Réponse : l’envahissement de la communication à la place de la politique et de l’information… Euro RSCG, avec Fouks et Hommel, bien sûr, et puis tous ceux, imbéciles, crédules ou intéressés, qui avaient envie de, ou intérêt à, y croire.
Un certain 15 mai, le nez dans la merde, ils ont bien été obligé de constater que ça sentait mauvais pour eux. D’ultimes tentatives « fors l’honneur » dans les médias pendant qques semaines, mais d’honneur, il n’y en avait point…
Bonjour, Une réflexion en passant vite - manque de tps, à creuser plus tard :
Amusant de constater qu’il y a en présence 3 approches paradigmatiques : sacrifi-centrée (LLS et RG), ludo-centrée (Lord) et donno-centrée, ou mieux : mausso-centrée (moi…). Or, par ordre d’apparition à l’image, je mettrai 1) le Jeu ; 2) le don ; 3) le sacrifice.
Le jeu n’est pas propre à l’humain, c’est sans doute la faculté la plus profonde (la plus « archaïque »).
Le don (donner-recevoir-rendre), est à l’origine de la culture (alliance « politique », sociabilité, que l’on trouve autant dans la culture humaine que dans les « proto » ou « para » cultures animales, et notamment les plus avancées d’entre elles chez les primates non humains).
Enfin, le sacrifice, serait une modalité liée à des (tardives ?) formes complexes du pouvoir et de la religion.
On pourrait situer le « mimétique » (mimesis…), i.e les fonctions d’imitation, en tout premier, parmi les plus purement « biologiques », étant donné qu’elles surplombent autant le jeu, que le don, que le sacrifice. Ça donne au final : 1) l’imitation, 2) le jeu, 3) le don, 4) le sacrifice…
Salut Lord… mmh… peut-être… Sinon, je n’utilisais pas le vocable « disciplinaire » dans son sens étroit de « disciplines scientifiques ».
Point de rivalité dans mon esprit. J’évoquais surtout les différents… euh… « champs » ? « domaines » ? Ainsi, la littérature ne fonctionne évidemment pas avec les codes des domaines scientifiques, ni l’art ni l’histoire de l’art, ni la philosophie ni la religion… Je trouve que la théorie girardienne est « hors champ » du domaine scientifique, ce qui ne la rend pas moins « respectable » mais on n’échange pas sur le même plan. Elle me rappelle les systèmes philosophiques, une sorte de jeu intellectuel dont le but ultime est la cohérence. Construire une belle mécanique, qui n’est pas attaquable, qui n’a pas de défauts, qui fonctionne parfaitement à l’économie… et qui plaît, séduit, à la manière d’une doctrine transcendentale, où toutes les questions ont leur réponse, où tout est à sa place, où l’homme sait d’où il vient et où il va… etc.
Je pense que LLS a un pied de chaque côté… il a sans doute davantage d’ambition « scientifique » que RG, et il est profondément séduit par les grandes théories de l’esprit qui embrassent le Tout (la théorie des catastrophes, les théories du chaos…) et certaines sont « border-line » (je veux dire « spirituelles » ou « religieuses », pour ne pas dire « sectaires »…).
En tout cas, c’est très agréable de discuter avec lui car il n’est pas de mauvaise foi. Le dialogue est ouvert et les désaccords sont clairement déchiffrés.
« Vos deux premiers paragraphes m’incitent à penser que nous n’avons pas de définition consensuelle de ce qu’il faut entendre par sacrificiel. Peut-être qu’un certain nombre de malentendus viennent de là. » (commentaire ci-dessus du 6 aout 8h45, en réponse à Lord)
Certainement.
L’idée m’avait effleurée très tôt qu’il manquait une définition précise du « sacrifice » dans votre article. Mais il y avait tant à dire et lire, que j’ai laissé de côté ce pb. Il m’apparaît maintenant crucial. Je n’ai évidemment pas le temps (ni l’énergie…) de tout relire pour y puiser mes exemples, vous m’excuserez de faire cela de mémoire.
