• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV
  • Agoravox Mobile

Accueil du site > Actualités > Société > Pédophilie, abus sexuels, attouchements... halte aux gros mots (...)

Pédophilie, abus sexuels, attouchements... halte aux gros mots !

Il est des mots, lorsque l’on touche au tabou de l’inceste, qui dérangent, qui font peur, que l’on fuit et dont on se détourne pour mieux se protéger. La pratique est simple, utiliser d’autres mots plus politiquement corrects ou plus supportables. Mais parfois, même à notre insu, ceux-ci s’avèrent tout aussi pervers que l’acte qu’ils signifient.

Commençons par le plus fameux, le plus employé dans notre société par tout un chacun et surtout par les médias : pédophilie. Il est issu du mot pédophile, étymologiquement, composé de deux termes grecs ; paidos (enfant) et philos (ami) ; l’ami des enfants, celui qui aime les enfants. Ce néologisme a été lancé à la fin des années soixante par un mouvement intellectuel sociopolitique. Le but était de démarquer la pédérastie de la pédophilie. La pédérastie qui désigne l’attirance érotique d’un adulte pour les adolescents (ou préadolescents), bien souvent associée à l’homosexualité. Malheureusement, la manœuvre aboutit à une confusion entre les deux termes qui donne aujourd’hui un sens différent à la pédophilie. On parle de pédophilie lorsqu’un adulte, homme ou femme, impose par la violence, la manipulation, la menace ou toute autre manœuvre, des relations sexuelles à un enfant. Sous couvert de l’amour porté à l’enfant, de l’initiation de ce dernier aux affaires sexuelles, le pédophile, profite de l’enfant comme objet sexuel jusqu’à l’échanger, le vendre, le tuer (cf. affaire Dutroux).

A partir des années 90, les médias s’approprient le terme, le galvaudant à loisir. Si la pédophilie n’est pas inscrite dans le code pénal, elle sert de couverture à un crime tout aussi grave et bien plus répandu : l’inceste. En effet, 80% des infractions sexuelles sur mineurs sont commises au sein de la famille. Cette réalité, bien difficile à dire autant qu’à admettre est camouflée derrière la pédophilie. Tabou oblige. Le résultat est sans appel : on ne parle plus d’inceste mais de pédophilie dès lors qu’il s’agit d’infractions sexuelles sur enfant. Ainsi des affaires bien connues comme celle d’Outreau ou d’Angers sont présentées sous ce terme. Jamais, voire rarement, on ne parlera d’inceste. Et pourtant il s’agit d’inceste. Voilà un tour de passe-passe exemplaire qui permet à notre société de dédouaner la famille, l’intouchable famille. Le pédophile, c’est l’étranger au coin du bois, c’est rare, ça n’arrive qu’aux autres. Donc on en parle peu et l’on concentre la prévention auprès des enfants sur cet étranger qui lui proposera des bonbons. Or, le lieu de tous les dangers dont on ne parle jamais à l’enfant, c’est sa propre famille. Par chance, si l’enfant incesté se rend compte que ce qu’il vit est anormal et qu’il en parle, neuf fois sur dix, toute sa famille se retournera contre lui et lui imposera le silence. L’autre problème avec le mot pédophilie est qu’il signifie toujours étymologiquement, « aimer les enfants ». Les pédophiles s’en servent pour justifier leurs actes, prétextant qu’ils donnent de l’amour à ces enfants lorsqu’ils les violent. Ce mot ne signifie pas ce qu’il représente, c’est-à-dire la transgression de l’interdit de la loi. C’est pourquoi, les mots pédocriminel ou pédocriminalité sont plus appropriés et plus respectueux pour les victimes. Mais rappelons-nous qu’un pédocriminel est toujours un membre extérieur à la famille. S’il s’agit d’inceste, on parlera de père incestueux, de mère incestueuse, de frère, sœur...

L’abus sexuel ça va, le viol, bonjour les dégâts !

Rappelons cette publicité préventive contre l’abus d’alcool : « Un verre ça va, deux verres, bonjour les dégâts ! ». On peut user mais pas abuser. Quelque part, le mot abus implique que l’on a un droit d’user dans certaines limites et sous certaines conditions. Si l’on applique cette idée au terme tant utilisé « abus sexuel », cela signifie que l’on a des droits sexuels sur l’enfant mais qu’il ne faut pas aller trop loin. C’est d’ailleurs pourquoi en France on a classifié les infractions sexuelles selon une échelle de « gravité » avec des peines proportionnelles. Malheureusement, c’est mal connaître les conséquences des infractions sexuelles, qui peuvent varier d’un individu à l’autre. C’est aussi punir des actes physiques sans tenir compte de l’acte psychologique très grave : la trahison d’un lien d’amour et de confiance. Quand il s’agit d’inceste, cette trahison peut mener au suicide même si il n’y a pas eu de rapport sexuel complet, et ce, quel que soit l’âge de l’enfant. Les termes violences sexuelles ou infractions sexuelles seraient plus appropriés. Attention, l’expression « agressions sexuelles » est à utiliser avec circonspection car il s’agit d’une appellation juridique. Les infractions sexuelles se répartissant en trois catégories : les délits d’atteintes et d’agressions sexuelles et le crime de viol. Pour illustrer la permissivité en vogue dans notre société, précisons que les atteintes sexuelles (ex : attentat à la pudeur) sont des agressions sexuelles sans violence, menace, contrainte ou surprise. Interprétation juridique : la victime était consentante et ce quel que soit son âge. Ci-après, un communiqué illustrant le résultat de cette permissivité, datant certes de 1977, mais la loi existe toujours et personne ne parle de la supprimer. Il est tellement évident qu’un enfant de cinq ans ne va pas dire non, se défendre, prendre une arme, crier... quand son papa ou son grand-père va s’adonner à des actes sexuels sur lui. Enfin, la situation rappelle étrangement les arguments d’Outreau qui, c’est le moins qu’on puisse dire, ne bénéficient pas aux victimes.

