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Accueil du site > Actualités > Société > La place de la mort dans notre société

La place de la mort dans notre société

Chaque société adopte une attitude particulière face à la mort. On pourrait même dire que cette attitude en est un élément de définition. Aussi le débat s’est-il dans un premier temps attaché à observer la façon dont on aborde la mort ; celle d’autrui, celle d’un proche ou la sienne.

D’aucuns voudraient voir la mort traitée de façon festive, ce qui se fait chez certains peuples africains. D’autres n’envisagent aucunement d’aborder la disparition d’un proche sous l’angle de la bonne humeur et ne peuvent honorer la mémoire du disparu autrement que dans le recueillement et la tristesse. La mort est généralement un tabou. C’est l’Inconnu qui déstabilise. Un intervenant à manifesté son « droit de mourir quand il le veut, plutôt que d’être branché de partout ». «  Pourquoi vivre quand on est un "légume" ? », est-il dit. On lui fit remarquer qu’il ne s’inquiétait pas, dans son choix, de son entourage. L’euthanasie refuse certes l’acharnement thérapeutique. Mais il est délicat d’enlever la vie à quelqu’un, même lorsqu’elle est diminuée. Les soins palliatifs, qui sont par ailleurs de plus en plus courants, épargnent la souffrance d’un malade. Il est ici fait allusion à la dignité humaine. On valorise aussi aujourd’hui l’accompagnement d’un malade qui va mourir en le soutenant moralement et physiquement. Mais «  Les hôpitaux sont des lieux où l’on "parque" les patients, les maisons de retraite les personnes âgées. On y souffre de la solitude ». Aussi voyons-nous se développer l’assistance des soins à domicile.

Certaines interventions ont condamné la mise en scène de la mort à la télévision. « Il y a trop de violence, la mort est vécue comme un jeu, on s’en amuse ». La télévision inquiète d’autant plus qu’elle influence grandement l’éducation des enfants. Le débat s’arrêta un instant sur les jeux de rôles, un danger pour certains car « ils génèrent la confusion entre réalité et fiction », une simple possibilité de s’échapper d’une société et de ses lois pour d’autres. Le spectacle de la mort n’est pourtant pas nouveau. Déjà, dans les arènes de la Rome Antique, l’on montrait les combats et la mort comme un divertissement. Et que dire des attroupements autour des bûchers, des guillotines ?

L’emprise de la religion sur notre société s’est considérablement affaiblie depuis la séparation de l’Eglise et de l’Etat sous la Révolution Française. Si l’objectif, qui était de ruiner le pouvoir et l’autorité de l’Eglise, fut atteint, il s’ensuivit de lourdes conséquences. Une «  déreligionnisation » progressive de notre société s’effectua parallèlement à l’avènement de l’ère scientifique. Notons que « les progrès en anatomie et en médecine n’auraient pu voir le jour sans cet effondrement de l’interdit, du défendu ». Mais la religion apportait aussi une explication à la mort, un caractère sacré. Et c’est cette «  fonction » qui semble faire défaut aujourd’hui.

On a sacralisé la science. Certains disent que l’homme joue à l’apprenti sorcier. Quelques découvertes en biologie soulèvent de grandes questions bioéthiques. Le clonage, les manipulations génétiques, la procréation in vitro, l’euthanasie, l’interruption volontaire de grossesse bouleversent notre conception de la vie. Ces différents maîtrises de la naissance et de la mort sont pour certains une violation des lois divines, pour d’autres une affaire de progrès. Si la science s’efforce seulement de repousser les limites de la vie, elle ne répond aucunement à l’inaltérable angoisse existentielle.

Et c’est à cette angoisse qu’il faut pouvoir répondre. Pour ce faire, il est nécessaire de pouvoir se réaliser. Que peut nous enlever la mort si l’on a l’impression d’avoir vécu, de s’être découvert et accompli ? La réalisation de soi-même est certes une chose difficile voire impossible. Toujours est-il que nous ne la favorisons pas non plus. En l’occurrence, « les Arts ne sont pas assez développés de nos jours ». Alors qu’ils permettent « d’apprendre à se connaître, de s’épanouir, plus encore, de rester vivant après sa mort » ; car l’artiste est un créateur et son œuvre, elle, peut prétendre à l’éternité. De plus, l’assemblée s’accorde sur le fait que « la philosophie n’intervient que trop tard dans l’éducation ». Platon, nous apprend pourtant que «  philosopher, c’est apprendre à mourir ».

Comment « gérons-nous » cette angoisse de la mort dans notre société de consommation ? Un intervenant fait remarquer que consommer et consumer aspirent au même principe : détruire. « Je consomme donc je suis, tel est le slogan de notre société ». « Qu’est-ce que consommer sinon détruire en utilisant la substance d’une chose, faire usage d’un objet pour le rendre inutilisable ? » C’est le processus inverse de la créativité.