Ainsi, cette phrase du même commentaire : « je considère que dès qu’on est dans l’attribution de causalité, donc dans l’ontologie, physique ou métaphysique cad, tout bêtement, dans l’explication, peu importe qu’elle soit de nature religieuse ou à prétention scientifique, on est dans une forme héritée du sacrificiel » me saute aux yeux. L’inférence suivante aussi : « Partant, tout ce qui nous amène à faire ceci cause de cela est une forme de pensée sacrificielle. »
J’en arrive à croire que si, par définition, presque « tout » relève du sacrificiel, alors au final tout est sacrificiel… Ainsi, vous expliquez refuser le « stéréotype du sacrifice humain », et je comprends mieux maintenant.
C’est donc bien des prémisses de votre hypothèse que vient l’un des plus puissants désaccords. Une typologie du sacrifice, même en ciblant l’unité davantage que la variabilité, montre tout de même que toute causalité ontologique ne relève pas du domaine sacrificiel. Vous allez (peut-être) dire que je fais un sort à une phrase que j’ai mal comprise ou que vous avez mal conçue, sans doute. Mais cet aspect m’a pourtant accompagnée pendant tous les échanges de ce fil (outre la déconnexion du système théorique avec les faits et les possibilités de validation, à l’instar de la psychanalyse).
Il en est ainsi de l’interprétation de la chasse au colobe, interprétable banalement comme une activité de coopération sociale. Rien d’étonnant chez le chimpanzé dont on connaît les talents politiques complexes (alliances, « propagandes », manoeuvres…). Il s’agit en outre d’une activité de prédation pour l’obtention d’une nourriture carnée, très appréciée chez les primates qui sont surtout fructivores. Que la proie soit partagée (pratique d’ailleurs assez rare) s’observe chez tous les animaux sociaux. Où est le « sacrificiel » ?
Pour la typologie du sacrifice, comment différencier les offrandes (aux dieux), les démonstrations ostentatoires de richesse/ pouvoir (potlach), le « solde » des dettes (don, contre-don) ? Outre les humains, les objets peuvent donc être « sacrifiés », ou les animaux… Et même ainsi, la réalité du sacrifice est variable : mettre des animaux dans une tombe, c’est juste un acte banal d’alimentation transposé dans le monde « d’après », une nourriture pour l’au-delà. Ce « sacrifice » n’en est pas un. Ou alors on « sacrifie » tous les jours la nourriture que l’on mange…
Ou alors, c’est vrai que dans bien des mythologies (cosmogonies), le « monde » animal (qui n’est pas forcément disjoint -ontologiquement- du « monde » humain) est conçu avec des intentions et des émotions « humaines ». Chasser, c’est prélever une proie, c’est être en dette, c’est devoir rendre, c’est s’attirer les bonnes grâces par des paroles ou des rites, c’est se prémunir de la vengeance animale (mauvaises chasses futures, disparition du gibier). On est là encore dans le tryptique maussien (donner, recevoir, rendre) qui est au fondement des structures humaines. Point de sacrifice ni de « mimétique » générateur de conflits.
Ou alors, vraiment, si tout cela est d’ordre « sacrificiel », j’y verrais une explication « attrape-tout ». Je comprends mieux pourquoi la théorie du sacrifice originel me paraît « totalisante ». Et je comprends mieux pourquoi, malgré tous les contre-exemples qui vous sont proposés à foison, vous réagissez à chaque fois en disant qu’ils apportent de l’eau à votre moulin… … ce qui évidemment, ne laisse pas de me surprendre… :)
Je reviens à notre intéressant débat de ces derniers jours. J’ai finalement bcp appris de nos échanges, car ils m’ont permis d’avoir davantage assuré la confiance de ma position, étant partagée, parfois à la remarque près, par Lord. Etant lui et moi de même formation anthropologique, j’en déduis que notre désaccord avec la méthode girardienne est vraiment d’ordre disciplinaire. De mon point de vue en tout cas, j’évoque la démarche de validation des hypothèses par les faits (« par le terrain »). Je vois bien que vous n’êtes pas d’accord et considérez que vos hypothèses sont également testables et réfutables, ce que je conteste.