Le Monde du 26 janvier 1977 : Nous avons reçu le communiqué suivant :

" Les 27, 28 et 29 janvier, devant la cour d’assises des Yvelines vont comparaître pour attentat à la pudeur sans violence sur des mineurs de quinze ans, Bernard Dejager, Jean-Claude Gallien et Jean Burckardt, qui arrêtés à l’automne 1973 sont déjà restés plus de trois ans en détention provisoire. Seul Bernard Dejager a récemment bénéficié du principe de liberté des inculpés. Une si longue détention préventive pour instruire une simple affaire de " moeurs " où les enfants n’ont pas été victimes de la moindre violence, mais, au contraire, ont précisé aux juges d’instruction qu’ils étaient consentants (quoique la justice leur dénie actuellement tout droit au consentement), une si longue détention préventive nous paraît déjà scandaleuse. Aujourd’hui, ils risquent d’être condamnés à une grave peine de réclusion criminelle soit pour avoir eu des relations sexuelles avec ces mineurs, garçons et filles, soit pour avoir favorisé et photographié leurs jeux sexuels. Nous considérons qu’il y a une disproportion manifeste d’une part, entre la qualification de "crime" qui justifie une telle sévérité, et la nature des faits reprochés ; d’autre part, entre la caractère désuet de la loi et la réalité quotidienne d’une société qui tend à reconnaître chez les enfants et les adolescents l’existence d’une vie sexuelle (si une fille de treize ans a droit à la pilule, c’est pour quoi faire ?) La loi française se contredit lorsqu’elle reconnaît une capacité de discernement à un mineur de treize ou quatorze ans qu’elle peut juger et condamner, alors qu’elle lui refuse cette capacité quand il s’agit de sa vie affective et sexuelle. Trois ans de prison pour des caresses et des baisers, cela suffit. Nous ne comprendrions pas que le 29 janvier Dejager, Gallien et Burckardt ne retrouvent pas la libérté".

Ont signé ce communiqué : Louis Aragon, Francis Ponge, Roland Barthes, Simone de Beauvoir, docteur Bernard Kouchner, Jack Lang, Judith Belladona docteur Michel Bon, psychosociologue Bertrand Boulin, Jean-François Lyotard, François Chatelet, Patrice Chéreau, Philippe Sollers, Copi, Michel Cressole, Gilles et Fanny Deleuze, Bernard Dort, Françoise d’Eaubonne, docteur Maurice Erne, psychiatre Jean-Pierre Faye, docteur Pierrette Garrou, psychiatre Philippe Gavi, docteur Pierre-Edmond Gay, psychanalyste docteur Claire Gellman, psychologue, docteur Robert Gellman, psychiatre André Glucksmann...et bien d’autres.

« Ce n’étaient QUE des attouchements »

Certains avocats disent qu’ils vont plaider une affaire « touche pipi » lorsqu’il s’agit d’attouchements ou, juridiquement parlant, d’atteintes ou d’agressions sexuelles sur mineur. Le terme utilisé dans le langage populaire, par son sens, minimise les actes commis par l’agresseur. Toucher, caresser, qu’y a-t-il de mal là-dedans ? De plus, on parle souvent de « simples » attouchements, ou « que des attouchements ». Il est courant de penser que les attouchements, ce n’est pas grave, qu’il n’y a pas de quoi en faire un plat. Pourtant, les conséquences sont tout aussi graves pour la victime car une fois encore, on esquive l’aspect psychologique de l’acte : la trahison. Cette trahison, suivie de l’incrédulité de l’entourage ou pire de la justice, va enfoncer la victime dans la culpabilité et la honte qu’elle subit déjà depuis l’acte. Si les actes se sont déroulés « en douceur », cette culpabilité sera d’autant plus forte. Notons que les conséquences de l’inceste, pour des victimes de viol ou d’agressions sexuelles par un membre de leur famille, sont les mêmes qu’il y ait eu un rapport complet ou non. La loi s’en tient à l’acte pur, la société aussi, et plus triste encore, les victimes aussi. Elles se persuadent que ce n’est pas grave, ne demandent pas d’aide, ne portent pas plainte, jusqu’au jour où la souffrance et les symptômes, inévitablement, font surface. Tentatives de suicide, suicides, automutilation, alcoolisme, toxicomanie, prostitution, dépressions... la liste des dégâts est très longue, et tout ça pour quelques caresses... C’est pourquoi le terme d’attouchements devrait sortir de notre langage. Nous avons largement de quoi le remplacer : agressions sexuelles, violences sexuelles, infractions sexuelles....

Les mots sont importants, surtout lorsqu’il s’agit de lutter contre un tabou. A nous de prendre conscience de leur importance et de ce qu’ils peuvent induire, déclencher pour l’autre et pour nous-mêmes. Preuve en est, la bataille pour arriver du « présumé coupable » au « présumé innocent ». On ne voit pas les choses de la même manière selon l’expression employée, on ne traite pas non plus la personne de la même manière. Au nom des victimes d’inceste et de pédocriminels, rayons de notre vocabulaire la pédophilie, le pédophile, les abus sexuels, les attouchements.


Moyenne des avis sur cet article :  4.6/5   (131 votes)




Réagissez à l'article

34 réactions à cet article    


  • La Taverne des Poètes 10 avril 2007 11:53

    Bonjour. Votre thèse de départ est louable : lever un tabou sur les effets désastreux parfois des attouchements sexuels. Cependant, il faut rappeler que la loi ne peut, la plupart du temps, que s’en tenir aux faits. Le sentiment de trahison que subit l’enfant doit être traité sur le plan de la thérpaie et la sanction de l’auteur des attouchements est un moyen de déculpabiliser l’enfant dont le consentement n’est pas établi, contrairement à ce que vous dites. Un enfant soumis n’est pas un enfant consentant. Et la loi est claire sur ce point. Vous savez aussi quela loi classe les infractions en catégories et sous-catégories selon leur gravité : les contraventions, les délits, les crimes. La définition du viol est la pénétration (quel que soit le moyen et la voie d’introduction). L’attouchement ou l’exhibition sexuelle ne relèvent pas de cette définition et sont d’une gravité moindre. Punir tous ces actes des mêmes peines serait mettre de côté l’habeas corpus et tomber dans les excès de certains Etats, ainsi la Chine qui peut condamner à mort pour le vol d’une bicyclette. Je ne suis pas d’accord avec ce que vous écrivez quand vous dites que la définition des « abus sexuels » c’est le droit sur l’enfant. Absolument pas ! L’abus est un excès de droit et donc le contraire de l’usage normal d’un droit. On parle d’abus de confiance de la part d’ascendants sur mineurs par exemple ou d’abus d’autorité. En aucun cas la justice ne fait preuve de permissivité envers les abus sexuels. Le souci c’est qu’ils sont plus difficiles à prouver que le viol. La parole de l’enfant n’est pas toujours infaillible sur ce point. Il peut être perturbé ou sous influence d’un adulte.

