Le pape Benoît XVI a prononcé le 16/09/2010, devant la reine Elisabeth II, un discours pour le moins surprenant dont voici un extrait :
« Même dans notre propre vie, nous pouvons rappeler combien la Grande Bretagne et ses dirigeants ont combattu la tyrannie nazie qui cherchait à éliminer Dieu de la société et qui niait notre commune humanité avec beaucoup jugés indigne de vivre, en particulier les juifs. J’évoque aussi l’attitude du régime envers des pasteurs et des religieux chrétiens qui ont défendu la vérité dans l’amour en s’opposant aux Nazis et qui l’ont payé de leur vie.
En réfléchissant sur les leçons dramatiques de l’extrémisme athée du XXème siècle, n’oublions pas combien exclure Dieu, la religion et la vertu de la vie publique, conduit en fin de compte à une vision tronquée de l’homme et de la société et ainsi à une vision réductrice de la personne et de sa destinée. » (Traduction du Vatican)
Les discours du pape étant diffusés dans le monde entier par tous les grands médias, télévisions, presse, internet, on apprend ainsi que le nazisme a cherché à éliminer Dieu et a été une conséquence de l’extrémisme athée. Le pape laisse également à penser que les responsables religieux de cette époque se sont opposés au nazisme au péril de leur vie.
Le pape considéré comme une autorité morale se livre-t-il à un simple rappel des faits ou assiste-t-on à une véritable falsification de l’histoire ?
Face à de telles affirmations, il semble nécessaire de se livrer à quelques vérifications historiques.
Les objectifs et le programme d’Hitler sont énoncés dans son livre « Mein Kampf » (Mon combat), écrit pendant qu’il purgeait une peine de prison pour un coup d’état avorté. Les deux volumes de ce livre ont été publiés en 1925 et 1926. Ils furent tirés à 10 millions d’exemplaires et traduits en 16 langues jusqu’en 1945. Ils sont le fondement de l’idéologie nazie.
Des millions de croyants chrétiens, dont les responsables catholiques, ont lu ce livre avant la guerre 39-45 et à de rares exceptions près, ne l’ont pas contesté mais au contraire approuvé.
Suivant les affirmations de Benoît XVI on devrait trouver dans « Mein kampf », une glorification de l’athéisme. Or voilà ce qu’Hitler écrivait :
« Et si un peuple succombe dans sa lutte pour les droits de l’homme, c’est qu’il a été pesé sur la balance du sort et a été trouvé trop léger pour avoir droit au bonheur de l’existence dans ce monde terrestre. Car celui qui n’est point prêt à lutter pour son existence, ou n’en est pas capable, est déjà prédestiné à sa perte par la Providence éternellement juste. Le monde n’est point fait pour les peuples lâches. »
La Providence étant l’action de Dieu sur le monde, Hitler estimait donc que l’histoire des peuples était écrite par Dieu qui ne récompensait que ceux qui savaient se battre pour leur existence. Croire en Dieu, c’était croire en la prédestination. Il estimait que s’il atteignait son but, c’est que Dieu aurait estimé sa cause juste. Si l’on considère que Dieu décide de tout, sa démonstration n’était pas contestable puisque seul Dieu lui donnerait la victoire. Si Dieu n’était pas avec lui, son combat serait voué à l’échec.
« Par contre, nous autres nationaux-socialistes nous devons nous en tenir d’une façon inébranlable au but de notre politique extérieure : assurer au peuple allemand le territoire qui lui revient en ce monde. Et cette action est la seule qui devant Dieu et notre postérité allemande, justifie de faire couler le sang : devant Dieu, pour autant que nous avons été mis sur cette terre pour y gagner notre pain quotidien au prix d’un perpétuel combat, en créatures à qui rien n’a été donné sans contrepartie, et qui ne devront leur situation de maîtres de la terre qu’à l’intelligence et au courage avec lesquels ils sauront la conquérir et la conserver. »
Hitler annonçait avec clarté que son objectif était de faire du peuple allemand, le maître du monde. Il faudrait qu’il tue, mais ce serait sous le regard de Dieu.
« En même temps que la foi aide à élever l’homme au-dessus du niveau d’une vie animale et paisible, elle contribue à raffermir et à assurer son existence. Que l’on enlève à l’humanité actuelle les principes religieux, confirmés par l’éducation, qui sont pratiquement des principes de moralité et de bonnes mœurs ; que l’on supprime cette éducation religieuse sans la remplacer par quelque chose d’équivalent, et on en verra le résultat sous la forme d’un profond ébranlement des bases de sa propre existence. On peut donc poser en axiome que non seulement l’homme vit pour servir l’idéal le plus élevé, mais aussi que cet idéal parfait constitue à son tour pour l’homme une condition de son existence. Ainsi se ferme le cercle.