Difficile de mieux vous expliquer mon avis que je ne l’ai fait longuement (Lord aussi), sinon en me répétant encore. Il faut croire que nos « heuristiques » sont trop radicalement différentes, alors qu’elles apparaissent proches, au premier regard. Mais non, il y a une distance sémantique infranchissable dans le maniement de certains concepts (théorie, invalidation, faits, tests, causalité, origine, imitation, cognition…) qui crée le désaccord (ou le malentendu).
Et puis, il y a aussi le contexte émotionnel différent qui vient aussi brouiller les cartes. Vos longs développements sur le « milieu » scientifique sont pour moi hors sujet, mais importants pour vous. Chez vous, ils font sens et interviennent fortement. J’imagine que le parcours hors « système », le côté penseur « maudit » de Girard participent de son attractivité (ce qui donne sans doute son aspect secte, gourou…). Pour moi, ce trait aurait plutôt tendance à provoquer ma méfiance, mais sans plus. J’aime les chercheurs audacieux qui s’aventurent hors des clous. Mais… toujours à la limite (épistémologique).
Je vais résumer le coeur de mon désaccord. Vous n’aimez pas mon expression de théorie « totalisante ». Ok, elle n’est pas assez claire. Je pourrais utiliser une autre perspective : c’est une théorie « unitaire », qui explique le grand tout par une seule cause. Une seule… c’est pour moi impossible de considérer une théorie anthropologique ainsi.
J’ai souvent dit ici combien j’avais apprécié les travaux d’E. Morin dans l’émergence en France, du « paradigme » des systèmes complexes. Sans rentrer dans le détail, l’idée d’une cause unique dans le « fonctionnement » d’un système complexe n’a pas de sens. Que la résolution des conflits dans une société humaine ait pu engendrer des mécanismes de focalisation bénéfique sur le « bouc émissaire », ok. Qu’elle soit à l’origine de Tout, excluant le système multifactoriel d’une évolution complexe (biologique et culturelle) est si extravagant que je n’en vois pas l’utilité (ni la pertinence scientifique). D’autant que rien, absolument aucune donnée factuelle, ne viennent étayer l’hypothèse d’une origine de la religion par le sacrifice pour les premiers hommes. Il y a un truc qui cloche.
J’entends bien le rôle que vous faites jouer à la petite scène de la chasse au colobe. Mais la place que vous lui donnez dans la justification de votre hypothèse est hors de toute proportion. J’ai lu une quantité considérable de publications en primatologie, et la masse des observations forme une base de connaissances d’un très grand intérêt dans la perspective de nourrir un éclairage sur l’hominisation. La quasi-totalité des données est d’ordre (proto-)culturel, technique, économique, politique, social, familial… mais quasiment rien sur le symbolique ou le spirituel. Qqes supputations sur la conscience de la mort (l’exemple de la mère qui a gardé longtemps son bébé mort, par ex), mais rien sur une « transcendance » ! la chasse au colobe a été reconnue comme une activité rare, nécessitant une coopération pour sa réussite, et des anthropologues y ont vu une explication d’un mécanisme d’hominisation, vers une plus grande sociabilité.
Je vous suis quand vous envisagez que l’hominisation, dans le fond, peut se comprendre encadrée par ses deux extrêmes, pré-humains / humains. Ce cadre méthodo sert par exemple à modéliser l’évolution des techniques, ou l’évolution des formes sociales du pouvoir, ou de la famille. Mais ni le sacrifice ni le religieux n’existent dans le monde animal non humain. Il faut des capacités cérébrales, cognitives (eh oui… ) qui autorisent les facultés d’abstraction, d’anticipation, et sans doute les facultés langagières.
Voilà. J’aurais encore bcp à vous dire à la suite de votre réponse… mais le temps me manque.
En tout cas, ces échanges m’ont permis de me replonger dans les réflexions sur la théorie girardienne. Elle me dérangeait et je sais mieux pourquoi.
C’était un plaisir enrichissant de discuter avec vous…