    Reste la question de fond : comment mieux protéger l’enfant sans commettre d’injustices (comme la détention provoisoire prolongée dénoncée par les pétionnaires ou la qualification d’attouchements en crimes) ?


    • aude Guignard (---.---.19.225) 10 avril 2007 15:52

      « Un enfant soumis n’est pas un enfant consentant. Et la loi est claire sur ce point. »dit la taverne des poètes.

      C’est dommage que ce soit une simple affirmation sans preuve. j’attendais plus de précisions, en particulier que vous citiez les textes exacts sur lesquels vous vous appuyez, et que vous déclarez « clairs ». J’aimerais me faire une idée directe car répondre à une affirmation par une affirmation n’est pas suffisant pour faire avancer le débat et atteindre une vérité satisfaisante.Merci d’avance à la taverne pour ses précisions supplémentaires que j’attends.


    • La Taverne des Poètes 11 avril 2007 00:39

      Je réponds brièvement. Le consentement en droit n’est pas prouvé ipso facto parce que l’individu n’a pas mis d’obstacles à la réalisation de l’action. Il existe la théorie du vice du consentement dans le droit des contrats par exemple et, pour en revenir au sujet, l’enfant n’est pas présumé disposer d’un discernement égal à celui d’un adulte. Donc son consentement n’est pas établi pour l’unique raison qu’il a laissé l’adulte agir.

      Je contestais ce passage là de l’article : « agressions sexuelles sans violence, menace, contrainte ou surprise. Interprétation juridique : la victime était consentante et ce quel que soit son âge. » Je ne suis pas d’accord sur la traduction donnée. Cette qualification pénale ne signifie aucunement que le législateur admet qu’il y a consentement éclairé de l’enfant.


    • Yann Riché Yann Riché 10 avril 2007 12:09

      Bravo pour cet article « risqué ».

      Il confirme s’il le fallait que la « pédophilie », que l’acte incestueux est plus ou moins condamné par l’environnement donc par la société qui sait identifier les « faibles » ici les enfants qui furent considérer comme des petits « hommes » autonomes.

      Cela montre que la génétique n’est pas la cause de l’inceste...

      Cela montre aussi pourquoi il est plus facile de dire que c’est génétique même si cela est faux plutot que d’éduquer.

      Cordialement,


      • Joe Cool (---.---.54.168) 10 avril 2007 12:13

        Cette phrase : « La pédérastie qui désigne l’attirance érotique d’un adulte pour les adolescents (ou préadolescents), bien souvent associée à l’homosexualité,. » me fait un peu froid dans le dos.

        Associer ainsi pédérastie et homosexualité, aucun problème pour vous ? Une petite phrase comme ça, anodine, sans sources ni références et paf ! on stigmatise les homosexuels.

        Pas joli joli.


        • Gasty Gasty 10 avril 2007 12:27

          Oui ! c’est une erreur qui est ancré dans le vocabulaire populaire. « PD = homosexuel »

          Alors que PD peut aussi être associé avec hétérosexuel.


        • LE CHAT LE CHAT 10 avril 2007 15:54

          Je ne sais pas si Pierre Desproges aurait apprécié d’être qualifié de tafiole , même avec humour smiley


        • elisabeth 18 avril 2007 15:34

          L’auteur de ce texte parle de l’amalgame très fréquent que font bons nombres de gens entre la pédophilie, la pédérastie et l’homoséxualité et me semble t-il le dénonce.. .Cet amalgame est regrettable, dangereux.Nous vivons dans un monde ou les gens deviennent de plus en plus incultes et ne prennent même plus le temps d’aller consulter cet ouvrage que l’on nomme dictionnaire. La méconnaissance mène à la bêtise, au développement des idées toutes faites, au pire...


        • elisabeth 18 avril 2007 15:36

          L’auteur de ce texte parle de l’amalgame très fréquent que font bons nombres de gens entre la pédophilie, la pédérastie et l’homoséxualité et me semble t-il le dénonce.. .Cet amalgame est regrettable, dangereux.Nous vivons dans un monde ou les gens deviennent de plus en plus incultes et ne prennent même plus le temps d’aller consulter cet ouvrage que l’on nomme dictionnaire.Cette inculture mène aux idées toutes faîtes, au développement de la bétise, au pire parfois...


        • Guil (---.---.203.7) 10 avril 2007 17:15

          Ci-après, un communiqué illustrant le résultat de cette permissivité, datant certes de 1977, mais la loi existe toujours et personne ne parle de la supprimer.

          Vous me faites rire... Il n’est plus rien aujourd’hui qui soit plus lourdement condamné que l’abus sexuel sous toutes ses formes, même le meutre est en passe de devenir moins condamné que le viol, ce qui est un comble. Vous tombez dans l’exces inverse de ceux que vous dénoncez, et qui étaient vrais dans les année 70, plus maintenant : vous cherchez à sacralisez l’abus sexuel. Faire tomber un tabou, celui qui empêchait les victimes de parler, est une excellente chose à condition de ne pas tomber dans le tabou inverse, vers lequel on tend dangereusement aujourd’hui (outreau, etc...) et qui constiste à faire de l’abus sexuel un crime quais-religieux, de l’ordre du sacré absolu. L’abus sexuel est un délit ou un crime comme les autres, il ne faut ni le nier ni l’exacerber. La juste voie est toujours celle du milieu.


          • AIVI AIVI 10 avril 2007 19:50

            Bonjour,

            Concernant la loi et le consentement du mineur à un acte sexuel, les choses sont claires :

            - l’atteinte sexuelle sans violence, menace, contrainte ou surprise signifie que la victime était consentante et ce quel que soit son âge. En effet, nulle part dans notre loi, vous ne trouverez un article indiquant en positif qu’un enfant ou mineur de 15 ans ne peut pas être consentant à un acte sexuel. (cf affaire du Vaucluse).

            C’est pourquoi notre association a travaillé à changer cela car cela peut créer des injustices. Voici la proposition de loi rédigée en 2004, cosignée par 140 députés. Une mission d’information a suivi, un engagement du garde des sceaux mais des promesses toujours des promesses. Je dois dire que ce projet de loi est plutôt imparfait à mon goût, le compte rendu de la mission d’info aussi mais il faut faire avec, dès que l’on parle d’inceste, les esprits s’échauffent, les gens ont peur, deviennent agressifs ou fuyants. Il en va de même pour nos politiciens.

