à l’auteur :
"Ils y croient à la justesse de leur choix, les harkis. Surtout quand ce
général de Gaulle, le sauveur de la France devenu président, clame dans
tous ses discours, de 1958 et 1959, que jamais il ne permettra que
l’Algérie cesse d’être française.«
Je ne suis pas historien, et vous me pardonnerez si je dis une bêtise, n’ayant pas le temps de vérifier comme il conviendrait, mais je connais assez bien les discours de De Gaulle ; à l’époque, je les entendais, j’étais un gamin. J’ai eu l’occasion d’en réentendre plusieurs et à aucun moment De Gaulle ne s’engage sur la question de l’Algérie française, sauf une fois, peut-être par maladresse. Le reste du temps, il utilise toute sorte de circonlocutions habiles du genre »je vous ai compris« . Et la foule croit bien évidemment qu’ils approuve ses désirs les plus secrets et les plus inavouables. SI vous lisez les »Mémoires de guerre« , vous verrez qu’il était convaincu, dès la fin de la guerre, qu’il n’y avait pas d’autre solution que la décolonisation. Il est possible que vous confondiez avec le ministre de la justice de Guy Mollet, fanatiquement partisan, lui, de l’Algérie française, au point de refuser de voir que les Algériens avaient entrepris une guerre de libération et qu’il ne s’agissait pas de simples »événements« , comme le voulait la vérité officielle de l’époque. C’est ce qui fait que Mitterrand a envoyé à la guillotine, comme s’il s’agissait de méprisables criminels de droit commun, des terroristes algériens, au lieu de les faire fusiller. En 58, De Gaulle parlera de la nécessité d’une »paix des braves", ce qui est moins indigne. Il reste qu’on a laissé tomber les harkis, considérant probablement qu’ils étaient des traîtres à leur nation devenue indépendante : on utilise les traîtres mais on ne les récompense jamais. Ce principe moral s’accorde quand même si bien avec la nécessité de faire des économies qu’on peut tout de même en la circonstance déplorer une telle inhumanité : ces braves gens nous avaient fait confiance, ils aimaient la France et des valeurs qui n’avaient rien à voir avec celles du fascisme, on ne peut pas les mépriser comme on mépriserait les collabos de Vichy. Ils méritaient assurément mieux que cet abandon et deux ou trois minables monuments commémoratifs dans des jardins publics parisiens en bordure du périphérique.