« La livre sterling est restée stable face à l’euro jusqu’en 2008 et
la crise.
Elle valait environ 1.50 euros, ou 10 francs.
Ce n’est qu’en 2008 qu’elle est passée à 1.20 euros ou 8 francs, et depuis
elle est stable (après une grosse chute ponctuelle en 2009, à 1 euro)..
Je ne sais pas ce qu’il faut en conclure »
L’économiste italien Claudio Borghi Aquilini, partisan de la sortie de son
pays de l’euro, sait lui ce qu’il faut en penser, faisant une comparaison entre
l’Italie et le Royaume-Uni à partir de la crise de 2008. Écoutez-le 8 minutes
et demi environ après le début de cette vidéo :
Selon lui la situation délicate de l’économie du Royaume-Uni principalement
axée sur la finance en 2008, justifiait que ce pays soit encore plus gravement
frappé par la crise que l’Italie, alors que ça été l’inverse (en 2008, les taux
de chômage italien et britannique étaient similaires, actuellement il y a un taux
de chômage de 7,5% au Royaume-Uni alors qu’il est de 12,5% pour l’Italie et de 26,7%
pour l’Espagne. Le chômage des jeunes est à 20,8% au Royaume-Uni alors qu’il est de 41,2% pour l’Italie et de 57,4 % pour l’Espagne.
Claudio Borghi Aquilini signale que la dévaluation de la monnaie qu’a utilisé le Royaume-Uni
a été l’un des moyens qui a fait la différence. En fait les britanniques ont utilisé
un cocktail de dévaluation de la monnaie, de quantitative easing et de cures d’austérité.
Les pays en crise de la zone euro n’avaient que la cure d’austérité à leur
disposition, ce qui s’est avéré beaucoup moins efficace.
Si la situation de la France est assez grave
en 2017, pour que les français portent au pouvoir un mouvement politique
favorable à la sortie de la France de l’euro, il faut que
ce mouvement politique anticipe le fait qu’il y a deux problèmes majeurs à
affronter dans cette perspective.
Le premier est lié à la fuite des capitaux en
France en anticipation d’une sortie de l’euro et d’une dévaluation de la
monnaie. On peut y remédier par un contrôle des capitaux comme cela été fait à
Chypre après l’épisode de la taxation des comptes bancaires, mais il faut bien
avoir à l’esprit que ce contrôle des capitaux a des effets très négatifs pour
l’économie.
Le deuxième problème est encore plus
important. Il est lié aux relations prêteurs-emprunteurs. En zone euro, les
États empruntent bien évidemment en euros ! Les prêteurs sont les
établissements financiers et non la banque centrale à laquelle il est interdit
de financer les États. Les entreprises et les particuliers se financent aussi
par des emprunts en euros. Si un État ne
peut pas se financer sur les marchés financiers, il peut se trouver à cours de
liquidité du fait de l’interdiction qui est faite à la banque centrale européenne
de lui prêter de l’argent. Ce problème n’existe pas pour les pays hors zone
euro car eux ont conservé leur souveraineté monétaire et leur banque centrale
est là en cas d’impossibilité d’emprunter sur les marchés financiers. Si les investisseurs
anticipent que la France va sortir de l’euro, ils ont vont aussi anticiper qu’elle
va rembourser sa dette sur la base d’un Franc pour un Euro, sans que la
dévaluation inévitable du franc soit prise en compte dans le remboursement de
la dette et s’ils anticipent la même chose pour l’Espagne, l’Italie, la Grèce,
le Portugal, etc. inutile de vous faire un dessin.
Voici un scénario catastrophe à destination
de Marine Lepen écrit par Christophe Servan Gestionnaire de fonds
d’investissement et intitulé : « La sortie de l’euro ou le talon
d’Achille du FN » qui est basé sur le deuxième problème signalé ci-dessus :
Je cite sa conclusion : « La présidente du FN a parfaitement
raison de vouloir redonner à la France son indépendance monétaire. C’est une
mesure économiquement rationnelle et parfaitement cohérente avec un programme
politique fondé sur la restauration de la souveraineté nationale. Mais elle a
commis une erreur capitale. Elle a oublié cette loi d’airain qui remonte aux
temps du roi Philippe le Bel qui veut que, lorsque l’on s’apprête à affronter
les puissances de l’argent, il ne faut jamais dire à l’avance ce que l’on veut
faire et même ne pas hésiter à dire le contraire. Il lui reste trois années
pour faire profil bas sur cette question. C’est la survie de sa formation
politique qui en dépend ».