            Je suis bien placée pour parler de cette question car mon père a été jugé pour ce chef d’accusation (à l’époque attentat à la pudeur). Il a avoué les faits, il est marqué noir sur blanc dans le jugement qu’il m’a imposé des rapports sexuels complets et que j’étais consentante. J’étais mineure de 15 ans. J’avais 6 ans lorsqu’il a commencé. Mon avocate, Gisèle Halimi, n’a pas voulu plaider le viol, pour cette raison, qu’on considère mon silence comme un consentement et qu’il sorte libre. Croyez moi, j’ai été considérée comme consentante tout simplement parceque je n’ai pas dit « non » à mon papa d’1 m 80, ceinture noire de judo, violent, se battant à tout va, possédant des armes blanches... et il n’avait pas besoin de tout ça en fin de compte, le fait d’être mon père suffisait à me clouer réduire au silence.

            Lien vers la PPL : http://www.aivi.org/modules.php?op=modload&name=Sections&file=index&req=viewarticle&artid=70&page=1

            L’article du Vaucluse :

            VAUCLUSE : L’INCOMPREHENSIBLE ACQUITTEMENT POUR VIOL LA PROVENCE. 23/11/99. LAETITIA SARIROGLOU L’accusé avait reconnu avoir violé son neveu âgé de 11 ans et lui avait demandé pardon. Les jurés vauclusiens l’ont acquitté vendredi dernier à Carpentras « Depuis le prononcé de ce verdict je suis complètement perdu. Je n’arrive décidément pas à comprendre ». Une semaine après la décision de la cour d’assises de Vaucluse qui a innocenté son oncle de viol, Nathaniel, du haut de ses 18 ans, repasse sans cesse le film des événements dans sa tête, et se demande « s’il n’a pas raté un épisode » ! Six à huit ans de prison avaient été requis par l’avocat général pour un crime sexuel qui avait été reconnu par un Orangeois de 36 ans. Avant que la cour ne se retire pour délibérer, Marc Arnoux avait même imploré le pardon de son neveu. Quelques heures plus tard, à la surprise générale, il était acquitté ! « Il reconnaît les faits, me demande pardon et est acquitté. Lorsque le président a lu le verdict j’ai vraiment cru qu’on se foutait de moi, confie Nathaniel effondré. Même s’il a été innocenté, moi, je me considère toujours comme une victime. Mon oncle a commis un acte impardonnable qui a brisé ma vie. Mes blessures ne s’effaceront jamais ».

            Il n’a que 11 ans lorsque Marc Arnoux lui fait subir sa première relation sexuelle. « Je lui avais dit que j’avais mal. Mais il m’a répondu que c’était un mauvais moment à passer et qu’après j’en redemanderais » avait-il difficilement relaté à la barre lors du procès.

            « J’ai été complètement déphasé »

            Marc Arnoux a constamment affirmé, tout au long des débats, que son neveu était « consentant » ; qu’il l’avait même fait « pour lui faire plaisir ». « Après ce viol, j’étais complètement déphasé. Je ne savais plus où j’en étais sexuellement » explique Nathaniel. Le jeune homme n’hésite pas à dire qu’il a mené une véritable vie de « débauche » au cours de son adolescence. « Mais chaque fois que j’avais une relation avec un homme, j’étais consentant, contrairement à la première fois », précise-t-il.

            Aujourd’hui, alors qu’il attendait ce procès comme « une délivrance », « pour enfin vivre », ce verdict, incompréhensible, d’acquittement le plonge à nouveau dans le désarroi le plus total. Écouré, il lâche : « Je ne sais toujours pas s’ils ont fait le procès de mon oncle ou celui de mon homosexualité ». Laetitia Sariroglou

            SELON LES AVOCATS, « C’EST AU LEGISLATEUR DE REAGIR »

            Me Hervé Delépinau, l’avocat de Marc Arnoux, admet que « sur un plan moral, la responsabilité de son client est acquise ». "Il n’avait pas à avoir une relation sexuelle avec un mineur. Or, nous avons une cour d’assises qui a raisonné en droit positif, c’est-à-dire qu’elle a fait une application stricte de la loi. Il revient donc au législateur de réagir. Qu’il interdise enfin à un adulte d’avoir des relations sexuelles avec un mineur de moins de quinze ans. Si ce verdict peut choquer sur le plan moral, il faut tout de même replacer l’affaire dans son contexte et surtout éviter d’en dégager un principe ou d’en faire une interprétation extensive« . Vide juridique Si l’avocat de Nathaniel, Me Marc Geiger, déplore lui aussi ce vide juridique en matière de consentement des mineurs, il affirme cependant que le viol aurait pu être caractérisé. »Un des éléments constitutifs du viol est la « surprise ». On est surpris lorsqu’il nous arrive quelque chose à laquelle on ne s’attend pas ou qu’on ne connaît pas. Ce qui est le cas d’un enfant de 11 ans qui n’a aucune activité sexuelle, explique-t-il. Or, aucun texte prévoit l’incapacité d’un mineur à donner son consentement. Juridiquement, ça me heurte puisque de nombreuses dispositions du code pénal et du code civil prévoient qu’un mineur de 13 ans est responsable de droit. "En d’autres termes, on ne peut pas poursuivre pénalement et civilement un mineur de 13 ans parce qu’il ne peut pas manifester sa volonté. Cela revient donc à dire qu’à cet âge-là on ne peut donner valablement son consentement à un acte sexuel. On est donc « surpris » ; par conséquent le viol est caractérisé !"

            Ce que dit la loi L’article 222-23 du code pénal prévoit que "tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, commis sur la personne d’autrui par violence, contrainte, menace ou surprise est un viol". Le fait que ce viol soit commis sur un mineur ne suffit pas à constituer le crime ; c’est seulement une circonstance aggravante. La cour d’assises a estimé que les éléments constitutifs du viol (menace, contrainte, violence ou surprise) n’étaient pas réunis ; que l’infraction était donc inexistante. En revanche, si Marc Arnoux avait été renvoyé devant le tribunal correctionnel, juridiction compétente pour connaître des délits, il aurait pu être condamné puisque selon l’article 227-25 du code pénal "le fait par un majeur, d’exercer sans violence, contrainte, menace ni surprise une atteinte sexuelle sur la personne d’un mineur de quinze ans est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 5000 -francs d’amende« . »J’ai peur de comprendre qu’un viol dont on n’aurait pas réussi à déterminer qu’il a été commis avec violence, menace, contrainte ou surprise, soit désormais considéré comme un délit", regrette Me Marc Geiger, l’avocat de Nathaniel.