Enfin, nous ne pouvons parler de la mort sans faire allusion à la sexualité. «  Les pulsions de vie et de mort sont présentes en chacun de nous » remarque une intervenante. Eros et Thanatos rythment notre vie, pour reprendre une formule de Freud. L’émancipation sexuelle apporta certainement beaucoup à notre vision de la mort. De plus, notre société est très individualiste. En des époques plus lointaines, la mort d’un individu n’avait pas d’impact aussi grand. Tout au plus nous faisions référence à la fatalité. Il n’en est pas de même aujourd’hui où le sort d’un individu importe plus que celui de la société toute entière ou des générations futures.


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23 réactions à cet article    


  • (---.---.33.228) 7 mars 2007 13:38

    Bonjour Marc,

    merci de votre article intéressant et profond ; nous l’aurions néanmoins préféré moins tiède, moins neutre, moins fait uniquement de remarques.

    Au fond, qu’en pensez-vous vous-même ?

    Mais le fait qu’il soit fait de beaucoup de questions sied très bien à un article sur la mort, évidemment.

    Pour quiconque a voyagé hors de l’Occident, une chose frappe : la différence d’attitude qui existe entre la majorité des vieillards occidentaux modernes et les autres ; et celà bien avant l’instant même de la mort.

    Chez nous, dans le meilleur des cas, quand les vieillards sont encore « dynamiques », on les voit souvent profiter de leur retraite pour « s’ouvrir » à la vie, voyager, exercer diverses activités, un peu comme s’ils se « dépêchaient » avant de partir, ultime regain de consommation un peu frénétique avant ce qui serait considéré comme la fin.

    Dans le pire des cas, il y a ceux que l’on voit en maisons de retraites, et qui vivent pour beaucoup une attente morne, ennuyeuse, sans espoir, de gens qui n’ont, précisément, plus d’avenir.

    Il ressort bien là la caractéristique la plus apparente de la mentalité moderne : tout est ici-bas, et il n’y a pas d’espoir à placer dans l’après. On subit la mort parcequ’il n’y a pas moyen de faire autrement.

    Tout différent est ce que l’on voit dans les autres pays, notamment en pays arabe : les vieillards changent rarement de mode de vie à l’approche de la mort, sinon qu’il confient les responsabilités terrestres à leurs descendants, et eux aussi se mettent, paisiblement, en situation d’attente.

    Mais leur attente n’a rien à voir avec la nôtre, car elle est très souvent préparation et aspiration au départ, en y mettant tout leur espoir ; c’est une démarche vers l’avenir ! Je ne parle pas de principes, mais de choses visibles et sensibles ; il est évident que la religion est en rapport avec celà : non pas une religion de prêches ou de politique, mais, sans paroles inutiles, une chose profondément vécue et harmonieuse.

    Si la mort est le bilan d’une vie, en quelque sorte sa fin d’exercice comptable, ceci devrait nous interpeler, et, sans discours forcément religieux, nous amener à remettre en question la valeur réelle de nos existences modernes, peut-être plus fuites devant la réalité qu’autre chose...

    Cordialement Thierry


    • mhoussaye (---.---.59.114) 7 mars 2007 20:51

      Bonjour Thierry,

      Oui, il est vrai que la question, comme le dit Sénèque, est bien de s’interroger sur ce que je peux faire pendant le temps qui m’est imparti. Cela demande :
      - d’accepter l’ordre des choses que nous ne pouvons pas modifier, en l’occurence notre mortalité, mais également
      - d’avoir la force d’enrichir sa vie d’initiatives. On ne quitte pas la vie de la même façon lorsqu’on a le sentiment de l’avoir bien remplie (bien usée disent les paysans de par chez moi). Sans mort, point de vie, et vice versa. Et quid de l’amour dans tout cela ?


    • aquad69 (---.---.100.34) 8 mars 2007 12:46

      Bonjour Marc,

      L’Amour ? Les Anciens le voyaient plus comme un sens, au même titre que la vue ou l’ouïe, comme l’« oeil du coeur » qu’il fallait cultiver et développer, indépendamment de son objet, que comme une aventure ou un sentiment.

      Ensuite ils « appliquaient » cette capacité à l’être aimé, le conjoint, leur entourage, l’ensemble du tout et de soi-même, et en réalisaient la synthèse, comme les différents aspects d’une seule et même chose.

      L’idée exprimée qu’il est normal d’aimer aussi autre chose que son Amour humain, son « conjoint d’amour », et en particulier le « Tout », l’universel, est une chose qui choque les Occidentaux, qui y verraient une sorte d’infidélité, un amoindrissement du sentiment amoureux.

