Peut-on centrer une réflexion critique sur les vaccinations à partir du virus et de ses caractéristiques générales et en évitant de dissocier selon les maladies ? Telle est la question à laquelle certains ont répondu affirmativement ici, si j’ai bien compris leur propos. Franchement, je ne pense pas que ce soit possible. Je vais essayer de l’expliquer sans esprit de polémique.
Les maladies contre lesquelles on vaccine sont autant à bactérie qu’à virus. Deux des 3 vaccinations encore obligatoires pour les enfants sont dues à des bactéries : la diphtérie et le tétanos. Pour ce dernier, le bacille séjourne le plus souvent dans la terre, agit par sa toxine, est anaérobie et la maladie ne provoque pas d’anticorps. Autant d’éléments spécifiques à prendre en compte pour apprécier la vaccination. La coqueluche, les méningites Hib, la typhoïde et le choléra sont aussi provoqués par des bacilles.
Le bacille de Koch n’est pas une bactérie comparable aux précédentes. Il est maintenant classé dans la famille des mycobactérie depuis que les méthodes de préparation pour l’observation ont permis d’éviter de sectionner les filaments dont il est constitué alors qu’on le voyait auparavant en bâtonnets. Le BK est ainsi devenu Mycobacterium Tuberculosis. Le BCG est aussi une mycobactérie. La tuberculose comme le BCG ne provoquent pas la formation d’anticorps comme c’est le cas pour la diphtérie et la typhoïde par exemple. La tuberculose et le BCG occupent ainsi une place très à part et doivent être absolument traités de façon spécifique.
Les virus de la polio se propagent surtout par l’eau souillée par des excréments humains. Le traitement des eaux usées joue donc un rôle essentiel. L’OMS connaît de très grosses difficultés pour éliminer cette maladie dans les régions de l’Inde où l’eau souillée est la seule disponible. Peut-on éliminer la polio par la seule vaccination sans résoudre auparavant ce problème de l’eau ? La question n’a pas encore reçu de réponse positive.
Les virus de la grippe, très volatils et mutant aisément, ont des spécificités dont on a beaucoup parlé avec le H5N1. Il est évidemment indispensable d’en tenir compte. Leur comportement n’a rien à voir avec les entérovirus de la polio. Il est impossible de les traiter ensemble en avançant leurs propriétés communes.
Au contraire de la grippe (heureusement), si la variole se propage par l’air, c’est à très faible distance du malade (2 mètres en l’absence de ventilation). Cette propriété a permis une définition efficace des contacts : les personnes ayant rendu visite au malade. Après l’échec des grandes campagnes de vaccination, ce fut cette connaissance qui permis, après localisation d’un malade, de rechercher efficacement ses contacts et de les isoler avant qu’ils ne deviennent contagieux, interrompant ainsi la chaîne de transmission. Ce fut l’une des conditions essentielles de la victoire sur la variole. Mais cela ne pourrait s’appliquer à la polio par exemple où à la grippe car les contacts d’un malade sont beaucoup plus difficile à définir et à retrouver.
Les virus des gastro-entérites se propagent souvent en famille par des mains souillées par les selles alors que l’hépatite B est en particulier à transmission sexuelle et que la fièvre jaune se propage par un moustique. Sous la direction de Soper et financée par la Fondation Rockfeller, une gigantesque campagne contre les moustiques avait permis, en 1960, d’éliminer la fièvre jaune et la dengue d’Amérique du Sud et Centrale. Le refus des américains du sud de se plier aux exigences de cette lutte (visite des jardins, modification des façades des maisons..) permis au moustique de se maintenir au sud des USA et fit échouer l’entreprise. Le moustique a pu reconquérir le terrain perdu, ramenant la fièvre jaune et la dengue avec lui en Amérique du sud.
