Pas très loyal...
Chic, après Jean-Marie Le Pen, après Nicolas Sarkozy, Ségolène Royal est enfin victime d’un mouvement « Tout sauf... ». Vu combien les deux précédents mouvements de ce style ont été particulièrement inefficaces, ce genre d’initiative mérite une meilleure publicité... pour accroître les chances de la candidate PS.
Car, c’est bien connu, on ne change pas une méthode qui perd. Après les sites de gauche anti-Sarko qui finalement ont plus servi à aider le petit Nicolas (car mieux vaut la haine que l’indifférence, mieux vaut une mauvaise publicité que pas de publicité du tout...), voilà le site Pas les Royal (http://www.paslesroyal.com), le site anti-Ségolène... de droite !
Car la manoeuvre est aussi grossière qu’une leçon de diplomatie de Douste-Blazy. Pas-les-Royal se prétend neutre, essaye de démarcher différents rédacteurs de tous bords. Pour preuve, ils vont jusqu’à mettre sur leur liste de diffusion des blogueurs supporters de Dominique Strauss-Kahn. Problème, ils ont par moment frappé à la mauvaise porte. La mienne en l’occurrence, s’imaginant que, mauvais perdant, j’allais spontanément rejoindre la défense de Nicolas Sarkozy et de projets que j’ai toujours critiqués au nom du "Tout sauf Ségo...". Sauf que je me vois mal m’associer à un mouvement loin d’être si neutre, pour preuve la distribution de tracts organisé avec l’UNI, le mouvement universitaire de droite ! Bref, un site qui propose du dézingage en règle, quitte à y aller assez fort sur n’importe quoi et à chercher des alliances remettant en cause toute sorte de neutralité bienveillante.
"Tout sauf Ségo..." La formule est belle mais l’argumentation est creuse. Dans les critiques, on retrouve des arguments plus bas que terre. Je n’ai pas souvenir d’attaque anti-Sarkozy ou anti-Le Pen allant jusqu’à viser leurs propres malheurs familiaux (les malheurs de leur couple, certes, mais pas ceux de leurs parents - Sarkozy, lui aussi fils de parents divorcés, ne peut pas se permettre de rire de ce genre de malheur). Dans le portrait de Ségolène Royal, un des preux rédacteurs courageux, qui connaît sans doute bien mieux la famille Royal qu’elle-même, ironise sur le divorce des parents Royal :
"À dix-neuf ans déjà, elle assigne son père en Justice et gagne, car il refusait de divorcer et de verser une pension alimentaire à sa femme Hélène Dehaye pour financer les études de ses enfants. Après de longues années de procédure, Jacques Royal, atteint d’un cancer du poumon, meurt au cours de l’été 1981, sans avoir revu six de ses huit enfants que Marie-Ségolène avait convaincus de défendre résolument leur mère."
Classieux, très fin, mais aussi un lynchage en règle avec, surtout, l’insinuation que Jacques Royal serait un brave homme, ce que plusieurs biographes nient. Un autre article de la rubrique Biographie, sur la participation de Ségolène Royal à l’Assemblée nationale : "Elue à l’Assemblée nationale depuis 1988, elle n’est intervenue que sept fois dans l’hémicycle depuis janvier 2004, un score qui la place au 469e rang des 577 députés." Rappelons quand même à l’auteur que depuis 2004, Ségolène Royal est également présidente de Région. Et que ses interventions peuvent difficilement chevaucher celles de son conjoint, chef du principal parti d’opposition. Et citer son score sans mentionner les scores d’autres cumulards (il y a 108 députés derrière Ségolène, peut-être à la tête d’exécutifs locaux ?) paraît une donnée bien peu objective. Je ne dis pas qu’il ne faille pas critiquer l’absentéisme des députés ou le cumul des mandats, comme le fait d’ailleurs un article publié récemment sur AgoraVox. Mais s’en prendre uniquement à Ségolène sur une pratique courante chez de nombreux autres candidats apparaît assez maladroit (comme le rapporte Le Canard enchaîné, Nicolas Sarkozy n’a passé que trois heures sur les 56 heures d’une commission consacrée à... l’étude de sa loi sur la prévention de la délinquance. Alors des procès d’absentéisme, on peut en faire à foison...). On peut aussi retrouver une descente en flèche du voyage officiel de Ségolène Royal au Proche-Orient et sa prétendue bourde avec le Hezbollah, les internautes semblant oublier qu’il est assez facile sur Internet de découvrir que la presse israélienne n’a pas mentionné une seule fois cet incident diplomatique qui n’a donné lieu qu’à un débat franco-français au sein de l’UMP et de quelques candidats en mal de voix, mais loin, très loin de la prétendue catastrophe mondiale annoncée par Douste-Blazy et Barnier, pourtant experts en bourdes diplomatiques.
Le plus amusant pour la fin : le site se donne la prétention d’être "jury populaire" de Ségolène Royal. Et pour cela, ils y arrivent, vu qu’ils appliquent exactement la même méthode. A savoir donner la parole aux intervenants sur un forum modéré (ce qui n’a pas manqué, ma petite voix divergente n’a pas été prise en compte par l’administrateur. Ou comment susciter une illusion de popularité en ne donnant la parole qu’à des propos vous soutenant. Un peu comme le forum du site... Désirs d’avenir, de Ségolène Royal). Ces internautes qui peuvent poster des liens et vidéos. Vers des vidéos de François Bayrou, de Nicolas Sarkozy... Sympa. Finalement, l’UDF et l’UMP, c’est comme le PSG, il y a des dirigeants (en théorie) respectueux des règles du jeu, et derrière, des fanatiques, qui feraient mieux de se taire s’ils ne veulent pas nuire à l’image de leur club. Sauf que de même que la fameuse vidéo piratée sur le temps de travail des enseignants a bien plus contribué à renforcer Ségolène qu’à la détruire, ce genre de procès en ligne uniquement à charge ne va pas la détruire. Si vous voulez attaquer Ségolène Royal sur son brushing, ou sur un vol de pâtes de fruit qu’elle aurait commis dans son enfance, ou sur le moindre ragot à disposition, le site Pas les Royal est fait pour vous. Les critiques plus constructifs, et qui acceptent de laisser une parole à une éventuelle défense, peuvent rester sur AgoraVox...
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