      Ou alors ils ne verraient là qu’une démarche « spirituelle », cad un peu extraordinaire, exotique, étrangère au monde « normal », et un peu originale, pas très sérieuse.

      C’est cette habitude de séparation, « rendre à César ce qui est à César », qui a produit un discours religieux coupé de la vie et très lourd, devenu d’ailleurs complètement incompréhensible du fait que ceux qui en sont les adeptes ne font qu’en « pressentir » la valeur, sans y comprendre grand-chose...

      Les Anciens le vivaient comme une chose beaucoup plus naturelle ; c’était certes considéré comme le plus important et le plus précieux, mais il n’y avait pas d’obligation ; à chacun son regard sur le Monde, plus ou moins pénétrant selon ses capacités ; tout était sacré, mais non religieux, et il n’y avait pas cette fracture terrible qui existe chez nous.

      Car un de nos pires défauts, c’est cette hypertrophie de l’esprit d’analyse qui fait que nous voulons absolument séparer les domaines, spécialiser chaque activité de notre quotidien, professionnel ou non, et nous spécialiser nous-mêmes, pour, parait-il, mieux nous concentrer et être plus efficace ; c’est un fractionnement indéfini, une individualisation, une véritable pulvérisation en tous domaines, entre nous et en nous-même avant tout, qui dépouille tout de son sens et de sa valeur.

      Je vais peut-être vous choquer, mais je crois que l’esprit moderne est l’esprit le plus borné qui ait jamais existé dans toute l’histoire humaine, et que c’est précisément là la raison de son apparent « succès » technique.

      Car à comparer une pointe d’aiguille à une feuille de papier, la pointe d’aiguille est plus étroite, plus bornée que la feuille, mais c’est précisément pour celà qu’elle réussit à percer le tissus.

      Les Anciens faisaient « tout ensemble », et fondaient même les méditations les plus élevées sur les activités les plus triviales, en toute simplicité ; ils étaient capables de faire de la préparation d’oeufs au plat une leçon spirituelle !

      Et c’est là l’origine de cette beauté et cette harmonie dont la présence nous étonne toujours dans tout ce qu’ils nous ont laissé. Car, quoiqu’ils fassent ou qu’ils fabriquent, celà concernait, ils y mettaient tout leur être, à tous niveaux, et l’amour qu’ils portaient à tout ce qui les entourait était comme une signature, une griffe qu’ils apposaient sur tout ce qu’ils faisaient.

      Mais quand à nous aujourd’hui, quand on s’intéresse à ce sujet, et que l’on va par exemple se promener sur « meetic » et autres lieux de « rencontres », on découvre que les gens d’ici ont remplacé « l’amour » par « un amour », voire même par « une histoire d’amour », ce qui n’est souvent plus rien d’autre qu’une « consommation » particulière.

      Ceci dit sans amertume ; le Monde est, et sera toujours magnifique ; mais l’on est pris de vertige par la souffrance qui se dégage notre société moderne.

      Amicalement Thierry


    • mhoussaye (---.---.59.114) 8 mars 2007 18:48

      Très cher Thierry,

      Vous parlez des anciens comme si vous les côtoyiez tous les jours. Même si je partage globalement vos propos concernant l’esprit humain, j’apporterai quelques nuances, notamment pour ne pas seulement voir dans l’évolution des sociétés humaines qu’une lente déchéance de l’esprit.

      Il est vrai que nous pensons de nos jours moins globalement qu’à d’autres époques. Il est très difficile de vivre pleinement aujourd’hui, je précise : pleinement au sens que vous donnez de l’amour.

      Néanmoins, le facteur essentiel est la complexification de nos sociétés qui modifie le rapport des individus entre eux et de l’individu aux structures sociales. La multiplicité des échanges, le déversement d’information, et la saturation, presque physique, de l’esprit humain, m’amène à penser que nous sommes certainement au seuil d’une révolution de la pensée.

      Ré-intégrer la pensée globale est nécessaire. Ce ne sera pas évident après des siècles de suprématie du cartésianisme. Il nous faudra, je veux dire nous serons obligés, d’adopter des conceptions systémiques très prochainement pour gérer sinon les crises, les aspirations futures de nos concitoyens.

      Et cette conception holistique retrouvée modifiera très certainement notre vision et notre ressenti de la mort.