            • Senatus populusque (Courouve) Courouve 10 avril 2007 20:08

              Le mineur de quinze ans est toujours présumé non consentant à une relation sexuelle :

              Article 227-25 du Code pénal :

              « Le fait, par un majeur, d’exercer sans violence, contrainte, menace ni surprise une atteinte sexuelle sur la personne d’un mineur de quinze ans est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 75000 euros d’amende. »


            • La Taverne des Poètes 11 avril 2007 00:50

              Pouvez-vous retranscrire ici l’attendu du jugement (sans les noms des parties) qui parle expressément de « consentement » de la victime ? Cela me surprend beaucoup et je pense que vous avez lu cela plutôt dans la plaidoirie de l’avocat adverse et non dans le jugement (ou alors dans les « considérants » précédant la partie décision). Du moins je l’espère car sinon ce serait inquiétant....

              Je compatis sincèrement à votre situation mais je pense que vous intreprétez mal le droit. Normal, c’est une matière complexe. Mais ce qui compte, c’est le jugement lui-même et la partie qui comporte les « attendus que... »

              très cordialement


            • La Taverne des Poètes 11 avril 2007 01:06

              Je comprends mieux votre point de vue après lecture de ce passage du projet de loi :

              « En effet, certains arrêts et jugements ont établi que lorsque les éléments constitutifs d’un viol ne sont pas réunis, l’enfant ou l’adolescent qui admet avoir été « consentant », alors même qu’il a été victime d’un inceste, n’est plus que la victime d’une « atteinte sexuelle ». Et, l’atteinte sexuelle n’est pas un crime, mais un délit, puni au maximum de dix ans d’emprisonnement lorsqu’il est commis par un ascendant sur un mineur de 15 ans. »

              S’il y a pas abus sexuels non qualifiables de viol et si l’enfant dit qu’il était consentant les faits sont classés en délit et non en crime et sont jugés par le tribunal correctionnel. Mais ce n’est parce que l’enfant dit qu’il était consentant que la justice admet ce consentement : elle prend simplement en compte cette parole de la victime pour qualifier les faits. Et il existe une peine pénale applicable de 10 ans d’emprisonnement.

              Le projet de loi consiste donc à aggraver la qualification de ces actes pour leur appliquer une peine plus lourde.

              Vu !


            • La Taverne des Poètes 11 avril 2007 01:08

              Erratum : « S’il y a abus sexuels mais non qualifiables de viol ... »


            • AIVI AIVI 11 avril 2007 09:25

              C’est une interprétation. Mais vous savez comme moi que les textes sont sujets à interprétation justement. Certains juges ne pensent pas comme vous.

              Si vous me trouvez un texte de loi disant qu’un enfant est toujours présumé non consentant à un acte sexuel avec un adulte, je vous offre un diner, et je ne plaisante pas !

              En l’absence d’un tel texte, on obtient des résultats comme l’affaire du Vaucluse ou bien d’autres encore.

              Mais si cette conversation est intéressante, j’aimerais revenir sur le fond de l’article et vous demander si vous êtes partant pour ne plus employer « abus sexuel », « pédophilie », « attouchements » ?

              Merci Isabelle


            • La Taverne des Poètes 11 avril 2007 10:18

              Je voudrais réagir sur deux points : ce que dit vraiment la loi et ce que dit le projet de loi que vous mettez en lien dans votre commentaire ci-dessus :

              - La loi ne dit pas, contrairement à ce que vous écrivez dans votre article, qu’il y a un droit à toucher les enfants de façon perverse et que seuls seraient sanctionnés les abus. Tous les atttouchements sexuels sur mineur sont passibles de peines pénales. La loi ne dit pas non plus que les « simples attouchements » n’ont aucun caractère de gravité. Peut-être des gens le pensent-ils parce que la qualificatin juridique de « simples attouchements » peut prêter à cette interpréation pour un non juriste mais elle qualifie bien ces infractions comme des faits graves.

              - Le projet de loi veut créer un crime d’inceste distinct puisque actuellement en France ce crime est englobé dans celui plus général d’abus sexuels. Néanmoins, la France n’est pas en contradiction avec l’ONU car l’inceste est puni comme circonstance aggravante et les peines sont lourdes. Le projet veut aussi que l’inceste soit systématiquement qualifié de crime. Ce qui est louable ici, c’est que c’est le point de vue de la victime qui est pris en compte pour le travail de réparation psychologique et pour prolonger à son profit le délai de prescription (qui est plus long pour les crimes que pour les délits). Vu comme cela, on ne peut qu’être d’accord. Mais là encore, il y a des risques : comment définir l’inceste ? (Où commence-t-il ? Les experts seront très partagés sur la question) Comment prouver l’inceste commis sans pénétration 30 années après ? On aura au procès la parole de l’un contre la parole de l’autre sans pouvoir trancher dans des procès destructeurs pour les victimes à coups de plaidoiries. Pourquoi retirer aux juges le pouvoir d’apprécier si les faits relèvent du délit ou de crime selon les cas ? (Je suis prudent sur le systématisme proposé par le projet...) Si la loi définit tout inceste comme un crime, la peine très lourde pourra sembler disproportionnée par rapport non seulement aux faits commis, mais aussi par rapport à des faits similaires commis par des pédophiles hors inceste. Donc je dis que c’est très délicat de légiférer ici. Mais je ne suis pas expert de ce dossier et donc je m’abstiendrai de m’avancer plus en avant sur ce terrain sensible.

              En conclusion, je ne suis convaincu que sur le fait que le consentement de l’enfant ne doit jamais être retenu pour exempter l’auteur de sa faute ou pour l’exonérer d’une peine conséquente. Pourquoi pas également distinguer juridiquement nettement l’inceste sur mineurs des autres cas de pédophilie ? Mais alors avec les précautions que je signale ci-dessus.

              Je crains n’avoir pas mérité votre invitation à dîner...