Naturellement, dans la définition tout à fait générale du mot « religieux » sont incluses des notions ou des convictions fondamentales, par exemple celles de l’immortalité de l’âme, la vie éternelle, l’existence d’un être supérieur, etc. Mais toutes ces pensées, quelque persuasion qu’elles exercent sur l’individu, demeurent soumises à son examen critique et à des alternatives d’acceptation et de refus, jusqu’au jour où la foi apodictique prend force de loi sur le sentiment et sur la raison. La foi est l’instrument qui bat la brèche et fraie le chemin à la reconnaissance des conceptions religieuses fondamentales.
Sans un dogme précis, la religiosité, avec ses mille formes mal définies, non seulement serait sans valeur pour la vie humaine, mais, en outre, contribuerait sans doute au délabrement général. »
Le moins que l’on puisse dire est qu’Hitler ne rejetait pas la foi en Dieu. Il la considérait au contraire comme nécessaire.
« En comparant la grandeur des organisations religieuses qu’on a devant les yeux avec l’imperfection ordinaire de l’homme en général, on doit reconnaître que la proportion entre les bons et les mauvais est à l’avantage des milieux religieux. »
A cette lecture, les responsables religieux ne pouvaient être que satisfait.
« Ici encore, il nous faut prendre des leçons de l’Eglise catholique. Bien que son édifice doctrinal, sur plus d’un point- et souvent d’ailleurs d’une manière surtout apparente- heurte la science exacte et l’observation, elle se refuse pourtant à sacrifier la plus petite syllabe des termes de sa doctrine. Elle a reconnu très justement que sa force de résistance ne réside pas dans un accord plus ou moins parfait avec les résultats scientifiques du moment, résultats d’ailleurs jamais définitifs, mais dans son attachement inébranlable à des dogmes établis une fois pour toutes, et qui seuls confèrent à l’ensemble le caractère d’une foi. Aussi se maintient-elle aujourd’hui plus fermement que jamais. On peut même prophétiser que dans la mesure où les phénomènes insaisissables défient et continueront à défier la poursuite des lois scientifiques sans cesse modifiées, elle sera de plus en plus le pôle de tranquillité vers lequel ira aveuglément l’attachement d’innombrables humains. »
Hitler considérait donc l’Eglise catholique comme un modèle à suivre et qu’elle était promise à un grand avenir.
« Pour le reste, que la raison soit notre guide et la volonté notre force ! Que le devoir sacré qui dicte nos actes nous donne la persévérance et que notre foi reste pour nous la protectrice et la maîtresse suprême ! »
Hitler s’en remettait à Dieu comme tout bon croyant. Grâce à sa foi, il ne risquait rien puisqu’il ne faisait qu’accomplir un devoir sacré.
« Mais l’impuissance des peuples, leur mort de vieillesse ne surviennent que lorsqu’ils ont renoncé à la pureté de leur sang. Et le juif sait le préserver mieux que tout autre peuple au monde. Il poursuivra donc toujours son chemin fatal (la domination du monde), jusqu’à ce que s’oppose à lui une autre force qui, en une lutte titanesque, renvoie à Lucifer celui qui monte à l’assaut du ciel. »
Hitler considérait qu’un peuple ne pouvait survivre que s’il ne se mélangeait pas à d’autres peuples. Il estimait que le peuple juif avait survécu en appliquant mieux que les autres cette idée qui leur permettait de dominer le monde et que le seul moyen de les en empêcher était de les combattre jusqu’à la mort.
« Si le juif, à l’aide de sa profession de foi marxiste, remporte la victoire sur les peuples de ce monde, son diadème sera la couronne mortuaire de l’humanité. Alors notre planète recommencera à parcourir l’éther comme elle l’a fait il y a des millions d’années : il n’y aura plus d’hommes à sa surface.
La nature éternelle se venge impitoyablement quand on transgresse ses commandements.
C’est pourquoi je crois agir selon l’esprit du Tout-Puissant, notre créateur, car :
En me défendant contre le juif, je combats pour défendre l’œuvre du Seigneur. »
Ainsi, Hitler ne faisait que suivre Dieu. Il était même un ardent défenseur de ses créations.