      Amicalement, Marc


    • aquad69 (---.---.100.34) 9 mars 2007 12:12

      Cher Marc,

      Je n’ai pas eu l’honneur de côtoyer les Anciens, évidemment, mais, fruit d’une vie de recherche, celui de rencontrer une ou deux fois quelques-uns de leurs héritiers qui continuent, jusqu’à nos jours, à perpétuer l’ancienne vision du Monde. Ce à quoi j’ai pu accéder n’est qu’un petit rien comparé à eux, mais il m’est par contre possible d’essayer de l’exprimer en langage moderne.

      Une prochaine révolution holistique de la pensée qui devrait arranger les choses : voilà une pure profession de foi, qui ne doit rien à aucun raisonnement rationnel...

      Je voudrais surtout que vous ne preniez pas celà pour une critique personnelle, ni que vous ayez l’impression que je le prenne « de haut ».

      Mais les conceptions systémiques et la complexité dont vous parlez ne concernent que l’organisation matérielle de nos sociétés et nos connaissances des supports physiques des choses, et non la vision du monde des gens, qui n’a rien gagné en profondeur.

      Il faut soigneusement faire la distinction entre « Pensée » et « Connaissances techniques ».

      C’est ce que n’ont jamais fait les modernes, et c’est la source de ce quiproquo qui a toujours existé entre eux et les autres peuples, dit primitifs, que l’on n’a jamais compris, ou plutôt, voulu comprendre.

      Quand l’on se gausse, par exemple, du fait « qu’ils croyaient que la terre était plate », on fait une double erreur :

      D’abord, quand ils (mais qui ça, « ils », le premier pékin venu, qui prenait tout à la lettre, ou les détenteurs réels du savoir ?) disaient « la terre », ils ne parlaient pas de la planète Terre, dont ils se fichaient éperdument, mais du « Monde Terrestre », au delà de tout ce qui est, par exemple, l’espace et le temps, et c’était un concept à l’horizon immensément plus vaste que la vision des scientifiques d’aujourd’hui du « petit » Univers selon les théories du « Big Bang ».

      Ensuite, et surtout, le savoir ancien concernait la signification, le sens des choses, « l’histoire » en quelque sorte, et non la connaissance technique du support physique des choses.

      Une image simple, tirée du théatre : vouloir réfuter la vision des choses des anciens peuples pour la raison que leurs descriptions du Monde était grotesque comparée à celle qui est la nôtre, et que nous avons « prouvée » par nos immenses moyens techniques, celà revient à réfuter toute l’oeuvre de Shakespeare -ou une autre si vous préférez- pour la simple raison que tout celà n’a aucune réalité, ce n’est qu’une « histoire », et que seul est vrai et possède une existence réelle le support physique que sont les coulisses et le bâtiment même.

      Car toute la science moderne,dans toute son extension, n’est faite que d’analyse et n’est, en vérité, qu’une science du support, une connaissance des moyens, du « comment », et non du « pourquoi » ; et c’est bien pour celà qu’elle est définitivement impuissante à répondre à aucune de nos vraies questions...

      Je ne suis pas le premier à poser ce problème, qui est vieux comme le Monde, évidemment ; et vous allez me dire : « bien sûr, bien sûr, mais ce prétendu »sens des choses« , dont vous parlez, existe-t-il vraiment ? Il faut avoir la foi pour croire en tout celà ! »

      En vérité, aucune réflexion, aucune discussion ne peut répondre à celà, de même que personne ne peut « prouver » à quiconque l’existence d’une orange par un raisonnement : il faut y goûter, et alors, à partir de ce moment-là, personne ne peut plus vous en faire douter, ce n’est plus de la foi, vous savez...

      Mais l’on peut tout de même remarquer que si celà n’était pas vrai, alors l’humanité toute entière, depuis les origines, n’aurait toujours été composée que de sauvages ignorants et hallucinés, véritables psychopathes pathologiques, ce qui est bien ce qu’une vision des choses un peu « coloniale » a toujours essayé de nous faire croire.

      Et d’autre part, quand vous allez au cinéma ou au théatre, y allez-vous pour une raison physique, pour vous reposer dans un fauteuil confortable, ou pour y suivre une histoire qui n’a aucune existence physique, mais qui y est la seule chose digne d’intéret, qui donne à ces spectacles leur seule raison d’être...

      Il est très difficile de faire une critique absolument fondamentale du modernisme, de vouloir le réfuter, sans passer pour un cassandre, un pessimiste invétéré et grognon.

      Et pourtant, pessimiste, je ne le suis pas car plus on cherche la réalité de ce Monde sous ses apparences, plus il apparaît comme une invraisemblable merveille ; mais la laideur qui est propre à toutes les réalisations modernes est peut-être là un moyen de reconnaître ce modernisme pour ce qu’il est : une gigantesque, une babylonique illusion bâtie sur un monde d’erreurs, de mensonges et de crimes.