            • Kieser ’l Baz (---.---.8.197) 11 avril 2007 18:05

              La Taverne des Poètes a dit : « Reste la question de fond : comment mieux protéger l’enfant sans commettre d’injustices (comme la détention provoisoire prolongée dénoncée par les pétionnaires ou la qualification d’attouchements en crimes) ? »

              Il me semble que l’article fait dériver les commentaires vers une appréciation juridique, forcément froide, objective et sans le sentiment qui accompagne la victime. Me plaçant de ce côté-là, j’ai à constater depuis de nombreuses années que le crime d’inceste n’est pas reconnu - comme cela est judicieusement relevé par La Taverne des Poètes -, que loin d’être entendue, la parole des victimes n’est pas prise en compte comme il se devrait. De ce point de vue, l’affaire postOutreau s’empara d’un problème purement judiciaro-médiatique au détriment des enfants victimes. Ce fut aussi le procès de la stupidité vénale de quelque expert douteux. Car il y eut bel et bien des enfants victimes, comme à Angers et bientôt ailleurs. Que le législateur ait eu à doser et à hiérarchiser les délits relève d’une forme de vision objective et matérialiste : le fait, rien que le fait... Si bien qu’en effet, après 38 ans, c’est une parole contre une autre. Et, à ce jeu, compte tenu des outils donnés à l’instruction, le doute bénéficie souvent à l’accusé. Et je ne cite pas le nombre considérable de fois où l’expert commis par le juge s’en prend à la victime qu’il accusera de simulation, dont il dira à coup sûr les tendances bipolaires, marquées d’un profond narcissisme, et j’en passe... Et si les experts se perdent en débats stériles c’est que nous subissons, en France, des effets d’une sorte d’archaïsme qui imprègne profondément les Sciences humaines. La nomenklatura neofreudienne n’est pas prête à consentir que l’inceste existe, qu’il n’est pas un fantasme ni l’expression d’un « désir de l’enfant ». Les gérontes commis en experts ne peuvent admettre que leurs bréviaires n’aient pas envisagé ces monstruosités. Cependant, il existe une autre génération d’experts, qui, formée à l’expérience du terrain, ne peut plus consentir à entendre ces dogmes d’un autre âge. Et nous disposons d’outils performants pour dire si telle personne, même 50 ans après a subi viol ou attouchement et de quel ordre est le préjudice sur sa vie. Il me semble devoir rappeler maintenant que l’exercice du droit et la sanction qu’il définit se fondent aussi sur l’évaluation du préjudice subi par la victime. De ce point de vue, loin des rhétoriques de salon et plus habitué au terrain qu’aux signatures d’ouvrages savants, j’ai à témoigner que les préjudices subis par des enfants sont considérables quand un parent abuse d’eux. Et ce n’est pas la notion de violence de l’acte qui fait la différence entre viol et attouchement, c’est la profondeur du préjudice, sa durée et, toutes les victimes s’accordent sur ce point, le climat malsain, glauque dans lequel la victime est tenue qui imprègne un marque profonde dans la psyché au point de la marquer si profondément qu’on en retrouve les séquelles parfois plus de 60 ans après. Pendant que vous, mesdames et messieurs, férus de droit, vous jonglez avec les mots, d’autres ramassent les miettes sanglantes de nombreuses âmes volées. Illel Kieser ‘l Baz, psychologue clinicien.


              • La Taverne des Poètes 11 avril 2007 18:29

                « Pendant que vous, mesdames et messieurs, férus de droit, vous jonglez avec les mots, d’autres ramassent les miettes sanglantes de nombreuses âmes volées. » :

                Le droit existe aussi pour protéger les victimes et je crois que mes propos l’expliquent assez. Ce n’est pas en crachant sur les juristes que vous allez aider les victimes. Les juristes aussi ont une âme !


              • Kieser ’l Baz (---.---.8.197) 11 avril 2007 19:29

                Je n’ai pas craché sur les juristes mais sur leur exercice froid et rationnel qui s’empêtre dans un vaste écheveau de règles... perdant ainsi tout contact à la réalité. Quant à la valeur du sentiment, vous confondez avec l’emphase émotionnelle voire le déchaînement des passions qui, je vous l’accorde, n’incline pas à la justice. C’est une dimension humaine qui fut aux sources du droit et qui le demeure encore dans le rendu d’une jugement, ne vous en déplaise...

                Mais que vaut un droit sans le sentiment ? Et ce sentiment, je l’ai dit et l’affirme, ce sont les victimes qui en livrent la mesure par l’ampleur du préjudice qu’elles ont subi pas les clercs.


              • AIVI AIVI 12 avril 2007 10:16

                D’accord avec vous à 2000%. D’ailleurs le Canada a su évoluer dans un sens plus réaliste en tenant compte des conséquences sur la victime lors du jugement. Les séquelles physiques et psychologiques viennent alimenter les preuves de l’acte physique. D’où notamment la création de « la déclaration de la victime », document à rédiger par elle énumérant les conséquences de l’infraction sur sa vie dans tous les domaines. Le juge peut utiliser ce document au moment du jugement. Même une rétractation de la victime peut être, selon le contexte, utilisée comme un commencement de preuve contre l’auteur des faits. Nous avons plaisir à voir ces avancées grâce à nos membres canadiens qui nous expliquent comment ils vivent les procédures. Il s’avèrent qu’ils sont bien mieux traités que les victimes françaises. Bref, nous préconisons la mise en place de véritables recherches sur le sujet afin d’en tirer des enseignements, de former les professionnels, ce qui rendra plus humain le traitement de telles affaires. Sur notre site, les réponses des candidats à la présidentielle à nos question. Ce jour, nous venons de recevoir les réponses de Bayrou et Royal. Isabelle Aubry


              • fichtre (---.---.146.2) 12 avril 2007 18:39

                « Nous avons plaisir à voir ces avancées grace à nos membres canadiens... »


              • La Taverne des Poètes 13 avril 2007 11:19

                Quand le sentiment l’emporte sur le droit, cela donne des choses graves comme lorsque Madame Royal a déclaré publiquemnet coupable un instituteur, allant à l’encontre de la décision du procureur qui, lui, connaissait le dossier. Elle était ministre alors et ses propos ont été largement relayés par les medias, l’instituteur s’est suicidé. Par contre, le sentiment fut totalemnt absent dans la lettre de réponse de Mme Royal à la famille du défunt, qui fut d’un ton glacial et ne comportait pas le moindre mot d’excuse ni de regret d’avoir entaché gravement la présomption d’innocence et interrompu le cours de la justice.

                Donc doucement sur les sentiments. C’est le domaine des thérapeutes, des associations de défense et des avocats mais pas cela ne doit pas être le ressort principal du législateur ni du juge.

                D’ailleurs, j’ai lu les réponses des candidats et je trouve la réponse de Bayrou juste et ouverte sur la question posée par l’auteur de l’article. On peut aller plus loin dans l’aide aux victimes et dans la détection et dans le traitement des cas d’inceste. La réponse de Mme Royal force trop sur le sentiment, tient trop de la posture.