A-t-il été rejeté après la publication de ce livre ? Non.
Au contraire, la majorité d’un peuple, protestant et catholique, l’a suivi dans ses monstrueux délires.
Il faut aussi se rappeler que la mention « Gott mit uns », soit « Dieu avec nous », était gravé sur le ceinturon de l’uniforme de l’armée allemande.
« Celui qui se tient sur le plan raciste a le devoir sacré, quelle que soit sa propre confession, de veiller à ce qu’on ne parle pas sans cesse à la légère de la volonté divine, mais qu’on agisse conformément à cette volonté et qu’on ne laisse pas souiller l’œuvre de Dieu. Car c’est la volonté de Dieu qui a jadis donné aux hommes leur forme, leur nature et leurs facultés. Détruire son œuvre, c’est déclarer la guerre à la création du Seigneur, à la volonté divine. »
« Ce qui est l’objet de notre lutte, c’est d’assurer l’existence et le développement de notre race et de notre peuple, c’est de nourrir ses enfants et de conserver la pureté du sang, la liberté et l’indépendance de la patrie, afin que notre peuple puisse mûrir pour l’accomplissement de la mission qui lui est destinée par le Créateur de l’univers. »
Hitler s’estimait donc investi d’une mission divine : la domination de la race Aryenne sur le monde qui supposait l’extermination des juifs. Ce programme était clairement énoncé dans son livre ainsi que la méthode qu’il allait employer. Hitler présentait sa démarche dans un cadre religieux et par rapport à Dieu.
En conclusion, le nazisme ne cherchait pas à éliminer Dieu de la société mais au contraire en faisait une référence fondamentale.
En affirmant que le nazisme cherchait à éliminer Dieu, Benoît XVI se livre donc à une véritable falsification de l’Histoire.
Mais les faits ne s’arrêtent pas là.
Doit-on s’étonner que « Mein Kampf » n’ait jamais été inscrit à l’Index par l’Eglise catholique. Cette liste d’ouvrages, que les catholiques n’étaient pas autorisés à lire jusqu’en 1966, comprenait des auteurs tels que Simone de Beauvoir, André Gide, Victor Hugo, George Sand, Jean Paul Sartre, Emile Zola. Par contre, les responsables catholiques de cette époque n’ont jamais estimé que « Mein Kampf » méritait d’être censuré.
De 1925 à 1933, date de sa prise du pouvoir en Allemagne, Hitler n’a rien caché sur ses objectifs racistes et sur sa volonté d’éliminer les juifs.
Quels sont les faits historiques :
Le 30 janvier 1933, Hitler est nommé Chancelier du Reich grâce au soutien de Franz von Papen, ancien chef de file du parti catholique, le Zentrum, qui sera son vice-chancelier.
Le 5 mars 1933, il prend le pouvoir démocratiquement en Allemagne grâce aux voix d’une majorité de chrétiens.
Le 23 mars 1933, il obtient les pleins pouvoirs grâce à l’appui du parti catholique dirigé par un archevêque, Mgr Kaas. Seuls les députés du SPD, le Parti Social Démocrate, votent contre lui (les députés communistes opposés au nazisme avaient été emprisonnés).
Le même jour est ouvert à Dachau, le premier camp de concentration qui servira, dans un premier temps, à enfermer les opposants politiques.
Le 29 mars, les libertés fondamentales sont abolies.
Le 1er avril 1933, les docteurs, avocats et commerçants juifs font l’objet d’une vaste campagne de boycott.
Le 7 avril 1933, une loi exclut les juifs de tout emploi de fonctionnaire.
Le 10 mai 1933, à Berlin, des étudiants nazis brûlent des milliers de livres d’auteurs juifs, pacifistes, marxistes ou psychanalystes.
Dès sa prise de pouvoir, on ne peut que constater qu’Hitler a mis strictement en application ce qu’il avait écrit dans « Mein Kampf ». Or que s’est-il passé deux mois et demi après, le 20 juillet 1933 ?
Le Pape Pie XI, représenté par le Cardinal Eugenio Pacelli, et Hitler, représenté par Franz von Papen, ont signé solennellement un concordat qui commençait ainsi :
« Sa Sainteté le Pape Pie XI et le Président du Reich Allemand mus par un commun désir de consolider et amplifier les relations amicales existant entre le Saint-Siège et le Reich Allemand… »
Ce concordat permettra à l’Eglise catholique d’avoir des privilèges pour son activité et pour les membres de son clergé.
