Chère râleuse,
En 1958, lorsque de Gaulle est venu prêcher l’Algérie Française à Colomb-Béchar où je suis né, (devenu Béchar depuis), j’avais 18 ans. Parmi les milliers de mains qu’il a serré sur la Place des Chameaux, il y’avait la mienne. Soucieux d’immortaliser ce geste historique, j’ai refait le tour parmi la foule pour la lui serrer de nouveau, et là, il m’a tendu la main en me disant « Mais ? Je vous ai déjà vu, vous ! ». Trop tard, la photo était déjà dans le Kodak de ma copine.
Ma famille était de ces petits juifs, petits commerçants qui votaient petit socialiste sans trop savoir pourquoi et moi, étudiant à Alger, j’étais en vacances.
Pour faire court, me voilà démobilisé à Toulouse, où je reprends mes études à la fac de Sciences, sous l’égide de l’IPST (Institut de la Promotion Sociale du Travail) ; tout en travaillant 10 h/jour, je fréquentais la fac de Sciences, alors située aux Allées Jean Jaurès, où je me rendais le soir à 20 heures pour assister aux cours généreusement prodigués par des profs après les heures de travail.
Fauché comme les blés, je devais à ma carte d’étudiant le droit de prendre mes repas dans les restos-U ; derrière la place Esquirol, j’avais loué une chambre d’étudiant et le soir je me préparais ma petite bouffe, souvent partagée avec ma copine.
Quelques harkis de mes amis ont fait le même parcours que le mien. D’aucuns ont fini médecins, avocats, scientifiques comme moi ou officiers dans l’armée. D’autres, moins instruits, ont trouvé du boulot sans aucune difficulté, la France manquant de mains à cette époque.
Et les plus nombreux, à l’instar des « réfugiés palestiniens » qui végètent ici et là, se sont assis et faisant de la voix, ils ont réclamé reconnaissance, indemnités, privilèges et prébendes.
Pour ce qui me concerne, j’ai été démobilisé à Toulouse avec un « trésor » de 500 F en poche, soit 80 € pour les jeunes lecteurs.
Nos harkis l’ont été avec 5000 F, soit environ 800 €.
Au lieu de se fondre dans la population française comme l’ont fait des centaines de milliers de pieds-noirs, de s’adapter aux circonstances, de s’intégrer jusqu’à faire oublier leur origine, tout comme les « réfugiés palestiniens » ils se sont mis à jouer du « victimisme », à hurler contre la trahison dont ils auraient été victimes ; ils se sont mis à gémir sans dignité pour obtenir un statut particulier et des avantages particuliers, assis sur la certitude que la République Française leur était redevable à vie du « sacrifice » qu’ils avaient consenti à combattre aux côtés de l’armée française.
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Votre ami Roger ;