      Si vous voulez garder le contact : [email protected]

      Amicalement -Thierry


    • roby (---.---.99.137) 7 mars 2007 15:55

      Bonjour marc, Je trouve votre article très courageux et vous y abordez tous les aspects de la mort dans nos civilisations prétendues avancées. Effectivement pour qui a voyagé un peu au travers du monde cet aspect (l’encapsulement)le fait de vouloir cacher la mort est très répandu dans notre société.

      Par contre j’aurais aimé que vous traitiez aussi du comportement des proches vis a vis de celle-ci , la différence de traitement et de la solidarité par rapport aux autres pays. J’ai perdu un enfant de 22 ans et très vite nous nous sommes retrouvés isolés comme des pestiférés.

      Encore bravo et merci pour le courage d’affronter des thèmes non élitistes.


      • mhoussaye (---.---.59.114) 7 mars 2007 20:43

        Bonjour, Les Révolutionnaires n’avaient pas, il me semble, la volonté de « dé-religioniser » la société. Le culte de l’Etre Suprême instauré par Maximilien Robespierre est significatif. Certes, les appareils de pouvoirs religieux que sont les Eglises ont été affaiblis, mais il y a eu plus : un changement du lien social, et donc du religieux par extension...


      • Isa (---.---.99.137) 7 mars 2007 20:39

        Mon dernier article a encore réveillé des doutes. En fait, ce sujet est tabou. Alors, j’explique : L’idée du suicide m’est venue parce que j’ai reçu un lien sur un forum en parlant. J’ai lu, par curiosité. Une femme écrivait que le suicide est impardonnable et cela m’a fait mal d’imaginer que certains de mes proches peuvent penser comme elle.

        Je suis consciente après coup d’avoir commis la plus terrible des agressions qui soit : attenter à une vie, en l’instance la mienne. Certes, je l’ai regretté 30 secondes plus tard, mais cela restera toujours trente secondes trop tard. Je sais que cet acte était violent. J’ai conscience qu’il ne s’oubliera jamais. Mais moi je sais qu’il m’a permis d’appréhender « le fond » de la noirceur, de mettre un nom sur mon mal : MELANCOLIE. Cet état est à jamais synonyme de grave danger et je sais maintenant m’en protéger.

        Mon plus gros souci actuellement vient de « mes morts », des décès qui ont jalonné ma vie. Ils sont peu nombreux, mais ils me hantent presque chaque nuit : Papy, Maman, Loïc et dans une moindre mesure tous les autres plus ou moins proches, y compris parmi mes souvenirs d’hôpital. Dans mes rêves, ils sont tous vivants, ils vivent même en cohabitation avec les nouveaux arrivés, cohabitation bien sur absurde et improbable mais qui va jusqu’à me faire purement et simplement nier leur mort. Le plus souvent, je me réveille affreusement troublée. Il me faut quelques minutes pour reprendre pied.

        J’entends souvent l’expression : « faire son deuil », je ne sais pas comment faire mon deuil, j’en suis incapable, je ne trouve pas le mode d’emploi qui me permettra d’accepter enfin. Il parait que tout est en moi. Je cherche vainement depuis presque trois ans. Peut être est ce que l’écrire, le dire, m’aidera ? Quelqu’un m’a dit, il y a peu, que la mort pour une infirmière devient banale. La mort pour moi est bel et bien cette grande faucheuse qui prend des vies sans logique, de manière injuste, parfois cruelle.

        Je crois qu’en fin de compte, elle me fait peur. A l’hôpital, en cardiologie, elle était une défaite après un rude combat. Il m’est arrivé une fois de devoir porter un nouveau né mort au bloc. A travers le drap blanc, je sentais la tête de l’enfant sur mon bras et peu à peu, j’ai senti physiquement la mort entrer en moi, dans mon bras. Ce fut un moment terrible. Depuis, je ne supporte pas de la croiser, je ne supporte pas plus : la violence qui la provoque, que celle qu’elle provoque dans mon esprit.

        Désolée, pour toutes ces réflexions pas très joyeuses, mais écrire cela maintenant me permet d’y voir plus clair.

        (Et pis, à ma décharge, pas de psy depuis 3 semaines, alors faut que ça sorte..... sourire).

        Promis le prochain article sera beaucoup plus soft publié par isabelle dan


        • Céline Ertalif Céline Ertalif 7 mars 2007 23:10

          Isa, tu nous parles vraiment. Tu commences même par nous secouer un peu par un premier paragraphe déstabilisant.

          Mon opinion personnelle est que la mort est un tabou ascendant dans notre société. Autrefois, les tombes étaient autour de l’église, aujourd’hui elles sont enfermées dans des murs, à l’écart.