Néanmoins, l’article 16 de ce concordat mérite une attention particulière :
« Avant que les évêques prennent possession de leur diocèse, ils devront prêter serment d’allégeance, soit au représentant de l’état du Reich concerné, soit au Président du Reich lui-même, selon la formule suivante :
« Devant Dieu et les Saints Evangiles je jure et promets, en devenant évêque, loyauté au Reich Allemand et à l’Etat de…
Je jure et promets d’honorer le gouvernement légalement constitué et de tout faire pour que le clergé de mon diocèse l’honore. Dans l’exécution de ma fonction spirituelle, et dans mon souci du bien-être et de l’intérêt du Reich Allemand, je tenterai d’éviter tous actes susceptibles de le mettre en danger. »… »
Faut-il rappeler que ce concordat a été signé alors qu’Hitler venait de mettre en place un pouvoir dont le racisme était le dogme ? Il avait affirmé que « la tâche de l’Etat raciste est de veiller à ce que soit écrite enfin une histoire universelle dans laquelle la question de race sera mise au premier rang » et que l’anéantissement des juifs qu’il traitait de « bacilles dissolvants de l’humanité » était son objectif ?
L’Eglise catholique a donc choisi en toute connaissance de cause « d’honorer » le nazisme et de lui « prêter serment d’allégeance ». Ce n’était certainement pas parce qu’elle considérait que le nazisme cherchait à éliminer Dieu ?
Faut-il aussi rappeler que le signataire de ce concordat pour la papauté, le cardinal Pacelli, fut élu pape sous le nom de Pie XII en 1939 et fut pour le moins passif pendant la guerre 39-45.
Faut-il rappeler que l’autre signataire de ce concordat, Franz von Papen, fut un ami personnel des papes Pie XI et Pie XII et fut un nazi notoire, condamné après la guerre. Cela ne l’a nullement empêché d’être nommé à plusieurs reprises Chambellan privé du pape dont la dernière fois en 1959 par Jean XXIII.
L’Eglise catholique fait souvent état d’une encyclique du 14 mars 1937 pour affirmer que Pie XI a dénoncé avec force le racisme et l’antisémitisme prônés par Hitler. Il faut lire ce texte, « Mit brennender Sorge », pour se rendre compte que l’on assiste là encore à une véritable falsification de l’histoire.
Cette encyclique commence ainsi :
« C’est avec une vive inquiétude et un étonnement croissant que depuis longtemps Nous suivons des yeux les douloureuses épreuves de l’Eglise et les vexations de plus en plus graves dont souffrent ceux et celles qui lui restent fidèles par le cœur et la conduite, au milieu du pays et du peuple auxquels saint Boniface a porté autrefois le lumineux message, la bonne nouvelle du Christ et du Royaume de Dieu. »
Pas un mot sur le sort des juifs, le pape ne se sent concerné que par les difficultés que rencontrent les catholiques. Car le vrai problème qui se pose pour lui, n’est que le non respect du Concordat qui avait été signé en 1933 :
« Tous ceux dont l’esprit n’a pas encore perdu tout sens de la vérité, tous ceux qui conservent au fond du cœur un reste de justice, conviendront que durant ces années, difficiles et lourdes d’événements, qui ont suivi la conclusion du Concordat, chacune de Nos paroles a été prononcée, chacun de Nos actes a été accompli sous la loi de la fidélité aux traités…Aujourd’hui encore, où la lutte ouverte contre l’école confessionnelle, protégée pourtant par le Concordat, où la suppression du libre suffrage à ceux des catholiques qui ont le droit de veiller à l’éducation de la jeunesse, manifestent sur un terrain essentiel de la vie de l’Eglise la gravité impressionnante de la situation et l’angoisse sans exemples des consciences chrétiennes, le souci du salut des âmes Nous pousse à ne pas négliger les possibilités encore existantes, si minimes soient-elles, d’un retour à la loyauté et à un arrangement acceptable suivant le désir du vénérable épiscopat, Nous continuerons, sans Nous lasser, à être auprès des dirigeants de votre peuple le défenseur du droit violé et, obéissant simplement à Notre conscience et à Notre mission pastorale- sans Nous soucier du succès ou de l’insuccès immédiat- à Nous opposer à un parti pris qui cherche, par l’emploi, ouvert ou dissimulé, de la force, à étrangler le droit garanti par les traités. »
« Par des mesures de contraintes cachées ou apparentes, par l’intimidation, par la perspective de désavantages économiques, professionnels, civiques et autres, l’attachement des catholiques à leur foi, et en particulier la fidélité de certaines classes de fonctionnaires catholiques, est soumise à une pression aussi contraire au droit qu’à la dignité humaine. »
Ainsi le Pape n’accepte pas que le droit ne soit pas respecté pour les catholiques. La pression psychologique qu’ils subissent serait contraire à la dignité humaine, mais il ne fait aucunement mention des milliers de prisonniers politiques internés et torturés à Dachau avant 1937 et du sort réservé aux juifs, obligés de quitter l’Allemagne.