Cela me paraît clair, il n’est pas possible de se contenter de généralités communes à tous les virus pour réaliser une analyse intéressante et utile. D’ailleurs les études expertes soutenant telle ou telle vaccination le font toujours de manière spécifique. Mais c’est un travail énorme : la seule audition publique sur le seul BCG dura 2 jours pleins et l’ensemble des interventions, y compris celles faites depuis la salle, ont été compilées dans un ouvrage de 382 pages. Le rapport de la commission d’audition faisait 40 pages. Le seul rapport du HCSP sur la vaccination contre la varicelle fait 78 pages (hcsp.fr). L’ouvrage Droit, éthique et vaccination, rapport commandé par l’état, fait 434 pages. Le rapport officiel sur l’éradication de la variole en fait 140. Le calendrier vaccinal 2007 fait 16 pages. Les publications sur les vaccinations représentent un volume énorme. Elles sont toujours spécifiques de la maladie concernée, voire d’un des virus de cette maladie, comme par exemple les avis et rapport du Conseil d’hygiène publique (HCSP) ou encore ceux de l’Académie de Médecine (academie-medecine.fr). C’est pourquoi la longueur de l’enquête d’AgoraVox n’a rien d’exorbitant.
Pour faire un travail critique sans s’égarer, que faire ? Etudier patiemment cette littérature où j’ai constaté que les comparaisons statistiques jouent un rôle très important et n’ont rien à voir avec les virus. On peut y rechercher les lacunes et les erreurs de méthodes. C’est aussi un travail considérable.
Certains diront peut-être que c’est de l’antivaccinalisme que de faire une telle recherche. J’étais mathématicien et mon travail consistait, pour une très large part, à chercher les erreurs et les lacunes dans les démonstrations, et d’abord dans les miennes. Pour moi c’est tout naturel et je pense que cela peut être très utile pour faire progresser les méthodes de l’épidémiologie. Je l’ai constaté à l’audition BCG et j’ai mis des articles en ligne à ce sujet, les méthodes statistiques et mathématiques utilisées pour le BCG sont dignes du café du commerce et cela ne peut pas rester en l’état.
Il ne faut pas oublier que les principaux adversaires des vaccinations ne sont pas les antivaccinalistes mais les virus et les bactéries. Avec eux nous n’avons pas le droit de jouer.
L’antivaccinalisme est une réaction au vaccinalisme qui n’a rien à voir avec les vaccins qui sont un produit alors que le vaccinalisme est un comportement humain. On n’est jamais pour ou contre un produit mais pour ou contre un certain usage de ce produit. Mais le vaccinalisme a sacralisé le vaccin et a ainsi généré une opposition. Opposition au produit, à l’usage en vigueur ou à cette attitude abusivement zélatrice ? Pour ma part, je ne suis pas antivaccin (pourquoi être contre un produit ?) ; je pense que l’usage qui en est fait doit être repensé et devenir plus ciblé ; je pense que les pires adversaires du vaccin hépatite B en France furent ses plus grands zélateurs qui ont détruit la confiance que le public avait placé en eux.
Je voudrais répondre à zyx qui pense qu’il n’y a pas d’étude possible sur le sujet sans reprendre de a à z (en passant par x et y sans doute !) l’étude de chaque vaccin et des virus...Vaste programme !!! Comme moi-même je me livre à une critique sur le sujet avec des articles en ligne (questionvaccins.canalblog.com et vaccinbcg.canalblog.com) je me sens aussi concerné par ce type de remarque.
Pour ma part, je ne m’occupe en fait pas vraiment des vaccins qui sont des produits, ni même des vaccinations qui sont un acte médical mais du discours fait sur eux par les diverses composantes de l’autorité vaccinale. Parmi les composantes principales il y a l’OMS pour l’ensemble du monde et pour la France, le Conseil d’hygiène publique, l’Académie de médecine, l’Afssaps, l’InVS, l’Inserm, l’Inpes etc. En étudiant de près tous ces discours, en les confrontant les uns aux autres, j’ai constaté quoi ? Des contradictions, des incohérences, des lacunes, des erreurs de méthodes, tout particulièrement en ce qui concerne l’usage de la statistique mais aussi de la règle de trois quand les experts oublient que dans le fameux problème d’école primaire « 3 choux coûtent tant, combien coûtent 10 choux ? », tous les choux doivent être au même prix (voire à ce sujet sur vaccinbcg, catégorie expertise, mon article « Cas évités par le BCG : un calcul très simpliste »). Et parmi les oublis majeurs voire dans la même catégorie « l’expertise était dans la lune ».