Je ne suis pas forcément d’accord avec la
partie de ce scénario qui voit Marine Lepen battue au second tour de l’élection
présidentielle en raison de l’énorme crise financière provoquée par sa
proposition de sortir la France de l’euro que les marchés financiers craindraient
de voir appliquer dans la perspective de sa victoire à l’élection
présidentielle. Toutefois, la crise
telle qu’elle est décrite dans cet article se produirait inévitablement dans le
cas de figure précité. Il faudrait que Marine Lepen ou tout autre candidat
préconisant la sortie de l’euro et se trouvant en position d’être présent au
second tour de l’élection présidentielle en France prévienne à l’avance que la
crise mentionnée dans cet article est inévitable, mais qu’il y aura moyen d’en
sortir rapidement, autrement il y aura un problème au moment où la crise
arrivera effectivement. Pour cela il faudra dire que pour faire face à cette
crise, on sortira la France de l’euro très rapidement, en fait dans les jours
qui suivraient l’élection présidentielle. Cette sortie ultra-rapide et non
concertée est contraire aux traités européens signés par la France, il faut le
savoir et il faut oublier le référendum, l’article 50 et toute procédure de
négociation qui prendrait du temps et qui ne serait pas adapté à la situation d’urgence
à traiter. Après la sortie ultra-rapide de la France de l’euro, il faudrait
que la banque de France soit chargée de monétiser la dette publique, il n’ y aura
pas le choix de faire autrement car l’État français ne pourrait plus se financer
sur les marchés financiers, sauf à des intérêts exorbitants qui lui seraient
demandés. Comment passer d’une monnaie à une autre en seulement quelques jours ?
Le paragraphe qui suit est extrait d’une étude d’expert sur la sortie de la Grèce
de l’euro : « un
coup de tampon sur les billets et on change les euros en drachme en instaurant
une conversion ensuite contre de vrais billets imprimés par la banque centrale.
Les entrées et sorties de capitaux devrait donc alors être contrôlées, pour
éviter que le drachme s’écroule totalement. » Pour la France, il n’y aurait pas
d’autre choix que de faire la même chose :
Il faudra
que la période intermédiaire précédent la restauration complète de la
souveraineté monétaire soit la plus courte possible, autrement il y aurait trop
de dégâts et de problèmes créés dans cette période intermédiaire. On peut penser
que ce scénario de sortie de l’euro est décidément trop délicat au regard des
problèmes à affronter et qu’il vaudrait mieux conserver l’euro, mais ça ne sera
pas possible, sur le long terme, à cause du caractère bancal de la construction
de la zone euro et pour la France à cause de ses problèmes particuliers :
Elle dit « La France a besoin de dirigeants qui ont compris la nécessité de rompre avec un modèle économique qui ne créé plus de richesses, détruit l’industrie, l’emploi et assèche nos finances publiques. Il faut impérativement retrouver notre souveraineté monétaire, débat alimenté par Patrick Artus dans une tribune récemment publiée, sans quoi nous serons condamnés au saccage de notre système social et à l’austérité meurtrière, telle qu’elle a été mise en œuvre en Grèce ou au Portugal. »
Marine Lepen évoque l’économiste de Natixis, Patrick Artus, qui a publié une tribune le 4 novembre 2013 intitulée : « Il y a trente ans, la France aurait dévalué sans hésiter », tribune à lire par ceux qui n’ont pas encore compris pourquoi la France aurait besoin de retrouver la souveraineté monétaire abandonnée en entrant dans l’euro :
Perso je ne reproche à Marine Lepen et à la direction actuelle du front national d’être des dictateurs en puissance dont le but est de supprimer la démocratie, mais plutôt leur incompétence face à des problèmes économiques et sociaux complexes, en particulier si la sortie de l’euro est nécessaire pour la France, le système institutionnel et financier de la zone euro est organisé pour qu’elle soit rendue vraiment très difficile, c’est une chose qu’ils n’ont pas encore bien appréhendé. Lire par exemple l’article ci-dessous : « Un consultant londonien primé pour son petit guide pratique de sortie de l’euro » qui a dit à propos de la sortie d’un pays de la zone euro « Cela revient à essayer de défaire une omelette pour retrouver l’œuf qui a été cassé » et que « la sortie doit être secrètement préparée » (le référendum sur la sortie de l’euro est irréalisable sauf si le vote des français est escompté favorable au maintien de la France dans l’euro, la négociation avec les autres pays membres de la zone euro sur cette question n’est pas non plus envisageable à cause des énormes problèmes économiques qui surviendraient si les marchés financiers se mettaient à croire que l’euro n’en a plus que pour an d’existence par exemple, je passe les détails).