Ce qui est appelé, « la forte dénonciation du racisme » dans cette encyclique, se borne à ces phrases qui ne représentent qu’une infime partie du texte :
« Quiconque prend la race, ou le peuple, ou l’Etat, ou la forme de l’Etat, ou les dépositaires du pouvoir, ou tout autre valeur fondamentale de la communauté humaine- toutes choses qui tiennent dans l’ordre terrestre une place nécessaire et honorable- quiconque prend ces notions pour les retirer de cette échelle de valeurs, même religieuses, et les divinise par un culte idolâtrique, celui-là renverse et fausse l’ordre des choses créé et ordonné par Dieu : celui-là est loin de la vraie foi en Dieu et d’une conception de la vie répondant à cette foi…
Seuls des esprits superficiels peuvent tomber dans l’erreur qui consiste à parler d’un Dieu national, d’une religion nationale ; seuls ils peuvent entreprendre la vaine tentative d’emprisonner Dieu, le créateur de l’univers, le Roi et le Législateur de tous les peuples, devant la grandeur duquel les Nations sont « comme une goutte d’eau suspendue à un seau » (Is, XL, 15) dans les frontières d’un seul peuple, dans l’étroitesse de la communauté de sang d’une seule race…
« Révélation », au sens chrétien du mot, désigne la parole dite par Dieu aux hommes. Employer ce même mot pour les « suggestions » du sang et de la race, pour les irradiations de l’histoire d’un peuple, c’est à coup sûr, créer une équivoque. Une fausse monnaie de cette sorte ne mérite pas de passer dans l’usage des fidèles du Christ. »
Doit-on considérer ces phrases comme une virulente attaque contre le racisme ? Il n’y en a aucune autre dans cette encyclique. Pour Pie XI, la race tient « une place nécessaire et honorable », mais n’a pas à être divinisée. Il y a Dieu d’abord et le racisme ensuite et non pas l’inverse.
Le représentant de Dieu sur terre est le pape et non Hitler :
« Une chrétienté ayant repris conscience d’elle-même dans tous ses membres, rejetant tout partage, tout compromis avec l’esprit du monde, prenant au sérieux les commandements de Dieu et de l’Eglise, se conservant dans l’amour de Dieu et l’efficace amour du prochain…
La foi en l’Eglise ne pourra se maintenir pure de toute falsification si elle n’est pas appuyée sur la foi à la primauté de l’évêque de Rome…
Nul ne songe, certes, à barrer la route qui doit conduire la jeunesse allemande à la constitution d’une vraie communauté ethnique, dans le noble amour de la liberté, l’inviolable fidélité à la patrie. Ce contre quoi Nous Nous élevons, et Nous devons Nous élever, c’est l’antagonisme volontairement et systématiquement suscité entre ces préoccupations d’éducation nationale et celles du devoir religieux. »
Le pape n’attaque nullement le racisme en tant que tel. Il ne s’oppose au nazisme que s’il devient une religion au détriment de celle qu’il défend.
A aucun moment dans toute son encyclique, le pape ne parle des juifs ou de l’antisémitisme. A aucun moment, il ne parle des lois raciales de Nuremberg datant de 1935 qui privaient les juifs de la citoyenneté allemande, leur interdisaient de se marier ou d’avoir des relations sexuelles avec « des personnes de sang allemand ou assimilé », les privaient du droit de vote ainsi que de la plupart de leurs droits politiques.
Considérer que cette encyclique du pape Pie XI représente une attaque contre le racisme et l’antisémitisme procède également de la révision historique.
Par contre, il n’est pas contestable que le pape a lancé une violente attaque, mais c’était contre le communisme.
Quelques jours après la diffusion de sa lettre « Mit brennerder Sorge » soit le 19 mars 1937, Pie XI écrivait une nouvelle encyclique appelée « Divini redemptoris » qu’il introduisait de la manière suivante :
« Des peuples entiers sont exposés à retomber dans une barbarie plus affreuse que celle où se trouvait encore la plus grande partie du monde à la venue du Rédempteur.