              • Guil (---.---.203.7) 11 avril 2007 18:56

                Il me semble que l’article fait dériver les commentaires vers une appréciation juridique, forcément froide, objective et sans le sentiment qui accompagne la victime.

                Il est heureux que la justice soit ainsi... Si on jugeait sur le « sentiment qui accompagne la victime » notre justice deviendrait une justice de vengeance, ce qui serait très grave et entrainerait bien d’autres victimes. La justice juge des faits, pas des sentiment. Il est demandé au juge - ou au juré - de juger sereinement, sans jamais se laisser porter par ses sentiments ni ceux des autres (partie civile, accusé, entourage des uns et des autres...). Chose pas toujours facile, mais absolument nécessaire pour que la justice reste juste (ce qui, depuis quelques années, est une gageur en France...).


                • Kieser ’l Baz (---.---.8.197) 11 avril 2007 19:47

                  J’ai répondu plus haut.

                  Il est regrettable que vous confondiez sentiment et passion. Il serait alors intéressant de revenir aux sources du droit avant de s’embourber dans des arguties sûrement intéressantes mais qui sont loin de la réalité.

                  Le crime d’inceste n’est pas pris en compte et, pour l’instant, nous n’avons guère de moyens de le prendre en compte. C’est au moins ce que les juristes, plus haut, disent à l’envie.

                  Conséquence : écouter les victimes ! 50 ou 60 ans après il n’y a plus les « faits » mais des maux de victimes. Ils sont encore là ! Et le droit ne peut pas les placer au même niveau que les paroles du prédateur. Sinon c’est que quelque chose ne va pas au royaume de notre merveilleuse justice.


                • (---.---.203.7) 13 avril 2007 12:02

                  Et le droit ne peut pas les placer au même niveau que les paroles du prédateur.

                  Bien sûr que si ! Parcequ’en droit, tant que le jugement n’a pas été rendu, on ne SAIT PAS si l’accusé est coupable ou non. On ne sait donc pas si c’est un « prédateur ». Sa parole face aux juges est donc à mettre au même niveau que celle de la partie civile. Ne pas le faire serait très dangereux...


                • Illel Kieser ’l Baz (---.---.253.179) 13 avril 2007 12:53

                  Au vu des réactions suscitées par la volonté de certains d’entre nous - victimes d’inceste ou de sévices sexuels dans l’enfance - de donner corps à la diffusion de leurs maux, confrontées aux mots de ceux qui ergotent sur la hiérachie à établir entre « attouchement » et viol, il me semble devoir rappeler certains éléments fondateurs du droit.

                  Et ces rappels nous dévoilent les éléments fondamentaux, anthropologiques du droit de chacun à vivre dans une société que nos parents ont contribué à bâtir. Que les acteurs de la transmission, les parents, viennent à faillir et l’on soupçonne l’ampleur d’une dévastation

                  D’un point de vue juridique, la loi écrite, édictée par le législateur, constitue l’une des sources du droit, de même que les lois non écrites comme la coutume, ensemble de règles non écrites, admises comme obligatoires. C’est ce que nous appelons le droit positif par opposition à un droit qui serait antérieur au droit précisé par le législateur. Le droit positif est constitué par l’ensemble de ces règles.

                  Mais on peut se demander sur quoi se fonde la loi qui émane du pouvoir législatif.

                  Le législateur n’agit certes pas par intérêt ni par impulsion, mais plutôt selon certaines exigences qu’il est conscient de devoir satisfaire, entre autre son inscription dans la ligne d’une culture rationaliste et matérialiste qui s’est affirmée dans l’histoire européenne avec la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme et du Citoyen - notons en passant, que, concernant l’homme, on ne sait s’il s’agit de l’espèce, l’humanité, ou du genre, le masculin. Il existe donc une double source du domaine législatif ou juridique. Ce que nous nommons droit positif qui repose sur les lois positives écrites ou non écrites, d’une part et , d’autre part, les fondement généraux de ces lois et droits dits positifs, nous parlerons alors de lois et de droit naturels.

                  On entend par ce terme « naturel » ce qui est indépendant de l’homme, ce qui n’est le produit ni de l’esprit ni de la raison mais qui découle d’une nécessité fondamentale à l’édification d’une société. Le tabou de l’inceste, universel, fait partie de ces fondements.

                  Il existe des forces naturelles comme le vent ou l’eau, qui sont antérieures à l’œuvre des humains et d’autres forces comme l’énergie nucléaire, l’électricité, etc. qui en sont l’œuvre. « Nous pouvons donc caractériser la loi naturelle et le droit naturel comme antérieurs à l’activité législatrice de l’homme et indépendants d’elle. Ils découlent de la nature même des choses : étant donné ce que sont les choses, ils ne peuvent être autrement. Ils s’imposeraient à tout esprit comprenant bien cette nature ; mais comme elle reste mystérieuse et sujette à discussion, les lois naturelles manquent de la positivité des lois positives ; ce ne sont pas des données de fait, mais des conceptions de l’esprit." » (Paul Foulquié, l’action)

                  En ce sens, le tabou de l’inceste relève d’un principe qui est antérieur à l’édification de toute culture, il lui est même nécessaire. La transgression de ce même tabou relève alors d’une atteinte faite à l’antériorité du droit positif.

                  S’échiner à trouver des éléments positifs, matériels, tangibles, pour apporter la preuve du crime d’inceste relève donc d’une aberration au plan du droit constitutif de toute société.

                  Dans la même lignée, reprocher aux victimes d’inceste de vouloir exercer une sorte de télescopage, voire de vengeance, dans le temps en rapportant au jour de la plainte des faits qui remontent parfois à plus de 20 ans, au prétexte qu’elles porteraient atteinte à une personne qui aura changé, c’est donner crédit et assistance au bourreau et non à la victime dans le préjudice radical quelle aura subi. Il se trouve que les prédateurs sexuels ne changent pas ! Le taux de récidive est le plus élevé qui soit. Regardez, écoutez, SVP !

                  20 ou 30 ans après la victime subit encore, le prédateur jouit toujours !

                  C’est aussi douter de leur faculté de discernement, ce que ne manquent pas de souligner certains experts nourris et abreuvés des bréviaires d’une psychanalyse mal digérée...

