A propos de l’article de Hervé Kempf dans Le Monde du 8/10/2008.
Dans cet article, Hervé Kempf discute les limites des ressources en lithium pour le développement des voitures électriques. Nous voudrions ici apporter des précisions et rectifier quelques erreurs.
Il est évident, comme l’a souligné le président de la République dans son discours d’inauguration au Salon de l’auto, que la voiture électrique suscite un très grand intérêt :
- d’abord pour des raisons écologiques dans notre pays où l’électricité est produite avec peu d’émissions de CO2 ;
- ensuite par suite de l’augmentation des prix du pétrole qui pénalise gravement ceux de nos compatriotes pour lesquels la voiture individuelle reste un moyen de transport incontournable ;
- enfin et surtout parce que les nouveautés du développement technique le rendent économiquement et techniquement faisable : les nouvelles batteries au lithium, en particulier au lithium-phosphate de fer fournissent par leurs performances et leur fiabilité une alternative sérieuse aux moteurs thermiques actuels, que ce soit pour la circulation urbaine de voitures légères ou celle de véhicules plus lourds en configuration hybride rechargeables.
C’est dans ces circonstances que paraît cet article qui contient quelques contrevérités concernant les obstacles que la Nature mettrait au développement de cette filière. Il est affirmé notamment que les ressources en lithium sont problématiques et que son prix pourrait augmenter de manière rédhibitoire.
Nous voulons ici réfuter ces idées fausses. Dans les techniques actuelles, on peut (typiquement) avec une batterie de 10 kWh faire 100 km. Cette batterie pèse de l’ordre de 100 kg, elle coûte quelques milliers de dollars et elle peut être rechargée de 1 000 à 3 000 fois, parfois en vingt minutes, suivant le modèle. Une telle batterie contient à peu près 1 kg de lithium (1). Va-t-on manquer de lithium ? On trouve des estimations des ressources de lithium exploitables par exemple dans :
minerals.usgs.gov/minerals/pubs/commodity/lithium/lithimcs06.pdf, données par les services gouvernementaux américains en 2006. Les réserves prouvées sont estimées à 4.1 mégatonnes et les réserves probables à 11 mégatonnes (voir aussi le site :
http://lithiumabundance.blogspot.com)
.
Cela veut dire qu’on peut, évidemment avec un développement de la production (qui est en ce moment autour de 20 000 tonnes), alimenter des milliards de voitures ! Par ailleurs, il y a des milliards de tonnes de lithium dans les océans et l’on dispose déjà de procédés pour les exploiter. Il n’y a donc aucune possibilité de pénurie.
Hervé Kempf argue également de la montée récente du prix du lithium, parallèle aux autres matières premières, pour montrer les limites de ce procédé. Le kilo de lithium d’une batterie qui coûtera encore longtemps quelques milliers de dollars ne fait que quelques dollars ! Il y a une très grossière erreur sur les ordres de grandeur !
Nous pensons que, contrairement à ce que cet article laisse croire, le développement de la voiture électrique, en particulier grâce aux récentes percées technologiques sur les batteries, apportera une grande contribution à la préservation du climat et aux limitations des émissions de gaz carbonique, pourvu évidemment que l’électricité nécessaire soit produite sans émission de CO2.
(1) Exemple : une batterie Li-Ion d’ordinateur fournit 90 Wh pour un poids de Li de 8 g.