Il est bien évident que les
personnalités rattachées à l’événement ont occulté les questions de fond. Monsieur
Sarkozy lui-même balaie la méthode pour se rattacher exclusivement aux
résultats : la libération des soignants. Il cite, comme l’indiquait Le
Monde, en appuie à ses choix le témoignage d’une des infirmières bulgares
qu’il avait eue le matin au téléphone après sa libération. « Elle m’a dit : je suis la femme la
plus heureuse du monde. Elle ne m’a pas dit : quel est le statut de votre
épouse, comment ça se passe avec Bernard Kouchner, est-ce que vous avez tenu
informé François Fillon ? »
Le Courrier
international fait état des réactions de la presse à Sofia : « Tous
les journaux consacrent leur une à l’événement, s’interrogent sur les coulisses
de la libération et félicitent la France pour son rôle supposé ». Et
la critique peut aller jusque dans la démesure. Le spécialiste du monde
arabe, Vladimir Tchoukov, félicite les Français
d’avoir fait un bon choix à la présidentielle : « Nous devons remercier les électeurs français
qui ont voté pour ce président et non pour Ségolène Royal, qui disait ne pas
connaître le problème des infirmières bulgares. Si les Français l’avaient élue,
nos compatriotes seraient toujours en prison... » Pour le quotidien
libéral Dnevnik,
il existe un lien étroit entre la liberté des infirmières et les bases
américaines, les missions en Irak, en Afghanistan et au Kosovo.
Pour Aujourd’hui le
Maroc : « même si le
succès de la libération de ces infirmières et du médecin palestinien et le
dénouement heureux de cette crise est à mettre au crédit du couple Sarkozy, il
n’est pas certain que le recours à une diplomatie personnelle parallèle qui
court-circuite allégrement les circuits traditionnels puissent ne faire que des
heureux. Nicolas Sarkozy qui se rend en Lybie pour cueillir les fruits de ses
investissements, pourra toujours dire que tout est permis dans ce domaine au
nom de l’efficacité et du résultat ».
Pour l’édition arabe Al-Quds Al-Arabi, citée par le Courrier
international : « le gouvernement bulgare, qui n’est ni arabe ni musulman, s’est montré
solidaire du médecin palestinien en lui accordant la nationalité bulgare et en
insistant sur sa libération au même titre que les infirmières. Il a agi ainsi
pour des raisons purement humanitaires alors qu’aucun pays arabe n’a fait
preuve de solidarité à l’égard de cet homme, que l’Autorité palestinienne
l’avait abandonné à son sort et que le président palestinien Mahmoud Abbas
s’était rendu en visite en Libye à plusieurs reprises sans jamais aborder le
sujet ».
Et Al-Quds
Al-Arabi en vient à conclure que : « il faut reconnaître que l’appareil
judiciaire arabe est une bonne blague et que personne ne le respecte. Cela nous
vaut des ingérences étrangères permanentes pour abroger les jugements de nos
tribunaux ».
Il faudra bien quelques jours
pour décanter l’actualité de cet événement qui a marqué les esprits. Et
surtout, qu’une analyse en profondeur s’imposera lorsqu’il s’agira d’un autre
événement où la sécurité des personnes est en cause.
@ Romain Baudry
Vous posez une question de fond, une question importante à laquelle un
jour les décideurs politiques devront répondre : « Il a fallu verser une
rançon, soit. Tout le monde s’y attendait. Mais qu’elle inclue la normalisation des relations entre Kadhafi et
l’Europe, c’est tout de même le monde à l’envers ! ».
Pierre R.