          La mort des autres, et surtout de nos proches, nous rappellent notre finitude. Le deuil, c’est admettre une fin de soi-même, l’irréversibilité du passé. Tout au moins, est-ce mon opinion.

          Je ne crois pas qu’on puisse avoir peur de la mort, à mon sens il n’y a que la peur de la vie : de la douleur et de la jouissance, comme un vertige devant les aspirations les plus fortes.


        • Marie Pierre (---.---.1.200) 9 mars 2007 00:29

          Bonjour Isa,

          D’abord merci à Céline pour sa réponse.

          Effectivement, la mort aujourd’hui est totalement éloignée de notre univers. Je me rappelle que, lors du décès d’une amie, en voulant lui dire un dernier adieu, je m’étais rendue à la maison de ses parents. La ville de Montpellier interdisait aux familles de « garder » ses morts, ne serait-ce que pour les veiller. Les morts étaient transportés d’office dans un endroit totalement déshumanisé : une hôtesse à l’accueil donnait le numéro de la chambre mortuaire. Arrivée devant la porte, j’ai stupidement frappé. Je dis stupidement car aucune réponse n’est arrivée : normal, il n’y avait personne près du corps. Personne non plus pour partager la douleur, la peine. Chacun venait et s’en repartait aussitôt.

          Je me rappelais que « mes morts » comme vous dites, je les avais toujours accompagnés car ils restaient à la maison jusqu’au jour de l’enterrement. Car tous ceux qui venaient pour le partage restaient un moment. Je me rappelle mes enfants qui tournaient autour du cercueil de mon oncle et qui commentaient la qualité des poignées (en or disaient-ils). Comment ne pas sourire ?

          Et puis, il est vrai que j’ai aussi l’expérience d’un asez long coma avec des éclairs de lucidité. Que je me rappelle très bien l’état dans lequel on se trouve alors et que je n’ai pas peur du tout de la mort. Sauf, effectivement, de la peine que peuvent ressentir ceux que nous aimons.


        • Thomas Roussot Thomas Roussot 11 mars 2007 11:46

          Pardon ou peut-on lire votre article ?


        • Plus robert que Redford (---.---.44.231) 7 mars 2007 23:01

          Ce qui m’effraie chez mes concitoyens, c’est cette absolue négation de la mort ! Cette angoisse qu’évoque Marc Houssaye, on la fuit, on l’occulte, on la nie, on la « nihilise ». Mais inévitablement, le moment arrive où il faut l’affronter, pour « les autres », puis pour ses proches, puis (et enfin !) pour soi.

          J’ai expérimenté les deux premières éventualités ; reste la dernière...

          J’espère faire « bonne figure » aussi bien extérieurement qu’à l’intérieur de ma conscience, et affronter l’inéluctable sans laisser la panique et la terreur gagner toute mon « âme » (désolé, j’ai pas trouvé d’autre mot bien que je sois profondément athée, voire areligieux)

          Car c’est bien de cela dont il s’agit : la peur virant à la panique devant un évènement dont chacun sait qu’il conduit à l’absence, et qu’il est irréversible. A l’absence, et à l’inconnu, même si certains d’entre nous sont intimement convaincus qu’il y a un « après », personne ne sait de quoi il peut être fait.

          J’envie le fatalisme des arabes dont parle ip 18.33.228 : « Tu conduis ta vie comme il se doit, et après : inch’ Allah ! »

          Quand à Isa, On ne « fait pas son deuil », c’est lui qui vous fait ! Il n’y a rien là dedans de volontaire, c’est seulementla poursuite de votre existence, le temps qui passe qui « fait » le deuil, par la superposition de tous les évènements, petits ou grands, qui nous arrivent après la perte de l’être cher, qui permet à la douleur de s’atténuer, lentement ! Vivre coupé du monde après un décès ne permet pas de cicatriser la perte subie. La plaie reste ouverte tant que l’on ne s’intéresse pas aux autres, à leurs bonheurs aussi bien qu’à leurs malheurs, autant de petites irruptions du quotidien qui, couche après couche, viendront colmater la brèche.

          Patiemment.


          • Marc (---.---.230.212) 8 mars 2007 09:02

            Quand tu nais, tous sourient, tu es le seul à pleurer. Fais que lorsque tu mourras, tous pleurent et que tu sois le seul à sourire !


            • Cosmic Dancer (---.---.174.10) 9 mars 2007 15:24

              @ L’auteur

              Merci pour votre article, dont le sujet est toujours difficile pour nous, aujourd’hui, et ici même. Pour rebondir sur votre propos, je vous conseille la lecture d’un magnifique livre, « Voyages de la mort » d’Eliane Georges (grand reporter). Elle y relate les différents rituels dans le monde, et y rappelle ceux des chasseurs du Paléotithique, des Sumériens, etc.

