieurs vagues. Briser économiquement des individus en les confinant. Effacer les cultures pour les remplacer par une culture mondialisée, fondée sur la consommation intensive, l’effacement des mémoires et la déification de l’argent, des profits. Vive la marchandisation généralisée et la mise en esclavage de tous les hommes par un système dont le seul objectif est la maximisation des rendements financiers. C’est trop bon de voir que pour cette nouvelle forme d’esclavage, il n’y a personne pour protester. Il est vrai, les techniciens de la destruction des Etats ont habilement orienté les protestataires sur les formes passées de l’esclavage pour les détourner de ses formes contemporaines, subtiles et perverses. Tout doit être mondialisé, uniformisé et équitablement réparti sur la planète : les maladies, les traitements, la nourriture, les addictions, la violence, le mensonge, la loi du plus fort, les mots d’ordre pour les indignations.
Jeune énarque dans deux plus cinq ans, la mission sera terminée. Les institutions du pays seront des coquilles vides et très fissurées. Les traces du passé seront pour la plupart défigurées. L’histoire sera réécrite. La soumission économique sera maximale pour une population chassée aux frontières du seuil de pauvreté. Le nouvel ordre mondial sera la seule issue proposée et perçue comme salvatrice par la masse informe des êtres humains. Un nouveau totalitarisme pourra écraser ce qui restera des Etats et des hommes libres. Nous serons vraiment dans un cauchemar éveillé.
Régis DESMARAIS
* : ce texte est une œuvre de fiction empruntant des éléments de réalité pour les placer dans un contexte inventé. Toute ressemblance avec des personnes ou des situations existantes ne peut être qu’une coïncidence fortuite et malheureuse…
109 réactions à cet article
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