Ce péril si menaçant, Vous l’avez déjà compris, Vénérables Frères, c’est le communisme bolchévique et athée, qui prétend renverser l’ordre social et saper jusque dans ses fondements la civilisation chrétienne. »
Si le pape Pie XI avait dénoncé le nazisme avec autant de force que le communisme, il est fort probable que l’Histoire aurait été écrite autrement.
Sur plus de 20 pages, le pape décrit ce qu’il appelle « les monstruosités du communisme ». On peut y trouver de nombreux passages tels que ceux-ci :
« Le communisme dépouille l’homme de sa liberté, principe spirituel de la conduite morale ; il enlève à la personne humaine tout ce qui constitue sa dignité, tout ce qui s’oppose moralement à l’assaut des instincts aveugles…Système rempli d’erreurs et de sophismes, opposé à la raison comme à la révélation divine : doctrine subversive de l’ordre social puisqu’elle en détruit les fondements mêmes, système qui méconnaît la véritable origine, la nature et la fin de l’Etat, ainsi que les droits de la personne humaine, sa dignité et sa liberté…
Le communisme est intrinsèquement pervers, et l’on ne peut admettre sur aucun terrain la collaboration avec lui de la part de quiconque veut sauver la civilisation chrétienne »
Ne pouvait-on pas attendre du pape qu’il dénonce avec la même force le nazisme ? Mais il ne le fit jamais. Pourquoi ?
Il faut lire successivement ses deux encycliques, écrites à neuf jours d’intervalle, pour se rendre compte de la différence entre ce qui est appelé aujourd’hui une « opposition » au nazisme et la réelle opposition au communisme. Le résultat est édifiant.
Il est aussi intéressant de noter dans cette encyclique, quelques réflexions du pape à propos du statut de la femme, des droits de l’homme, du passé de l’Eglise et des pauvres :
« En proclamant le principe de l’émancipation de la femme, il l’enlève à la vie domestique et au soin des enfants pour la jeter dans la vie publique et dans les travaux de la production collective au même titre que l’homme…
Il est faux que tous les hommes aient les mêmes droits dans la société civile et qu’il n’existe aucune hiérarchie légitime…
On peut dire en toute vérité que l’Eglise, à l’imitation du Christ, a passé à travers les siècles en faisant du bien à tous…
Quant aux pauvres, tout en cherchant selon les lois de charité et de justice à se pourvoir du nécessaire et même à améliorer leur sort, ils doivent toujours rester, eux aussi, « des pauvres en esprit », plaçant dans leur estime les biens spirituels au-dessus des biens et des jouissances terrestres, qu’ils se souviennent qu’on ne réussira jamais à faire disparaître de ce monde les misères, les douleurs et les tribulations, qu’à cette loi personne n’échappe…
« Bienheureux les pauvres ! » Ce n’est pas une vaine consolation ni une promesse trompeuse comme celles des communistes, mais ce sont des paroles de vie et de vérité profonde, qui se réalisent pleinement ici-bas et ensuite dans l’éternité. »
Doit-on commenter de telles affirmations ? Elles ne sont pas anodines quand elles émanent d’un pape.
La réalité historique montre sans ambiguïtés que l’Eglise catholique de cette époque n’a pas condamné le nazisme parce qu’il aurait cherché à éliminer Dieu, elle s’y est au contraire associée tant qu’elle gardait ses avantages.
En conclusion, affirmer que le nazisme cherchait à éliminer Dieu relève de la falsification de l’Histoire. Les responsables religieux chrétiens connaissaient parfaitement à partir de 1926 quels étaient les objectifs d’Hitler et les ont soutenus parce qu’ils étaient fondés sur un discours faisant appel à leur croyance en Dieu et non l’inverse. Laisser à penser qu’ils furent nombreux à s’opposer au nazisme est également une falsification de l’histoire. Seuls quelques uns d’entre eux, ont combattu le nazisme et y ont laissé leur vie, mais leur hiérarchie ne les soutenait pas.
Pourquoi accepte-t-on cette falsification alors que l’on condamne à juste titre la négation de la Shoah ?
La falsification de l’Histoire est d’autant plus grave et dangereuse qu’elle émane d’une personne respectée et reconnue dans le monde entier comme une autorité morale.
(Pour avoir plus d’informations sur ces sujets, mon livre « Dieu et les religions à l’épreuve des faits » est téléchargeable gratuitement sur le site inexistencededieu.com.)