C’est étrange car le
ratio dettes publiques sur PIB du Portugal continue de croître à un
rythme de hausse de plus de 10% par an selon les données les plus
récentes d’Eurostat :
118,1 % du PIB à la
fin du second trimestre 2012, 131,3 % du PIB à la fin du second
trimestre 2013, soit une hausse en pourcentage sur un an de 10,98%,
malgré l’application à la lettre par le Portugal des directives de
la troïka. En France, qui n’en est pas encore à appliquer à la
lettre les directives de la troïka, mais ça va venir, le
pourcentage de hausse durant la même période est de moins de 3%.
A la fin du premier
trimestre 2013, le ratio dette le ratio dettes publiques sur PIB du
Portugal est de127,5%, passant donc à 131,3% au second trimestre, la
hausse en pourcentage sur un seul trimestre est de 2,98%, on est est
encore sur un rythme annuel de plus de 10% de hausse.
En réalité le Portugal
est en faillite, le but des agences de notation est simplement
d’inciter les pays en difficultés de la zone euro à poursuivre
l’austérité au service du système financier mondial, même si la
démonstration par les chiffres indique que ces pays continuent de
s’enfoncer dans des niveaux d’endettement de plus en plus élevés.
C’est encore plus vrai pour la Grèce qui voit son ratio ratio
dettes publiques sur PIB croître à un rythme impressionnant. Voyez
les chiffres dans le lien indiqué ci-dessus.
Le
président de la Bundesbank (communément surnommée la Buba), Jens
Weidmann, a plaidé vendredi 24 mai 2013
pour
qu’un pays de la zone euro puisse à l’avenir faire défaut, une
option que les Européens ont à tout prix cherché à empêcher
pendant la crise.
"Avec la crise,
nous avons fait très attention à éviter les risques de défaut",
par crainte d’un effet de contagion, a expliqué Jens Weidmann,
réputé pour sa défense stricte de l’orthodoxie monétaire et
budgétaire, lors d’une conférence organisée par la Banque de
France et la banque centrale d’Allemagne. Il a, en revanche, laissé
ouverte une telle possibilité à l’avenir. "A long terme, nous
devons faire en sorte qu’un Etat puisse, en dernier ressort, faire
faillite", a relevé le patron de la Buba, ajoutant que cette
possibilité était « un élément clé » pour permettre de
discipliner les marchés. "C’est pour cela que nous
travaillons au fait de découpler les Etats et les systèmes
bancaires", a-t-il par exemple fait valoir.
Le
fait est que la Grèce et plusieurs autres pays de la zone euro sont
aujourd’hui budgétairement insolvables et sont appelés à le rester
compte du niveau trop élevé de leur endettement et de leur déficit de
croissance. Et pourtant on continue à leur prêter de l’argent. Comme d’habitude les marchés financiers qui cherchent
le profit à court ou moyen terme ne voient pas que le système va
dans le mur et
comme d’habitude ils ne remarqueront le désastre qu’au dernier
moment, lorsque les défauts sur dettes d’un, voir de plusieurs pays de la zone euro, interviendront inéluctablement.