Pour constater tout cela il n’est nullement nécessaire d’entrer dans la composition chimique et biologique du vaccin ni de discuter sur ses propriétés immunologiques. Pour ma part, je ne cherche pas à faire une contre-expertise sur les vaccins et vaccinations qui conduirait à des conclusions très différentes de celle des organismes officiels mais à montrer ce qui ne va pas dans les expertises et affirmations officielles.
Je me suis livré à une analyse de ce type sur l’audition BCG de novembre 2006. Elle est en ligne sur le site gestion santé (plus de 20 pages) et je donne le lien sur vaccinbcg dans l’article « L’affaire du BCG : une thérapie psychologique ? ». Dans ma démarche je reste fidèle à la discipline qui m’a formé, les mathématiques, qui veulent que la démonstration soit plus importante que le théorème : le théorème est peut-être vrai mais la démonstration donnée n’est pas acceptable. Et j’ai trouvé tant et tant à dire sur les défauts des démonstrations relatives aux vaccinations que cela m’interpelle profondément.
Je propose de dissocier le problème de l’obligation vaccinale ainsi :
1- Suppression de l’obligation du DTP pour les enfants, même si celui-ci resterait fortement recommandé. La couverture vaccinale ne devrait pas en pâtir car ce sont les vaccins contre le tétanos (non contagieux) et contre la coqueluche (non obligatoire)à laquelle le DTP est souvent associé qui font passer les 2 autres vaccins.
2- Clause de conscience pour les professionnels soumis à certaines obligations. Cette clause serait plus facile à organiser qu’en population générale. Certains postes pourraient ainsi ne pas pouvoir être confiés aux professionnels refusant certaines vaccinations.
3- Maintenir, comme le prévoit la loi de santé publique du 9 août 2004, la possibilité d’établir une obligation vaccinale circonstanciée en cas d’épidémie grave. Encore faudrait-il, parmi les conditions à satisfaire, que le risque épidémique soit avéré, disposer d’un vaccin suffisamment efficace, et suffisamment peu nocif, qu’il n’existe pas d’autres moyens de lutte et de protection, que les autres pays soumis au même risque utilisent la même stratégie, que le soutien aux victimes de la vaccination soit assuré, y compris en cas de doute...
Ainsi, le problème du DTP pour les enfants ne serait pas confondu avec le problème du retour de la variole ou d’une pandémie grippale par exemple, ou le problème des agents de laboratoire travaillant sur des produits biologiques en provenance de malades graves.
Comme mon précédent message n’a pas l’air d’avoir été apprécié alors que je ne donnais que des infos et non mon opinion, je reviens sur le sujet en donnant les termes
exacts tels qu’ils figurent sur le site de l’Assemblée
nationale et dans leur intégralité :
Le 10 janvier des parlementaires sont parvenus à faire adopter par l’Assemblée nationale, en première lecture, un
amendement prévoyant 6 mois de prison et 3750 euros
d’amende pour refus de toute vaccination obligatoire en prenant « l’exemple du BCG » dont l’obligation allait être supprimée quelques mois plus tard alors que sa pratique généralisée l’était déjà.
Voici l’intégralité du premier débat qui a conduit au vote de cet amendement. Il sera suivi d’un second débat après le dépôt d’un contre-amendement déposé par Philippe Bas alors ministre et demandant l’annulation de ce qui venait d’être voté. Le débat était présidé par Jean-Luc Warsmann vice-président de notre Assemblée. Il présente simultanément 2 amendements, l’un relatif aux obligations vaccinales (n° 139) et l’autre aux transfusions sanguines (n°190). Le rapporteur de la commission ayant étudié au préalable ces amendements est Mme Valérie Pecresse député des Yvelines.