              Sa page d’introduction rappelle que « quand il a senti sa fin venir, Rabelais s’est fait revêtir d’un domino, sur la foi d’une sentence des Saintes Ecritures, qui dit Bienheureux ceux qui meurent dans le Seigneur ! »


              • José (---.---.53.193) 9 mars 2007 18:00

                Pour un portugais qui n’habite pas en France, comme moi, c’est très curieux d0bserver, comment les frnçais font encore des references à ce qu’on penssait au temps de la revolution française.[2 siècles après] Pourquoi est ce qu’en France la mort n’est pas considerée, comme la naissance, une affaire naturelle. Il y a en France une peur et un culte de la mort qu’on ne trouve nul part ailleurs en Europe. Vous autres français devenez des drôles de gens.


                • @jean @jean 9 mars 2007 22:52

                  tout cela c’est de l’eschatologie smiley


                  • moebius (---.---.158.232) 10 mars 2007 23:27

                    la place de la mort est loin de la vie. On ne mélange pas sinon dans cet odieux mélange c’est toujours la mort qui gagne et c’est elle qui devient désirable. Réfléchissez avant d’énoncer de si conventionnelles inepties. Ca n’est pas en négociant avec la mort que la vie peut etre plus forte . Rupture des négociations, allez


                    • moebius (---.---.158.232) 10 mars 2007 23:30

                      « drole de gens » vous vos femmes ont de la moustache, alors pas de leçons s’il vous plait ! non mais !


                    • Thomas Roussot Thomas Roussot 11 mars 2007 11:54

                      Propos de totalitarisme vitaliste.


                    • Thomas Roussot Thomas Roussot 11 mars 2007 11:43

                      Je poste ce texte d’humeur que j’avais écrit sous l’emprise de la souffrance morale liée directement à la perte d’un être cher, un texte pathologiquement atteint, j’en conviens. Un texte de haine et de ressentiment désespéré. La mort pose problème dans cette civilisation moderne car tout y est basé sur l’attachement,l’émotionnel et le sensible, doublé de l’éthique qui refuse la souffrance morale et psychique depuis que nous avons rompu avec le fatalisme et le dolorisme des divers monothéismes qui justifiaient les épreuves, d’où cette tendance à escamoter ou faire l’impasse sur la mort et son cortège de souffrance. Et je ne pense pas que nous ayions tort en soi de cette mutation. Nous cherchons encore le remède au dévoilement de cette lucidité cruelle. Je pense que l’euthanasie sera notre réponse technique pour la devancer et la contrôler, reste à y répondre exitentitellement.

                      Voci : Je souffre, pour tout, parce que j’existe, parce que je suis ce que je suis, incarné n’ayant rien choisi, parce que vous êtes là, autour, vous tous, toutes, je souffre de voir tout ce que j’aime mourir lentement, je rejette radicalement ce monde, je refuse les abattoirs, les génocides, les viols collectifs, les karmas, le bonheur bourgeois, les rires gras, les spectacles intelligents, les espoirs politiques, les couchers de soleil, je vomis les étoiles, les soupirs et la sueur, l’amitié, l’amour, la haine, je dégueule sur le courage et la lâcheté, la peur et les métros bondés, la volonté et la fatigue, la vaisselle et l’ordre, les croyants et athées, je chie sur mon agnosticisme, l’attente et les couloirs de la mort, je pisse sur mes nerfs et les bouquets de fleurs, les émissions avec animateurs intégrés, les joies programmées, les courses désincarnées, je refuse mon refus, la compromission et les sourires bouddhistes, je veux flamber les berceaux et les cotillons de mariage, l’expression poétique et toute forme de communication, je crache sur les autistes et les nains, les impuissants et les queutards, les aires de repos et les avions à réaction, les voisins et les déserts, je maudis de tout mon coeur les solidarités et les égoismes, les nihilistes et les scientistes, les paiens et les racailles, les parvenus et les poissons, les aristos et les prolos méritants, les bières et la sodomie, la défonce et l’austérité, je déverse toute ma bile sur l’intégrité et le sacré, sur les transgresseurs et les fauteurs de troubles, sur les autorités et les libertaires, les suicides ratés et réussis, je veux pourrir vos meilleures ambiances, pourrir vos derniers souvenirs, vos vacances en Irlande ou à Rome, vos convulsions et vos étreintes émues, vos regrets et vos rancoeurs, j’efface tous les voeux, toutes les mains tendues, je hurle contre la recherche et la connaissance, l’ignorance et les bains turcs, je souhaite une bombe atomique sur Sion et New-York, sur Notre Dame et Beaubourg, sur les singes verts et les dauphins, les enfances innocentes et les vieilles putes, je veux défigurer les peoples et les guides touristiques, les musées et les bons sauvages,égorger les puissants et les aveugles, torturer les japonais et les australiens, scalper les africains et les auvergnats, la circularité et les concepts techniques, les strophes et les véhicules rutilants, décharger sur les saints et les bons à rien, souiller les forêts et démolir les cités, déconstruire le sens et l’absurde, jusqu’à la moelle du RIEN, parce que je veux les vallées du RIEN, je prie pour le flot du RIEN, parce que j’attends le ressac du RIEN SOUVERAIN s’ouvrant dans un ciel constellé de comètes d’apocalypse. Parce que la dévastation impassible guette à l’horizon de l’impossible, je peux encore m’endormir.