                  On pourrait donc dire qu’une loi positive contraire à la nature des choses et/ou au bien commun serait injuste, contraire au droit non positif mais à un droit supérieur et antérieur à toute loi humaine et au droit naturel. Dans la pratique juridique, on voit bien la part de contingence et d’arbitraire inévitable en ce qui concerne les détails des règlements et des procédures dans la construction et l’application de la loi. Or, de ce point de vue, les victimes d’inceste subissent de plein fouet une absence de prise en compte de leur dimension humaine.

                  Au procès de Bobigny, en octobre et novembre 1972, avec l’accord des prévenues, Gisèle Halimi choisit de faire le procès de la justice. « J’ai toujours professé que l’avocat politique devait être totalement engagé aux côtés des militants qu’il défend. Partisan sans restriction avec, comme armes, la connaissance du droit « ennemi », le pouvoir de déjouer les pièges de l’accusation, etc. (...) Les règles d’or des procès de principe : s’adresser, par-dessus la tête des magistrats, à l’opinion publique tout entière, au pays. Pour cela, organiser une démonstration de synthèse, dépasser les faits eux-mêmes, faire le procès d’une loi, d’un système, d’une politique. Transformer les débats en tribune publique. Ce que nos adversaires nous reprochent, et on le comprend, car il n’y a rien de tel pour étouffer une cause qu’un bon huis clos expéditif. » (GH)

                  Et, ces mots de Montesquieu sont encore à méditer : « Les lois, dans la signification la plus étendue, sont les rapports nécessaires qui dérivent de la nature des choses. » C’est dire que ceux qui ont le pouvoir cherchent toujours à justifier le bien fondé de leurs décisions législatives en faisant appel à la raison et aux exigences d’un droit concret. En ce sens aussi, une charte des droits ne fait qu’expliciter ce que l’on considère comme des droits naturels préexistants. Si « la loi naturelle ou le droit naturel se réduisent à quelques principes généraux » (P. Foulquié), concernant la transgression du tabou de l’inceste il reste un long chemin à parcourir.


                • Illel Kieser ’l Baz (---.---.253.179) 13 avril 2007 13:54

                  La parole, comme traduction d’une preuve de lésion irréversible.

                  La parole du prédateur comme déni de faute et de responsabilité.

                  Cela impose l’arbitrage d’experts formés à entendre cela. Mais, avant, il faudrait que le legislateur admette le dommage fait à la vicitme comme élément à charge... On est loin du compte.


                • dan (---.---.254.253) 12 avril 2007 18:31

                  Je pense qu’il faut remplacer le mot pédophilie qui est un beau mot étymologiquement, par le mot pédosexuel plus approprié.Je pense aussi que l’auteure n’est pas objective emportée par la passion et ce qu’elle a vécu.D’autre part à 13 ans on est plus un enfant mais un jeune adulte certes non expérimenté(on peut être père ou mère),même à cette age on peut avoir le bac,traverser l’océan seul sur une barque,être champion olympique et même être prophète.En plus la condamnation de la pédosexualité n’est pas universelle.Dans l’islam chiite elle est sacralisée par le mariage.


                  • Senatus populusque (Courouve) Courouve 13 avril 2007 12:21

                    Le délit d’inceste élargi existe ; il y a donc distinction entre cette infraction et les abus sexuels en général lorsque la victime a entre 15 et 18 ans :

                    Article 227-27 du Code pénal :

                    Les atteintes sexuelles sans violence, contrainte, menace ni surprise sur un mineur âgé de plus de quinze ans et non émancipé par le mariage sont punies de deux ans d’emprisonnement et de 30000 euros d’amende :

                    1º Lorsqu’elles sont commises par un ascendant légitime, naturel ou adoptif ou par toute autre personne ayant autorité sur la victime ;

                    2º Lorsqu’elles sont commises par une personne qui abuse de l’autorité que lui confèrent ses fonctions.


                    • dan (---.---.254.253) 13 avril 2007 18:42

                      En définissant la pédosexualité comme la relation sexuelle avec actes de pénétration entre une personne adulte et un enfant et en la différençant de la pédophilie définie par le simple amour pour un enfant sans actes sexuels de pénétration,alors je pense que la pédosexualité est moralement condamnable et il est légitime de la condamner légalement non pas par des motifs religieux ou moralisateurs intolérants ou sectaires mais par des motifs purement physiologiques et scientifiques i.e l’appareil génital de l’enfant n’ est pas assez formé et développé pour avoir de tel type de relation sexuelle.Il faut aussi différencer la pédosexualité avec l’abus sexuel par une personne ayant autorité qui est aussi condamnable.Mais le grand problème est de savoir pourquoi il existe des pédosexuels car il semble incroyable qu’on puisse avoir le désir d’avoir des relations sexuelles avec un enfant disons un bébé de 3 ans.Pour moi de tels pédosexuels ne peuvent être que des malades ou des pervers fous et donc aussi des malades.J’ai une thèse sur l’origine de cette maladie:peut-être que pour de telles personnes leur sexualité infantile a été contrecarrée,frustées,elles ont fait leur fixation sur les enfants .


                      • chmoll 14 avril 2007 10:37

                        ouai c’est vrai ça ,faut arrèter les gros mots

                        faut plus dire viol, faut dire effraction


                        • elisabeth 18 avril 2007 15:39

                          L’auteur de ce texte parle de l’amalgame très fréquent que font bons nombres de gens entre la pédophilie, la pédérastie et l’homoséxualité et me semble t-il le dénonce.. .Cet amalgame est regrettable, dangereux.Nous vivons dans un monde ou les gens deviennent de plus en plus incultes et ne prennent même plus le temps d’aller consulter cet ouvrage que l’on nomme dictionnaire.Cette inculture mène aux idées toutes faîtes, au développement de la bétise, au pire parfois...


                          • azerty1710 14 septembre 2008 00:38

                            Je ne comprends pas trop cette phrase : ’’la situation rappelle étrangement les arguments d’Outreau qui, c’est le moins qu’on puisse dire, ne bénéficient pas aux victimes’’.

                            Mais ces arguments sont bons et on l’a vu à Outreau : on a gardé en prison des innocents et il n’y avait pas autant de victimes qu’on le pensait.

                            Une autre chose me dérange : vous semblez regrettez que certaines victimes semblent aller bien après ce qu’elles ont subi. Mais tant mieux non ? Si elle vont réellement bien, pourquoi vouloir les obliger à ressentir un traumatisme qu’ils ne ressentent pas.

                            Cordialement

Ajouter une réaction

Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page

Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.


FAIRE UN DON






Les thématiques de l'article


Palmarès