"Le président : Je suis saisi de deux amendements identiques, n° 139 et 190. La parole est à M. Georges Fenech, pour défendre l’amendement n° 139 :
Les vaccinations sont obligatoires, mais, suivant la vaccination, les pénalités ne sont pas les mêmes. Nous proposons de frapper des mêmes pénalités tous les refus de vaccination, c’est-à-dire six mois d’emprisonnement et 3 750 euros d’amende.
Le président :
La parole est à M. Claude Leteurtre, pour défendre l’amendement n° 190 :
C’est le même.
Le président :
Quel est l’avis de la commission ?
Défavorable parce que les peines nous paraissent trop lourdes pour un refus de vaccination.
Le président :
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Même position.
Le président :
La parole est à M. Claude Leteurtre :
Pour la transfusion sanguine, il était bien d’en rester où on en était parce que, concrètement, c’est très efficace.
S’agissant des vaccinations, la situation paraît actuellement confortable parce que, globalement, la majorité des gens sont vaccinés, mais il est clair que cela va devenir un enjeu majeur. Il ne faut absolument pas qu’il y ait des foyers de non vaccination car c’est extrêmement dangereux en termes de santé publique. Il serait donc raisonnable de retenir ces amendements.
Le président : Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 139 et 190.
Ces amendements sont adoptés."
On observera la brièveté du débat alors que ministre et commission étaient contre. Un autre fait ressort de ce débat, si on peut appeler cela un débat : c’est le fait que nos parlementaires ne font pas la différence entre transfusion sanguine et vaccination. Il en existe pourtant une absolument fondamentale : une transfusion se fait toujours dans le cadre d’une maladie ou d’un accident et est la plupart du temps une urgence voire une extrême urgence. L’acte vaccinal BCG ou DTP n’est jamais une urgence. Cette différence est parfaitement reconnue par la loi Kouchner du 4 mars 2002.
Par ailleurs, voici la phrase exacte prononcée le 13 février par Jean-Michel Dubernard, alors président de la commission des affaires sociales, telle qu’elle a été rapportée sur le site de l’Assemblée :
« Le président Jean-Michel Dubernard a fait observer, à propos des articles introduits par l’Assemblée pour protéger les mineurs contre les agissements des sectes, que rien ne peut être autant sectaire que le comportement antisectaire ».
En fait, le gouvernement était contre cet amendement qui classait le refus de vaccination obligatoire pour les enfants comme étant une dérive sectaire.
Le premier débat à l’Assemblée début janvier a duré une minute 30 tout au plus. Philippe Bas, représentant le gouvernement, était contre, Valérie Pécresse, rapporteur de la commission qui avait planché sur le sujet, était contre et a rappelé que le président de cette commission Jean-Michel Dubernard était très opposé. Ce dernier a même dit (c’est sur le site de l’assemblée) que rien n’était plus sectaire que la lutte antisectaire.
L’amendement fut d’abord voté. Le ministre demanda une interruption de séance et déposa un contre-amendement demandant l’annulation de celui qui venait d’être voté. Le contre-amendement fut repoussé. Peu de temps après, le Sénat l’adopta malgré l’opposition des sénateurs de gauche : il fut dit par le président de séance que le rejeter serait un mauvais message envoyé aux sectes.
De plus, cet amendement faisait partie d’une vaste loi sur la protection de l’enfance qu’il fallait boucler pour le 22 février, fin de la session parlementaire. Toute modification de dernière minute obligerait à reprendre la totalité du texte à la session parlementaire suivante...
Ainsi, presque tous étaient contre : gouvernement, commission, partis de gauche et pourtant le texte est passé...
Il pourrait aussi, a contrario, accélérer les réflexions sur la levée des obligations vaccinales afin de le vider de sa substance : quand il fut voté, le BCG était encore obligatoire alors que plus de la moitié des médecins et des parents concernés refusaient le vaccin. Tous dans des sectes ? Ce texte ne s’applique donc plus au BCG : depuis le 19 juillet le refus de BCG n’est plus une dérive sectaire !!!