                      • Gasty Gasty 11 mars 2007 12:55

                        Article qui génère de magnifiques commentaires.


                        • Dilip Singh (---.---.14.69) 11 mars 2007 19:14

                          La mort est ce temps qui nous tiens

                          Que nous fuyons souvant par peur du lendemain

                          Nous pouvons vivre ce moment comme le dernier

                          Ou le percevoir avec les yeux d’un bébé

                          Mais beaucoup préfèrent fuire cet instant délectable

                          Plutôt que d’avoir à ce mettre à table

                          Et de remacher les erreurs, les regrets du passer

                          Afin et enfin de pouvoir les transcender

                          La mort devrait être d’abord à soi-même

                          Et dite moi ensuite si celà pause problème

                          Lorsque le silence surviens

                          Ne coure pas vers les bruits, écoute le est devient...


                          • vincent (---.---.104.121) 13 avril 2007 02:37

                            Bonjour.

                            J’ ai un ami qui dit souvent ceci : « la vie c’ est con comme la mort. »

                            La vie, on né et pendant lontemps nous sommes dépendant des autres, notament de nos parents. Ensuite on se fait ch... a l’ école pendant des années pour faire notre instruction. Ensuite nous entrons dans le monde du travail ou on se fait souvent ch.... a gagner un modeste salaire, enfin bref, gagner notre vie, d’ une part pour se nourrir payer notre loyer ou acheter une barraque, une voiture etc... et ajouter a cela payer des inombrables taxes et impots diverses. Nous subissons des épreuves inombrables, comme la perte de nos proche, de nos amis ou connaissances diverses. Ensuite nous sommes devenus vieux, a la retraite, ( pour ceux qui ont la chance d’ y arriver, ...) et ensuite nous finissons par mourrir.

                            Si on regarde bien mon ami a raison, effectivement c’ est très c.... !

                            Ajouter a cela tous ceux qui n’ arrive pas a leur retraite et qui meurent d’ une maladie, d’ un accident, ou je ne sais quoi d’ autre....

                            J’ ai perdu des amis qui étaient plus jeune que moi et cela me casse le moral. J’ ai fait une tantative de suicide en Décembre 1993, et lorsque je me suis réveillé dans le service des soins intensif, pendant un moment j’ ai regrété que tout ne soit pas fini. A cette époque j’ étais au fond du « goulot » bref a l’ extremme limite de mes forces physique et morale. Par contre je ne sais pas comment font les gens pour voir un tunnel et une grande lumière blanche au bout, car moi j’ étais dans le comma et je n’ aui rien vu du tout ! Pour moi, je suis mort et j’ ai résucité, et c’ est toute l’ impression que j’ en ai.

                            Je suis hanté par la mort, j’ en ai peur, et je suis traumatisé par elle. Le moindre mal de crane me fait penser que j’ ai une saloperie de cancer et que je vais mourrir. Une épine de rosier plantée dans le doigt et je pense que je vais claquer du « tétanos ».

                            Je prend le train, j’ ai peur d’ un attantat. je prend l’ avion j’ ai peur d’ un détournement. Je prend le métro j’ ai peur des agressions. Tout me fait peur.... J’ ai également peur de la foule.

                            La mort me hante, et hante mes nuits, je fait des cauchemards, je me réveille en sursaut, et ensuite c’ est EQUANIL 400, IMOVANE, et toute la panoplie d’ anti-dépresseurs, de somnifères, etc....

                            Je pense a tous les amis que j’ ai perdus et qui étaient jeunes, certains avaient moins de 40 balais. Mourrir quand on est vieux, malheureusement c’ est un peu dans l’ ordre des choses, mais mourrir a 38 ans c’ est grave. La soeur d’ un de mes ancien amis c’ est suicidée a l’ age de 15 ans, et ça c’ est atroce. Tous ses gens me manquent souvent.

                            Cordialement.

                            VINCENT.

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